L'Alsace, Région VENDREDI 18 JUILLET 2014 28 Énergie Trois turbines pour le canal du Rhône au Rhin fabriquées par NSC à Guebwiller Innovation chez Schlumberger : une turbine hydroélectrique à vitesse lente a été conçue pour les canaux et rivières à faible débit. Entièrement fabriquées en Alsace, les trois premières sont en cours d’installation entre Battenheim et Munchhouse. C’est une grande vis d’Archimède, de 2,50 m de diamètre, entièrement en inox. Couplée à un générateur électrique, elle va produire quelque 430 000 kWh par an. Le prototype fonctionne déjà sur la Lauch, à Guebwiller, à l’arrière des ateliers de Schlumberger. La première unité de présérie a été posée début juillet à l’écluse 44 du canal du Rhône-au-Rhin déclassé, à Battenheim. Deux autres seront installées d’ici la fin du mois aux écluses 45 et 46, vers Munchhouse. « C’est une installation de très haut niveau technique », souligne Étienne Leroi, PDG de NSC Environnement et directeur général de N. Schlumberger. Filiale du groupe NSC, qui depuis 200 ans construit des biens d’équipements pour l’industrie textile et l’emballage, NSC Environnement est la dernière société créée par le groupe pour développer les énergies renouvelables, et en particulier les installations hydroélectriques. « Nous sommes partis de rien il y a six ans, souligne Étienne Leroi. Nous avons mené nous-mêmes tous les travaux de re- Les microcentrales : un choix du conseil général du Haut-Rhin Une turbine en cours de montage dans l’atelier de NSC Environnement à Guebwiller. Il faudra une journée pour la poser sur une chute du vieux canal. Photos Thierry Gachon cherche et développement, et construisons l’installation dans nos ateliers de Guebwiller. » Le savoirfaire séculaire de l’entreprise en mécanique, soudure et automatisme a bien aidé l’équipe de dix personnes qui travaillent à ce projet, pour lequel un brevet a été déposé. Entreprises alsaciennes Les entreprises alsaciennes ont été privilégiées pour la construction : l’auge et la vanne d’alimentation ont été fabriquées par Concental à Carspach, l’axe principal par Hameca à Richwiller, le multiplicateur par SEW à Haguenau, les courroies et les transmis- Nucléaire Coupures de courant après la fermeture de Fessenheim ? sions par Binder Magnetic à Oberhausbergen, se félicite Étienne Leroi, qui veut développer l’emploi local. Il espère obtenir une dizaine de commandes par an : « L’investissement ne sera rentabilisé qu’après 50 turbines vendues. De nombreux propriétaires de moulins, abandonnés après la guerre, sont intéressés. Pour le propriétaire, le retour sur investissement est de 10 ans sur un canal, de 15 sur une rivière aux débits plus irréguliers. » Les trois premières turbines ont été commandées par le conseil général du Haut-Rhin, qui « nous a donné l’occasion de tester notre filière de microcentrale ». Elles tourneront 345 jours par an. Avec un débit moyen de 2,80 m3/se- « Des coupures de courant seront inévitables, si aucune production significative en Alsace ne vient remplacer la centrale nucléaire de Fessenheim », dénonce le président du conseil général du Haut-Rhin. Dans un communiqué de presse, Charles Buttner qualifie de « duperie » « les démonstrations théoriques déconnectées du réel » du directeur régional de RTE (Réseau de transport d’électricité) qui a assuré que l’arrêt de la centrale de Fessenheim, programmé pour fin 2016 par le président François Hollande, ne poserait aucun problème d’alimentation électrique de la région (L’Alsace du 10 juillet). Une « opération de diversion » Pour Charles Buttner, la présentation faite par RTE est une « opération de diversion » reposant sur des « hypothèses totalement irréalistes, comme la fourniture massive en hiver venant de la Suisse, alors que c’est l’inverse qui se produira ». De même, les centrales hydroélectriques d’EDF ne fourniront que 350 MW (mégawatts) en hiver, quand le Rhin est à son plus bas niveau, alors qu’en cette saison la consommation atteint un pic de 2 900 MW. Selon ce communiqué, le calcul de RTE est comparable à celui que pourrait faire un maire qui prétendrait qu’il n’y a aucun problème d’eau potable durant l’été dans sa commune car il a mis en place des tuyaux suffisamment grands pour approvisionner sa population, alors même que la source tombe à sec et que le besoin en eau augmente… Le président du conseil général demande que la transition énergétique s’accompagne du « maintien d’un service public électrique de qualité sur notre territoire, nécessitant l’installation d’une unité de production alternative au nucléaire, d’au moins 800 MW, de préférence sur le site de Fessenheim, et de type turbine à gaz ». Élisabeth Schulthess piste des petites microcentrales n’est pas à négliger : « Le HautRhin compte quelque 300 ouvrages. On peut d’ores et déjà équiper une vingtaine de chutes, notamment sur le canal du Rhône-auRhin déclassé. Propriété du Département du Haut-Rhin, il a été remis en eau pour constituer la trame verte et bleue. Aujourd’hui, nous valorisons ses chutes en énergie propre. » Considérées comme rentables après une dizaine d’années, ces microcentrales ne nécessitent pas beaucoup d’entretien et contribueront au développement des énergies renouvelables en Alsace. « C’est une des 70 actions de Planète 68, le Plan local d’action pour les nouvelles énergies et la transition économique, adopté le 13 mars par le conseil général, afin de favoriser le développement durable local et l’économie circulaire. » La première microcentrale Schlumberger a été installée début juillet à l’écluse 44 du canal du Rhône-au-Rhin, à Battenheim. Concours Six projets alsaciens de technologies innovantes primés Le 16e concours national d’aide à la création d’entreprises de technologies innovantes, rebaptisé i-LAB, a récompensé six Alsaciens sur 221 lauréats. Pour éviter des coupures de courant en Alsace après la fermeture de Fessenheim, il faudrait construire une centrale à gaz sur ce site, estime Charles Buttner. Archives Darek Szuster conde, elles valoriseront des chutes de 2,50 m et permettront de produire l’équivalent de la consommation électrique de 1 100 personnes. Soit une économie de 288,5 tonnes équivalent pétrole ou de 466,1 tonnes de charbon, et de 877 tonnes de CO2. Il était prévu d’injecter les premiers kWh dans le réseau fin juillet. Mais le conseil général du Haut-Rhin, maître d’ouvrage, n’accepte pas les propositions d’ERDF pour le raccordement : « Bien trop cher », dit Charles Buttner, président du conseil général. D’âpres négociations sont en cours. Schlumberger a remporté l’appel d’offres international lancé par le conseil général du Haut-Rhin pour l’installation de ces trois turbines. « Jusqu’à présent, c’étaient les fabricants hollandais et allemands qui détenaient le marché des microcentrales. Schlumberger a remporté notre consultation d’entre-prises lancée en 2013 : ils proposaient, pour un prix équivalent à la turbine hollandaise, du tout inox, bien plus durable », souligne Georges Walter, directeur général des services du conseil général 68. Montant total pour trois turbines : 665 300 € HT. Puissance installée : 55 kW. Peu de chose par rapport aux deux fois 900 MW de la centrale nucléaire de Fessenheim ou aux 100 à 183 MW de chacune des dix grandes centrales hydroélectriques rhénanes. Mais, selon Georges Walter, la Ce concours national, porté par le ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, doit permettre d’encourager la création d’entreprises innovantes et créer « des champions industriels de demain ». En effet, selon le ministère, la France n’a créé aucun nouveau leader industriel mondial au cours des 25 dernières années, « alors que les États-Unis en ont fait émerger 23 ». Les projets, quel que soit leur stade d’avancement, doivent prévoir la création d’une entreprise, installée sur le territoire français, et s’appuyant sur une technologie innovante. Ils peuvent être présentés en deux catégories : les projets « en émergence » qui nécessitent une phase de maturation et de validation technique, économique et juridique, et les projets « création-développement », se situant juste en amont de la création de l’entreprise, et devant avoir établi la « preuve du concept ». gion à Strasbourg, Nicolas Garreau de Loubresse, postdoctorant de l’IGBMC (Illkirch) pour RiboStruct, qui a développé des antibiotiques de nouvelle génération basés sur la structure du ribosome ; Oleksandr Koniev pour Syndivia, qui a pour but d’amener sur le marché les nouvelles technologies de bioconjugaison ; Rémy Perla, qui a fondé un outil pédagogique innovant pour donner goût à la lecture et à l’écriture aux enfants via sa société strasbourgeoise Rêve aux Lettres ; Gilles Humez et l’entreprise Contaact, qui ont développé une application destinée aux personnes rencontrant des troubles cognitifs ; et Jonathan Wertel et l’entreprise 3D Eau, un bureau d’ingénieur-conseil pour l’étude d’ouvrages hydrauliques basée sur la modélisation 3D. Ces lauréats ont reçu une subvention allant jusqu’à 45 000 €. Dans la catégorie « création-développement », il y a un seul lauréat alsacien pour ce cru 2014 : FiberMetrix de Till Sohier, qui a mis au point un dispositif de dosimétrie de rayonnement ionisant. Les subventions pouvaient aller jusqu’à 450 000 €. Un prix pour les étudiants Pour la première année, le prix Pépite a récompensé des étudiants et jeunes diplômés ayant créé leur entreprise. Quatre projets alsaciens ont été choisis : SesaMm, un outil web d’ingénierie financière développé par des étudiants de l’Insa, Contaact (cité plus haut), Synovo, une future société portée par des diplômés de SupInfo pour développer un outil d’optimisation des flottes de véhicules, et Esay Sunday de Tho- mas Tirtiaux, de l’Insa, qui a créé une interface web gérant et organisant des livraisons de pain chez les particuliers. Parmi ces lauréats, la Région Alsace a soutenu, avec des prix allant de 5 000 à 10 000 €, 3D Eau, Syndivia et Contaact. Selon les participants et les organisateurs, ce concours est possible grâce à un écosystème favorable où travaillent ensemble, entre autres, la Région, l’incubateur d’entreprises Semia, la Banque publique d’investissement Alsace, l’Université de Strasbourg, les grandes écoles, Alsace Innovation, etc. Selon Séverine Sigrist, ancienne lauréate et présidente fondatrice de Defymed, ainsi que nouvelle présidente d’Alsace Biovalley, « tout est possible. Il ne faut pas rester seul, et profiter des réseaux existants ! » Fabienne Delaunoy Le goût de la lecture Dans cette première catégorie ont été récompensés, lors d’une cérémonie à la Maison de la Ré- Cette année, l’Alsace est la quatrième région dans les résultats du concours. Photo Jean-Luc Stadler/Région Alsace
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