REPUBLIQUE DE CÔTE D’IVOIRE -------------------COUR D’APPEL D’ABIDJAN -------------------TRIBUNAL DE COMMERCE D’ABIDJAN -------------------RG N° 39/2014 JUGEMENT CONTRADICTOIRE du 04/04/2014 -----------------Affaire : MONSIEUR CHOUR MOHAMED CHOUR MAITRE OCTAVE MARIE DABLE CONTRE MONSIEUR COULIBALY SIAKA MINAYAHA LA SCPA SORO-BAKO ET ASSOCIES MAITRE CISSE YAO JULES AUDIENCE PUBLIQUE ORDINAIRE DU 04 AVRIL 2014 Le Tribunal de Commerce d’Abidjan, en son audience publique ordinaire du quatre avril deux mil quatorze tenue au siège dudit Tribunal, à laquelle siégeaient : Madame TOURE AMINATA épouse TOURE, Président du Tribunal ; Messieurs OUATTARA Lassina, EMERUWA EDJIKEME, assesseurs ;- DAGO Isidore et Avec l’assistance de Maître DOLEGBE Léonie SELIKA, Greffier ; A rendu le jugement dont la teneur suit entre : -MONSIEUR CHOUR MOHAMED CHOUR, né le 05 janvier 1967 à Tyr (Liban), directeur de société, de nationalité libanaise, demeurant à Abidjan-Marcory Zone 4 C, 10 BP 3536 Abidjan 10, cellulaire : 07 28 60 65 ; Lequel fait élection de domicile au cabinet de maître OCTAVE MARIE DABLE, avocat près la Cour d’Appel d’Abidjan, y demeurant, Abidjan Plateau, 6 rue Gougas, immeuble « kaladji », escalier B, 3ème étage, portes N° 80 et 81, 18 BP 2772 Abidjan 18, téléphone : 20 22 62 84 ; fax : 20 22 62 78, courriel : [email protected]; DECISION : Demandeur comparaissant susnommé ; Contradictoire D’une part, Rejette l’exception d’incompétence soulevée ; Reçoit monsieur CHOUR MOHAMED CHOUR en son action ; L’y dit mal fondé ; Met monsieur CISSE YAO JULES hors de cause ; Constate que monsieur CHOUR MOHAMED CHOUR est déchu de son droit au renouvellement au bail ; Dit que le bail liant les parties a pris fin depuis le 31 décembre 2013 et que le locataire est depuis lors, un occupant sans droit ni titre ; Ordonne l’expulsion subséquente de monsieur CHOUR MOHAMED CHOUR des lieux qu’il occupe, tant de sa personne, de ses biens, que de tout occupant de son chef ; Le déboute de ses demandes ; Le condamne aux dépens de l’instance. Et et concluant par son conseil MONSIEUR COULIBALY SIAKA MINAYAHA, propriétaire immobilier, de nationalité ivoirienne, demeurant à AbidjanCocody Riviera, téléphone : 22 47 65 66, cellulaire : 01 95 97 97/ 04 38 57 47 ; Ayant pour conseil la SCPA SORO-BAKO et associés, avocats à la Cour d’Appel d’Abidjan ; Défendeur comparaissant et concluant par son conseil ; MONSIEUR CISSE YAO JULES, huissier de justice près la la Cour d’Appel d’Abidjan et le Tribnual de Première Instance d’Abidjan-Plateau, y demeurant à Abidjan-cocody II Plateaux, Boulevard Latrille, près de la mosquée Aghien, SIcogi Latrille, 1 Immeuble M, réz de chaussée, porte N° 147, 06 BP 801 Abidjan 06, téléphone : 22 42 22 80, cellulaire : 05 97 76 42 ; Défendeur ne comparaissant pas ; D’autre part ; Enrôlée le 08 janvier 2014 pour l’audience du 10 janvier 2014, l’affaire a été appelée ; Le Tribunal ayant constaté l’échec de la tentative de conciliation, a renvoyé l’affaire au 21 février 2014 pour instruction, puis au 14 mars 2014 et au 21 mars 2014 pour observations des parties ; A cette date, la cause étant en état d’être jugée, elle a été mise en délibéré pour jugement être rendu le 04 avril 2014 ; Advenue cette date, le Tribunal a rendu le jugement dont la teneur suit: LE TRIBUNAL Vu les pièces du dossier ; Vu l’échec de la tentative de conciliation ; Ouï les parties en leurs demandes ; Après en avoir délibéré conformément à la loi ; FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES Par exploit d’huissier en date du 30 décembre 2013, monsieur CHOUR MOHAMED CHOUR a fait servir assignation à monsieur COULIBALY SIAKA MINAYAHA et à monsieur CISSE YAO JULES d’avoir à comparaître devant le Tribunal de Commerce d’Abidjan, pour entendre : -constater que l’exploit de congé du 26 septembre 2012 ne contient pas la nature et la description des travaux projetés ; -déclarer nul et de nul effet l’exploit de congé en date du 26 septembre 2012 pour cause de violation des dispositions de l’article 127-2° de l’acte uniforme OHADA portant droit commercial général ; -dire et juger que le droit au renouvellement de son bail lui est acquis ; -condamner le défendeur en cas de validation de congé, à lui payer la somme de 60.000.000 FCFA à titre d’indemnité d’éviction, conformément à l’article 126 de l’acte uniforme OHADA portant droit commercial général ; Monsieur CHOUR MOHAMED CHOUR expose au soutien de son action qu’il lui a été servi un exploit de congé en date du 26 septembre 2012, d’où il ressort que le bail le liant à monsieur 2 COULIBALY SIAKA MINAYAHA et venant à expiration le 31 décembre 2013 ne sera pas renouvelé ; Il explique qu’en application de l’article 127-2° le bailleur qui envisage de démolir l’immeuble comprenant les lieux loués et de le reconstruire, doit justifier de la nature et de la description des travaux projetés ; Le congé qui lui a été servi, ne fait nullement cas de modifications portant sur l’immeuble ; Le bailleur ne justifie ni de la nature des travaux projetés ni de leur description ; Il en déduit qu’un tel congé est nul ; Il ajoute qu’il a versé la somme de 6.000.000 FCFA à titre de caution et a, conformément à l’avenant apporté au contrat, effectué des travaux autorisés par le bailleur, à hauteur de 7.388.810 FCFA ; Il a également confectionné à ses frais, un dossier technique pour un montant arrêté d’accord partie à 1.000.000 FCFA ; Ayant réalisé ces travaux avec l’accord du bailleur, il a été surpris de recevoir de celui-ci un courrier lui demandant de remettre les lieux en l’état ; Le 26 septembre 2012 le bailleur lui signifiait le non renouvellement de son bail, ce qu’il lui réitérait par exploit d’huissier du 30 septembre 2013 ; En réalité le motif du non renouvellement du bail n’est pas l’expiration du contrat de bail, mais plutôt le fait qu’il a procédé à des travaux dans le local loué ; En effet, par exploit en date du 17 juillet 2012, le bailleur lui a reproché d’avoir procédé à des travaux d’aménagement ; Un tel congé sans motif valable doit être annulé ; En outre affirme le demandeur en application des articles 123 et 126 de l’acte uniforme sus visé, il a acquis droit au renouvellement de son bail, puisqu’il a exploité les lieux pendant plus de deux ans ; Il exerce une activité de quincaillerie en plein essor et qui connait une embellie financière, surtout qu’elle est située à un carrefour de grand passage ; Il sollicite donc la condamnation du bailleur à lui payer la somme de 60.000.000 FCFA à titre d’indemnité d’éviction ; S’agissant de l’exception d’incompétence soulevée par le défendeur, monsieur CHOUR MOHAMED CHOUR fait noter que pour fixer l’indemnité d’éviction le juge doit mener des investigations, ce que n’est pas habilité à faire un juge des référés ; Il fait observer que le défendeur n’a justifié le congé qu’un an après le lui avoir servi ; S’agissant de la déchéance du droit au renouvellement au bail sur lequel le Tribunal a appelé les observations des parties, le demandeur fait remarquer que c’est une faculté que l’article 124 de l’acte uniforme offre au preneur de demander le renouvellement de son bail or, pour avoir exploité son activité dans les lieux loués pendant six ans, le droit au renouvellement au bail lui est acquis ; 3 En réplique monsieur COULIBALY SIAKA MINAYAHA soulève l’incompétence du Tribunal à connaitre de la présente action, au motif qu’en application de l’article 132 de l’acte uniforme portant droit commercial général, seule la juridiction des référés peut connaitre de la contestation d’un congé ; Subsidiairement, il argue que suivant convention en date du 23 novembre 2007, il a donné à bail son local à monsieur CHOUR pour une durée de trois ans, à compter du 1er janvier 2008, moyennant un loyer trimestrielle de 4.500.000 FCFA ; A la demande du locataire, des modifications ont été apportées aux locaux afin de permettre à celui-ci d’exploiter au mieux l’espace ; Dès le départ, il a été signifié au locataire que qu’outre le rez de chaussée qui allait abriter plusieurs magasins, des constructions en hauteur allaient être effectuées ; Le 1er janvier 2011, le bail était renouvelé pour une période de trois ans venant à terme le 31 décembre 2013 ; Dans un exploit d’huissier il signifiait au locataire sa volonté de ne pas renouveler le bail, et ce, en raison de travaux de modifications pour des raisons familiales ; Entretemps le locataire qui n’a fait aucune observation sur ce document a violé les clauses du bail en apposant une enseigne qui a fragilisé la dalle et en ne payant pas ses loyers à bonne date ; Il lui rappelait donc le non renouvellement du bail ; Le motif du non renouvellement du bail et la preuve des travaux à effectuer ont bel et bien été communiqués au locataire ; Il en déduit que les conditions des articles 125 et 127 de l’acte uniforme sus indiqués ont été respectées ; L’indemnité d’éviction pour cette raison n’est pas due ; Faisant des observations sur le moyen de déchéance soulevé par le Tribunal, le défendeur fait remarquer que les dispositions sur la déchéance sont d’ordre public en application de l’article 134 de l’acte uniforme ; Le contrat de bail liant les parties est un contrat à durée déterminée qui est arrivé à expiration le 31 décembre 2013, sans que le locataire qui avait jusqu’au 30 septembre 2013 ne demande le renouvellement de son bail ; Il est donc déchu du droit au renouvellement de son bail et cela a pour conséquence le mal fondé de sa demande en paiement d’indemnité d’éviction qui n’est due qu’au preneur qui a demandé le renouvellement de son bail dans les formes et délais prévus par la loi ; Le demandeur s’étant maintenu sans titre ni droit dans les lieux loués, il doit être expulsé ; SUR CE En la forme Sur le caractère de la décision 4 Les défendeurs ayant comparu et conclu, il sied de statuer par décision contradictoire ; Sur l’exception d’incompétence de la juridiction de céans Monsieur COULIBALY SIAKA MINAYAHA soulève l’incompétence du Tribunal à connaitre de la présente action, au motif qu’en application de l’article 132 de l’acte uniforme portant droit commercial général, seule la juridiction des référés peut connaitre de la contestation d’un congé ; S’il est vrai que l’article 132 sus visé attribue compétence à la juridiction compétente statuant à bref délai pour connaitre des contestations relevant du livre I de l’acte uniforme, il n’en demeure pas moins d’une part, que la juridiction du fond peut statuer dans un délai bref, celui-ci s’entendant de la célérité dans le règlement du litige, et que d’autre part, la question de la contestation du congé est une question de fond, puisque pour se prononcer sur le congé qui a été servi, le juge devra examiner au fond les motifs dudit congé, ce qui relève bien de la compétence du Tribunal statuant au fond ; Il sied dès lors de rejeter l’exception d’incompétence soulevée ; Sur la recevabilité de l’action L’action des demandeurs ayant été introduite dans les forme et délai prescrits par la loi, il convient de la recevoir ; AU FOND Sur la mise en cause de monsieur CISSE YAO JULES Bien qu’ayant assigné monsieur CISSE YAO JULES, à aucun moment le demandeur n’a caractérisé un quelconque grief à son encontre ; Au demeurant celui-ci n’a été que l’huissier instrumentaire des actes servis au demandeur ; Il y a lieu de le mettre hors de cause ; Sur le constat de la déchéance et l’expulsion du demandeur Aux termes de l’article 104 de l’acte uniforme OHADA portant droit commercial général « Les parties fixent librement la durée du bail. Le bail à usage professionnel peut être conclu pour une durée déterminée ou indéterminée. A défaut d’écrit ou de terme fixé, le bail est réputé conclu pour une durée indéterminée. Le bail prend effet à compter de la signature du contrat, sauf convention contraire des parties. » ; 5 En l’espèce il ressort des pièces produites que le contrat de bail conclu par les parties, l’a été pour une durée déterminée de trois ans, prenant effet le 1er janvier 2008, qui a été renouvelée le 1er janvier 2011 et qui venait à expiration le 31 décembre 2013 ; La durée de ce contrat était donc déterminée puisque le terme est connu ; S’agissant du renouvellement d’un tel contrat, l’article 124 de l’acte uniforme sus indiqué dont les dispositions sont d’ordre public, en application de l’article 134 du même acte uniforme, dispose : « Dans le cas du bail à durée déterminée, le preneur qui a droit au renouvellement de son bail en vertu de l’article 123 ci-dessus peut demander le renouvellement de celui-ci, par signification d’huissier de justice ou notification par tout moyen permettant d’établir la réception effective par le destinataire, au plus tard trois mois avant la date d’expiration du bail. Le preneur qui n’a pas formé sa demande de renouvellement dans ce délai est déchu du droit au renouvellement du bail. Le bailleur qui n’a pas fait connaître sa réponse à la demande de renouvellement au plus tard un mois avant l’expiration du bail est réputé avoir accepté le principe du renouvellement de ce bail. » ; Ce texte met à la charge du preneur l’obligation sous peine de déchéance, de solliciter le renouvellement de son bail par acte d’huissier ou par tout moyen permettant d’établir la réception effective par le bailleur, et cette demande doit être faite au plus tard trois mois avant la date d’expiration du bail ; Il s’agit d’une disposition d’ordre public, à laquelle il ne peut être dérogé ; En la présente cause, le bail ayant été renouvelé pour une période de trois ans et venant à expiration le 31 décembre 2013, il revenait au preneur de solliciter le renouvellement de son contrat de bail ; Le bailleur qui n’entendait pas poursuivre le contrat de bail, a signifié au preneur sa volonté de ne pas le renouveler par exploits de notification de non renouvellement de bail en date du 26 septembre 2012 et du 30 septembre 2013 par lesquels le bailleur informait le preneur de sa volonté de ne pas renouveler le bail à son expiration le 31 décembre 2013 ; Il s’est donc bel et bien agi d’une notification de non renouvellement de bail ; Monsieur CHOUR MOHAMED CHOUR à qui il incombait de solliciter le renouvellement de son bail, par signification d’huissier de justice ou notification par tout moyen permettant d’établir la réception effective par le destinataire, au plus tard trois mois avant la date d’expiration dudit bail, ne l’ayant pas fait, alors que le 6 bailleur n’entendait plus poursuivre le bail, il est déchu de ce droit, en application de l’article 124 précité ; Il y a donc lieu de constater cette déchéance ; Il en résulte que depuis le 31 décembre 2013, le défendeur est occupant sans droit ni titre ; Il sied dès lors d’en tirer les conséquences en ordonnant son expulsion des lieux loués qu’il occupe tant de sa personne, de ses biens que de tout occupant de son chef ; Sur la demande en paiement de l’indemnité d’éviction Monsieur CHOUR MOHAMED CHOUR réclame, à défaut de renouvellement de son bail, la condamnation de son bailleur au paiement de la somme de 60.000.000 FCFA à titre d’indemnité d’éviction ; Aux termes des dispositions combinées des articles 126 et 127 de l’acte uniforme portant sur le droit commercial général, qui posent le principe du paiement d’une indemnité d’éviction, celle-ci n’est due qu’au preneur bénéficiant du droit au renouvellement de son bail, qu’il soit à durée déterminée ou indéterminée ; S’il n’est point contesté, que pour avoir exercé son activité commerciale depuis plus de deux ans dans les locaux loués, monsieur CHOUR MOHAMED CHOUR bénéficiait du droit au renouvellement de son bail, en vertu de l’article 123 de l’acte uniforme susvisé, il n’en demeure pas moins qu’il ressort des développements qui précèdent que ce dernier, preneur d’un bail à durée déterminée arrivant à terme, n’ayant pas formé sa demande de renouvellement dudit bail, a été déchu de son droit au renouvellement, ce qui a été constaté ; Dès lors, ayant été déchu de son droit au renouvellement du bail, il est mal fondé à réclamer le paiement d’une indemnité d’éviction ; Il y a donc lieu de le débouter de cette demande ; Sur les dépens Les défendeurs succombant, il sied de mettre les dépens de l’instance à leur charge ; PAR CES MOTIFS 7 Statuant publiquement, contradictoirement, et en premier ressort ; Rejette l’exception d’incompétence soulevée ; Reçoit monsieur CHOUR MOHAMED CHOUR en son action ; L’y dit mal fondé ; Met monsieur CISSE YAO JULES hors de cause ; Constate que monsieur CHOUR MOHAMED CHOUR est déchu de son droit au renouvellement au bail ; Dit que le bail liant les parties a pris fin depuis le 31 décembre 2013 et que le locataire est depuis lors, un occupant sans droit ni titre ; Ordonne l’expulsion subséquente de monsieur CHOUR MOHAMED CHOUR des lieux qu’il occupe, tant de sa personne, de ses biens, que de tout occupant de son chef ; Le déboute de ses demandes ; Le condamne aux dépens de l’instance. Ainsi fait, jugé et prononcé publiquement les jour, mois et an que dessus. ET ONT SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER. 8
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