dans les dystrophies musculaires congénitales

JUIN 2014
AvanCées
dans les
dystrophies
musculaires
congénitales
Ce document présente l'état actuel des connaissances
scientifiques sur les dystrophies musculaires congénitales
(DMC), mis à jour à l'occasion des Journées des Familles
2014 de l'AFM-Téléthon. Il est téléchargeable sur le site
internet de l'AFM-Téléthon : WEB www.afm-telethon.fr .
Pour en savoir plus sur les dystrophies musculaires
congénitales, vous pouvez consulter les Zooms sur... les
dystrophies musculaires congénitales et les Repères Savoir
et Comprendre qui traitent de sujets scientifiques,
médicaux, psychologiques et sociaux.
Destinés
aux
personnes
atteintes
de
maladies
neuromusculaires et à leurs familles, ils sont disponibles
sur le site internet de l'AFM-Téléthon et auprès du Service
> DMC
> DMC avec déficit primaire en mérosine
> DMC de type Ullrich
> DMC avec déficit en sélénoprotéine N
> alpha-dystroglycanopathies
> DMC de type Fukuyama
> syndrome MEB (muscle-eye-brain)
> syndrome de Walker-Warburg
régional de l'AFM-Téléthon de votre région.
Ces documents ne peuvent en aucun cas se substituer à
l'avis d'un médecin, même s'ils peuvent vous faciliter le
dialogue avec l'équipe soignante.
Savoir & Comprendre
Avancées dans les dystrophies musculaires congénitales
Sommaire
Rédaction
 Myoinfo,
Département d'information sur
les maladies neuromusculaires
de l'AFM-Téléthon, Évry
Validation
 Dr. Valérie Allamand, Centre
de Recherche en Myologie,
UMRS 974, Institut de
Myologie, Hôpital PitiéSalpêtrière, Paris.
Faits marquants .....................................................................................3
Que sont les dystrophies musculaires congénitales ? ....................... 3
Différente formes de dystrophies musculaires congénitales... ......................3
...classées en trois groupes ..........................................................................................4
A quoi les dystrophies musculaires congénitales sont-elles dues ? . 5
La DMC1A est due à des anomalies dans le gène LAMA2 codant la
lamine α2 ............................................................................................................................5
La DMC de type Ullrich est due à un déficit ou à des anomalies du
collagène VI .......................................................................................................................5
Une nouvelle DMC due à un déficit primaire en collagène XII .....................7
La DMC avec anomalies du gène de l'intégrine alpha7...................................7
Les alpha-dystroglycanopathies sont dues à un mauvais fonctionnement
de l'alpha-dystroglycane ..............................................................................................7
Identification de trois nouveaux gènes impliqués dans les alphadystroglycanopathies ....................................................................................................... 8
Rupture du lien entre l'intérieur et l'extérieur de la cellule musculaire .....8
Le syndrome de la colonne raide est dû à un déficit en séléprotéine N ...9
Où en est la recherche dans les dystrophies musculaires
congénitales ? ........................................................................................9
Des congrès et des collaborations internationales ............................................9
Des bases de données ............................................................................................... 10
Des études de l’histoire naturelle .......................................................................... 11
Développer des modèles animaux des DMC .................................................... 11
Des outils diagnostiques performants ................................................................. 12
Explorer de nouvelles pistes thérapeutiques .................................................... 12
Rétablir le lien rompu ................................................................................................... 12
Dans les DMC liées au collagène VI...................................................................... 13
Le saut d’exon .................................................................................................................. 13
Restaurer l’autophagie ................................................................................................. 14
La thérapie cellulaire ..................................................................................................... 14
Dans les alpha-dystroglycanopathies .................................................................. 14
La thérapie génique ....................................................................................................... 14
Dans la DMC1A ............................................................................................................. 15
Restaurer la laminine α2 .............................................................................................. 15
Inhiber le protéasome................................................................................................... 15
La thérapie cellulaire ..................................................................................................... 15
Diminuer la fibrose ......................................................................................................... 15
Essai de l'omigapil en prévision chez l'homme .................................................. 15
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2 ǀ AFMTéléthon ǀ Juin 2014
*
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Avancées dans les dystrophies musculaires congénitales
Savoir & Comprendre
Faits marquants
> Le 3e atelier international sur les défauts de glycosylation dans les
dystroglycanopathies a eu lieu les 18 au 19 avril 2013 aux États-Unis.
> Les 11e Journées annuelles de la Société de Myologie étaient
consacrées aux dystrophies musculaires congénitales (27-29 novembre
2013, à Montpellier).
> Le Comité international de spécialistes des DMC a élaboré des
recommandations pour le diagnostic de ces maladies.
> La fonction du diaphragme et les paramètres respiratoires ont été
évalués dans deux études de l’histoire naturelle de la DMC d’Ullrich.
> Identification de nouveaux gènes impliqués dans les DMC : le gène
COL12A1 (collagénopathie) et les gènes GMPPB, DPM1, SGK196 et POMK
(alpha-dystroglycanopathies).
> Un nouveau modèle de souris a été développé pour étudier la
dystrophie musculaire congénitale liée au collagène VI.
> Diversification des pistes thérapeutiques étudiées sur des cellules en
culture ou chez la souris : losartan, saut d'exons, thérapie génique,
thérapie cellulaire…
> Un essai de l’omigapil chez des personnes atteintes de dystrophie
musculaire congénitale liée au collagène VI ou à l'absence de laminine α2
est en préparation aux États-Unis et au Royaume-Uni.
Que sont les dystrophies musculaires congénitales ?
Les dystrophies musculaires congénitales (DMC) sont des maladies rares
d’origine génétique. Le terme regroupe plusieurs maladies différentes
caractérisées par une atteinte musculaire ("dystrophie") entrainant une
faiblesse musculaire - hypotonie et difficultés motrices - se manifestant
dès la naissance ou dans les premiers mois de vie ("congénitale"). Le
muscle squelettique est le siège d’un processus dystrophique observable
au microscope.
Cette atteinte musculaire peut se compliquer de rétractions musculotendineuses et de difficultés respiratoires.
Les dystrophies musculaires congénitales sont généralement peu
évolutives, voire stables. Leur gravité est variable d'une forme à l'autre. Le
traitement est, pour l’instant, symptomatique.
Différente formes de dystrophies musculaires congénitales...
Il existe plusieurs formes de dystrophies musculaires congénitales qui
diffèrent, parfois beaucoup, les unes des autres. Connaitre le diagnostic
clinique et moléculaire de l’affection en cause améliore la surveillance et la
Une maladie est dite rare quand
elle touche moins d'une personne
sur 2 000. Les maladies rares font
l'objet d'une politique de santé
publique commune dans les
domaines de la recherche, de
l'information et de la prise en
charge.
L'examen au microscope d'un
échantillon de muscle
dystrophique montre une
dégénérescence des cellules
musculaires s'accompagnant de
la présence de cellules jeunes en
régénération tendant à
contrebalancer la perte cellulaire
due à la dégénérescence.
3 ǀ AFMTéléthon ǀ Juin 2014
Avancées dans les dystrophies musculaires congénitales
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prise en charge des complications de l'atteinte musculaire et permet de
donner des informations précises sur les risques de transmission de la
maladie. Par ailleurs, pour participer à un essai clinique ciblé sur sa
maladie, il est indispensable d'en connaître le diagnostic précis.
La classification des DMC n’est pas figée dans le temps et évolue avec les
découvertes de nouveaux gènes impliqués dans ces maladies.
Jusqu’à la découverte du déficit en mérosine (aussi appelée laminine α2)
en 1994, on se basait essentiellement sur des critères cliniques pour
distinguer deux grands groupes de dystrophies musculaires congénitales
(DMC) : d’un côté, les formes dites occidentales, classiques, sans anomalies
malformatives de l’œil ou du cerveau, et de l’autre, tout le reste (c'est-àdire les actuelles alpha-dystroglycanopathies).
Avec la découverte de l’implication de la mérosine, deux grands groupes
sont apparus : les DMC avec déficit en mérosine (ou DMC mérosine
négatives) et les DMC avec mérosine normale (DMC mérosine positives).
La découverte des gènes impliqués dans différentes formes de DMC, et
des protéines qu’ils codent, a fait sensiblement évoluer la classification, qui
repose désormais sur l’identité de ces protéines, leur localisation dans la
cellule et leurs fonctions.
...classées en trois groupes
On distingue désormais 3 grands groupes de DMC :
- celui où des protéines liées à la matrice extracellulaire sont en cause :
• DMC avec déficit primaire en mérosine (ou en laminine α2), les DMC1A.
• DMC de type Ullrich (DMCU) lié au déficit en collagène VI.
• Forme avec des anomalies du gène de l’intégrine alpha 7, une protéine
transmembranaire, en contact avec des protéines de la matrice
extracellulaire.
- celui où des protéines sont impliquées dans le bon fonctionnement
de l'alpha-dystroglycane :
• Syndrome de Walker-Warburg
• Syndrome Muscle-œil-cerveau ou MEB
• DMC de Fukuyama ou FCMD
• Dystrophie musculaire précoce avec microcéphalie et retard mental
• Forme avec des anomalies du gène DPM3 avec réduction de la Nglycosylation et de la O-mannosylation de l’alpha-dystroglycane
- autres formes :
• Syndrome de la colonne raide (Rigid spine syndrome) liée à des
anomalies du gène SEPN1.
• Forme sévère liée à des anomalies sporadiques du gène des lamine A/C
(LMNA).
• Forme avec anomalies mitochondriales liée à des anomalies du gène
CHKB.
• Forme avec lissencéphalie et neuropathie périphérique.
• Forme avec retard mental et cataracte congénitale.
• Forme avec myocardiopathie primitive.
• Forme liée à BAG3, que l'on retrouve dans le groupe récemment identifié
des myopathies myofibrillaires.
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Avancées dans les dystrophies musculaires congénitales
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A quoi les dystrophies musculaires congénitales sontelles dues ?
Toutes les dystrophies musculaires congénitales sont des maladies
d’origine génétique. Elles sont liées à des anomalies de l'ADN (mutations)
qui sont généralement héritées des deux parents (maladies autosomiques
récessives) ou parfois d’un seul (maladies autosomiques dominantes)
Les anomalies génétiques à l'origine des DMC, conduisent généralement
au déficit d'une protéine donnée, cette protéine ayant une fonction
importante pour la cellule musculaire.
La DMC1A est due à des anomalies dans le gène LAM A2 codant la
lamine α2
La DMC avec déficit primaire en laminine α2 (DMC1A) est liée à une
anomalie de l'ADN au niveau du gène LAMA2 (situé sur le chromosome 6)
qui code la laminine α2 (aussi appelée mérosine). Ces anomalies
génétiques conduisent à l’absence de production de laminine α2.
La laminine α2 appartient à un réseau de protéines situées à l’interface
entre la membrane de la fibre musculaire et le tissu de soutien du muscle
(tissu conjonctif). Ce réseau, appelé lame basale, entoure chaque fibre
musculaire.
En plus d'un rôle de protection et de filtre vis-à-vis de l’extérieur de la
cellule, la lame basale joue un rôle important dans la réparation
(régénération) du muscle après une lésion. Lorsque des fibres musculaires
sont endommagées, de nouvelles cellules vont les remplacer, en utilisant
la trame formée par la lame basale pour guider leur migration.
Dans la DMC avec déficit primaire en laminine α2, la lame basale est
fragilisée et ne peut plus jouer son rôle de soutien pour le tissu
musculaire.
Les maladies (d'origine)
génétiques sont des maladies
dues à des anomalies de l'ADN,
c'est-à-dire de l'information qui
détermine le fonctionnement
biologique de notre organisme.
Cette information est présente
dans nos cellules sous forme de
chromosomes, nous l'héritons de
nos parents et nos enfants
héritent de la nôtre. C'est
pourquoi les maladies génétiques
sont souvent familiales, c'est-àdire qu'il peut y avoir plusieurs
membres d'une même famille
atteints par la maladie génétique.
Une maladie héréditaire est
transmise sur le mode récessif
lorsque la personne malade a ses
deux copies du gène - celle reçue
de son père et celle reçue de sa
mère - porteuses d’une anomalie
génétique. La maladie ne se
manifeste que lorsque les deux
copies du gène sont altérées.
La DMC de type Ullrich est due à un déficit ou à des anomalies du
collagène VI
Une maladie héréditaire est
transmise sur le mode dominant
lorsque la personne malade a
une copie porteuse de l'anomalie
génique et une copie normale du
gène. La maladie se manifeste
même si l'autre copie du gène
n'est pas altérée.
La DMC de type Ullrich est liée à des anomalies de l'ADN dans l'un des
trois gènes COL6A1, 2 ou 3, qui codent les sous-unités du collagène VI. Le
gène COL6A1 (localisé sur le chromosome 21) code la sous-unité alpha1,
le gène COL6A2 (localisé sur le chromosome 21), la sous-unité alpha2 et le
gène COL6A3 (localisé sur le chromosome 2), la sous-unité alpha3.
La DMC de type Ullrich peut avoir une transmission autosomique récessive
ou autosomique dominante, voire de novo (apparition d’une nouvelle
anomalie génétique non héritée des parents).
La lame basale (ou membrane
basale) est une forme particulière
de matrice extracellulaire
spécifique à quelques tissus. Elle
est constituée de protéines qui
s'enchevêtrent les unes aux autres
pour former un réseau élastique
qui entoure une ou plusieurs
cellules.
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Avancées dans les dystrophies musculaires congénitales
myofibrille
cellule (ou fibre)
musculaire
faisceau musculaire
© AFM - M. Gilles
muscle
La zone de contact entre la fibre musculaire et le tissu conjonctif qui l'entoure est très importante pour la cohésion entre
les fibres musculaires qui constituent le muscle. Dans les DMC, ce lien est altéré et le muscle est fragilisé.
La mérosine, le collagène VI, l'intégrine alpha7 et l'alpha-dystroglycane participent, chacune à leur niveau, au
maintien d'une liaison entre l'intérieur et l'extérieur de la cellule. Ce système d'amarrage entre les deux milieux permet à
la cellule musculaire de s'adapter aux contraintes mécaniques, en particulier aux déformations qu'elle subit lors d'une
contraction du muscle.
6 ǀ AFMTéléthon ǀ Juin 2014
Avancées dans les dystrophies musculaires congénitales
Savoir & Comprendre
Le collagène est une protéine en forme de filament, constitué de trois
sous-unités : trois chaînes dites "alpha" qui s'enroulent les unes autour des
autres pour former une (triple) hélice.
Le collagène VI est un des constituants principal du tissu conjonctif
musculaire qui entoure les fibres musculaires (matrice extracellulaire) et
dont le rôle est de les soutenir et de les protéger.
Les anomalies génétiques dans l'un des gènes COL6A1, 2 ou 3 entraînent
l'absence de collagène VI ou la fabrication d'un collagène VI anormal, ce
qui fragilise le tissu conjonctif musculaire, lequel ne peut plus jouer son
rôle de soutien pour le muscle.
La matrice extracellulaire est
un réseau complexe de protéines
dans lequel baignent les cellules.
Elle assure la cohésion des
cellules au sein d’un tissu et joue
un rôle essentiel dans la
constitution, le maintien,
l'adhérence, le mouvement et la
régulation des cellules. La matrice
extracellulaire du muscle est
spécialisée pour répondre aux
contraintes mécaniques
inhérentes à l'activité contractile
des fibres musculaires.
Une nouvelle DMC due à un déficit primaire en collagène XII
En 2014, un nouveau gène en cause dans une dystrophie musculaire
congénitale a été identifié ; il s’agit du gène COL12A1 (localisé sur le
chromosome 6) qui code le collagène XII.
Les personnes qui présentent des anomalies dans le gène COL12A1 ont
des symptômes qui ressemblent fortement à ceux des personnes
présentant des anomalies dans le gène du collagène VI. La perte de
collagène XII dans des souris entraine une faiblesse musculaire et un
changement dans l’élasticité des muscles, soulignant l’importance de la
matrice extracellulaire dans le développement de maladie musculaire.
Le collagène XII est composé de 3 sous-unités alpha1. Comme le
collagène VI, le collagène XII participe à la constitution du tissu conjonctif
musculaire qui entoure les fibres musculaires afin de les protéger.
La DMC avec anomalies du gène de l'intégrine alpha7
L'intégrine alpha 7 est une protéine qui traverse de part en part la
membrane de la fibre musculaire. Elle forme un complexe avec l’intégrine
beta 1. A l'intérieur de la cellule, cette dernière est liée à des protéines du
cytosquelette comme l'actine. A l'extérieur de la cellule, le complexe
intégrine alpha 7/beta 1 se lie à des molécules de la matrice extracellulaire
comme la laminine et le collagène.
Le déficit en intégrine alpha 7 fragilise le lien entre la membrane de la
fibre musculaire et le tissu de soutien qui l'entoure.
Les alpha-dystroglycanopathies sont
fonctionnement de l'alpha-dystroglycane
dues
à
un
Le cytosquelette est un réseau
de protéines filamenteuses qui
forme l’armature de la cellule et
lui donne sa forme. Il se
réorganise en permanence pour
permettre à la cellule de se
déplacer et de se diviser.
mauvais
Pour fonctionner correctement, l'alpha-dystroglycane a besoin de
molécules de sucres à sa surface. La présence de ces sucres est nécessaire
à l’interaction entre l'alpha-dystroglycane avec des protéines de la matrice
extracellulaire, comme les laminines.
Dans la très grande majorité des cas, les anomalies génétiques en cause
dans les alpha-dystroglycanopathies ne portent pas sur le gène de l'alphadystroglycane (DAG1) lui-même mais sur des gènes codant des protéines
impliquées dans la fixation des sucres à la surface de l'alpha-dystroglycane
(glycolysation). L'absence d'ajout de sucres à la surface de l'alphadystroglycane qui en résulte fait qu’elle ne peut plus se lier aux protéines
de la matrice extracellulaire. Le lien entre l'intérieur et l'extérieur de la
cellule est alors rompu, fragilisant ainsi la cellule musculaire.
7 ǀ AFMTéléthon ǀ Juin 2014
Avancées dans les dystrophies musculaires congénitales
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En plus de la fixation des sucres (glycosylation) sur l’alpha-dystroglycane,
l’ajout d’un phosphate (phosphorylation) à l’alpha-dystroglycane est
également nécessaire à sa liaison aux laminines de la matrice extracellulaire. Cette phosphorylation effectuée par la protéine LARGE, est
absente chez des personnes atteintes de DMC de Fukuyama.
Une forme d’alpha-dystroglycanopathie est liée à une anomalie du gène
codant l’alpha-dystroglycane, lui-même. L’anomalie génétique interfère
avec le site de fixation des molécules de sucres à la surface de l’alphadystroglycane, empêchant l’interaction de la protéine avec la matrice
extracellulaire.
Dix-huit gènes impliqués dans les alpha-dystroglycanopathies
Les gènes codant une protéine qui transfère une
molécule de sucre sur l’alpha-dystroglycane :
- le gène de la fukutine (chromosome 9),
- le gène FKRP (chromosome 19),
- le gène LARGE (chromosome 22),
- le gène POMGnT1 (chromosome 1),
- le gène POMT1 (chromosome 9),
- le gène POMT2 chromosome 14),
- le gène ISPD (chromosome 7),
- le gène TMEM5 (chromosome 12) ;
- le gène GTDC2 (chromosome 3) ;
- le gène B3GNT1 (chromosome 11) ;
- le gène B3GALNT2 (chromosome 1) ;
- le gène GMPPB (chromosome 3) ;
- le gène SGK196 (chromosome 8).
Les gènes impliqués dans la fabrication d’un
précurseur du sucre :
- le gène DOLK (chromosome 9),
- le gène DPM3 (chromosome 1),
- le gène DMP2 (chromosome 9) ;
- le gène DMP1 (chromosome 4).
Le gène codant l'alpha-dystroglycane :
- le gène DAG1 (chromosome 3).
Identification de trois nouveaux gènes impliqués dans les alphadystroglycanopathies
En 2013 et en 2014, trois nouveaux gènes impliqués dans les alphadystroglycanopathies ont été identifiés : les gènes GMPPB, DPM1, SGK196
(ou POMK).
Ces trois gènes codent tous des protéines qui participent à la
glycosylation de l’alpha-dystroglycane. L’absence d’une de ces protéines
provoque un défaut de glycosylation de l’α-dystroglycane.
Rupture du lien entre l'intérieur et l'extérieur de la cellule musculaire
La laminine α2, le collagène VI, l'intégrine alpha7 et l'alpha-dystroglycane
participent, chacune à leur niveau, au maintien d'une liaison entre
l'intérieur et l'extérieur de la cellule. Ce système d'amarrage entre les deux
milieux permet à la cellule musculaire de s'adapter aux contraintes
mécaniques, en particulier aux déformations qu'elle subit lors de la
contraction du muscle.
Dans les DMC, le déficit en l'une ou l'autre de ces protéines entraîne un
dysfonctionnement de ce système d'amarrage. Le lien entre l'extérieur et
l'intérieur de la cellule musculaire est alors rompu, entraînant, au fil du
temps, une altération de la membrane cellulaire par les contractions
répétées et, à terme, une fragilisation de la cellule musculaire dans son
ensemble.
8 ǀ AFMTéléthon ǀ Juin 2014
Avancées dans les dystrophies musculaires congénitales
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Le syndrome de la colonne raide est dû à un déficit en séléprotéine N
La DMC avec déficit en sélénoprotéine N est liée à des anomalies
génétiques qui se produisent dans le gène SEPN1, localisé sur le
chromosome 1 et codant la sélénoprotéine de type N.
La sélénoprotéine N appartient à la famille des sélénoprotéines. Ces
protéines ont toutes la particularité de contenir du sélénium. Au total, 27
sélénoprotéines ont été identifiées, qui interviennent dans de nombreuses
voies du métabolisme cellulaire. Aujourd'hui, on sait que le sélénium est
un élément nutritif essentiel qui joue un rôle dans la défense immunitaire
de l'organisme, la fertilité et le vieillissement.
La fonction précise de la sélénoprotéine N dans la cellule n’est pas connue
mais des études ont montré qu'elle est localisée dans le réticulum
endoplasmique, suggérant son implication dans un (ou plusieurs)
processus qui s'y déroulent (synthèse protéique, synthèse des lipides,
contraction musculaire...). D’autre part, la sélénoprotéine N joue un rôle
majeur dans la régénération des muscles et la fonction des cellules qui
participent à la croissance et la réparation des muscles, les cellules
satellites.
Où en est la recherche dans les dystrophies
musculaires congénitales ?
Le métabolisme est l'ensemble
des transformations biochimiques
qui se déroulent au sein des
cellules des organismes vivants et
qui assurent leurs
fonctionnements.
Le réticulum endoplasmique
est le compartiment de la cellule
où se déroule la fabrication des
protéines et des lipides.
Dans la cellule musculaire, il joue
en plus un rôle essentiel lors de la
contraction musculaire en
libérant et en recaptant le
calcium qu'il contient. Le
réticulum endoplasmique de la
cellule musculaire est aussi
appelé réticulum sarcoplasmique.
Avec les progrès de la génétique et des techniques de diagnostic
moléculaire, on connaît désormais beaucoup mieux les bases génétiques
de cet ensemble très hétérogène que sont les dystrophies musculaires
congénitales.
Les connaissances acquises sur ces protéines ont permis de mieux
comprendre les mécanismes moléculaires et cellulaires à l'origine de la
maladie.
Depuis quelques années, on découvre petit à petit que de plus en plus de
dystrophies musculaires congénitales ont en commun des gènes
défectueux avec d’autres types de myopathie. C’est le cas notamment de
certaines dystrophies musculaires congénitales et des dystrophies
musculaires des ceintures, y compris pour le gène ISPD récemment
identifié.
Des congrès et des collaborations internationales
Le 3e atelier international sur les défauts de glycosylation dans les alphadystroglycanopathies a réuni 22 cliniciens et chercheurs venus des ÉtatsUnis, du Japon et du Royaume-Uni, du 18 au 19 avril 2013 à Charlotte
(États-Unis). Le compte rendu de cet atelier a été publié en janvier 2014.
L’objectif de cet atelier était de discuter des avancées récentes dans les
alpha-dystroglycanopathies et de favoriser de potentielles collaborations.
Les sujets abordés ont porté sur les mécanismes impliqués dans la
glycosylation de l’alpha-dystroglycane, les nouveaux gènes identifiés dans
les alpha-dystroglycanopathies, les nouveaux modèles animaux, la
9 ǀ AFMTéléthon ǀ Juin 2014
Savoir & Comprendre
Avancées dans les dystrophies musculaires congénitales
Les Cahiers de myologie sont
une revue biannuelle destinée
aux professionnels de santé
médicaux, paramédicaux et aux
scientifiques impliqués dans le
domaine des maladies
neuromusculaires et de la
myologie. Ils sont publiés par
l'AFM-Téléthon en partenariat
avec la Société Française de
Myologie. Ils sont consultables sur
les sites Internet de l’AFMTéléthon, la SFM et l’Institut de
Myologie.
thérapie génique ou pharmacologique, le diagnostic génétique et la prise
en charge clinique des alpha-dystroglycanopathies.
Les 11e Journées annuelles de la Société Française de Myologie ont été
consacrées aux dystrophies musculaires congénitales, à la fibrose
musculaire et au dystroglycane. Elles ont réuni, du 27 au 29 novembre
2013 à Montpellier, une centaine de médecins et de chercheurs européens
impliqués dans ces domaines. Ces journées ont été l’occasion de faire le
point sur les aspects cliniques, physiopathologiques et génétiques des
DMC. Ce sujet a fait l’objet d’une mise au point dans la revue des Cahiers
de myologie.
Treat-NMD est un réseau
européen d'excellence dans le
domaine dans maladies
neuromusculaires, dont le but est
de créer l'infrastructure qui
garantit que les recherches les
plus prometteuses atteignent les
patients le plus rapidement
possible. Depuis sa création en
janvier 2007, Treat-NMD s'est
concentré sur le développement
d'outils (registres de patients...)
dont l'industrie, les cliniciens et
les scientifiques ont besoin pour
amener de nouvelles approches
thérapeutiques à la clinique, et
sur l'établissement des meilleures
pratiques de soins des personnes
atteintes de maladie
neuromusculaire dans le monde.
WEB www.treat-nmd.eu/
Les études de corrélations
génotype/phénotype
recherchent l'existence de liens
entre les caractéristiques
génétiques, le génotype, et les
caractéristiques s'exprimant de
façon apparente, le phénotype
(taille, couleur et forme des yeux,
couleur des cheveux,
manifestation d'une maladie...).
On peut ainsi identifier une
relation plus ou moins étroite
entre la présence d'une anomalie
génétique de tel ou tel type et
celle de telles ou telles
manifestations d'une maladie
génétique.
10 ǀ AFMTéléthon ǀ Juin 2014
Un comité international de spécialistes des dystrophies musculaires
congénitales, l’International Standard of Care Committee for Congenital
Muscular Dystrophy, a été constitué pour élaborer des recommandations
diagnostiques et de soins dans ces maladies rares.
Ce comité a élaboré des recommandations pour le diagnostic des
dystrophies musculaires congénitales en s'appuyant sur une revue de la
littérature et des avis d'experts. Ces recommandations, publiées en janvier
2014, permettront notamment d’aider les cliniciens à reconnaitre les
différentes formes de DMC et d’orienter les analyses génétiques vers tel
ou tel gène selon la présentation de la maladie.
Un guide sur les recommandations pour la prise en charge dans les DMC
réalisé grâce au soutien de Treat-NMD, de l’AFM-Téléthon et de
l’association américaine Cure CMD est disponible (en français) sur le site
internet de l’association Cure CMD.
WEB www.curecmd.org/cmd-care
Des bases de données
Le développement de registres de patients permet d’effectuer un
recensement exhaustif des personnes atteintes d'une maladie et de
préciser l’histoire naturelle de celle-ci. La détermination de l’histoire
naturelle d'une maladie est un pré-requis important avant la mise en place
d'essais cliniques.
Ces bases de données de patients permettent aussi de mieux connaître
l’évolution à long terme des DMC et d'établir des relations entre
l’anomalie génétique (génotype) et les manifestations cliniques de la
maladie (phénotype).
Une base de données internationale des dystrophies musculaires
congénitales dont la création par l’association Cure CMD en 2009 a été
soutenue par l’AFM-Téléthon, recense les personnes dans le monde
atteintes de dystrophie musculaire congénitale.
Cette base de données internationale des maladies musculaires
congénitales, CMDIR (pour Congenital Muscular Dystrophy International
Registry), a pour but de faciliter l’identification des personnes atteintes de
DMC pour des essais cliniques, d’améliorer le diagnostic et la prise en
charge et de collecter des données globales sur la DMC. Elle dispose d’une
aide en ligne, avec des conseillers génétiques, pour répondre aux
questions.
Avancées dans les dystrophies musculaires congénitales
Savoir & Comprendre
La base de données internationale des dystrophies musculaires
congénitales (CMDIR) en pratique
• Le CMDIR a pour but de collecter les informations sur les patients atteints d’une
dystrophie musculaire congénitale.
- Plus de 700 patients sont actuellement recensés dans la base.
- Les patients doivent remplir un questionnaire sur le site internet :
WEB www.cmdir.org
- Les patients sont recontactés chaque année pour actualiser leurs données.
- Des informations sont envoyées aux patients susceptibles d’être inclus dans des
essais cliniques.
- Un conseiller en génétique (anglophone) en ligne peut aider à répondre aux
questions des patients.
Des études de l’histoire naturelle
Une étude internationale de l’histoire naturelle a été réalisée en
s’appuyant sur les données cliniques et paracliniques de 145 personnes
atteintes de DMC liée au collagène VI. L’accent a été mis sur l’analyse des
paramètres respiratoires. Dans les formes les plus sévères (comme la
dystrophie musculaire d’Ullrich), une ventilation non invasive était
nécessaire à partir de l’âge de onze ans et demi. Dans les autres formes,
l’évolution était plus contrastée, avec une capacité vitale souvent très
longtemps conservée.
Ce que les médecins appellent
l'histoire naturelle d'une
maladie est la description des
différentes manifestations d'une
maladie et de leur évolution au
cours du temps en l'absence de
tout traitement (médicaments,
kinésithérapie, chirurgie…).
Récemment, un groupe de myologues français s’est intéressé à la fonction
diaphragmatique chez 7 personnes atteintes de dystrophie musculaire
d’Ullrich et âgées de 6 à 28 ans. Ils ont confirmé l’atteinte préférentielle du
diaphragme et des muscles expiratoires dans cette maladie. Cette atteinte
respiratoire qui est propre à la dystrophie musculaire d’Ullrich pourrait
aider à orienter les cliniciens dans le diagnostic de cette maladie.
Développer des modèles animaux des DMC
Pour étudier les mécanismes moléculaires en jeu dans les dystrophies
musculaires congénitales et tester de nouvelles pistes thérapeutiques, les
chercheurs développent des modèles animaux qui reproduisent les
anomalies génétiques et au moins certains signes cliniques de la maladie.
Actuellement, pour les alpha-dystroglycanopathies, il existe des souris
modèles du syndrome muscle-œil-cerveau (avec anomalie génétique dans
le gène POMGnT1), des souris modèles de DMC1D (avec anomalie
génétique dans le gène LARGE) et des souris modèles de la maladie de
Fukuyama (anomalie génétique dans le gène de la fukutine).
Pour les autres dystrophies musculaires congénitales, il existe des souris
modèles de DMC1A avec déficit primaire en laminine α2. Des modèles de
poisson zèbre et de souris ont été développés pour la DMC d'Ullrich. Un
modèle de souris et un modèle de poisson zèbre ont été également créés
pour la DMC avec déficit en sélénoprotéine N. Un modèle de poisson
zèbre pour la DMC avec déficit en FKRP a été mis au point.
Un modèle animal est un
animal qui reproduit les
caractéristiques de la maladie (à
la fois sur le plan génétique et sur
le plan clinique) permettant
l'étude des mécanismes de la
maladie ou l'essai de traitements
potentiels.
Récemment, des chercheurs américains ont développé une souris modèle
de DMC liée au collagène VI, en induisant une délétion dans un exon du
gène Col6a3. Les souris présentent des anomalies tissulaires et
11 ǀ AFMTéléthon ǀ Juin 2014
Savoir & Comprendre
Avancées dans les dystrophies musculaires congénitales
musculaires très proches de celles observées dans le déficit en collagène
VI. Il s’agit du second modèle de DMC liée au collagène VI.
Des outils diagnostiques performants
De nouvelles techniques d'analyse génétique ont été mises au point pour
rechercher de nouveaux gènes ou identifier de nouvelles anomalies
génétiques. Plus rapides et plus précises, ces techniques de séquençage
nouvelle génération permettent de lire "mot à mot"- les chercheurs disent
"séquencer" - le génome entier et de caractériser l’ARN messager, les
petits ARN, les régions de facteurs de transcription, la structure de la
chromatine, la méthylation de l'ADN…
Chaque gène est structuré en
une alternance de séquences
codantes : les exons, et de
séquences non codantes : les
introns. On appelle "codant" les
portions du gène qui sont
utilisées par la machinerie
cellulaire comme guide de
montage pour la fabrication de
la protéine et donc seuls les
exons sont traduits en protéine.
Très récemment, la technique dite de "séquençage de l’exome entier"
c’est-à-dire de séquençage de tous les exons de gènes codant des
protéines, a permis de mettre en évidence un nouveau gène, le gène
COL12A1 responsable d’une DMC avec déficit primaire en collagène XII.
Les gènes GMPPB, DPM1, SGK196 impliqués dans les alphadystroglycanopathies ont également été identifiés grâce à ces techniques
de séquençage nouvelle génération.
Explorer de nouvelles pistes thérapeutiques
Des pistes thérapeutiques ont émergé ces dernières années grâce à la
meilleure compréhension des mécanismes pathologiques.
Rétablir le lien rompu
Le déficit en l'une ou l'autre des protéines entraînant un
dysfonctionnement du système d'amarrage entre la matrice extracellulaire
et l'intérieur de la cellule musculaire, certaines approches thérapeutiques
développées consistent à rétablir le lien rompu entre l'extérieur et
l'intérieur de la cellule musculaire.
Différentes méthodes sont utilisées :
- faire exprimer de nouveau la protéine manquante : technique
expérimentée pour le collagène VI dans des cultures de cellules issues de
personnes atteintes de DMC d'Ullrich ;
- remplacer la protéine manquante par une autre protéine ayant des
capacités au moins partiellement similaires : remplacement de la
laminine α2 par l'agrine ou par l’intégrine α7 dans une souris modèle avec
des anomalies de la laminine α2, substitution des laminines-211 et -221
par la laminine-111 dans une souris modèle de DMC1A ;
- rétablir le bon fonctionnement de la protéine manquante : la
surexpression du gène LARGE induit une augmentation très importante de
la glycosylation de l'alpha-dystroglycane dans des cellules en culture
provenant de personnes atteintes de dystrophie musculaire de type
Fukuyama, du syndrome de Walker-Walburg ou du syndrome muscle-œilcerveau (MEB) ; cette surexpression du gène LARGE entraine également la
restauration de la glycosylation de l’alpha-dystroglycane dans les muscles
squelettiques et cardiaques de souris atteintes d'alpha-dystroglycanopathies ;
un traitement par le curcumin ou par baisse de température corrige la
localisation anormale de la fukutine anormale dans des cellules en culture.
12 ǀ AFMTéléthon ǀ Juin 2014
Avancées dans les dystrophies musculaires congénitales
Savoir & Comprendre
Dans les DMC liées au collagène VI
Le saut d’exon
Le saut d'exon consiste à faire en sorte que l'ARN messager, qui servira de
guide de fabrication à la protéine, ne comporte plus certaines parties
codantes (exons) anormales. Pour ce faire, les chercheurs trompent le
système d'épissage en masquant des sites précis sur l'ARN pré-messager,
au moyen de molécules mimant des séquences complémentaires d’ARN,
les oligonucléotides antisens.
Au cours de la synthèse des protéines, l'épissage est une étape de
maturation des ARN messagers.
Pendant l'épissage, les fragments non codants des gènes (introns, en bleu) des
pré-ARN messagers sont supprimés et les fragments codants des gènes (exons,
en jaune orangé) sont collés les uns à côté des autres pour former l'ARN
messager mature. C'est celui-ci qui sera traduit en protéine.
En 2012, une équipe a montré l’efficacité dans des fibroblastes en culture
d’oligonucléotide antisens ciblant l’exon anormal du gène codant le
collagène pour détruire ce gène anormal. L’exon muté du gène du
collagène a bien été sauté, ce qui inhibe l’expression de collagène anormal
et permet de restaurer la sécrétion de collagène normal.
Une autre approche récemment étudiée a consisté à sauter l’exon anormal
à l’aide de petits ARN interférents qui vont inhiber l’expression de
collagène VI anormal dans des fibroblastes en culture. La quantité et la
qualité du collagène VI dans la matrice extracellulaire en est améliorée.
L'épissage est une étape de la
fabrication des protéines.
Dans la première étape, la
transcription, le message du gène
est "transcrit" en ARN messager
(un peu comme une photocopie
de la région d'ADN qui porte le
gène).
Dans la seconde étape, l'épissage,
l'ARN messager est "épissé" :
certaines parties sont coupées et
les morceaux restants sont réunis
en un seul brin d'ARN messager
mature qui ne contient que les
informations nécessaires pour
guider la synthèse de la protéine.
Un oligonucléotide antisens
est un fragment d'ARN,
généralement synthétisé en
laboratoire qui se lie
spécifiquement à un ARN
messager naturel (la séquence
de l’oligonucléotide antisens est
complémentaire de celle de
l'ARN messager). Il peut ainsi
modifier à un endroit précis
l’ARN messager (saut ou
incorporation d’exon(s) en
intervenant à l'étape de sa
maturation (l’épissage).
13 ǀ AFMTéléthon ǀ Juin 2014
Savoir & Comprendre
L'autophagie est un processus
permettant à une cellule de
dégrader une partie de son
contenu.
Au cours d'un essai clinique de
phase II, un médicament, dont il
a été montré au préalable qu'il
était bien toléré (au cours d'un
essai de phase I) est administré à
un groupe de malades dans le
but de déterminer l'efficacité
thérapeutique, les doses
optimales et la sécurité du
traitement (Quel est le mode
d’administration et la dose
maximale tolérée ?).
La phase II peut être divisée en
deux étapes : la phase IIa étudie
le dosage et la phase IIb
l'efficacité du traitement.
>> Essais cliniques et maladies
neuromusculaires, Repères Savoir
& Comprendre, AFM, Juillet 2010.
L'European Neuromuscular
Centre (ENMC) est une
organisation internationale visant
à soutenir la recherche dans le
domaine des maladies
neuromusculaires. Il organise
régulièrement des rencontres
internationales rassemblant
scientifiques et cliniciens sur une
thématique donnée.
WEB www.enmc.org/
Les cellules souches possèdent à
la fois la capacité de se multiplier
à l’identique pour produire de
nouvelles cellules souches (autorenouvellement) et celle de
donner naissance, dans des
conditions déterminées, à des
cellules différenciées (cellules
sanguines, cellules du foie,
cellules musculaires...).
Avancées dans les dystrophies musculaires congénitales
Restaurer l’autophagie
Dans les dystrophies musculaires liées au collagène VI, le phénomène
d’autophagie est inefficace dans le muscle squelettique. La réactivaction
de l’autophagie pourrait être déclenchée grâce à des régimes pauvres en
nutriment ou en facteur de croissance.
En Italie, une étude pilote de phase II a évalué les effets d’un régime
pauvre en protéine chez 8 personnes atteintes de dystrophie musculaire
d’Ullrich ou de myopathie de Bethlem. Cette étude avait pour but
d’évaluer si un tel régime alimentaire pouvait corriger les anomalies de
l’autophagie chez les participants. Cette étude sur 12 mois a fait suite à
une étude d’histoire naturelle sur 3 mois (sans régime).
La phase clinique de l’étude est terminée et les données sont en cours
d’analyse. Des résultats préliminaires présentés à un congrès de l’ENMC
consacré à l’autophagie (8 décembre 2014 à Naarden, Pays-Bas) n’ont
montré aucun effet secondaire de ce régime alimentaire.
Essai terminé en Italie
• Étude pilote de phase II d’un régime pauvre en protéine chez 8 personnes
atteintes de dystrophie musculaire d’Ullrich ou de myopathie de Bethlem
- Essai terminé. Données en cours d’analyse
La thérapie cellulaire
La thérapie cellulaire a pour but de remplacer des cellules déficientes ou
anormales par des cellules souches. Elle consiste à prélever des cellules
soit chez le patient à traiter (autogreffe), soit chez un donneur (allogreffe).
Ces cellules sont ensuite purifiées, modifiées (ou non), puis multipliées en
laboratoire. Elles sont alors injectées dans l'organe (ou en systémique) à
traiter de la personne malade. Différents types de cellules sont
actuellement utilisés.
En 2014, une étude apporte la preuve de concept de la faisabilité d'une
greffe de cellules souches de tissu graisseux pour produire du collagène VI
dans des souris avec un déficit en collagène. Les cellules ainsi greffées
dans le muscle y ont produit et sécrété du collagène VI.
Dans les alpha-dystroglycanopathies
La thérapie génique
La thérapie génique, consiste à remplacer un gène défectueux en
apportant, à l’aide d’un vecteur, le gène normal.
Les chercheurs ont développé différents types de vecteurs et de
techniques permettant le transfert du gène thérapeutique jusqu'au noyau
des cellules malades : les vecteurs viraux (virus dont les éléments
pathogènes sont remplacés par le gène thérapeutique comme les AAV),
les vecteurs synthétiques (plasmide, vecteurs lipidiques,…) et des
techniques "physiques" (électroporation,...).
En 2013, une stratégie de thérapie génique a été appliquée pour
surexprimer le gène LARGE dans plusieurs modèles de souris atteintes
d'alpha-dystroglycanopathie. Cette approche s'est avérée efficace dans
des souris modèles ayant une anomalie dans le gène LARGE, mais aussi
14 ǀ AFMTéléthon ǀ Juin 2014
Avancées dans les dystrophies musculaires congénitales
Savoir & Comprendre
dans des souris modèles ayant une anomalie dans le gène POMGnT1 ou
dans le gène FKRP.
Dans la DMC1A
Restaurer la laminine α2
Pour restaurer une dystrophine plus courte mais fonctionnelle, plusieurs
types d'oligonucléotides antisens ont été testés avec succès chez la souris
modèle de la myopathie de Duchenne. C’est le cas notamment des
oligomères morpholino phosphorodiamidate (PMO).
Appliquée à des souris modèles de la DMC1A, l’injection de ces mêmes
PMO a entrainé la restauration de laminine α2 et a augmenté l’espérance
de vie des souris traitées.
Inhiber le protéasome
Des travaux ont montré que le muscle atteint de DMC1A présente une
activité du protéasome augmentée.
Un effet thérapeutique du bortezomib, un inhibiteur du protéasome utilisé
dans le traitement de certains lymphomes et myélomes, a été obtenu
récemment dans des modèles de souris atteints de DMC1A : les
caractéristiques histologiques, le poids, la locomotion et la durée de vie
des souris ont été améliorés.
La thérapie cellulaire
En 2012, pour la première fois la transplantation de cellules stromales
mésenchymateuses issues de cordon ombilical a été étudiée dans une
souris modèle de DMC1A en association à un traitement par IGF-1, un
facteur de croissance connu pour améliorer la régénération musculaire. La
fibrose et l’inflammation musculaires ont été réduites et la force
musculaire des souris a été significativement améliorée.
Le protéasome est un complexe
enzymatique responsable de la
dégradation des protéines mal
repliées, dénaturées ou obsolètes
pour la cellule. Les protéines à
dégrader sont marquées par une
protéine appelée ubiquitine. Il
faut une chaîne d'au moins
quatre ubiquitines pour que le
protéasome reconnaisse la
protéine à dégrader.
Diminuer la fibrose
Le losartan est un inhibiteur des récepteurs à l'angiotensine II utilisé dans
le traitement de l’hypertension artérielle chez l’homme.
Des travaux rapportent les effets positifs du losartan ou d’un dérivé du
losartan (le L-158809) dans des souris modèles de DMC1A. La force
musculaire et la fibrose des souris ont été significativement améliorées par
rapport à celles des souris sous placebo.
Essai de l'omigapil en prévision chez l'homme
Des recherches pré-cliniques réalisées par la société Santhera
Therapeuticals ont montré que l’omigapil entrainait une diminution de la
sévérité des symptômes et une augmentation de la survie de modèles
animaux de la DMC1A. Les études pré-cliniques réglementaires de
l’omigapil dans la DMC en France ont été financées par l’AFM-Téléthon.
L’effet positif de l’omigapil a été confirmé récemment dans des souris
modèles de dystrophie musculaire congénitale de type 1A en diminuant la
fibrose et en améliorant leur fonction respiratoire.
Les résultats de ce travail viennent compléter les données précliniques
nécessaires à la mise en place d’un essai de l’omigapil chez l’homme.
Un premier essai clinique de l’omigapil dans les DMC liées à une anomalie
dans le gène codant le collagène VI (DMC de type Ullrich, myopathie de
15 ǀ AFMTéléthon ǀ Juin 2014
Savoir & Comprendre
Avancées dans les dystrophies musculaires congénitales
Au cours d'un essai clinique de
phase I un médicament dont
l'intérêt thérapeutique a été
montré sur des modèles animaux
et/ou cellulaires (essais
précliniques) est administré pour
la première fois à un petit
groupe de volontaires sains, plus
rarement à des malades, afin
d'évaluer leur tolérance à la
substance en fonction de la dose
(Comment le futur traitement
est-il absorbé et éliminé ?
Comment se fait sa répartition
dans les organes ? Est-il toxique
et à quelles doses ? Existe-t-il des
effets secondaires ?).
Bethlem ou formes intermédiaires) ou à un déficit primaire en laminine α2
(DMC1A) est en préparation par la société Santhera Therapeuticals, en
collaboration avec EndoStem, un consortium européen de cliniciens,
chercheurs et industries pharmaceutiques.
>> Essais cliniques et maladies
neuromusculaires, Repères Savoir &
Comprendre, AFM, Juillet 2010.
La pharmacocinétique étudie le
devenir d'un médicament dans
l'organisme. Comment (quantité,
vitesse...) est-il absorbé ?
Comment diffuse-t-il dans
l'organisme (quantité, vitesse...) ?
Comment est-il transformé, puis
éliminé (par le foie, par le
rein...) ?
16 ǀ AFMTéléthon ǀ Juin 2014
Il s’agit d’une étude pharmacocinétique, dont le but principal est d’étudier
le devenir du produit dans l’organisme et les effets secondaires à court
terme afin de déterminer la dose optimale d’omigapil. Cette étude
permettra aussi de tester la faisabilité d'un essai clinique évaluant
l'efficacité de l'omigapil chez ce type de patients et d'en élaborer le
protocole. L’essai sera réalisé aux États-Unis sur un petit nombre d’enfants,
âgés de 5 à 16 ans.
Essai en préparation aux États-Unis
• Essai de phase I en ouvert de l’omigapil sur 3 mois chez des personnes atteintes
de DMC liée au collagène VI ou à l'absence de laminine α2
- Étudier le devenir du produit dans l'organisme (étude pharmacocinétique) et les
éventuels effets secondaires à court terme afin de déterminer la dose optimale
d'omigapil (tolérance)
>> Tout au long de l'année, suivez l'actualité de la recherche dans les maladies neuromusculaires
sur WEB www.afm-telethon.fr > Voir toutes les actus > Maladies