LEÇON N˚ 55 : Courbes planes définies par des équations paramétriques. Pré-requis : – Fonctions R −→ R : limites, continuité, dérivabilité, . . . ; – Vecteurs : notions élémentaires, norme ; – Coniques : définitions monofocale et par équation réduite, généralisation bifocale des coniques à centre. On se place dans le plan affine euclidien orienté P muni d’un repère orthonormé direct (O,~i,~j). 55.1 Courbes planes définies par des équations paramétriques Définition 1 : Étant données deux fonctions f , g définies et continues sur un intervalle I ⊂ D f ∩ Dg , on appelle courbe paramétrée plane l’ensemble Γ des points M (t ) déterminés pour t ∈ I par −→ OM (t ) = f (t )~ı + g (t )~. Le système x = f (t ) , y = g (t ) t∈I est appelé système d’équations paramétriques de Γ. Interprétation cinématique : Lorsque t désigne le temps, M(t) est la position du point mobile M à l’instant t, et Γ la trajectoire de M. 55.2 Étude locale d’une courbe paramétrée 55.2.1 Vecteur dérivé et tangente Soit t0 ∈ I fixé arbitrairement. Supposons que f et g soient de classe C 2 sur I, de sorte que la formule de Taylor à l’ordre 2 appliquée à f et g en posant −−→ dn M (t0 ) = f (n) (t0 )~i + g(n) (t0 )~j n dt pour n = 1 et 2 donne pour tout t ∈ I \{t0 } : 2 Courbes planes définies par des équations paramétriques −−→ −→ −−−−−−−→ ( t − t 0 ) 2 d2 M dM (t0 ) + (t − t0 )2 ~ε(t) ( E) M ( t0 ) M ( t ) = ( t − t0 ) ( t0 ) + 2 |{z} dt 2 dt −t− → ~0 →t 0 −−→ −−−−−−−→ −→ M ( t0 ) M ( t ) t − t 0 d2 M dM ⇔ ( t0 ) + = (t0 ) + (t − t0 )~ε(t) t − t0 dt 2 dt2 −−→ −−−−−−−→ −→ 2 M (t ) M (t) dM 1 d M 0 −→ 0. − ( t0 ) 6 | t − t0 | ( t0 ) ⇒ + k~ε(t)k − 2 t − t0 t → t0 dt 2 dt −−−−−−→ M ( t0 ) M ( t ) Définition 2 : Soient t0 ∈ I et v(t ) := . On appelle vecteur dérivé à la courbe Γ en t − t0 M (t0 ) le vecteur défini par −−−−−−→ −→ dM M ( t0 ) M ( t ) = (t0 ) = f ′ (t0 )~i + g ′ (t0 )~j. lim ~v(t ) = lim t → t0 t → t0 t − t0 dt On le note ~v(t0 ) par commodité. −→ dM Remarque 1 : Lorsque (t0 ) 6= ~0, la droite sécante M(t0 ) M(t) (définie par M(t0 ) et le vecteur direcdt teur ~v(t)) a pour limite quand t → t0 la droite définie par M(t0 ) et le vecteur directeur ~v(t0 ). Ainsi, cela justifie les définitions suivantes. 55.2.2 Point régulier Définition 3 : Soient Γ une courbe de classe C 1 sur I (i.e. f , g ∈ C 1 ( I )) et t0 ∈ I. Le point M (t0 ) ∈ Γ est dit régulier si −→ dM (t0 ) 6= ~0. dt Interprétation cinématique : −→ Le vecteur dM/dt (t0 ) représente le vecteur vitesse instantanée à l’instant t0 . Un point régulier est donc un point à vitesse non nulle, et la tangente à la trajectoire d’un point mobile en un point régulier est dirigée par le vecteur −−→ vitesse. De même, le vecteur d2 M/dt2 (t0 ) représente le vecteur accélération instantanée à l’instant t0 . 55.3 Étude au voisinage d’un point régulier M(t0 ) Dans la suite, Γ désigne une courbe de classe C k (k > 2). 3 Courbes planes définies par des équations paramétriques 55.3.1 Point birégulier ! −→ −→ d2 M dM ( t0 ) , (t0 ) est un système libre. dt dt 2 Définition 4 : M (t0 ) ∈ Γ est dit birégulier si −−→ d2 M (t0 ). Si ~v(t0 ),~a(t0 ) est un système libre, alors on peut écrire ~ε(t) = Posons ~a(t0 ) = 2 dt α(t)~v(t0 ) + β(t)~a(t0 ), avec lim α(t) = lim β(t) = 0, donc t → t0 t → t0 −−−−−−−→ 1 M (t0 ) M (t) = (t − t0 ) 1 + α(t) ~v(t0 ) + (t − t0 )2 1 + 2β(t) ~a(t0 ). 2 Dans le repère M (t0 ), ~v(t0 ),~a(t0 ) , M (t) a pour coordonnées X (t) = (t − t0 ) 1 + α(t) , du signe de t − t0 pour t proche de t0 (en effet, α(t) → 0 lorsque t → t0 ), et Y (t) = 21 (t − t0 )2 1 + 2β(t) > 0 pour t proche de t0 . D’où l’allure de la courbe Γ au voisinage d’un point birégulier M (t0 ) : ( E) ⇔ ~a(t0 ) = −−→ d2 M dt2 ( t0 ) Γ ~v(t0 ) = −→ dM dt M ( t0 ) ( t0 ) 55.3.2 Point d’inflexion analytique Définition 5 : Un point M (t0 ) ∈ Γ est appelé point d’inflexion analytique si ~v(t0 ) 6= ~0 et ~v(t0 ), ~a(t0 ) est un système lié. − →n dn M Pour tout n ∈ notons v (t0 ) = (t0 ) et, M(t0 ) étant un point d’inflexion analytique, dtn − → on note encore q le plus petit entier tel que ~v(t0 ), vq (t0 ) soit libre. Si q > 2, pour tout k ∈ − → − → {2, . . . , q − 1}, vk (t0 ) et ~v(t0 ) colinéaires et donc ~v(t0 ) 6= ~0 ⇒ ∀ k, ∃ λk ∈ R | vk (t0 ) = λk~v(t0 ). Comme précédemment, on montre que ! q −1 −−−−−−−→ →q ( t − t0 ) q − λ k ( t − t0 ) k + α(t) + v (t0 ) · 1 + q! β(t) . M (t0 ) M (t) = (t − t0 )~v(t0 ) 1 + ∑ | {z } k! q! {z } |k=2 −t− →0 → t0 0 −t− → →t N∗ , 0 D’où l’allure de la courbe selon la parité de q : − →q v ( t0 ) − →q v ( t0 ) Γ M ( t0 ) ~v(t0 ) Γ ~v(t0 ) q impair M ( t0 ) q pair Remarque 2 : Lorsque q est impair, la courbe "traverse" sa tangente, c’est une inflexion géométrique. 4 Courbes planes définies par des équations paramétriques 55.3.3 Point stationnaire Définition 6 : Un point M (t0 ) ∈ Γ est dit stationnaire si ~v(t0 ) = ~0. On associe au point M (t0 ) deux entiers p et q tels que p soit le plus petit entier vérifiant − →p − → − → v (t0 ) 6= ~0 et q le plus petit entier tel que v p (t0 ), vq (t0 ) soit libre dans le plan vectoriel. Comme − → − → d’habitude, on montre que dans le repère M (t0 ), v p (t0 ), vq (t0 ) , on a M (t) = X (t), Y (t) , où ( t − t0 ) q et signe Y (t) = q! ( t − t0 ) p signe X (t) = p! lorsque t est proche de t0 . D’où les quatre cas possibles : p pair q impair M ( t0 ) p impair M ( t0 ) • 3 1 q pair • • M ( t0 ) • M ( t0 ) 2 1. Rebroussement de 1re espèce 2. Rebroussement de 2e espèce 3. Inflexion 4. Méplat h x ( t ) = t2 , y ( t ) = 4 t3 et i pour t ∈ [−3 ; 3] ; x (t) = 2t − t12 + 3, y(t) = 2t + t2 + 1 pour t ∈ [−2, 6 ; −0, 45] ; h i 3 x (t) = t5 , 25 tet pour t ∈ [−0, 72 ; 1, 2] ; x (t) = t3 , y(t) = t6 pour t ∈ [−1, 17 ; 1, 17] . Interprétation cinématique des cas 1 et 2 : « Pour rebrousser chemin, il faut d’abord s’arrêter. » Nécessairement, M(t0 ) est un point stationnaire. Remarque 3 : Les équations des courbes ci-dessus ont été explicitées afin de pouvoir vérifier qu’il s’agit bien à chaque fois d’un point stationnaire : il suffit de calculer x ′ (t) et y′ (t) et vérifier si elles s’annulent bien en zéro. 5 Courbes planes définies par des équations paramétriques 55.4 Étude des branches infinies Soit I = [ a, b[. Définition 7 : On dit que Γ (défini sur I) présente une branche infinie lorsque t → b si lim OM (t ) = +∞, t →b O étant un point arbitrairement fixé dans P. Remarque 4 : Cette définition ne dépend pas du choix du point O. En effet, si O′ désigne un autre point de P, alors l’inégalité triangulaire nous assure que ′ ′ ′ O M(t) − OO 6 OM(t) 6 O M(t) + OO ′ ⇒ ′ lim OM(t) = +∞ ⇔ lim O M(t) = +∞ . t→b t→b −−→ Soient λ, p ∈ R et m ∈ R ∗ . Lorsque OM (t) = f (t)~ı + g(t)~, on a plusieurs cas à distinguer : ⋄ f (t ) → ±∞ et g (t ) → λ : Γ admet y = λ pour asymptote horizontale ; ⋄ g (t ) → ±∞ et f (t ) → λ : Γ admet x = λ pour asymptote verticale ; ⋄ g (t ) → +∞ (resp. 0) : Γ admet une branche parabolique parallèlement à (Oy) (resp. (Ox )) ; f (t ) ⋄ g (t ) → m : Γ admet y = mx pour direction asymptotique ; f (t ) ⋄ g (t ) → m et, de plus, g (t ) − m f (t ) → p : Γ admet y = mx + p pour asymptote oblique ; f (t ) ⋄ Autres cas : On ne peut rien dire. . . 55.5 Exemples 55.5.1 Épicycloïde à trois rebroussements On considère le cercle fixe C f de centre O et de rayon 3, ainsi que le cercle mobile Cm de rayon 1 roulant sur C f sans glisser. On repère un point M sur Cm et on étudie sa trajectoire en fonction du temps t ∈ R. Le reste des notations, notamment d’angles, se trouve sur la figure ci-dessous : 6 Courbes planes définies par des équations paramétriques Notons − → ut = cos(t)~ı + sin(t)~. −−→ −−→ −−→ → →. Or Donc OM(t) = OO′ + O′ M(t) = 4− ut + − u ϕ M(t) ↓ • Cm O′ les deux arcs M (0) I et I M (t) ont la même longueur car Cm roule sans glisser sur C f , donc 3t = α (angles en radians ! !). D’où ϕ α Cf I −−→ ~ı, O′ M(t) −−−−−−−−−→ −−→ −−→ −−→ = (~ı, OO′ ) + (OO′ , O′ O) + O′ O, O′ M(t) = t + π + α = 4t + π. Cm ϕ = t ~ O • ~ı տ M (0) D’où −−→ → → u−− OM(t) = 4− ut + − 4t+π = (4| cos t {z − cos 4t})~ı + (4| sin t {z − sin 4t})~. f (t) g(t) Remarques 5 : −−→ −−→ ⋄ OM(t + 2π ) = OM(t) ⇒ réduction de l’intervalle d’étude à [0, 2π ]. ⋄ f (2π − t) = f (t) et g(2π − t) = − g(t) ⇒ Γ est symétrique par rapport à (Ox ) ⇒ réduction de l’intervalle à [0, π ]. Le calcul de f ′ et g′ donne alors les tableaux de variations suivants : t 3π 5 π 5 0 f ′ (t) + f (t) % 0 − & 0 2π 3 + 0 % π O • • 2π 5 0 − g′ (t) + & g(t) % On arrive ainsi à la représentation graphique : • t On a 0 2π 3 − & 0 4π 5 + π − 0 % & −→ dM 3t − (t) = 8 sin u→ 5t , 2 dt 2 donc −→ 3t dM (t) = ~0 ⇔ sin =0 dt 2 2π 4π ⇔ t = 0, , 3 3 (mod 2π ), ce qui nous donne trois points stationnaires (points bleus sur le graphique) qui sont des rebroussements de première espèce étant donnée l’interprétation physique. 7 Courbes planes définies par des équations paramétriques 55.6 Paramétrisation des coniques, tangente en un point Conique Γ Parabole P Rappel : Si D (O,~ı) est l’axe focal, y2 = 2px une équation de Γ est : Théorème 1 : Γ est définie par les équations paramétriques t2 2p y=t x= t∈R Ellipse E Hyperbole H x 2 y2 =1 + a2 b2 ( a > b) x 2 y2 − 2 =1 a2 b x = a cos t x = ± a/ cos t y = b sin t y = b tan t i π πh t∈ − , 2 2 t ∈ [0, 2π [ démonstration (théorème 1) : P : M( x, y) ∈ P ⇔ y2 = 2px. On pose simplement y = t, t ∈ R. E : Par définition des fonctions cosinus et sinus, on a que pour tout t ∈ R, cos2 t + sin2 t = 1. Ainsi, pour tout (u, v) ∈ R2 vérifiant u2 + v2 = 1, on peut faire correspondre, modulo 2π, un réel t tel que u = cos t et v = sin t. Par suite, pour tout M( x, y) ∈ P, on a x2 y2 x y + = 1 ⇔ ∃ t ∈ [0, 2π [ | = cos t et = sin t. 2 2 a b a b H : La fonction t 7−→ tan t est une bijection de ] − π/2, π/2[−→ R. De plus, la fonction t 7−→ 1/ cos t (paire) est une bijection de 5[0, π/2] −→ [1, +∞[. Pour tout t ∈ ] − π/2, π/2[, on a 1/ cos2 t − tan2 t = 1. D’où le résultat : ∀ M( x, y) ∈ H , i π πh x x2 y2 1 y − = 1 ⇒ ∃ t ∈ − , et = tan t. | =± a2 b2 2 2 a cos t b Pour chacune des trois coniques, la réciproque est évidente : il suffit en effet d’effectuer le calcul. 55.6.1 Quelques tracés. . . Exercice : Tracer dans un même repère orthonormé les courbes paramétrées suivantes : 6 cos t cos t cos t x (t) = −1 +1 x (t) = x (t) = 5 2 2 2 sin t sin t ; (Od ) ( B) y(t) = − sin t ; (Og ) y(t) = +2 y(t) = +2 2 + sin t 2 2 t ∈ [0, 2π ] t ∈ [π, 2π ] t ∈ [0, 2π ] 3t cos3 t cos x ( t ) = x ( t ) = 3 3 1 1 sin3 t ( Nh ) et ( Nb ) 3 y(t) = + sin t y(t) = + 2 2 10 t ∈ [0, π ] t ∈ [0, π ] . Solution : Voici le graphique attendu. . . ; 8 Courbes planes définies par des équations paramétriques 2 1 −1 O 1 −1 Je laisse au lecteur le soin de reconnaître les différentes courbes. . . c 2012 par Martial LENZEN. Aucune reproduction, même partielle, autres que celles prévues à l’article L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle, ne peut être faite sans l’autorisation expresse de l’auteur. ♦
© Copyright 2025 ExpyDoc