204 Analyse 204 - E SPACES VECTORIELS NORMÉS DE DIMENSION FINIE , NORMES USUELLES , ÉQUIVALENCE DES NORMES . Prérequis : Espaces vectoriels, topologie (application lipschitzienne, continuité et compacité théorème de BorelLebesgue, théorème de Tychonoff). Notations : E K-e.v de dimension finie n , K = R ou C I) Normes, espaces vectoriels normés Déf 1 : (Norme, e.v.n) Une norme sur E est une application N : E → R+ telle que : 1. ∀x ∈ E, N(x) = 0 ⇒ x = 0 2. ∀λ ∈ K, ∀x ∈ E, N(λx) = |λ|N(x) 3. ∀(x, y) ∈ E2 , N(x + y) ≤ N(x) + N(y) E, muni d’une telle norme est appelé espace vectoriel normé (e.v.n). ex 1 : Ï | · | sur R ou C est une norme p Ï || · ||2 : (x, y) 7−→ x 2 + y 2 est la norme associée au produit scalaire de R2 Prop 1 : (Inégalité triangulaire bis) Soit N une norme sur E. ∀(x, y) ∈ E2 , |N(x) − N(y)| ≤ N(x − y). Preuve : N(x) = N(x − y + y) ≤ N(x − y) + N(y) d’où N(x) − N(y) ≤ N(x − y). Par symétrie, on a encore N(y) − N(x) ≤ N(y − x) = | − 1|N(x − y) d’où la formule. Déf 2 : (Norme produit) Soit p ∈ N∗ et (Ei , Ni )1≤i ≤p des e.v.n. L’application N définie sur E1 × · · · × En par : ∀(x i )1≤i ≤p ∈ E1 × · · · × En , N((x i )) = max1≤i ≤p Ni (x i ) est une norme appelée la norme produit. Prop 2 : (et définition) Soit N une norme sur E. L’application d N : E2 → R+ définie par ∀(x, y) ∈ E2 , d N (x, y) = N(x − y) est une distance sur E appelée distance induite par la norme N. Rem 1 : Un espace vectoriel normé est donc un cas particulier d’espace métrique, et on peut donc parler de la topologie induite par la norme. II ) Normes usuelles, équivalence Déf 3 : (Normes p , norme infini) Dans le cas de E = Kn , on pose pour tout p ∈ [1, +∞[ et x = (x i ) ∈ E, ||x||p = Prop 3 : || · ||∞ et || · ||p pour p ≥ 1 sont des normes sur E. Exo 1 : Ï Montrer que ∀p ∈]0, 1[, || · ||p n’est pas une norme sur Kn . Ï Montrer que pour x ∈ E, ||x||p −→ ||x||∞ p→∞ 1 ¡Pn i =1 |x i | p ¢1 p et ||x||∞ = max1≤i ≤n |x i |. 204 Analyse Exo 2 : Montrer que la boule unité associée à une norme est toujours convexe. p = 1/2 p =1 p = 3/2 p =2 p =4 p =∞ Déf 4 : (Normes équivalentes) Soit N1 et N2 deux normes sur E. Elles sont équivalentes si il existe (a, b) ∈ R∗+ tel que : ∀x ∈ E, aN1 (x) ≤ N2 (x) ≤ bN1 (x). Prop 4 : Si deux normes sont équivalentes, alors elles définissent la même topologie. Rem 2 : Pour paraphraser, les ouverts pour une norme sont aussi ouverts pour l’autre, idem pour les fermés, les suites de Cauchy, les bornés etc. Démonstration en développement Thm 1 : (Équivalence des normes) Dans un espace vectoriel de dimension finie, toutes les normes sont équivalentes. Exo 3 : Montrer que || · ||∞ , || · ||1 et || · ||2 sont équivalentes : ∀x ∈ Kn , 1. ||x||∞ ≤ ||x||1 ≤ n||x||∞ p 2. ||x||∞ ≤ ||x||2 ≤ n||x||∞ p 3. ||x||2 ≤ ||x||1 ≤ n||x||2 Thm 2 : (Borel-Lebesgue généralisé) Soit (E, || · ||) un espace vectoriel normé de dimension finie. Une partie X de E est compacte si et seulement si elle est fermée et bornée. Preuve : ⇒ Dans un espace métrique, tout sous-espace compact est fermé borné. ⇐ On choisit un isomorphisme u de Kn sur E. Alors N◦u est une norme sur E équivalente à la norme ||·||∞ . Les fermés bornés de N ◦ u et || · ||∞ sont donc les mêmes. Mais || · ||∞ définit la topologie produit et donc ses fermés bornés sont compacts. On revient alors à E en utilisant l’isométrie bijective u . Prop 5 : Un espace vectoriel normé de dimension finie est complet. Preuve : Une suite de Cauchy de E est bornée, elle est donc contenue dans une certaine boule fermée de E. Mais la boule considérée est compacte d’après le théorème précédent et donc la suite de Cauchy converge dans E. III ) Normes subordonnées Prop 6 : (Application linéaire continue) Soit u : (E, || · ||E ) → (F, || · ||F ) une application linéaire entre espaces vectoriels normés. 1. u est continue si et seulement si il existe M ≥ 0 tel que ∀x ∈ E, ||u(x)||F ≤ M||x||E 2. Si dim E < ∞, c’est toujours le cas. Preuve : 1. ⇐ ||u(x) − u(y)||F = ||u(x − y)||F ≤ M||x − y||E . u est M-lipschitzienne et donc continue. 2 204 Analyse ⇒ Si u est continue, elle l’est en 0. Pour ² = 1, ∃δ > 0/∀x ∈ E, ||x||E < δ ⇒ ||u(x)||F < 1, ce qui se traduit par u (BE (0, δ)) ⊂ BF (0, 1). x ∈ BE (0, δ) et donc par linéarité Soit x 6= 0, δ ||x|| E 1 ||u(x)||F ≤ δ ||x||E . δ ||x||E u(x) ∈ BF (0, 1). On en déduit que δ ||x||E ||u(x)||F ≤ 1 et donc Si x = 0, on a bien l’inégalité en prenant M = δ1 . 2. Si dim E = n , il existe B = (e i )1≤i ≤n base de E et donc pour tout x ∈ E, ¡P ¢ P P P P ||u nk=1 x i e i ||F = || nk=1 x i u(e i )||F ≤ nk=1 |x i |||u(ei )||F ≤ ||x||∞ nk=1 ||u(ei )||F . En posant k = nk=1 ||u(ei )||F , u est bien k -lipschitzienne, et donc continue. Déf 5 : (Norme subordonnée) Soit (E, || · ||E ) et (F, || · ||F ) deux espaces vectoriels normés. On appelle norme subordonnée aux normes de E et F ||u(x)||F l’application qui à tout u ∈ L (E, F) associe ||u||E,F = supx6=0 . ||x||E Prop 7 : ||u(x)||F ||u(x)||F = supx=1 . ||x||E ||x||E 2. Si u ∈ L (E, F) et v ∈ L (F, G), ||v ◦ u||E,G ≤ ||u||E,F ||v||F,G 1. ∀u ∈ L (E, F), ||u||E,F = supx≤1 Exo 4 : 1. Montrer que si A est hermitienne (t A = A), ||A||2,2 = ρ(A) p 2. Montrer qu’en général ||A||2,2 = ρ(A∗ A). 3 204 Analyse Développement : équivalence des normes en dimension finie Théorème 1 : Dans un espace vectoriel de dimension finie, toutes les normes sont équivalentes. Plan de la démonstration : 1. On montre cette propriété dans Kn (point clé : compacité de la sphère unité - théorème de Borel-Lebesgue) 2. On montre que la propriété est encore valable dans E en exhibant un isomorphisme entre E et Kn (par exemple en utilisant une base). 1. On munit Kn de la norme || · ||∞ . On va montrer que toute norme N est équivalente à || · ||∞ , et par transitivité on obtiendra l’équivalence de toutes les normes. (a) Soit B = (e i )1≤i ≤n base de Kn et soit x ∈ K n . Ã N(x) = N n X i =1 En posant b = Pn i =1 N(e i ), ! xi e i ≤ n X |x i |N(e i ) ≤ max |x i | × 1≤i ≤n i =1 n X N(e i ) = ||x||∞ × i =1 n X N(e i ) i =1 on a donc ∀x ∈ K n , N(x) ≤ b||x||∞ . (b) On a de plus pour tout (x, y) ∈ (Kn )2 , |N(x)−N(y)| ≤ N(x−y) ≤ b||x−y||∞ . On en déduit donc que N : (Kn , ||·||∞ ) → (R, | · |) est b -lipschitzienne et donc continue pour || · ||∞ . Notons S 1 la sphère unité de (Kn , || · ||∞ ). C’est un compact de (K n , || · ||∞ ) car : Ï elle est contenue dans la boule unité de la norme infinie qui est [−1, 1]n si K = R ou [−1, 1]2n si K = C Ï d’après le théorème de Borel-Lebesgue, [−1, 1] est un compact de R muni de | · |, Ï un produit cartésien de compacts est un compact d’après le théorème de Tychonoff. N S1 est continue et atteint donc son minimum en un certain x 0 6= 0. Puisque N est une norme, N(x 0 ) > 0. Notons alors a = N(x 0 ). µ ¶ x x Pour x 6= 0, ∈ S 1 et donc N ≥ a , ce qui se réécrit N(x) ≥ a||x||∞ . Et puisque cette dernière inégalité ||x||∞ ||x||∞ est toujours vraie pour x = 0, on a bien montré que ∀x ∈ Kn , N(x) ≥ a||x||∞ . 2. Soit E un e.v.n. de dimension finie n . On munit E d’une base, et on considère l’isomorphisme canonique u entre Kn et E. Soit N1 et N2 deux normes sur E. (a) Montrons que N1 ◦ u et N2 ◦ u sont des normes sur Kn : en notant N sans distinction, Ï ∀x ∈ Kn , N ◦ u(x) = 0 ⇔ u(x) = 0 ⇔ x = 0 Ï ∀λ ∈ K, ∀x ∈ Kn , N ◦ u(λx) = N(λu(x)) = |λ|N ◦ u(x) Ï ∀(x, y) ∈ (Kn )2 , N ◦ u(x + y) = N(u(x) + u(y)) ≤ N ◦ u(x) + N ◦ u(y). (b) N1 ◦ u et N2 ◦ u sont donc équivalentes, donc ∃(a, b) ∈ R∗+ , ∀x ∈ Kn , aN1 ◦ u(x) ≤ N2 ◦ u(x) ≤ bN1 ◦ u(x). Mais puisque u est un isomorphisme, cette propriété est encore vraie pour les antécédents, qui décrivent E en entier, ce qui permet donc de conclure : ∀x ∈ E, aN1 (x) ≤ N2 (x) ≤ bN1 (x) . Sources : 1. Tout-en-un mathématiques MP/MP*, collection E. Ramis, Dunod 2. Analyse, X. Gourdon, Ellipses 3. Petit guide du calcul différentiel à l’usage de la licence et de l’agrégation, F. Rouvière, Cassini 4. Agrégation de Mathématiques cours d’analyse, A. Pommelet, Ellipses 5. Analyse pour l’agrégation, Queffélec-Zuily, Dunod 6. Analyse I, L. Schwartz, Hermann 4
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