4 LE NOUVELLISTE JEUDI 20 MARS 2014 ar ZOOM Robuste, bio et costaud Vainc l’oïdium la pourriture, le mildiou Fruité, épicé et floral Le divico nouveau arrive... DÉGUSTATION Le dernier-né de l’Agroscope débarque en terres valaisannes. Le divico a des atouts que ses prédécesseurs n’avaient pas. NOUVEAU «Costaud et bio! C’est le pre- AOC mier cépage issu de nos recherches qui est capable de résister non seulement à la pourriture, mais aussi au mildiou et à l’oïdium.» C’est ainsi que Jean-Laurent Spring, chercheur à la Station Agroscope à Changins parle du divico, un nouveau cépage né du croisement du gamaret et du bronner que le scientifique viendra présenter lors de la prochaine conférence-dégustation qui sera organisée au Musée valaisan de la vigne et du vin à Sierre le 26 mars prochain à 19 heures. Le divico y aura-t-il droit Prometteur… «Le divico est intéressant à plus d’un titre et ses caractéristiques devraient lui permettre de bien se comporter sur l’ensemble du vignoble valaisan», explique le scientifique. Bien que ce soit un cépage précoce, comme il ne pourrit pas, on peut le laisser sur souche assez longtemps sans que le niveau œchslé ne bouge beaucoup. «Dans la perspective d’un réchauffement climatique combiné à plus de précipitations, le divico s’avère donc très prometteur.» Comme il ne nécessite pratiquement pas de traitements, il devrait aussi faire le bonheur des propriétaires de parcelles difficiles d’ac- Christian Blaser, cave Le Bosset: «Cette première vinification révèle un vin au grand potentiel. Mais à présent, qu’est-ce qu’on va en faire? Sortir une ligne spéciale pour les vins respectueux de l’environnement...» CHRISITAN HOFMANN cès. Lors de cette conférence, Jean-Laurent Spring commentera également une dégustation du petit dernier de l’Agroscope. Romaine qui a opté pour une vinification «Le Nouvelliste» s’est rendu à la cave traditionnelle. «Je me suis juste autorisé 2 Le Bosset à Leytron, où Romaine micro oxygénations car je n’avais pas le voBlaser-Michellod, Christian Blaser, lume suffisant pour le mettre en barrique.» Corine Goodchild-Michellod et Graham Pour Christian Blaser, l’arrivée du divico Goodchild produisent des «vins de sens» demande une réflexion. «Y a-t-il de la place garantis: 100% du raisin de leurs vignes, dans notre viticulture pour ce type de cépa100% du cépage et 100% du millésime. ges? Faut-il repenser l’encépagement de manière globale?» Car si les stars que sont les JEAN-LAURENT SPRING CHERCHEUR À LA STATION AGROSCOPE DE CHANGINS Un raisin qui donne du vrai vin cornalin, syrah et autre petite arvine trouA la cave Le Bosset, Romaine gère la vivent leur public, les vins de moyenne nification, Corine et Graham la commergamme sont souvent peu, voire pas rentacialisation et l’administratif tandis que sistantes aux principales maladies fongiques un peu de structure, mais révélant plus de bles. «Des cépages demandant moins de traChristian Blaser, également président de de la vigne. Si les premiers cépages résistants complexité aromatique que le gamaret. vaux permettraient de couvrir les frais de Vitival, s’occupe des vignes. «J’ai travaillé étaient surtout des améliorateurs de couleur Quelques notes florales flirtent avec les production. Ce pourrait être une alternative plusieurs années à Changins et je suis tou- et si certains n’étaient pas vraiment intéres- épices et lui apportent un peu d’élé- dans un contexte général. Mais il faut que la jours avec intérêt leurs recherches et j’ai tout sants au goût – ils avaient souvent un côté gance… «Il est tout jeune, on l’a vendangé démarche soit collective. Il faut décider ennaturellement voulu participer au pro- foxé – avec le divico, on boit du vin», sourit fin octobre. Comme c’est une 3e feuille, il faut semble: on y va ou pas?» FRANCE MASSY gramme expérimental du divico. Dès 1996, Christian Blaser. Robe d’un violet intense, lui laisser encore un peu de temps pour s’épala station s’est attelée à créer des variétés ré- nez encore discret, une bouche manquant nouir, il est toujours sur lies», commente Inscription 20.-, [email protected] 027 456 35 25 Le divico devrait bien «se comporter sur l’ensemble du vignoble valaisan.» CÉPAGES INTERSPÉCIFIQUES Hans-Peter Baumann, le précurseur INSOLITE Dans sa Diroso (par exemple, Vitis vinifera de raisins non traités. C’est Kellerei à Tourtemagne, Hans-Peter Baumann pratique une viticulture écologique et traditionnelle avec des technologies œnologiques modernes. Sur 5 hectares, répartis sur 7 communes entre Sierre et Visperterminen, il cultive pas moins de 50 cépages. Et si on trouve de nombreuses spécialités valaisannes, une bonne dizaine sont des curiosités quasi exclusives. Entendez par là, des cépages interspécifiques, résistants aux maladies cryptogamiques, issus de croisements entre différentes espèces x Vitis riparia). Bref, des cépages aux noms étranges: Gf-Ga 4812 (qui donne un vin blanc au bouquet de fruits exotiques), bianca et johanniter (dont le mariage donne un blanc sec et fruité baptisé Bijowin), muscat bleu, cabernet Jura, cabernet carol, cabernet cortis, regent… «Il ne s’agit pas de plants transgéniques, mais uniquement de croisements traditionnels. Avec le climat du Valais, ces cépages robustes n’ont pas besoin de traitements fongiques. Nous offrons donc des vins vinifiés à partir sans doute la viticulture de l’avenir.» Depuis 2009, Hans-Peter Baumann cultive aussi du divico. «Pour le moment, je l’utilise uniquement en assemblage. Mais j’aimerais le vinifier en monocépage car le divico a du potentiel. Sa couleur profonde me plaît, tout comme ses arômes épicés et fruités qui rappellent le gamaret. Le vin d’assemblage dans lequel il figure me plaît d’ailleurs beaucoup.» Si ces nouveaux cépages titillent vos papilles, allez les déguster chez les Baumann. FM Ce nouveau venu en terres valaisannes aura-t-il un jour droit à l’AOC. L’AOC pour les vins et non l’AOP comme on peut lire sur le site Valais Terroir: «Vins du Valais AOP». Valais-Wallis Promotion ne semble pas savoir que les vins font exception à la nouvelle règle et contrairement aux autres produits labellisés, ils conservent l’appellation AOC. Créée le 24 février 1999 à Berne, sous l’appellation AOC-IGP, l’association suisse qui promeut des produits liés à leur origine géographique et à la forte identité a troqué depuis peu le C d’Appellation d’Origine Contrôlée pour le P d’Appellation d’Origine Protégée. Une petite modification qui lui permet simplement de s’aligner sur le marché européen mais qui ne change en rien ses buts et ses actions. Cette clarification faite, revenons à la première question. Le divico aura-t-il droit un jour à l’AOC du Valais? Selon l’ordonnance cantonale du 17 mars 2004 sur la vigne et le vin (art. 34) toujours en vigueur aujourd’hui, «les vins issus de cépages autorisés à titre d’essai n’ont pas droit à la désignation AOC ou à une quelconque désignation traditionnelle valaisanne. Ils ne peuvent pas entrer dans la composition d’un vin AOC. L’étiquette principale doit porter la désignation «Vin de pays.» Et même si à la même époque on parlait déjà d’«ouverture à certains cépages hybrides interspécifiques adaptés pour la filière des vins biologiques», ces derniers ne sont pas prêts à recevoir l’AOC. Pour Pierre-André Roduit, chef du Service de la viticulture, «même si l’AOC n’a rien de figé, elle se veut garante d’une notion d’histoire et de tradition, le consommateur reconnaît derrière une AOC un vrai lien entre origine, histoire et reconnaissance. Encore faut-il définir ce qui est d’origine en Valais.» Par contre, dans le canton de Vaud, le divico figure dans les AOC. FM
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