Olivier Debesse - SDMY-CFTC

11ème Assemblée Générale ordinaire
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Jeudi 13 mars 2014
SDMY – CFTC
Syndicat Départemental de la Métallurgie des Yvelines
affilié à la confédération CFTC
N° préfectoral : 78/1372 – Enregistrement : ME7801
s y n d i c a t
l i b r e
e t
i n d é p e n d a n t
siège social : Maison des Syndicats
2 bis place de Touraine
78000 VERSAILLES
boite vocale : 06.98.05.13.80
courriel : [email protected]
site : www.sdmy-cftc.fr
« Le travail, forme particulière de la conversation
entre les hommes »
1
éthique de Solidarité Joseph TISCHNER 1983
______________
1
Il s’agit du grand syndicat polonais
RAPPORT D’
D’ORIENTATION
du syndicat SDMY affilié à la confédération CFTC
présenté par son Président : Olivier DEBESSE
proposé au vote de l’Assemblée Générale ordinaire
Chers amis,
Lors des assemblées générales du SDMY du 20 avril 2012 et du 22 février 2013 j’ai présenté le
er
« 1 C » du sigle de notre confédération CFTC, puis le « F ». Cette fois, je traite du « T » qui veut
dire « Travailleurs » et qui évoque l’homme au travail, et donc le travail lui-même.
Cela paraît aller de soi qu’une confédération syndicale se préoccupe du travail et des travailleurs.
Mais lorsque l’on sait que les deux plus anciennes confédérations syndicales françaises datent,
l’une de 1895 pour la CGT et l’autre de 1919 pour la CFTC, on se pose légitimement la question :
et avant 1895, que se passait-il ? Les travailleurs étaient-ils représentés et organisés ?
Les organisations syndicales, héritières des anciennes corporations
Jusqu’à la Révolution française, le monde
du travail était organisé en corporations
(constitués de patrons, compagnons et
apprentis). Ces organisations professionnelles avaient plusieurs attributions :
Assurer l’apprentissage,
Certifier la qualification professionnelle,
Garantir la qualité du travail,
Définir les prix,
Fixer les salaires « tarifs »,
Déterminer les règles du métier,
Organiser le métier,
Protéger contre :
•
•
•
Loi Le Chapelier du 14 juin 1791
Article premier L'anéantissement de toutes les espèces de corporations
des citoyens du même état et profession, étant une des bases
fondamentales de la Constitution française, il est défendu de les rétablir de
fait, sous quelque prétexte et sous quelque forme que ce soit.
Article II Les citoyens d'un même état ou profession, les entrepreneurs,
ceux qui ont boutique ouverte, les ouvriers et compagnons d'un art quelconque
ne pourront, lorsqu'ils se trouveront ensemble, se nommer ni présidents, ni
secrétaires, ni syndics, tenir des registres, prendre des arrêtés ou
délibérations, former des règlements sur leurs prétendus intérêts communs.
Article IV Si, contre les principes de la liberté et de la Constitution, des
citoyens attachés aux même professions, arts et métiers, prenaient des
délibérations, ou faisaient entre eux des conventions tendant à réfuter de
concert, ou à n'accorder qu'à un prix déterminé le secours de leur industrie ou
de leurs travaux, les dites délibérations et conventions, accompagnées ou
non du serment, sont déclarées inconstitutionnelles, attentatoires à la
liberté et à la déclaration des droits de l'homme, et de nul effet ; les Corps
administratifs et municipaux seront tenus de les déclarer telles. Les auteurs,
chefs et instigateurs qui les auront provoquées, rédigées ou présidées, seront
cités devant le tribunal de police, à la requête du Procureur de la Commune,
condamnés chacun à cinq cents livres d'amende, et suspendus pendant un
an de l'exercice de tous droits de citoyens actifs et de l'entrée dans les
assemblées primaires.
la maladie (Les apprentis sont soignés par leur maître, les corporations possédaient des hôpitaux),
le chômage (Parce que la terre et le paysan font un, on vend la terre avec ses fermiers),
la vieillesse (Les apprentis assurent les vieux jours du maître).
Les corporations ont été abolies par la loi Le Chapellier et les décrets d’Allarde (1791) parce que
« attentatoires à la liberté ». C’est la concrétisation de l’influence de Jean-Jacques Rousseau pour
qui toute forme sociale est aliénante : « L’homme naît bon, c’est la société qui le corrompt ».
1
D’autre part, l’industrie naissante voyait dans les corporations un frein au développement du
Capital. Karl Marx dira plus tard que : « La bourgeoisie a joué dans l'histoire un rôle éminemment
révolutionnaire » Manifeste du parti communiste (1847).
Il a fallu attendre la loi de Waldeck-Rousseau (1884) autorisant les syndicats pour que la
liberté soit rendue aux travailleurs de se constituer en syndicat pour défendre leurs intérêts
professionnels communs. Pendant près d’un siècle, il leur était interdit de s’associer en France !
Les travailleurs qui ont créé les premiers syndicats, soit dans la clandestinité avant 1884, soit
ouvertement après cette date comme le SECI en 1887 (Syndicat des Employés du Commerce et
de l’Industrie – syndicat fondateur de la CFTC), s’inspirèrent des données traditionnelles que la
Révolution n’avait pas réussi à anéantir : liberté d’association, solidarité organique, constitution de
« corps intermédiaires » en réaction contre les effets désastreux de l’individualisme sur le marché
du travail.
Les premiers syndicalistes constituèrent des « Bourses du travail », véritable bureau de
placement, et des caisses d’assurance chômage. Lorsque le salaire était discuté de « gré à gré »
entre l’employeur et l’employé, cela avait pour conséquence une baisse des tarifs. Mécanisme
que l’on constate encore aujourd’hui. L’idée fondatrice du syndicalisme est que l’ennemi de
l’ouvrier, du travailleur, ce n’est pas le « patron » qui « fait travailler », mais la concurrence que les
travailleurs se font entre eux, et au détriment de tous, sur le marché du travail. Il s’agissait donc
« d’organiser le marché du travail de manière à atténuer, et à la limite à faire disparaître cette
concurrence » Claude HARMEL - Les Etudes Sociales et Syndicales (avril 1988).
Une survivance des principes corporatifs au sein du mouvement syndical
Alors que l’on a trop souvent du syndicalisme une vision de lutte et d’affrontements (dans bien
des cas rendu nécessaire par des situations économiques et d’injustices graves), il ne faut pas
méconnaître cependant le rôle que jouent les organisations syndicales au sein du paritarisme, où,
à l’instar des anciennes corporations
Formation Professionnelle, la Cour des Comptes épingle les OPCA
composées
des
maîtres
et
des
Dans son rapport annuel, la Cour des Comptes critique les
dysfonctionnements des Organismes paritaires de la formation
compagnons, les instances paritaires sont
professionnelle parmi les plus importants dont l’OPCAIM de la
composées
de
représentants
des
Métallurgie. Elle dénonce notamment la complexité des systèmes de
collectes qui engendrent confusion et surcoûts. Les contrôles opérés par
employeurs et des salariés (organisations
l’Etat son insuffisants selon elle …. Elle critique sévèrement le train de
syndicales et patronales). Il en est ainsi par
vie des OPCA : accroissement des effectifs mais surtout de salaires
élevés qualifiés par la Cour de « très confortables » pour les dirigeants
exemple du fonctionnement des Caisses
ainsi que la gestion financière « peu rigoureuse » pratiqués par des
Primaires d’Assurance Maladie (CPAM),
organismes manifestement habitués à « l’aisance financière ». Enfin la
Cour pointe l’imprécision des règles de contribution au paritarisme et
des Caisses d’Allocations Familiales (CAF),
constate que les dispositions légales qui font obligation à ces organismes
Union Nationale interprofessionnelle pour
de reverser les sommes non utilisées au Trésor public ne sont pas
respectées.
l'Emploi dans l'Industrie et le Commerce
Liaisons sociales 9 février 2007
(UNEDIC).
On retrouve le paritarisme également dans la gestion de la formation professionnelle ou encore
dans les Conseils des prud’hommes.
Les dérives du financement du paritarisme, souvent dénoncées dans la Presse (Cf le Rapport
PERRUCHOT interdit de publication), doivent être
Les cotisations sociales ne sont pas une « charge »
sanctionnées. De même l’influence de l’Etat sur le
mais un salaire indirect
paritarisme doit être reconsidérée pour redonner aux
Lorsque les libéraux donnent le nom de « charge » au
représentants des salariés et des employeurs la liberté
salaire indirect c'est parce qu'ils veulent réduire notre
salaire indirect. Mais comme ils ne peuvent pas le dire
de s’auto-organiser et d’autogérer les caisses sociales.
de cette façon, comme ils n'osent pas affronter les
Français ouvertement sur ce point, ils disent qu'il « faut
Mais pour autant, que des représentants des
réduire les charges ». Ils espèrent jouer sur la
employeurs et des salariés siègent ensemble pour
méconnaissance de ce qu'est ce salaire indirect
pourtant si précieux pour chaque français.
gérer ce que l’on appelle le salaire indirect (appelé
Démocratie & Socialisme 13 septembre 2003
improprement charges sociales et patronales) qui
finance notre système de protection sociale, est en soi une bonne chose. La finalité de
l'organisation professionnelle, avec la participation des syndicats, est l'union et la solidarité des
employeurs et des travailleurs. Cette démarche de « cogestion » qui pratique le « Travaillons
ensemble », est dans le droit fil de la doctrine sociale chère aux fondateurs de la CFTC.
2
Il est utile de rappeler que l’on doit la base de notre législation sociale aux députés chrétiens :
DATE
21 mars 1841
22 avril 1850
18 juin 1850
15 juillet 1850
19 mai 1874
27 déc. 1892
12 janvier 1895
13 juillet 1906
10 juillet 1915
25 mars 1919
28 mars 1919
12 mars 1920
5 avril 1920
INITIATIVE
Loi Montalembert
Loi Armand de Melun
Loi Benoist d'Azy
Loi Benoist d'Azy
Loi Emile Keller
Loi Albert de Mun
Loi Albert de Mun
Loi Paul Lerolle
Loi Albert de Mun
Loi Jean Lerolle
Loi Jean Lerolle
Loi Jean Lerolle
Loi Anselme Patureau Mirand
OBJET
Travail des femmes et des enfants dans les manufactures
Logements insalubres
Caisses de retraite
Sociétés de secours mutuel
Travail des femmes et des enfants
Arbitrage temporaire et facultatif dans les conflits du travail
Insaisissabilité partielle du salaire
Repos dominical
Salaire minimum légal pour les travailleurs à domicile
Statut des conventions collectives du travail dans le cadre de la liberté contractuelle
Interdiction du travail de nuit dans les boulangeries
Capacité de posséder reconnue aux syndicats
Accession à la petite propriété
Le déclin du syndicalisme
Le travail de reconstruction entrepris depuis la loi de 1884 autorisant l’existence de syndicats et
reconnaissant aux travailleurs des droits est reconnu par la Constitution du 27 octobre 1946.
ème
Mais dans la deuxième moitié du 20
siècle, la
législation régissant le syndicalisme a contribué à affaiblir
les outils de défense et de protection des travailleurs pour
rendre inopérants les syndicats, reproduisant ainsi, mais
d’une façon « soft », l’anéantissement des corporations
par la Convention et la loi Le Chapelier de 1791.
1) Loi du 11 février 1950 sur la « représentativité légale »
Préambule de la Constitution de 1946
5. Chacun a le devoir de travailler et le
droit d'obtenir un emploi. Nul ne peut être
lésé, dans son travail ou son emploi, en
raison de ses origines, de ses opinions ou
de ses croyances.
6. Tout homme peut défendre ses droits
et ses intérêts par l'action syndicale et
adhérer au syndicat de son choix.
Reprenant la circulaire dite Parodi du 28 mai 1945, cette
7. Le droit de grève s'exerce dans le cadre
loi fixa des critères de représentativité des syndicats leur
er
des lois qui le réglementent.
attribuant un privilège de présentation de candidats au 1
8. Tout
travailleur
participe,
par
tour des élections professionnelles, sans avoir besoin de
l'intermédiaire
de
ses
délégués,
à
la
faire leurs preuves et donc d’exister vis-à-vis des salariés.
détermination collective des conditions de
En 1950, les confédérations CGT, CFTC, CGC (devenue
travail ainsi qu'à la gestion des
CFE-CGC en 1981) et CGT-FO (appelée communément
entreprises.
FO) bénéficiaient de cette représentativité légale. Après
la transformation en 1964 d’une partie de la CFTC en CFDT, le décret du 31 mars 1966 élargi la
liste aux cinq confédérations que nous connaissons. Les salariés trouvent-ils normal que ce
soit la Loi qui détermine quels sont les syndicats susceptibles de les représenter ?
http://www.travaillonsensemble.org/2008/images/Te_15_Controle_social_par_les_salaries.pdf
2) Loi du 27 décembre 1968 sur la création du délégué syndical
Lors des négociations de Grenelle (ouverts le 24 mai 1968), un consensus est trouvé sur,
notamment, les augmentations de salaires et … le principe de création de sections syndicales
d’entreprise et de désignation de délégués syndicaux pour les organisations syndicales
représentatives. Cette dernière revendication a été concrétisée par la loi du 27 décembre 1968.
Du coup, le pouvoir syndical, au lieu de partir de la base (les salariés qui élisent leurs délégués du
personnel), est transféré à la structure syndicale qui est placée au-dessus. André BERGERON
(Secrétaire Gal de la confédération CGT-FO de 1963 à 1989) a exprimé l’idée que : « les droits
syndicaux avaient contribué à tuer le syndicalisme ».
Dominique LABBÉ, auteur de : Syndicats et syndiqués en France depuis 1945 - L’Armattant
(1996) parle « d’effets pervers » de la loi de décembre 68 et affirme que : « La destruction
de·l’ambiance collective a certainement un coût : augmentation des conflits individuels, de
l’insécurité, de l’angoisse et de la solitude, mais ces coûts sont difficiles à mesurer et
probablement sous-estimés ».
http://www.travaillonsensemble.org/2008/images/Te_14_Notre_dyssociete_est_fille_de_mai-68.pdf
3) Loi Auroux du 28 octobre 1982 instituant la subvention de fonctionnement du CE, le « 0,2% »
Cette subvention attribuée au Comité d’Entreprise égale à 0,2 % de la masse salariale brute
s’ajoutant a la subvention dites des « œuvres sociales », donne des moyens spécifiques au CE,
notamment pour nommer un expert indépendant, engager des actions en faveur des salariés…
3
Au lieu que cette subvention de fonctionnement, contrôlée par les élus du CE, soit orientée en
faveur des salariés surtout en temps de crise, il arrive qu’une partie importante de cette
subvention soit détournée au profit du financement des organisations syndicales de l’entreprise.
http://www.travaillonsensemble.org/2013_Elections_tcr/images/T_20131028_Le_role_premier_du_CE.pdf
4) Loi quinquennale du 20 décembre 1993
La durée des mandats des délégués du personnel, d’un an passent à deux ans et ont lieu,
dorénavant, à la même date que les élections du CE. Avant cette loi, le salarié était appelé à voter
trois fois sur un cycle de deux ans. Avec la loi quinquennale, il ne vote qu’une fois. Cela éloigne le
salarié de ses élus et commence à lui fait perdre l’habitude de voter pour ses représentants.
5) Loi du 2 août 2005 « en faveur des petites et moyennes entreprises »
A la faveur de cette loi qui avait un objet limité, les mandats des élus DP et CE passent à quatre
ans pour toutes les entreprises ! Cela aggrave la remarque précédente et fait perdre au salarié le
contrôle de ses élus. Quatre ans, c’est très long lorsque l’entreprise subit plusieurs mutations et
que les accords, comme ceux dit de « compétitivité », n’ont qu’une durée de deux ou trois ans.
Résultats : les Instances Représentatives du Personnel ne sont plus en adéquation avec la réalité
sociale de l’entreprise. Pas étonnant que le salarié s’éloigne des organisations syndicales. Il est à
remarquer que cette durée de mandat de quatre ans était une des 50 propositions du Rapport de
Virville (15 janvier 2004), ancien Secrétaire Général de Louis Schweitzer, puis DRH de Renault.
6) Loi du 20 août 2008 réformant la représentativité
Cette loi, qui fait suite au scandale des financements de la métallurgie par l’UIMM, affaibli le
syndicalisme en introduisant un seuil (10% aux élections de CE) pour qu’un syndicat soit
représentatif dans l’entreprise et invité aux négociations. Les petits syndicats sont souvent plus
pugnaces que les gros. Mais les petits ne doivent plus exister selon la loi de 2008 et pour le
bonheur de bien des DRH. Le rêve du MEDEF de casser les syndicats est en passe de se
réaliser. Cependant, la loi de 2008, « scélérate » pour beaucoup, possède deux aspects positifs :
la représentativité est devenue ascendante (elle ne vient plus des confédérations nationales),
er
un syndicat non représentatif dans l’entreprise peut présenter des candidats au 1 tour des
élections professionnelles.
Le syndicalisme va-t-il renaître et se reconstruire par cette (légère) ouverture ?
http://www.travaillonsensemble.org/2009/images/Te_19_Un_syndicalisme_libre.pdf
Travaillons ensemble à la reconstruction
Il y a 50 ans, lors du congrès extraordinaire des 6 et 7 novembre 1964, une majorité de
congressistes abandonnaient la référence chrétienne pour que la CFTC devienne dans ses
statuts : « humaniste et démocratique » et dans son titre : « CFDT ». Ce congrès avait été
préparé par un groupe appelé « Reconstruction » (qui était plutôt une déconstruction). En « 64 »,
des militants ont dit « NON » à l’abandon de la référence chrétienne et, au bout de trois ans de
bataille juridique, ont obtenu des tribunaux le droit d’existence à la « CFTC maintenue ».
En 2014, la confédération CFTC commémorera-t-elle cet anniversaire ? Les militants syndicaux,
fidèles aux valeurs de notre syndicalisme inscrites dans « l’article premier » : « prospérité de la
nation, idéal de paix, esprit de fraternité, exigence de justice, développement de la personnalité
humaine, dignité et indépendance des travailleurs et de leurs groupements … », pourront-ils
encore les porter en 2014 ? http://www.cftc.fr/ewb_pages/f/fondements.php
A cette question, je réponds « OUI ». Nous devons retrouver ensemble le sens d’un vrai
syndicalisme, et nous affranchir de toutes influences qui nous empêchent d’assurer
efficacement la défense des travailleurs et de leurs droits. Je vous invite à la
reconstruction !
Le Président du SDMY-CFTC
Olivier DEBESSE
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