3 phlebite des membres inferieurs

M 3 : Phlébite des membres inferieurs
Phlébite des membres inférieurs
Préparé par :
Dr. BOULADI Wajih
Objectifs :
1- Donner une définition de la phlébite et de la phlébo-thrombose.
2- Décrire les différents stades de constitution de la thrombose veineuse du point de vue
anatomopathologie.
3- Enumérer les facteurs favorisants la survenue d’une phlébite des membres inférieures.
4- Décrire l’étiopathogénie de la thrombose veineuse.
5- Rechercher par l’examen clinique et les examens complémentaires l’étiologie d’une
phlébite des membres inférieurs.
6- Réunir les arguments anamnestiques et cliniques en faveur d’une phlébite commune
des membres inférieurs (phlébite surale) à la phase de début et à la phase d’état.
7- Reconnaître le tableau clinique des formes topographiques et symptomatiques des
phlébites des membres inférieurs.
8- Discuter les diagnostics différentiels - qui peuvent se poser devant une phlébite des
membres inférieurs - sur des arguments anamnestiques, cliniques et para -cliniques.
9- Expliquer l’apport de l’examen écho-dِoppler veineux au cours d’une phlébite.
10- Citer les indications et expliquer l’intérêt de la phlébographie des membres inférieurs
au cours d’une phlébite.
11- Enumérer les principales complications aiguës et chroniques des phlébites des
membres inférieurs.
12- Indiquer les modalités du traitement et de sa surveillance dans la phlébite des
membres inférieurs.
13- Indiquer le traitement préventif de la phlébite des membres inférieurs.
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M 3 : Phlébite des membres inferieurs
Phlébite des membres inférieurs
I - INTRODUCTION :
La thrombose veineuse profonde ou thrombophlébite est définie comme la formation d’un
thrombus dans la lumière d’une veine profonde.
La maladie veineuse thrombo-embolique (MVTE) est une pathologie fréquente et grave. Elle
constitue une importante cause de morbidité et de mortalité avec une incidence moyenne
annuelle > 1 par 1000 personnes/année. La MVTE expose dans sa phase aigue à l'embolie
pulmonaire et au delà de cette phase, le risque est lié au syndrome post-phlébitique qui peut
être invalidant.
La gravité potentielle des thromboses veineuses profondes impose non seulement un
diagnostic et un traitement précoces des accidents thrombotiques mais aussi la connaissance
des circonstances à risque thrombogène en vue d'un traitement prophylactique.
II – PHYSIOPATHOLOGIE :
1/ Constitution du thrombus :
La physiopathologie de la TVP a été décrite depuis le XIX ème Rudolph Virchow qui implique
une triade physiopathologique qui porte son nom et qui demeure d'actualité ; elle comporte:
- un facteur hémodynamique : la stase sanguine.
- un facteur pariétal : l’altération de la paroi veineuse.
- un facteur thrombophilique : état d’hypercoagulabilité ou de thrombophilie.
Les éléments de cette triade agissent souvent en conjonction.
a - Facteur hémodynamique :
Le ralentissement du flux sanguin veineux aboutit à la désorganisation du flux qui n’est plus
laminaire et qui devient turbulent. Cette turbulence aboutit à l’activation de la coagulation
(thrombine, fibrinogène, plaquettes) et la constitution de thrombus veineux.
Ce phénomène explique le siège de prédilection des TVP au niveau des valvules veineuses,
région où la stase est importante en raison de flux rotatoires de faible vélocité.
Par ailleurs, toutes les conditions qui favorisent la stase veineuse prédisposent à la TVP :
alitement prolongé, position assise prolongée lors d’un voyage en avion, immobilisation
plâtrée d’une fracture d’un os des membres inférieurs.
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b - facteur pariétal :
L’altération de l’endothélium vasculaire veineux par différents agents pathogène (ischémie,
inflammation, compression…) entraîne d’une part le dysfonctionnement des cellules
endothéliales qui perdent leur pouvoir vasodilatateur (medié par la sécrétion de NO) et qui se
mettent à produire des substances vasoconstrictrices et proagrégantes plaquettaires, d’autre
par, la destruction de l’endothélium entraîne la mise à nu de la couche collagène sous
endothéliale avec libération de thromboplastine tissulaire. Tous ces facteurs concourent à la
formation d’un thrombus.
c - facteur thrombophilique :
La coagulation est une succession de réactions enzymatiques permettant une activation de
zymogènes (facteur XII, XI, IX, et II) qui vont aboutir, au sein de complexes enzymatiques
contenant du calcium et des phospholipides, à la génération de la thrombine. La thrombine va
activer le fibrinogène circulant pour former un réseau de fibrine insoluble qui participera avec
les globules rouges et les plaquettes, à la formation de thrombus.
Le facteur V activé (Va) et le facteur VIII activé (VIIIa) contribuent à amplifier la génération
de thrombine, cette dernière exerce un feed-back positif sur sa propre génération. D’un autre
côté, la thrombine exerce un contrôle indirect sur ce feed-back puisqu'elle active le système
Protéine C - Protéine S - Thrombomoduline qui inactive les facteurs Va et VIII a.
La coagulation est contrôlée par des inhibiteurs :
-
L’antithrombine : Elle est le principal inhibiteur physiologique de la coagulation.
C'est une glycoprotéine synthétisée par le foie. Elle agit essentiellement sur la
thrombine mais aussi sur le facteur X activé (Xa) et les acteurs IXa, XIa et XII a.
L'antithrombine est aussi le cofacteur de l’héparine : sa présence est donc
indispensable pour son activité anticoagulante.
-
Le système Protéine C - Protéine S – Thrombomoduline : La protéine C est
inhibiteur physiologique de la coagulation, vitamine K dépendant, synthétisé par le
foie. Elle circule dans le sang sous forme inactive. Elle est activée par le complexe
thrombine-thrombomoduline. La protéine C activée, inactive les facteurs V et VIII
activés. Cette inactivation est accélérée par la présence de calcium et de
phospholipides, et potentialisée par la présence d'un cofacteur: la protéine 5.
La protéine S est une glycoprotéine, vitamine K dépendante, synthétisé dans le foie.
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Elle a une activité de cofacteur de la protéine C activée. Elle favorise sa fixation aux
phospholipides et est donc nécessaire à l'expression de l'activité anticoagulante de la protéine
C activée, augmentant ainsi le taux d'inactivation des facteurs Va et VIIIa dans la cascade de
la coagulation. Dans le plasma, existe sous deux formes: libre (seule forme active) et liée à la
C4b binding protéine (C4bBP), protéine qui augmente en cas d'inflammation.
-
L'inhibiteur de la voie extrinsèque.
2/ Progression du thrombus initial :
Une fois le thrombus formé, sa progression s'effectue ensuite vers le centre de la lumière par
strates successives. Des couches de fibrine et de globules rouges sont successivement
apposées, séparées par de minces dépôts de plaquettes formant les lignes de Zahn, qui
témoignent de la progression par strates successives du thrombus rouge. Quand la lumière
veineuse est complètement occluse, l'absence de flux aboutit à la progression rapide de
thrombus vers l'amont et l'aval. Initialement, le thrombus n'adhère pas à la paroi vasculaire et
son extrémité supérieure peut même flotter librement dans la lumière veineuse et pouvant être
responsable d'embolie pulmonaire. Par la suite l'évolution se fait la rétraction et
l'épaississement de la paroi veineuse et à la destruction du jeu des valvules responsables de la
survenue de la maladie veineuse post-thrombotique par incontinence valvulaire.
III - ETIOLOGIES ET FACTEURS DE RISQUE DES TVP:
1 - Facteurs de risque environnementaux acquis :
a – La chirurgie :
Le risque d’accident thromboembolique veineux postopératoire dépend d’une part de la nature
de l’intervention chirurgicale pratiquée (les chirurgies à haut risque thromboembolique :
orthopédique, gynécologique, urologique, abdominale et rachidienne) et d’autre part du
terrain du patient (terrain à risque ; sujet obèse, grabataire, hémiplégique ou paraplégique,
atteint de pathologie néoplasique).
La fréquence des complications thromboemboliques est maximale dans les 10 premiers jours
postopératoires, mais quand les conditions favorisant la thrombose persistent, l’accident
thromboembolique peut se révéler à distance de l’acte chirurgical.
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b – Les traumatismes :
En particulier ceux des membres inférieurs, du bassin et du rachis. Le risque est plus faible
dans les traumatismes crâniens, de la face, du thorax ou de l’abdomen.
c – Les antécédents d’EP ou de phlébite :
L’incidence des récidives est de 5 %.
d – Les médicaments :
* Thromboses et thrombopénies à l'héparine :
La survenue d'une thrombopénie induite par l'héparine (TIH) est un phénomène rare, mais
pouvant mettre en jeu le pronostic vital. Le risque majeur est la survenue de thrombose. Le
risque de survenue d'une TIH ne dépend ni de la voie d'administration, ni de la dose
administrée, ni du type d'héparine utilisée, ni de l'âge du patient. La fréquence serait moindre
avec les héparines de bas poids moléculaire (HBPM) qu'avec l'héparine non fractionnée. La
survenue d'une TIH impose impérativement l'arrêt du traitement. La prévention des
complications passe obligatoirement par une surveillance de la numération des plaquettes
avant traitement, et tous les 2 à 3 jours à partir du Sème jour du traitement ainsi qu'un
raccourcissement de la durée du traitement héparinique. La pathogénie serait en rapport avec
la formation à la surface plaquettaire d'un complexe ternaire, héparine-facteur 4 plaquettaire
(H-FP4). Ces complexes fixent les anticorps anti-H-PF4, ce qui active les fragments Fc des
anticorps de type IgG. Ces fragments Fc se fixent alors sur leurs récepteurs Plaquettaires
(FcR II), induisant l'activation plaquettaire et les processus thrombogènes.
* Thromboses et œstroprogestatifs :
Les œstrogènes de synthèse multiplient le risque thrombotique par 3 à 4. Les
oestroprogestatifs sont contre-indiquées en cas d'antécédents de TVP et d'anomalies
congénitales de l'hémostase.
* Thromboses et chimiothérapies anti-cancéreuses :
Le rôle thrombogène des chimiothérapies serait lié à une augmentation du taux de
fibrinopeptide A. Les TV surviennent pendant l'administration du traitement et peuvent être
prévenues par une anticoagulation par AVK à faibles doses.
e – la grossesse et le post-partum A âge égal, la grossesse multiplie
par 5 le risque de TVP, qui survient dans 80% des cas après la 28ème semaine.
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f – l’immobilisation prolongée au cours d’un voyage en avion
(syndrome de classe économique), en train ou même en voiture.
g – les cardiopathies, en particulier l’insuffisance cardiaque congestive
et l’infarctus aigu du myocarde (avant la généralisation du traitement anticoagulant).
h – l’insuffisance respiratoire
i – le syndrome néphrotique
j – l’âge avancé
k – les maladies systémiques :
Les maladies du système les plus incriminées dans ce contexte sont :

le lupus érythémateux disséminé.

la maladie de Behçet.

les entérocolopathies inflammatoires (rectocolite hémorragique et la maladie de
Crohn).

la maladie de Buerger.
Au cours de ces maladies, la thrombophilie est multifactorielle : l’alitement, l’inflammation
pariétale veineuse, la fuite d’antithrombine (AT) (dans les urines au cours des syndromes
nephrotiques et dans les intestins au cours des entérocolopathies inflammatoires) et la
présence d’un anticoagulant circulant, c’est ce qui rend compte de la forte prévalence des
accidents thromboemboliques veineux dans ces pathologies.
l– Le syndrome des antiphospholipides primitif ou associé à un lupus érythémateux
disséminé. Il se définit par des manifestations cliniques (thromboses veineuses et/ou
artérielles, fausses couches à répétition) associée à la présence d'une thrombopénie et
d'anticorps antiphospholipides (APL). Les APL peuvent s'exprimer soit sous forme
d'antithrombinase (ou anticoagulant circulant de type lupique) qui allonge le TCA, soit sous
forme d'anticardiolipine, soit enfin par une sérologie syphilitique dissociée.
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2 – Cancers et hémopathies malignes :
a – Les cancers :
Les néoplasies les plus souvent responsables de maladie thromboembolique veineuse sont : le
cancer du pancréas, du poumon (notamment à petites cellules), du côlon, de l’endomètre, de
la prostate, du rein et du sein.
Là aussi plusieurs mécanismes expliquant cette thrombophilie : secrétion par les cellules
cancéreuses de substances procoagulantes (syndrome para néoplasique), les compressions
veineuses, l’alitement, la déshydratation…
En clinique, la thrombose veineuse profonde ou l’EP compliquent souvent un cancer connu
antérieurement, mais l’accident thromboembolique veineux peut aussi révéler un cancer
occulte.
b – Les hémopathies :
Spécialement les syndromes myéloprolifératifs (leucémie myéloïde chronique, polyglobulie de
Vakez, thrombocytémie essentielle, splénomégalie myéloïde chronique) mais également
l’hémoglobinurie paroxystique nocturne, drépanocytose, paraprotéine, déshydratation ...).
3 – Thrombophilies constitutionnelles
Une thrombophilie doit être recherchée devant:
-Une TV. Survenant avant 40 ans, d'allure primitive, récidivante, à topographie inhabituelle,
- Des TV. Superficielles.
- Des antécédents familiaux de thromboses.
a – les déficits en inhibiteurs de coagulation :
 Les déficits en anti-thrombine sont incontestablement associés au risque de TV
élevé. Plus de 50% des sujets porteurs d'un déficit ayant eu un épisode thrombotique
avant 30 ans. Le dosage d'AT doit être réalisé avant la mise sous héparine.
 Les déficits en protéine C et S sont plus fréquents que le déficit en AT. L'expression
clinique des déficits en PS est légèrement moins forte que celle des déficits en AT,
alors que celle des déficits en PC est assez variable d'une famille à l'autre. Le dosage
des protéines S et C doit être réalisé avant la mise sous AVK. Un déficit en PC (plus
rarement en PS) peut être révélé par l'apparition de nécroses cutanées dans les
premiers jours d'un traitement AVK. Le mécanisme invoqué est un déséquilibre entre
le taux bas de PC, premier facteur abaissé par les AVK et les taux encore normaux des
autres facteurs de coagulation, ce qui favoriserait l'apparition de thromboses dans la
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microcirculation. Cette complication peut être prévenue par l'introduction progressive
du traitement AVK lorsque le déficit est connu.
La transmission des déficits en AT, PS, PC ainsi que la RPCa s'effectue sur le mode
autosornique dominant, et explique l'existence d'une thrombophilie familiale souvent
retrouvée. La confirmation de l'origine congénitale de ces anomalies passe obligatoirement
par une enquête familiale. Ce qui les différentient des déficits acquis (qualitatifs ou
quantitatifs) rapportés au cours de l'insuffisance hépatique, des coagulations intravasculaires
disséminées ...
b - les polymorphismes génétiques :
Ils sont beaucoup plus fréquents et représentés par : la résistance à la protéine C activée
(RPCa), facteur V Leiden, prothrombine 20210A, augmentation du facteur VIII, IX, XI et
hyperhomocystéinémie). Ces polymorphismes sont très fréquents dans la population générale
mais ils sont associés à un risque relatif de thrombose plus faible.
La RPCa est l'anomalie constitutionnelle responsable de thrombose la plus fréquente. La
RPCa est due à une mutation du facteur V ou facteur lei den (arginine 506glutamine) qui
empêche son activation physiologique par la PCa (fig 2).
4 – Syndrome de Cockett :
Il s’agit là d’un syndrome caractérisé par un œdème chronique avec varices et phlébites à
répétition au niveau du membre inférieur gauche. La physiopathologie en est la compression
de la veine iliaque primitive gauche par l’artère iliaque primitive droite. Le traitement
chirurgical et percutané est souvent décevant.
c- Thrombophilie constitutionnelle :
IV- ETUDE CLINIQUE:
A- TYPE DE DESCRIPTION: PHLÉBITE DES MEMBRES INFÉRIEURS :
1-Phlegmatia alba dolents : C'est le tableau le plus classique.
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Diagnostic clinique:
a- Signes locaux :
 Douleur à la palpation du mollet et surtout à la dorsiflextion du pied (signe de
Homans présente dans 60% des cas).
 Œdème ferme, prenant peu ou pas le godet, limité au mollet ou remontant à la cuisse.
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Le siège de l'œdème est conditionné par celui de la thrombose, l'œdème peut être
localisé au mollet (phlébite surale), à la jambe (poplité) ou remontant jusqu'au pli de
l'aine (fémoro-iliaque). L'œdème est d'intensité variable, souvent discret et ne se
traduisant que par une diminution du ballottement du mollet.
 Signes inflammatoires avec augmentation de la chaleur locale et dilatation veineuse
superficielle. Chacun de ces signes peut être isolé. Lorsqu'ils sont associés, leur valeur
diagnostique est majorée.
b- Signes généraux :
 Fièvre : de la simple fébricule à l'hyperthermie pseudosepticémique qui est
exceptionnelle. La fièvre est quasi constante, résistante aux antibiotiques et cède à
l'héparine et aux anti-inflammatoires.
 Pouls : le pouls s'accélère mais beaucoup plus que ne voudrait la température, sa
fréquence croit de jour en jour réalisant le « pouls grimpant de Mahler».
1-2 Diagnostic para-clinique :
Une fois évoqué par le clinicien: le diagnostic de TVP doit être prouvé. Tout retard ou toute
erreur diagnostique exposent à des complications emboliques (diagnostic par défaut) et des
complications iatrogéniques (diagnostic par excès).
a- Phlébographie : considérée comme l'examen de référence, la phlébographie est de
moins en moins pratiquée. Après injection de produit de contraste iodé au dos de pied, les
critères de TYP qui sont recherchés sont la lacune et la cupule (extrémité de la lacune). Deux
critères secondaires sont représentés par l'absence d'un segment veineux principal et la
présence d'une circulation collatérale. Les limites de la phlébographie sont la nécessité d'une
injection iodée, une variabilité inter-observateur, un coût élevé et la difficulté voire
l'impossibilité d'explorer certaines veines (fémorale profonde, pelvienne, jumelles ...).
b- Echo-doppler veineux : examen anodin, indolore, répétitif, réalisable au lit du
malade. Une TVP se traduit par la présence d'une zone échogène endoveineuse et à l’appui de
la sonde. L’examen offre une sensibilité et une spécificité avoisinant 95% si certaines
conditions sont exigées : l’appareillage doit être de bonne technicité (haute résolution et sonde
adaptée) et l’opérateur doit être expérimenté.
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c- Dosage des D-dimères : Les D-dimères sont issus de la dégradation de la fibrine
liée à la vie physiologique d'un thrombus récent. La spécificité de ce test est mauvaise car une
élévation des D-dimères est aussi retrouvée lors de l'inf1ammation, de cancer, de
traumatisme, de grossesse, de période post-opératoire, d'âge avancé. A l'inverse, un test
négatif permet d'exclure une TYP avec un risque d'erreur inférieure à 5% par le test ELISA.
d-Autres explorations : la pléthysmographie, la thermographie, le test au fibrinogène
marqué…
B- FORMES CLINIQUES :
1- Formes symptomatiques :
1-1- Phlegmatia coerulea dolens ou Phlébite bleue :
Le caractère très obstructif de la TYP peut être responsable d'un ralentissement artériel avec
ischémie du membre (extrémité froide, cyanosée avec abolition des pouls).
C'est une urgence vasculaire qui outre le traitement anticoagulant, une prise en charge dans un
centre spécialisé en vue d'une thrombectomie ou d'une aponévrotomie de décharge peut
s'imposer.
1-2- Formes asymptomatiques :
La TYP est révélée par une embolie pulmonaire (EP) dans un nombre non négligeable de cas.
Ainsi seule 20% des TYP trouvés à l'autopsie de patients décédés d'EP étaient
symptomatiques avant le décès.
2- Formes topographiques :
2- 1- TV Distales:
Localisée au niveau des veines surales, peu emboligène et ne laissant généralement pas de
séquelles locales.
2-2- TV Superficielle (TVS) :
En dehors des TVS survenant sur veines variqueuses et ne nécessitant qu'un traitement antiinflammatoire, les TVS méritent la même attention que les TVP isolées.
L'association TVS et TVP est fréquente. Les risques emboligènes et étiologiques des TVS
extensives sont voisins de ceux des TVP isolées.
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2-3- TV Pelviennes :
Elles surviennent dans un contexte de chirurgie abdomino-pelvienne, de grossesse, de postpartum. Les signes cliniques, lorsqu'ils sont présents, sont pelviens (douleur utérovaginale,
troubles urinaires) ou généraux (fièvre). Le diagnostic est difficile car les veines thrombosées
sont ovariennes, utérines, hypogastriques et pouvant s'étendre au réseau iliaque. L'efficacité
de l'héparine sur les signes cliniques est le meilleur test diagnostique.
2-4- Thrombose de la veine cave inférieure :
Elle peut être le siège de l'extension d'un thrombus iliaque ou d'un thrombus veineux rénal.
Les signes cliniques peuvent être bilatéraux, notamment l'œdème étendu jusqu'aux cuisses. La
circulation collatérale superficielle est perçue au niveau abdominal.
2-5- TV des membres supérieurs :
Le tableau est habituellement évocateur avec des douleurs et un œdème du membre supérieur,
dans un deuxième temps apparaît une circulation collatérale du moignon de l'épaule et de la
face antérieure du thorax. Les étiologies sont dominées par les thromboses sur cathéter, la
pathologie néoplasique et les anomalies de l'hémostase.
3. Formes selon le terrain :
3.1. TV de grossesse :
Si la grossesse est considérée comme un facteur de risque thrombotique, la survenue d'une
thrombose impose la recherche d'une anomalie hématologique thrombogène en particulier une
thrombophilie.
3.2. TV de l’enfant :
La TVP est exceptionnelle chez l’enfant (en raison du taux élevé de l'alpha 2 macroglobuline
qui confère un rôle protecteur par son action anti- thrombotique), sa survenue impose une
enquête étiologique soigneuse.
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V) Evolution :
A) Rechute ou extension :
En rapport avec un sous dosage ou une résistance à l'héparinothérapie (déficit en AT ou TIH).
B) Embolie pulmonaire :
La réalisation d'une radiographie thoracique, d'un ECG et d'une gazométrie doit faire partie du
bilan initial de toute TVP à titre de point de repère dans l'optique de survenue d'une EP.
Devant la suspicion d'une EP. Devant la suspicion d’une EP, le bilan sera complété par une
scintigraphie pulmonaire, une échographie cardiaque et une angiographie pulmonaire au
besoin.
C) Récidive :
Le caractère récidivant d'une TVP impose la recherche d'une cause sous jacente. Volontiers
une thrombophilie chez un sujet jeune, une pathologie néoplasique chez le sujet âgé.
D) Syndrome post-phlébitique :
Est la complication la plus redoutable après l'EP. Elle est due à une destruction des valvules et
une altération de la paroi veineuse.
Le membre inférieur est le siège d'une douleur et d'un œdème qui s'accentuent à
l'orthostatisme. Ils s’y associent au cours de l'évolution des troubles trophiques à type
d’hyperkératose cutanée, de dermite ocre, de dépigmentation. L’ulcère veineux de jambe est
la complication la plus redoutée, elle correspond à l’ouverture spontanée à la peau d’une
ectasie superficielle souvent thrombosée.
VI) DIAGNOSTIC :
A) Diagnostic positif :
1. Face à une suspicion clinique de TVP :
L’écho-doppler veineux doit être demandé et obtenu dans les plus brefs délais. Dans le cas
d’une TVP proximale la sensibilité est de 100%.
2. Contexte de TVP asymptomatique (EP) :
L’écho-doppler n’offre une sensibilité que de 50%, la phlébographie est préconisée.
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3. Récidive de TVP :
Il est parfois difficile de différencier entre une récidive de TVP ou une TV ancienne avec
aggravation récente du syndrome post-phlébitique.
B) Diagnostic étiologique :
C’est le plus la conjonction d’un facteur déclenchant (situation à risque) et de facteurs
favorisants propres au patient qui est à l’origine d’une TVP. La démarche étiologique a pour
objectif la recherche d’une pathologie sous-jacente ayant pu favoriser la TVP: pathologie
immuno-hématologique chez le sujet jeune et néoplasique après 50 ans.
Le diagnostic étiologique de TV s’appuie toujours sur une analyse soigneuse du contexte
clinique s’efforçant à rechercher les facteurs de risque et les associations pathologiques suscitées. Le bilan à réaliser doit être orienté par le terrain et les données fournies par l’anamnèse
et l’examen clinique (voir annexe). Le tableau l résume les situations où la recherche d’un état
d’hypercoagulabilité primaire s’impose. La notion d’une TV migratrice, d’une TV du membre
supérieur et surtout d’une TVS récidivante doit faire rechercher une néoplasie sous jacente.
Tableau 1 : Indications des dosages biologiques dans le cadre
d’une recherche étiologique de TVF
Recherche de déficits en PS, PC, AT et RPCa
- Age < 40 ans,
- Antécédents de TVP,
- TV récidivantes,
- Antécédents familiaux de TV,
- TV à localisations exceptionnelles,
- Absence de facteurs de risque.
PC, PS si nécroses cutanées précoces sous AVK.
AT si résistance à l’héparine.
Attention : AT  si héparine,
PS-PC  si AVK,
ACC ou APL :
- Si thromboses récidivantes veineuses ou artérielles.
- Avortement spontané.
- Thrombopénie périphérique.
- TCA allongé spontanément.
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C) Diagnostic différentiel :
Le diagnostic clinique de TVP, notamment dans les veines du mollet, est on ne peut moins
fiable. Aucun des symptômes ou signes physiques n’est vraiment sensible (tableau II).
En effet, le bien classique signe de Homans n’est pas spécifique d’une TVP. La douleur peut
faire évoquer une sciatalgie tronquée, un hématome... L’œdème peut traduire une
compression veineuse par adénopathie ou tumeur pelvienne, la présence d’un kyste
synovial (de Baker), un lymphoedème ou un syndrome post-thrombotique. Les signes
inflammatoires sont retrouvés au cours d’un érysipèle, d’une lymphangite ou d’une cellulite
inflammatoire. Une dilatation des veines superficielles peut accompagner une insuffisance
veineuse chronique ou une compression veineuse.
Il est dès lors évident qu’au delà des différents diagnostics susceptibles d’être évoqué, toute
suspicion doit être affirmée ou infirmée par les examens complémentaires appropriés.
VII) Traitement :
A) Traitement d’une TVP à la phase aiguë :
1) Traitement anticoagulant :
a) L’héparinothérapie initialisée par un bolus intraveineux d’héparine (100 UI/Kg/j)
suivie par un traitement intraveineux soit continu au pousse seringue, soit en discontinue
toutes les 4 heures ou alors par de la calciparine en sous-cutanée toutes les 8 heures avec une
posologie adaptée au poids du patient (500 UI/kg/j) puis en fonction du temps de Céphaline
activée. Quelque soit le mode d’administration du traitement héparinique, l’important étant
d’obtenir le plus rapidement possible une efficacité biologique. La posologie est adaptée selon
le TCA (2 à 3 fois le témoin pour une hypocoagulabilité efficace).
b) Les héparines de bas poids moléculaire (HBPM) en une ou deux injections
quotidiennes sont actuellement devenues le traitement de référence des TVP. La dose est
simplement adaptée au poids et ne nécessite ensuite plus de contrôle selon l’activité anti-Xa,
dont la surveillance n’augmente ni l’efficacité ni la sécurité. Les HBPM présentent également
un risque inférieur de survenue de TIH, mais le contrôle bihebdomadaire de la numération des
plaquettes durant le traitement demeure la règle. La facilité d’utilisation des HBPM permet
d’envisager un traitement ambulatoire de la TVP, ou une hospitalisation très réduite de 48
heures.
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c) Le traitement anti-vitamine K : Le relais précoce par une anti-vitamine K (dès le
premier jour) contribue d’une part à éviter la survenue d’une TIH, et d’autre part à diminuer la
durée d’hospitalisation. La zone thérapeutique doit être comprise entre 2 et 3 pour l’INR
(international normalized ratio), c’est à dire le temps de prothrombine (temps de Quick)
corrigé. L’expression du taux de prothrombine sous forme de l’INR favorise la
reproductibilité d’un laboratoire à un autre et accroît ainsi la sécurité du traitement.
La durée du traitement anticoagulant varie de 3 à 6 mois ou plus en fonction de la topographie
de la TVP et du contexte.
2) Des traitements complémentaires peuvent être envisagés :
* La contention élastique permet d’obtenir une amélioration rapide des symptômes et limite
le risque de maladie post-thrombotique.
* L’interruption partielle de la veine cave inférieure qui permet par la mise en place d’un
barrage mécanique une prévention des migrations emboliques. Les indications principales
sont les échecs et les contre-indications du traitement anticoagulant.
* Une thrombectomie veineuse devient impérative en cas de phlébite bleue.
B) Traitement préventif :
Il repose sur le lever précoce, une mobilisation rapide des patients et des règles d’hygiène
veineuse simples, surélévation des membres, exercices respiratoires, contention élastique.
En fonction du risque de TVP qui doit être estimé individuellement on peut un traitement
anticoagulant à visée prophylactique. Les HBPM se sont également imposées ici comme le
traitement le plus simple (une seule injection) et le plus efficace. Leur dose varie selon chaque
héparine, et selon le degré de risque (modéré ou élevé) que l’on cherche à prévenir. La
prévention par HBPM permet d’éviter la survenue de TV en milieu chirurgical (post-opératoire ou lors d’une immobilisation prolongée). En milieu médical, la prévention est
justifiée chez tout malade alité présentant des facteurs de risque associés ; âge avancé, obésité
importante, varices des membres inférieurs, antécédents de MVTE, déficit connu en
inhibiteurs physiologiques de la coagulation.
Selon le contexte, les AVK à faible dose peuvent être également préconisée en prophylaxie.
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VIII) Conclusion :
La MVTE reste fréquente et grave. Le diagnostic clinique est difficile en raison de l’absence
de sensibilité et de spécificité des signes cliniques. L’examen complémentaire de première
intention est l’écho-doppler veineux. Le dosage des D-dimères est une possibilité élégante
pour exclure une MVTE évolutive. Souvent la TV évolue dans un contexte clinique
favorisant. Parfois, elle apparaît de façon inopinée chez un sujet jusque là indemne et se
discute alors le bilan étiologique à réaliser, en particulier lorsque la TV est récidivante ou de
siège inhabituel. L’enquête étiologique est dominée par deux grands cadres : la recherche
d’un cancer occulte et la recherche d’une anomalie de l’hémostase. Les HBPM sont devenues
le traitement de référence ; Le traitement anti-vitamine K est débuté précocement.
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