Association de Biologie Praticienne 70 avenue des Gobelins 75013 PARIS - Tél : 01 43 31 94 87 - Fax : 01 43 37 39 92 Email : [email protected] Enregistrée à la Préfecture de la Région de l’Ile de France, délégation à la formation professionnelle, sous le N°11750 397 375 SIRET : 321 609 489 00034 – NAF 9499Z Dr Véronique Vernet-Garnier [email protected] Dr Lucien Brasme [email protected] Anne-Marie Fihman Responsable scientifique Coordonnateur Expert(s) Consultant(s) chargé(s) de l’exploitation des résultats Bactériologie Clinique, confrontation N° 3/2014 Rapport final, 25/11/2014 Echantillon : BR4/14 (souche bactérienne sous forme de lyophilisat). - Ouvrir le flacon avec précaution pour éviter les aérosols bactériens. - Mettre en suspension dans 1 ml de bouillon stérile (cœur-cervelle ou trypticase-soja ou bouillon glucosé). - Déposer une petite goutte sur les différents milieux de culture choisis, sélectifs ou non sélectifs, en fonction de la nature du prélèvement. - Incuber 24 heures, voire 48 h ou plus. - La coloration de GRAM effectuée directement sur le lyophilisat peut être trompeuse et n'est pas conseillée. Cas clinique M. A 84 ans, diabétique présente un mal perforant plantaire en regard de l’articulation métatarso-phalangienne du 2è orteil évoluant depuis plus d’un an. Le chirurgien orthopédiste ayant posé le diagnostic d’ostéo-arthrite l’a pris au bloc pour résection arthroplastique de la MTP et vous a fait parvenir les 3 prélèvements : tissu plantaire, tendon fléchisseur et tête de M2 : les 3 prélèvements sont monomicrobiens avec la bactérie BR4, sans anaérobies associés. Il vous est demandé une identification précise de la bactérie ainsi que le rendu de l ’antibiogramme. Il sera tenu compte du choix des 10 ATB que vous allez rendre dans votre compte-rendu. D’autre part, indiquez : - les milieux de culture que vous allez ensemencer ainsi que les atmosphères utilisés ? - la nécessité ou non d’alerter le service pour mise en place de précautions contact ? - l’antibiothérapie à démarrer chez M. A, en absence de référent antibiotique au moment du rendu des résultats ? Nombre d’inscrits et nombre de réponses exploitées : 317 (295 réponses) Réponse attendue pour l’identification : Staphylococcus lugdunensis. Il était nécessaire de donner une identification d’espèce en raison de l’isolement en culture pure à partir de 3 échantillons distincts et du caractère plus pathogène de cette espèce par rapport aux autres staphylocoques à coagulase négative. Les autres réponses ne sont pas acceptables (catégorie C), soit parce que les participants se sont contentés de l’appellation « staphylocoque à coagulase négative » (manque de précision), soit parce que l’espèce citée est erronée. Voir le tableau I ci-dessous : Tableau I. Réponses exploitables pour la souche BR4/14 (n = 295). Réponse BR4/14 Staphylococcus lugdunensis Staphylocoque à coagulase négative Staphylococcus sp. Staphylococcus epidermidis Staphylococcus aureus Staphylococcus auricularis Staphylococcus warneri N 279 6 4 3 1 1 1 295 Le pourcentage de bonnes réponses est plutôt satisfaisant (94,6 %). % Catégorie 94,6% A 2,0% C 1,4% C 1,0% C 0,3% C 0,3% C 0,3% C 100,0% Les milieux utilisés sont résumés dans le tableau II ci-dessous. Tableau II. Milieux de culture utilisés pour l’isolement de la souche BR4/14. Milieux utilisés Gélose au sang Gélose chocolat Chapman Drigalski Bouillon d'enrichissement ou flacon d'hémoculture BCP bioMérieux ChromID SAID Gélose au sang ANC bioMérieux CPS ID 3 Sélectif SAMR (bioMérieux, Oxoid, ou BD) autres N 285 207 17 15 15 13 13 12 9 6 16 Le choix des milieux dépend bien entendu de la nature du prélèvement : nous sommes ici dans un contexte de mal perforant plantaire avec atteinte ostéo-articulaire nécessitant un geste chirurgical. Habituellement, les prélèvements doivent être réalisés avec soin et effectués par un médecin (ou chirurgien) habitué. Le laboratoire bénéficie dans le cas proposé ici de 3 prélèvements différenciés ; il faut utiliser en première intention des milieux non sélectifs comme la gélose au sang, la gélose chocolat, mais en raison du caractère souvent polymicrobien de ces échantillons, il est également recommandé d’utiliser des milieux sélectifs comme les géloses type Drigalski, BCP (entérobactéries). Il est également possible d’utiliser de manière détournée des géloses chromogènes « urinaires » type CPS ID 3 ou URI Select 4 qui ont l’avantage de permettre une reconnaissance rapide de certaines colonies. L’utilisation de milieux sélectifs pour l’isolement de Staphylococcus aureus méticillino-résistants bien qu’anecdotique parmi les participants (6, soit 2 %) présente également un intérêt pour une optimisation de l’antibiothérapie. La présence fréquente de bactéries anaérobies strictes justifie une incubation prolongée (au moins 5 jours) en atmosphère anaérobie. Par contre, l’utilisation de bouillons d’enrichissement dans un contexte de mal perforant plantaire est le plus souvent inutile en raison du caractère le plus souvent polymicrobien des cultures. Les systèmes utilisés pour l’identification de BR4/14 donnent des résultats globalement satisfaisants comme on peut le voir dans le tableau III ci-contre. Tableau III. Systèmes utilisés en première intention pour l’identification de la souche BR 4/14 (n = 295). NE = non évalué, effectif trop faible. Méthode d'identification principale BR4/14 bioMérieux Vitek 2 Spectrometrie de masse Bruker Maldi Biotyper bioMérieux ID32® STAPH bioMérieux API® STAPH Spectrometrie de masse bioMérieux Vitek MS Technique conventionnelle : tests unitaires, latex... bioMérieux RAPIDEC staph Siemens MicroScan® / WalkAway® BD Phoenix™ Spectrometrie de masse Andromas Dremel RapID™ System bioMérieux Vitek 1 non précisé N % réponses correctes % 175 59,3% 32 10,8% 24 8,1% 20 6,8% 15 5,1% 8 2,7% 6 2,0% 5 1,7% 3 1,0% 3 1,0% 2 0,7% 1 0,3% 0,3% 1 295 100,0% 99,4% 100,0% 100,0% 85,0% 100,0% NE NE NE NE NE NE NE NE Même si son caractère pathogène est prononcé, S. lugdunensis présente une sensibilité habituelle aux antibiotiques comme on peut l’observer pour la souche BR4/14 dans le tableau IV ci-dessous Tableau IV. Résultats attendus pour les catégories cliniques de la souche BR4/14. Les valeurs de concentrations et diamètres critiques sont celles préconisées par le communiqué 2014 du CA-SFM, sauf celles pour lesquelles il n’y a pas d’information disponible, dans ce cas, ce sont les valeurs 2013 qui sont indiquées. * : molécules ne devant pas figurer dans le compte rendu (marqueurs phénotypiques). Antibiotique Pénicilline G Oxacilline Cefoxitine* Moxalactam* Kanamycine Tobramycine Gentamicine Tétracycline Erythromycine Lincomycine Pristinamycine Linézolide Ofloxacine Cotrimoxazole Acide fusidique Fosfomycine Rifampicine Vancomycine Teicoplanine Charge du disque 6 µg (10 UI) 5 µg 30 µg 30 µg 30 UI 10 µg 10 µg 30 UI 15 µg 15 µg 15 µg 10 µg 5 µg 23,75 + 1,25 µg 10 µg 50 µg 30 µg 30 µg 30 µg Concentrations critiques (mg/l) S ≤ 0,12 - R > 0,12 - ≤8 ≤1 ≤1 ≤1 ≤1 ≤2 ≤1 ≤4 ≤1 ≤ 2/38 ≤1 ≤1 ≤ 0,06 ≤2 ≤4 > 16 >1 >1 >2 >2 >8 >2 >4 >1 > 4/76 >1 >2 > 0,5 >2 >4 Diamètres critiques (mm) S ≥ 26 ≥ 26 ≥ 24 ≥ 17 ≥ 20 ≥ 20 ≥ 22 ≥ 21 ≥ 21 ≥ 22 ≥ 19 ≥ 20 ≥ 17 ≥ 24 ≥ 25 ≥ 26 - R < 26 < 24 < 23 < 15 < 20 < 20 < 19 < 18 < 17 < 19 < 19 < 20 < 14 < 24 < 25 < 23 - Résultat attendu pour BR4/2014 Catégorie S S S S S S S S S S S S S S S S S S S Pour les molécules suivantes, il n’y a pas encore de recommandation dans le communiqué 2014 du CASFM au moment de la rédaction de ce texte : Moxalactam, kanamycine, lincomycine, pristinamycine, fosfomycine. Conduite à tenir : Madame A présente un tableau d’infection de pied diabétique de grade 3 ou 4, ayant nécessité une prise en charge orthopédique pour résection arthroplastique. Il y a donc lieu de mettre en route un traitement antibiotique chez cette patiente à risque de développer un choc septique. Dès la coloration de Gram et la culture, l’orientation est faite vers un Staphylocoque Deux possibilités sont envisageables, selon les recommandations françaises sur le pied diabétique de 2006, puis celles des infectiologues américains de 2012 (Clin Infect Dis, 2012, 54, 1679-1684) : - soit traitement probabiliste à visée anti Staphylocoque meti R car risque de BMR si la patiente a reçu des antibiothérapies lors de ses consultations précédentes et/ou a été hospitalisée : vancomycine ou teicoplanine ou linezolide + aminoside (gentamicine 48H) - soit traitement probabiliste à visée anti SAMS car absence de facteurs de risque : cloxacilline IV + aminoside (gentamicine pendant 48H Dès l’identification et l’antibiogramme obtenus, ici S. lugdunensis meti-S, sensible à tous les antistaphylococciques, la réévaluation de l’antibiothérapie s’impose : Devant ce tableau d’ostéite, la voie IV est à privilégier jusqu’à l’amélioration clinique avec un relais per os le plus rapide possible utilisant des antibiotiques ayant une bonne pénétration osseuse : clindamycine, rifampicine, fluoroquinolone, acide fusidique à utiliser en association comme pour les souches de S. aureus. La durée du traitement sera ensuite déterminée par le référent antibiotique en concertation avec l’équipe de diabétologie, les orthopédistes et les bactériologistes (au minimum 3 semaines, voire plus selon les équipes) D’autre part, il n’y a bien sûr pas lieu d’alerter le service dès l’isolement de cette souche qui n’est pas une BMR. Bien confraternellement L. Brasme V. Vernet-Garnier
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