1 Proposition de recherche présentée par : KOUASSI Dedje

D12a
RÉEXAMEN DE LA CRÉATION DE COMMERCE AU SEIN DE L’UEMOA
Une approche sectorielle
Proposition de recherche présentée par :
KOUASSI Dedje Sylvestre Eric
Doctorant
Unité de Formation et de Recherche de
Sciences Economiques et de Gestion
Université Félix Houphouët Boigny
(Abidjan-Côte d’ivoire)
Tel: (+225) 22 42 22 65/09 28 52 70
[email protected]
NOUVELLE PROPOSITION REVISÉE
CONSORTIUM POUR LA RECHERCHE ÉCONOMIQUE EN AFRIQUE
Decembre 2014
1
Résumé
Cette proposition vise à tester l’impact sectoriel du marché commun de l’UEMOA sur la création
d’échanges intrazone. Le renforcement de l’intégration dans cette zone s’est concrétisé par la mise en
place d’une politique commerciale commune, mais également par l’adoption de politiques sectorielles
visant à améliorer l’offre et renforcer les échanges entre pays membres. L’étude utilisera des données
provenant des bases World Develpment Indicator (WDI), World Integrated Trade Solutions (WITS),
Dist.xls de la CEPII et de la base UNCTADstat sur la période 1995-2012 pour analyser l’impact
global et sectoriel du marché commun sur les échanges intra-UEMOA. D’abord, nous utiliserons des
indicateurs de commerce pour établir les conditions de la création d’échange au sein de l’UEMOA.
Puis, nous estimerons une équation globale et trois équations sectorielles (agricole, pétrole,
manufacturé) à partir de la méthode de sélection de Heckman pour contrôler certains biais. Les
résultats de cette étude fourniront des informations empiriques permettant de comparer l’impact
sectoriel du marché commun et de faire des recommandations pour les intégrer dans les politiques
sectorielles régionales.
Mots clés: intégration régionale, échanges bilatéraux, UEMOA, Modèle de gravité, structure
sectorielle des échanges, création d’échanges.
JEL: F11, F12, F13, F15, F17
Abstract
This proposal aims to test the sectoral impact of the Common Market of the WAEMU, in terms of
trade creation. The further integration in this area has culminated in the establishment of a common
trade policy, but also by the adoption of sectoral policies to improve the supply and strengthen
exchanges between member countries. The study will use data from the World Develpment bases
Indicator (WDI), World Integrated Trade Solutions (WITS) Dist.xls the CEPII and base UNCTADstat
the period 1995-2012 to analyze the impact of global and sectoral common market on intra-WAEMU.
First, we will use trade indicators to establish the conditions for the establishment of trade within
WAEMU. Then, we estimate a global equation and three equations sectoral (agriculture, oil,
manufactured) from the Heckman selection method for controlling certain bias. The results of this
study will provide empirical information to compare the sectoral impact of the common market and to
make recommendations for integration into regional sector policies.
Keywords: regional integration, bilateral trade, UEMOA, Gravity model, sectoral structure of trade,
trade creation.
JEL: F11, F12, F13, F15, F17
2
1. Introduction
1.1. Contexte
L'étude de l'effet de création d'échanges, dans un contexte des accords commerciaux régionaux est un
sujet d’actualité. Cela est d’autant vrai qu’au cours des trente dernières années, dans toutes les régions
du monde, ces accords ont connu une évolution remarquable, notamment en Afrique subsaharienne.
En Afrique de l’Ouest, le traité de l’UEMOA qui a été signé le 10 janvier 1994 à Dakar et ratifié le 1er
aout 1994 est entré en vigueur le 1er janvier 1995. Ce traité qui venait compléter le traité de l’UMOA
visait la création du marché commun à travers diverses réformes successives : la suppression
progressive des barrières tarifaires ; l’entrée en vigueur de l’union douanière le 1er janvier 2000 avec
l’adoption d’un tarif extérieur commun (TEC). Parallèlement, la Conférence des Chefs d'État a adopté,
en décembre 2001, le Protocole additionnel n° II, relatif aux politiques sectorielles de l’UEMOA. Ce
protocole prévoyait la mise en œuvre de diverses politiques sectorielles communes dont la politique
agricole commune (2001), la politique industrielle commune (1999), politique minière commune
(2000) et politique énergétique commune (2001). Le but de ces politiques est de développer la capacité
d’offre de biens et services compétitives afin d’accroître le panier de biens échangeables entre les pays
membres.
Malgré les réformes, les effets attendus restent mitigés au regard des faibles parts des échanges
intrazone et des résultats des certaines études empiriques. Certaines études relatives au pays de
l’UEMOA indiquent que le marché commun de l’UEMOA aurait débouché sur une création
significatif d’échanges, même si leurs niveaux restent faibles (Carrère, 2004 ; Gbetnkom et Avom,
2005 ; Carrère, 2013). D’autres au contraire, observent un détour significatif d’échanges (Agbodji,
2007). Par ailleurs, selon les données du secrétariat de la CNUCED, les exportations globales de la
plupart des pays membres se sont accrues de 8 % en moyenne annuelle sur la période 1995-2012.
Mais, moins de 12 % de cette croissance représentent les échanges intra-UEMOA. En comparaison
internationale, cette part est modeste par rapport à celle d’autres expériences comme l’Union
européenne où les échanges intra-UE représentent environ 70 % en 2010. En général, la capacité de
l'ACR de créer des échanges intrazone est en lien avec la taille économique, la croissance économique
et la géographie défavorables des pays (Foroutan et Pritchett, 1993 ; Coe et Hoffmaister, 1999 ;
Chauvin et Gaulier, 2002) l’insuffisance d’infrastructures (Coulibaly et Fontagné, 2005 ; François et
Manchin, 2007) l’inefficacité des politiques publiques (Longo et Sekkat, 2004) et les commerces non
enregistrés (Agbodji, 2007).
Par ailleurs, l'évolution des échanges sectoriels entre les pays membres, indique que les exportations
dans chaque secteur ont, non seulement, enregistré une croissance positive, mais il y a aussi, une
recomposition des exportations entre les secteurs de 1995 à 2012 (voir Tableau 1). Notre étude
3
cherche à montrer comment les reformes dans la zone UEMOA ont modifié les flux d’échanges intrazone attendus tant au niveau global qu’au niveau sectoriel.
Tableau 1 : Évolution sectorielle des exportations intra-UEMOA
Secteurs
les parts sectorielles (%)
Croissance moyenne annuelle (%)
1995
2012
1995-2012
Agricoles
46,12
30,28
3,52
Pétroles et mines
21,52
33,34
8,58
Manufacturés
32,36
36,38
6,66
Total
100
100
5,97
Sources : l’auteur, tableau construit à partir des données de la CNUCED
1.2. Justification et intérêt du sujet
L’idée du réexamen des effets du marché commun de l’UEMOA se base sur les acquis des études
antérieures. En effet, ces études se sont largement appuyées sur l’estimation de modèle de gravité, en
proposant diverses spécifications. Les résultats obtenus par ces études antérieures diffèrent souvent en
fonction de la magnitude de la variable d'intérêt ou de la significativité de cette magnitude. Il y a
explications possibles à cette divergence (Fontagne et al., 1999). La première explication est relative à
la période d’étude. En général, la plupart des études antérieures portent sur des périodes d’étude qui
intègrent peu ou pas toutes les réformes entreprises dans la cadre de la construction du marché
commun de l’UEMOA. Cela peut justifier l’absence de significativité du coefficient de la variable
associée à l’accord commercial régional, chez certains auteurs (Agbodji, 2007). La deuxième
explication est d’ordre méthodologique. L’abondance des flux nuls d’échange au niveau des pays
africains a favorisé l'élimination de certains pays de l’échantillon ou l'application de méthodes qui
contrôlent peu ou pas certains problèmes économétriques liés à ce type de données (censure). De plus,
les études antérieures se focalisent sur les volumes globaux d'échanges et ce sont rarement intéressées
à la question clef de la structure sectorielle des échanges.
Cette démarche a un avantage à la fois méthodologique et politique, surtout au niveau de la mise en
œuvre des politiques sectorielles. Au niveau de la méthodologie, l'application de la transformation
logarithmique aux modèles de gravité se heurte au problème des flux nuls d’échange et ne permet pas
toujours de respecter les conditions d’estimation efficace et sans biais. En outre, lorsque les flux nuls
d’échange ne correspondent pas à une décision aléatoire des firmes, de ne pas exporter, les estimations
peuvent conduire à un biais significatif de sélection, si on élimine ces flux. Ce qui explique pourquoi
l’application directe des MCO sur les données de commerce fournit souvent des estimations biaisées et
inconsistantes. Pour répondre à ces limitations, nous utiliserons des méthodes récemment développées
dans la littérature, qui prennent en compte certains de ces problèmes. Au plan politique, notre étude
s’inscrit dans la droite ligne des efforts déployés par les responsables politiques africains pour booster
les échanges sud-sud, notamment au sein de la zone UEMOA. Ce type d'échanges est considéré
4
comme une source importante de croissance économique et de réduction de la dépendance vis-à-vis de
l'extérieur. Cette étude va donc fournir des informations utiles et récentes sur les secteurs à fort
potentiel de création d’échanges et des recommandations pour intégrer les résultats de l’étude dans les
politiques sectorielles régionales.
1.3. Questions de recherche
Cette étude cherche à répondre aux questions suivantes : comment les récentes évolutions de du
marché commun de l'UEMOA affectent-elles les échanges intrazones ? Les conditions de la mise en
œuvre de l’intégration sont-elles favorables à la création d’échange intra-UEMOA ? Quel est l’impact
du marché commun sur les flux sectoriels d'échanges ?
1.4. Objectifs de la recherche
L'objectif général de cette étude est de réexaminer l'impact du marché commun de l’UEMOA sur la
période 1995-2012, relativement plus récente. L’objectif général se divise en trois objectifs spécifiques
: Vérifier les conditions de viabilité du marché commun, en termes de création d’échanges intraUEMOA.

Réexaminer les spécifications économétriques utilisées dans les travaux précédents ainsi
que les résultats obtenus.

Évaluer l’impact global et sectoriel du marché commun de l’UEMOA, en estimant à la
fois une équation globale et trois équations sectorielles entre 1995 et 2012.
2. Hypothèses de la recherche
Les hypothèses de l’étude sont :

H1 : il y a une inadéquation entre l’offre et la demande, en raison de la faible complémentarité
des structures des échanges au sein de l’UEMOA.

H2 : La mise en place du marché commun de l’UEMOA débouche sur une création
significative d’échange aux niveaux global et sectoriel.

H3 : La création d’échange est significativement plus importante pour le secteur manufacturé
que pour le secteur agricole et le secteur pétrolier et minier.
Le reste de la proposition de recherche est organisé de la manière suivante : la section 3 présente, une
brève revue de la littérature théorique et quelques récentes études empiriques portant sur la création
d’échange en zone UEMOA. La section 4 expose la méthodologie qui sera utilisée dans cette étude et
enfin la section 5 décrit l’échantillon, les données et leurs sources, de même que les résultats attendus.
3. Brève revue de la littérature
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Cette brève revue de la littérature met en évidence les bases théoriques de la création d’échange et
l’évolution des fondements des équations de gravité comme outils d’analyse. Elle présente aussi
quelques récentes études empiriques significatives portant sur l’analyse de la création d’échanges
intra-UEMOA.
3.1.
Les bases théoriques de la création d’échanges
Les travaux précurseurs de Viner (1950) montrent que l’adoption d’une union douanière débouche sur
deux effets : la création et le détour d’échanges. L’effet net global de l’union dépend du poids de la
création sur le détour. Les études ultérieures ont établi les conditions dans lesquelles la création
d’échanges surpasse le détour d’échanges. Certaines ces études s’appuient sur un cadre d’équilibre
partiel (Viner, 1950 ; Meade 1955) tandis que d’autres optent pour un cadre d’équilibre général
(Lipsey, 1960 ; Bourguinat, Lutz et Wonnacott, 1989 ; kowalczyk, 2000). En général, les effets de
détour d’échanges sont minimisés (Meade, 1955) lorsque :

Les économies des pays membres sont concurrentes avant la mise en œuvre de l’union et sont
potentiellement complémentaires ;

Les échanges mutuels initiaux entre les pays membres sont importants avant la formation de
l’union ;

L’offre et la demande nationales dans chaque pays membre sont très réactives l’une par
rapport à l’autre (forte élasticité).
3.2.
La mesure de la création des échanges : la méthode de gravité
L'impact des accords commerciaux régionaux est le plus souvent évalué à partir d'une équation de
gravité. Les effets des accords sont souvent approximés par des variables muettes (ACR) qui prennent
la valeur 1 si la paire de pays étudiés est membres de l'accord donné et zéro sinon.
Linnemann (1966), et Leamer et Stern (1971) sont les premiers à démontrer l’efficacité des équations
de gravité comme modèle explicatif des flux bilatéraux d’échanges. Toutefois, ces équations
empiriques sont restées longtemps sans fondements théoriques, ce qui limitait leur pertinence. C’est
Anderson (1979) qui a fourni la première base théorique en dérivant une équation de gravité d’un
modèle avec produits différenciés selon l’origine. A sa suite, plusieurs autres fondements ont été
développés à partir d'autres théories du commerce international : Bergstrand (1989) utilise le modèle
factoriel ; Deardorff (1998) s’intéresse au modèle Heckscher-Ohlin ; Krugman (1980) dérive une
équation de gravité à partir d’un cadre de concurrence monopolistique en présence de coûts de
transports. Anderson et van Wincoop (2003) améliorent la version du modèle d’Anderson (1979) en y
intégrant les résistances multilatérales. En général, les modèles HO semblent mieux expliquer le
succès de l’équation de gravité lorsque les dotations factorielles sont très différentes, tandis que les
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modèles à rendements croissants expliquent mieux les échanges entre pays similaires parce que les
échanges de biens différenciés représentent une part importante de leur commerce.
Les récents développements de la théorie du commerce, impulsé à partir du modèle de firmes
hétérogènes de Melitz (2003), apportent de nouveaux fondements à l’équation de gravité. Dans les
équations de gravité qui en découlent, le nombre de paramètres reliant les flux d’échanges aux
barrières commerciales et leur interprétation changent (Chaney, 2008). Comme le souligne Melitz
(2003) et d'autres chercheurs après lui, seules quelques firmes hétérogènes peuvent exporter, pour un
niveau de coûts de transaction donné, sur le marché international. Ainsi, lorsque les coûts transaction
baissent, deux mécanismes sont à l'œuvre : les exportateurs historiques augmentent leur volume de
ventes (la marge intensive), et de nouvelles entreprises entrent sur le marché d'exportation (la marge
extensive). Les paramètres clés régissant la marge intensive sont les mêmes que ceux dans les modèles
d'échanges avec des firmes homogènes: l'élasticité de substitution entre les biens et l'élasticité des
coûts de transaction par rapport à la distance. Toutefois, la marge extensive dépend non seulement de
ces deux paramètres, mais également de la répartition de la productivité des firmes. Au niveau global,
l'effet des coûts de transactions est la somme de l'effet du coût de transaction à la marge intensive et du
coût de transaction à la marge extensive. Chaney (2008) de même que Melitz et Ottaviano (2008) ont
montré que l'élasticité du commerce total des flux par rapport à la distance ne peut donc pas être
interprétée comme l'élasticité de substitution entre les biens, mais plutôt comme le degré
d'hétérogénéité des entreprises. Les principales différences entre le modèle de Krugman (1980) et celui
de Chaney (2008) avec des firmes hétérogènes sont :

L'élasticité des flux commerciaux par rapport aux barrières commerciales (variables) est plus
élevée dans le modèle avec les entreprises hétérogènes. Cela est dû à la marge d’ajustement
supplémentaire, c’est-à-dire la marge extensive du commerce.

L'élasticité des flux d'échanges par rapport aux barrières commerciales variables ne dépend
plus de l'élasticité de substitution.

L'élasticité des flux commerciaux par rapport aux coûts fixes est négativement liée à
l'élasticité de substitution.

Les deux élasticités des flux commerciaux par rapport aux coûts fixes et aux coûts variables
sont plus élevées dans les secteurs où la productivité des entreprises est moins dispersée.
L’intérêt de ces derniers développements est de permettre de mesurer les effets sectoriels de la zone
UEMOA tout en mettant en évidence la marge extensive et la marge intensive.
3.3.
Études empiriques sur la création d’échanges au sein de l’UEMOA
La plupart des études empiriques qui ont été consacrées à l'impact du marché commun de l'UEMOA
ont débouché sur des résultats différentiés, en fonction de la spécification de l'équation de gravité, des
méthodes d'estimations utilisées et de la période d'analyse. Carrère (2003) a évalué l’impact des
7
accords régionaux sur le commerce des membres en Afrique subsaharienne (CEMAC et UEMOA), en
contrôlant les autres déterminants traditionnels. Puis, elle a comparé les effets respectifs des accords
commerciaux préférentiels et les unions monétaires sur la période 1962-1996. Elle a conçu un modèle
de gravité « augmentée » en s’appuyant sur une fonction de coût de transport et où des variables
dichotomiques spécifiques permettent de séparer les effets de création des effets de détour. Le modèle
est estimé en panel en incluant des effets spécifiques bilatéraux pour isoler les caractéristiques non
observables de chaque paire de pays. La méthode de Hausman-Taylor (1981) a été utilisée pour
prendre en compte l’endogénéité de certaines variables explicatives. Il ressort que, lors de leur mise en
œuvre, la CEMAC et l’UEMOA ont a généré une hausse significative des échanges entre les pays
membres, même si cette hausse est due, au départ, à des effets de détour d’échanges. Dans les deux
accords de la zone franc CFA, les unions monétaires ont largement renforcé l’effet positif des accords
commerciaux préférentiels sur le commerce intrarégional, tout en amortissant les effets de détour des
échanges. Daniel Gbetnkomk et Désiré Avom (2005) ont utilisé un modèle de gravité pour estimer les
déterminants du commerce intra-UEMOA, en mettant l’accent sur l’impact des réformes économiques
des années 1980 et 1990. Le modèle est appliqué pour les périodes 1990-1994 et 1996-2000, sur un
échantillon de 25 États exportateurs et 31 États partenaires. Ils optent pour une technique d’estimation
non linéaire telle que le Tobit, qui reconnait explicitement l’existence des valeurs nulles de la variable
dépendante et les traite comme les flux des échanges non enregistrés tout en normalisant la
distribution du terme d’erreur (lorsque la proportion des observations nulles est élevée, l’utilisation des
MCO conduit à des résultats biaisés). Les résultats indiquent que l’intégration régionale aurait permis
d'augmenter substantiellement les échanges entre les États membres dans l’UEMOA, à la suite des
réformes économiques. Leurs résultats montrent également l’existence de potentialités commerciales
importantes entre les économies de la sous-région. Toutefois, si l’estimation à partir d’un Tobit ne
pose pas de problème, la mesure de la performance du modèle ne fait pas l’objet d’un consensus.
Agbodji (2007) examine les impacts isolés de l’union monétaire et l’union économique sur les
échanges intra-UEMOA, en présence d’échanges transfrontaliers non enregistrés. Il utilise un modèle
de gravité dynamique amélioré qui comporte une variable indicatrice des incitations à la fraude dans
les échanges transfrontaliers. Pour prendre en compte le caractère dynamique des échanges, la nonstationnarité et l’endogénéité de certaines variables, l’auteur applique la méthode des moments
généralisés (GMM) proposé par Arellano et Bond (1991). Sur l’ensemble de la période 1981–2000,
l’étude a montré que l’appartenance à la zone monétaire commune et la mise en œuvre des réformes
économiques ont eu des effets significatifs en termes de détour des importations et des exportations.
Cependant, les distorsions économiques, considérées comme des incitations aux échanges
commerciaux frauduleux, ont significativement réduit les échanges commerciaux bilatéraux formels
au sein l’UEMOA. Ainsi, l'effet de création d’échanges ne s’est pas révélé significatif sur la période
1981-2000. Aligui, Legros et Koch (2012) analysent les flux commerciaux des pays de l’Union
économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) en tenant compte de l’autocorrélation spatiale. Ils
8
estiment donc une équation de gravité augmentée en utilisant des techniques d’économétrie spatiale.
Cette méthode d’estimation permet de contrôler l’effet frontière relatif à la zone UEMOA. Par ailleurs
le coefficient relatif à l’autocorrélation spatiale révèle une concurrence entre les pays, qui est de nature
à réduire le volume des échanges commerciaux entre les différents partenaires. Enfin, Carrère (2013)
étudie les performances en matière de commerce obtenues jusqu’alors au sein de l’Union économique
et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et de la Communauté économique et monétaire d’Afrique
centrale (CEMAC) sur la période 1995-2010. Tout d’abord, en décomposant les mesures de
diversification des exportations, elle met en évidence deux dynamiques : il existe dans les deux unions
une diversification très claire à la marge extensive, c’est-à-dire via l’exportation de nouveaux produits,
les pays des deux unions présentent un panier d’exportations intra régionales beaucoup plus diversifié
qu’avec le reste du monde. Puis, à l’aide d’un modèle de gravité en panel, elle aboutit à trois
principales conclusions sur les flux de commerce échangés : en moyenne, l’UEMOA et la CEMAC
ont engendré du détournement de commerce, un supplément de commerce intrarégional significatif
apparaissant dans le cas de l’UEMOA, mais pas dans celui de la CEMAC ; la stabilité des taux de
change conférée par le partage d’une monnaie unique a permis aux pays de chaque union d’améliorer
le commerce intrarégional tout en limitant le phénomène de détournement ; il existe une grande
hétérogénéité des gains associés à l’intégration régionale au sein de chaque union. Les pays qui étaient
relativement concentrés dans leur structure d’exportation lors de la mise en place des accords subissent
un fort détournement de commerce. Mais, les pays les plus diversifiés ont bénéficié d’une
augmentation substantielle de leurs exportations de biens industriels vers leurs partenaires, sans subir
de détournement de commerce. Les secteurs peuvent donc jouer un rôle important dans l'analyse des
effets des accords régionaux. Nous analysons ces effets en utilisant un cadre théorique différent et des
techniques d'estimation différentes, sur une période d'étude plus récente.
4. Méthodologie
Nous proposons une double démarche méthodologique qui permet de vérifier nos hypothèses. Il s’agit
d'une démarche descriptive et d'une démarche économétrique.
4.1. Méthode statistique
Cette section s’intéressera à la condition de viabilité u marché commun de l’UEMOA. Un des
arguments mis en avant par Meade (1955) pour garantir l’efficacité d’un ACR en termes de création
d’échanges est que les économies des pays membres soient concurrentes avant la mise en œuvre de
l’union et potentiellement complémentaires après. Pour vérifier cette condition théorique, une
approche statistique basée sur le calcul d’indices de complémentarité et concurrence de la structure des
échanges bilatéraux est souvent adoptée. Ils permettent de donner un premier aperçu ou une vision
synthétique du potentiel supplémentaire d’intégration, en comparant la structure des importations d’un
partenaire avec la structure des exportations d’un autre partenaire. En générale, ces indices sont
9
calculés au niveau agrégé, ce qui ne permet pas d’identifier les secteurs qui offrent un potentiel
d’échange à court terme et ceux qui devraient faire l’objet d’efforts particuliers pour garantir la
condition de complémentarité à long terme. Dans le cadre spécifique de notre étude, nous comparons
la structure sectorielle des importations d’un pays de l’UEMOA avec la structure sectorielle des
exportations d’un autre pays membre, en 1995 et 2012, mais également leur profil de spécialisation
toujours au niveau sectoriel. Cette section va donc présenter un état des lieux de la complémentarité
globale et sectorielle des structures des échanges des pays de la zone en 1995 et en 2012. Elle va nous
permettre d'observer la capacité des pays membres à s'ajuster aux conditions de complémentarité et de
concurrence et les avantages liés à leur réalisation. Elle devrait aussi fournir une base analytique pour
des discussions sur les moyens d’approfondir les relations commerciales entre les pays membres. Ce
qui nous permettra d’identifier les secteurs qui présentent un potentiel de création et de détour
d’échanges afin de mieux apprécier l’adéquation offre demande de la structure des échanges bilatéraux
au sein du marché commun (Cadot et al., 2007). Lahcen (2007) explique qu’il y a globalement une
relation étroite entre l’indice de complémentarité et le taux de commerce intrarégional. Ainsi, les
résultats de cette analyse statistique pourraient constituer un témoin pour interpréter efficacement les
résultats économétriques. Les indices de complémentarité et de concurrence utilisés dans l’étude sont
décrits dans les paragraphes ci-dessous.
4.1.1.
Indice de complémentarité
L’indice de complémentarité mesure le degré de différenciation des structures d’importation et
d’exportation des pays d’une zone régionale donnée. Il est calculé par la somme des valeurs absolues
de la différence entre la part des importations et la part des exportations des produits des pays étudiés
le tout divisé par deux :
Se j mk  1 
E
ij
 M ik
i
2
(1)
Avec





Sejmk : désigne l’indice de complémentarité commerciale entre l’exportateur j et l’importateur
k
j : exportateur (pays ou groupe de pays)
k : importateur (pays ou groupe de pays)
Eij : la part des produits i des exportations totales du pays j vers le monde
Mik : la part des produits i des importations totales du pays k en provenance du monde
La valeur de l’indice varie entre 0 et 1. Plus cet indice est élevé, plus les structures commerciales des
pays correspondants sont complémentaires et plus important est le potentiel de commerce entre eux.
10
L’indice de complémentarité est complété par un indice de corrélation du commerce souvent utilisé
pour mesurer la similitude des indices de spécialisation entre les pays c’est-à-dire le degré de
concurrence des structures sur le marché mondial.
4.1.2.
Degré de concurrence
Le degré de concurrence des structures d’échange sur le marché mondial peut se mesurer à partir de
l’indice de corrélation, calculé à partir de la formule suivante :
 TSI
n
TCI jk 
i 1
 TSI
n
i 1



ji

 TSI ji  TSI ki  TSI k

 TSI ji  TSI ki  TSI ki 
2
ji
i
(2)
2
TCIjk : est l’indice de corrélation du commerce d’un pays j et d’un pays k pour une période
donnée
TSIji : est l’indice de spécialisation du commerce du pays j et du produit i
TSIki : est l’indice de spécialisation du commerce du pays k et du produit i
Ce coefficient établit la corrélation des indices de spécialisation de deux pays étudiés et prend des
valeurs entre -1 et 1. Un indice positif signifie que les pays sont en concurrence sur le marché mondial,
car ils sont exportateurs nets des mêmes produits. Mais, un indice négatif suggère que ces pays ne sont
pas spécialisés dans la production ou la consommation des mêmes produits et sont donc des
partenaires commerciaux naturels.
Les données utilisées sont disponibles dans la base de données COMTRADE, extraites à partir du site
du World Integrated Trade Solutions (WITS). Chaque analyse sectorielle comprend donc une brève
description de la structure des échanges bilatéraux et un examen des complémentarités ou
concurrences.
4.2. Méthode économétrique
Nous présenterons successivement le modèle de base, sa spécification et la méthode d’estimation,
l’échantillon et la période d’étude, les variables et les sources des données.
4.2.1.
Le modèle de gravité avec firmes hétérogènes
La démarche économétrique repose sur l’estimation d’une équation de gravité de commerce bilatérale
pour les pays de l’UEMOA. La plupart des études antérieures utilisent des modèles de gravités avec
firmes homogènes, basés sur les théories traditionnelles ou les développements de la nouvelle théorie
du commerce. Les plus fréquemment utilisés sont ceux de type Anderson et van Wincoop (2003). Le
modèle utilisé est celui de Chaney (2008) qui dérive une équation de gravité de la « nouvelle nouvelle
théorie du commerce » impulsé par Melitz (2003). D’après ce modèle les exportations de i vers j sont :
11
  ij
X ij   


L
 j
Li L j

 


1

  1 
  fij

(3)
Où Li et Lj sont les tailles des pays i et j, τij and fij sont respectivement les coûts variables (coût de
transport souvent mesuré par la distance) et les coûts fixes (par exemple mise aux normes, recherche
de distributeurs, publicité, traduction des notices, apprentissage des langues étrangères…) et θj est
l’indice agrégé d’éloignement (remoteness) du pays j par rapport au reste du monde. Le paramètre γ
désigne l’élasticité des flux d’échange par rapport aux barrières commerciales variables et σ est
l’élasticité de substitution. Ce modèle démontre le rôle de l’hétérogénéité des firmes dans le commerce
international et montre que l’intégration économique a des effets différents entre les industries (Crozet
et Koeing, 2010). D'une part, il montre que la baisse des coûts commerciaux a des répercussions plus
grandes sur échanges dans les industries moins hétérogènes. D'autres parts, la décomposition de l'effet
de l'intégration du commerce varie en fonction du degré de différenciation des produits. Dans les
industries où les produits sont hautement différenciés, l'intégration commerciale permet l'entrée d'un
grand nombre de firmes, chacune ayant une part du marché relativement faible : le commerce se
développe principalement par la marge extensive. Au contraire, dans les industries où les produits sont
homogènes, la baisse des coûts commerciaux agit à travers la marge intensive, car les firmes moins
efficaces auront plus de difficultés à entrer sur les marchés d'exportation. Par conséquent, seulement
un petit nombre de firmes vont devenir de nouveaux exportateurs.
4.2.2.
Spécification du modèle et méthode d’estimation
L’équation théorique peut être estimée (multiplicative peut être transformée sous forme linéaire par
l’opérateur du logarithme) par l’équation empirique suivante :
 

logX ij  log   log Li  log L j  log L   log  ij   log  j  
 1 log fij   ij
  1 
(4)
Cette équation va être estimée à partir de données sur les flux globaux, mais également, des données
sur des flux sectoriels (agricole, pétrole et mine et manufacturé). L’intérêt de ces spécifications est de
saisir les effets sectoriels de création d’échanges. Par ailleurs, l’équation (4) à l'avantage de mettre en
évidence les marges d’expansion des flux d’échanges, en occurrence la marge extensive et la marge
intensive. En effet, Crozet et Koeing (2010) ont démontré que le paramètre – γ est l’élasticité coûtcommerce des échanges totaux, - (σ-1) est l’élasticité coût-commerce de la marge intensive et -[γ- (σ1)] désigne l’élasticité coût-commerce de la marge extensive. Par ailleurs, l'équation (4) suppose que
les firmes sont hétérogènes. Ainsi, lorsque les barrières aux échanges varient, le nombre
d’exportateurs change, par un processus endogène de sélection, entrainant ainsi un d'ajustement
supplémentaire à la marge extensive. Contrairement aux autres équations de gravité, l'équation (4)
offre un fondement à la prise en compte des flux nuls d'échanges dans les estimations.
12
Les traitements économétriquement des données vont se faire à partir des développements
économétriques les plus récents qui prennent en compte cette spécificité : Poisson Pseudo Maximum
de Vraisemblance (PPML) et la sélection de Heckman. Ces méthodes d'estimation non linéaires
contrôlent mieux le problème de zéros flux d’échange et permet une estimation non biaisée des
coefficients. En effet, la transformation logarithmique très répandue dans les études empiriques sur le
commerce exige des conditions très spécifiques à respecter pour avoir des estimations sans biais et
efficace. Ce qui constitue un avantage dans l’estimation des équations à partir des données sur les flux
sectoriels plus désagrégés qui contiendront un nombre important de zéro. Par ailleurs, afin de garantir
la robustesse de nos résultats, nous comparerons les résultats obtenus à ceux des méthodes non
linéaires.
4.3. Échantillon, variables, sources des données et méthode d’estimation
4.3.1.
Échantillon
Les estimations portent sur un panel constitué d’un échantillon de pays de développement similaires :
15 pays exportateurs d’Afrique de l’Ouest dont les huit (8) pays de l’UEMOA et 31 pays importateurs
d’Afrique subsaharienne et d’ailleurs. La période d’étude (1995-2012) correspond à des dates
importantes dans la mise en œuvre du marché commun de l’UEMOA. Ce qui permet de tester les
effets additionnels des réformes préférentielles adoptés depuis 1995 jusqu’en 2012 en passant par la
date d’entrée en vigueur de l’union en janvier 2000.
4.3.2.
Variables, signes attendus et sources des données
Les détails des variables (définition, signe attendu et sources) sont contenus dans le tableau 2 ci-après.
Tableau 2 : variables, signe attendu et sources
Variables
Xglogalij, Xagroij, Xpetroij, Xmanuij: les flux
d’importation globaux et sectoriels de j
provenant de i, en millions de dollars US.
gdpi, gdpj : le produit intérieur brut de i et de j
, en millions de dollars US.
distij : la distance bilatérale qui sépare i et j.
landlockij : prend la valeur 2 si i et j sont
enclavés, 1 if un seul l’est et 0 aucun n’est
enclave
contij: prend la valeur 1 si i et j sont contiguës
et 0 sinon.
Comlang_offij : prend la valeur 1 si i et j on
tune langue commune et 0 sinon
comcolij : prend la valeur 1 si i et j ont un
colonisateur commun et 0 sinon
uemoaij: prend la valeur 1 si i et j sont
membres de l’UEMOA et 0 sinon.
Remotej: indice remoteness mesurant les
Signs
+
-
sources
Données de la UNCTADStat SITC,
Révision 3, obtenues à partir des calculs du
secrétariat de la CNUCED.
Base de données World Development
Indicator (WDI) 2013 de la World Bank
Base de données «Dist.xls» du Centre
d’Étude prospective et d’Information
internationale (CEPII).
+
+
+
Constructed by informations about regional
trade agreement notifying at WTO.
Données calculées à partir du PIB et de la
13
résistances multilatérales du j par rapport au
reste du monde.
Complij: indice de complémentarité des
structures d’exportation variant entre 0 et 1
distance bilatérale décrits ci-dessus.
+
Données de la UNCTADStat SITC,
Révision 3, obtenues à partir des calculs du
secrétariat de la CNUCED.
5. Résultats attendus
Les résultats de l'étude mettent en évidence l'impact du marché commun de l’UEMOA sur les
échanges intra-UEMOA entre 1995-2012. Ils examineront les conditions de la création d’échanges au
sein de l’UEMOA, tout en mettant en évidence l’inadéquation entre les structures d’offre et de
demande d’échanges. Nous
montrerons qu'il existe des effets globaux et sectoriels de création
d'échanges dus au marché commun. Enfin, nous vérifierons que la création d’échanges est
significativement plus importante pour le secteur manufacturier que pour les deux autres secteurs
définis par l’étude.
14
6. Références bibliographiques
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l’UEMOA. Revue Africaine de l’Intégration, vol.1, n ° 1, pp.161-188.
2) Cadot O., C. Djiofack et J. de Melo (2007) Préférences commerciales et règles d’origine :
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l’Ouest
et
Centrale.
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d’économie du développement, vol. 27
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15
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