Trav. Inst. Sci. Rabat, sér. Géol. & Géogr. phys., n° 21, 2003, p.225-232 Le risque sismique dans le Nord du Maroc Taj-Eddine CHERKAOUI 1 et Lahcen ASEBRIY 2 1: Département du Physique du Globe; Institut Scientifique, B.P. 703, Université Mohammed V, Rabat, Maroc; e-mail : [email protected] 2: Département de Géologie, Institut Scientifique, B.P. 703, Université Mohammed V, Rabat, Maroc; e-mail : [email protected] Résumé. L’activité sismique dans le Nord du Maroc est due en grande partie à une intense activité tectonique Plio-Quaternaire et actuel engendrée par le rapprochement des deux plaques lithosphériques Afrique-Eurasie dont la vitesse de rapprochement est de l'ordre de 0.5 cm/an au niveau du détroit de Gibraltar. La direction générale de convergence est NNW-SSE à N-S. Dans ce travail, nous avons tenté d’évaluer les intensités qu’on aurait observées dans le Nord du Maroc, engendrées par trois importants séismes historiques en utilisant des lois d’atténuation établies pour le Maroc, et de tracer une esquisse des intensités maximales observées. Les résultats obtenus montrent l’importance de la sismicité historique pour l’évaluation du risque sismique. Mots clés : : sismicité historique, carte des intensités maximales, aléa sismique, Nord du Maroc. Abstract. The seismic activity in the North of Morocco is due mainly to an intense Plio-Quaternary and current tectonic activity generated by the convergence of two lithospheric plates, Africa and Eurasia, with a low rate of 0.5 cm/yr at the Gibraltar Straits. The general direction of convergence is NNW-SSE to N-S. In this work, we tried to evaluate the intensities which one would have observed in the Northern Morocco, generated by three significant historical earthquakes by using attenuation laws established for Morocco, and to trace a draft of the maximum intensities observed (isoseismic map). The results obtained show the importance of the historical seismicity for the evaluation of the seismic risk. Key words : Morocco, historical seismicity, isoseismic map, seismic risk, North of Morocco. INTRODUCTION Le Maroc est considéré comme un pays de sismicité modérée par rapport à d’autres pays du bassin méditerranéen comme l’Algérie, la Grèce, l’Italie ou la Turquie. Néanmoins, les données de la sismicité historique et instrumentale montrent que le Maroc n’est pas à l’abri des tremblements de terre destructeurs comme se fut le cas en 1522, 1624, 1755 ou en 1960. Les cartes de sismicité du Maroc montrent les provinces du Nord comme les régions les plus actives sismiquement ; situé dans une zone de collision, a proximité de la limite entre les deux plaques Afrique - Eurasie, le Nord du Maroc subi donc l’effet de la convergence. APERCU GEOLOGIQUE La chaîne rifaine, qui appartient à l’arc bético-rifo-tellien (Fig. 1), est affectée, au Miocène supérieur (Messinien), par des déformations à grand rayon de courbure suivie d’une tectonique cassante matérialisée par des décrochements et des failles normales au Plio-Quaternaire récent. Le jeu tardif de ces accidents majeurs (PAQUET, 1969; ANDRIEUX, 1971; ANDRIEUX et al., 1971; FOUCAULT, 1971; DIDON et al., 1973, AÏT BRAHIM, 1991; ASEBRIY et al., 1993) a joué un rôle capital dans la structuration récente de la chaîne rifaine et de l'arc de Figure 1. Le cadre structural de la Méditerranée occidental (DURAND-DELGA et FONTBOTE 1980) Taj-Eddine CHERKAOUI & Lahcen ASEBRIY: Le risque sismique dans le Nord du Maroc Figure 2 : Carte de sismicité générale de l’arc de Gibraltar et le Rif (1901-1998). Ne sont représentés que les séismes dont la magnitude ≥ 3.5. Gibraltar. Ensuite, certains d'entre eux jouent en distension pour aboutir à la formation des horsts et grabens; d'autres rejouent en décrochement lors de la phase de compression quaternaire (GROUPE DE RECHERCHE NEOTECTONIQUE DE L'ARC DE GIBRALTAR, 1977). Cette compression N-S, engendre des plis, des failles inverses et des décrochements conjugués dextres (NW-SE) et senestres (NE-SW). L'analyse microtectonique effectuée dans le Rif central, dans les Rides péré-rifaines et dans le bassin de Saïss (AÏT BRAHIM et CHOTIN, 1983; 1984; GROUPE DE RECHERCHE NEOTECTONIQUE DE L'ARC DE GIBRALTAR; 1977), montre que le jeu d'accidents décrochants conjugués dextres et senestres déterminent deux phases de compression : la première, de direction N025 à 030 d'âge Fini-Miocène-Pliocène, la seconde, de direction N00 d'âge Plio-Quaternaire ancien. Au Messinien et Plio-Quaternaire, la direction de la contrainte tectonique compressive σ1 varie, dans le Rif oriental, entre N140°E et N160°E (AÏT BRAHIM et al., 1990). Cet épisode est contemporain, dans le Rif central, au rejeu de failles normales décrochantes de direction subméridienne N 170°E (dextres) et des failles décrochantes senestres N20°E ; N40°E et N50°E dont la réactivation est due à la compression N00° à N40°W au cours de l'épisode compressif allant du Messinien au PlioQuaternaire (AÏT BRAHIM et CHOTIN, 1989). L'épisode compressif (phase N040°E) engendre au Messinien des décrochements senestres de direction NE-SW associés aux failles normales décrochantes dextres. Ainsi, dans la chaîne rifaine, le champ de contrainte connaît, dans le temps et dans l'espace, des oscillations et des rotations anti-horaire de la contrainte maximale σ1 dans un contexte de compression méridienne, au cours du Néogène récent (MOREL, 1992). La contrainte σ1 change de direction du N40°E au Tortonien à l'Ouest de la faille du Nékor à N-S au Messinien à l'Est de celle-ci. Dans l'ensemble de la chaîne et en particulier dans le Rif central et oriental, le champ de contrainte a subi une rotation tardive anti-horaire, lors de l'évènement tectonique allant du Messinien terminal au PlioQuaternaire (CHOTIN et AÏT BRAHIM, 1988). La contrainte maximale de compression σ1 prend une nouvelle direction N140°E-160°E. Dans les parties ouest et sud-ouest de la chaîne (Rides Prérifaines), l'état de contrainte correspond, au Plio-Quaternaire, à une extension ENE-WSW à E-W. Dans le Rif oriental et son avant-pays, l'évolution des bassins néogène et quaternaire est accompagnée d'une activité magmatique bien développée. Elle s'exprime, selon CHOTIN et AÏT BRAHIM (1988), par un volcanisme très diversifié étalé dans le temps et dans l'espace dans une croûte fortement amincie (TADILI et al., 1986; HERNANDEZ et al., 1987; RIMI et LUCAZEAU, 1987; CHERKAOUI, 1991). La déformation superficielle engendrée par ce volcanisme est dominée, dans cette région, par des failles décrochantes NESW et normales N-S associées, en général, à la faille majeure du Nékor. Ce réseau de failles, participe à la genèse des bassins néogènes où ils orientent les émissions volcaniques. Le matériel s'interstratifie par endroits au sein des terrains sédimentaires d'âge Messinien et Plio-Quaternaire (HERNANDEZ et al., 1987). L'activité volcanique est aussi 1 Taj-Eddine CHERKAOUI & Lahcen ASEBRIY: Le risque sismique dans le Nord du Maroc Figure 3: Carte des intensités maximales ressenties dans le Nord du Maroc entre 1901 et 2000. intimement liée à l'évolution tectono-sédimentaire des bassins néogènes de Boudinar, du Kert et de Guercif. Ainsi, la dynamique magmatique est contrôlée par son environnement structural dans un régime compressif de direction NE-SW (AÏT BRAHIM, 1991). Latéralement, les parties centrale et occidentale du Rif sont indemnes de telle activité magmatique. Les données gravimétriques montrent que la croûte ne change pas de nature, et s’épaissit vers l'Ouest (TADILI et al., 1986). Les décrochements d’ordre régional y sont relativement rares. A la lumière des données néotectoniques relatives aux variations du champ de contrainte, nous remarquons que la chaîne rifaine a subi au cours du Messinien au PlioQuaternaire, des déformations qui seraient dues, d'abord, aux mouvements de déplacement du bloc d'Alboran vers le SW et ensuite, au blocage actuel de direction N150°E à NS due à la convergence Europe-Afrique. LA SISMICITE Sismicité ancienne (avant 1900) Les descriptions relatées par les textes historiques relatives à la sismicité ancienne du Maroc, avant 1900, ne sont pas, dans la majorités des cas, suffisamment détaillés pour fixer un épicentre et pour évaluer une intensité. Néanmoins, à partir des catalogues de GALBIS (1932, 1940), de ROUX (1934), de MEZCUA et MARTINEZ SOLARES (1983) et d’EL MRABET (1991), nous avons pu établir une liste des principaux séismes notablement ressenti dans le Nord du Maroc (Tab. I). Sismicité récente La distribution géographique des épicentres dans le Nord du Maroc pour la période 1901 - 1998, permet les observations suivantes (Fig. 2) : On observe dans le Rif occidental deux alignements sismiques, le premier, est orienté NE-SW, entre Jebha et Ouezzane et se prolonge au sud jusqu’à Sidi Kacem. Le deuxième, de direction NW-SE, s’étend entre le golfe de Cadix et Ourthzarh en passant par Larache. L’activité sismique dans ce dernier est probablement liée à l’accident majeur décrochant dextre intrarifain externe, et qui se prolonge jusqu’à la zone coulissante des Açores. Deux séismes de magnitude ≥ 5 ont été enregistrés pendant cette période, dont le plus fort est celui de Aïn Defali du 9/8/1930 (M = 5.2, Io = VII MSK). La majorité des foyers (96.5%) sont superficiels, néanmoins on note la présence de quelques séismes intermédiaires (11 au total) dont le plus profond est localisé à 98 km. Nous avons écarté un événement douteux dit «séisme de Ghomara» du 21/1/1909, que nous avons considéré comme un glissement de terrain provoqué probablement par une petite secousse sismique (CHERKAOUI et al., 1987; HERQUEL et al., 1987; LEVRET, 1995). La région de l’accident majeur du Nékor est considérée comme la zone la plus active sismiquement au Maroc. Les épicentres y sont alignés selon la direction générale de la faille de Nékor (NE-SW). Les données de la compagne de microsismicité réalisée en 1989 dans la région ont montré une faible sismicité de cet accident. La sismicité était plutôt concentrée au voisinage des accidents secondaires (ou auxiliaires) subméridiens. Ceux-ci rejouent actuellement (importance du remplissage quaternaire de la plaine du Bas Nékor) et c'est l'accident majeur du Nékor qui "règle" ce jeu (CHERKAOUI et al., 1990; CHERKAOUI, 1991; HATZFELD et al., 1993). Le plus violent séisme enregistré dans la région est celui du 26/5/1994 (M = 5.6, Io = VIII MSK), qui a provoqué des dégâts importants dans la province d’Al Hoceima (EL ALAMI et al., 1998). Nous avons recensé 17 séismes (2%) intermédiaires dont le plus profond est à 131km. 2 Taj-Eddine CHERKAOUI & Lahcen ASEBRIY: Le risque sismique dans le Nord du Maroc Dans le Rif oriental, la sismicité est surtout concentrée au niveau de l'avant pays oriental rifain, là où un réseau de décrochements senestres de direction "Nékor" est reconnu, tels que les accidents Nord Kebdana et Nord Gareb (HERVOUËT, 1985). Cette région est caractérisée par un volcanisme plio-quaternaire : Gourougou, Beni Bou Ifrour et Guiliz. Celui-ci est à mettre en relation avec les paroxismes compressifs (HERVOUËT, 1985). Dans cette zone, la sismicité se présente comme un alignement de direction NE-SW qui se prolonge jusque dans le bassin de Guercif (CHERKAOUI, 1991). Ce dernier est caractérisé par le volcan de Gueliz qui a été le siège d'une importante activité volcanique au Plio-Quaternaire (HERNANDEZ et al., 1987). Mais le danger sismique peut provenir de la Mer d’Alboran au voisinage des Iles Chaffarines, c’est là où les séismes les plus violents ont lieu et qui sont largement ressenti sur la côte méditerranéenne entre Saïdia et Melilla comme se fut le cas lors du séisme du 23/5/1993 (M = 5.3, Io = VI MSK)) qui a été largement ressenti dans la région. La dernière région correspond au bassin du Saïss - Fès et aux rides prérifaines. La sismicité pourrait y être engendrée par le rejeu d'anciennes failles normales qui affectent le causse moyen-atlasique et qui ont contribué à la genèse du bassin. Le rejeu récent de ces failles a entraîné une activité sismique moyenne (CHERKAOUI, 1991). Les séismes les plus forts enregistrés dans la région n’ont pas dépassé la magnitude 4.6. On note également la présence de deux séismes intermédiaires seulement dont le plus profond est à 133km. CARTES DES INTENSITES MAXIMALES OBSERVEES Les données macrosismiques recueillies sur le terrain lors des tremblements de terre violents ou destructeurs sont d'une grande utilité pour l'évaluation de l'aléa sismique. L'observation instrumentale des séismes est récente alors que la période de retour des événements majeurs peut dépasser quelques siècles. Par conséquent, l'évaluation de l'intensité macrosismique des séismes ressentis reste un paramètre indispensable pour quantifier les effets des événements historiques, et complémentaire à la sismicité instrumentale. C'est à partir de ces valeurs d'intensités qu'il est possible, si les données sont suffisantes, de tracer les isoséistes (courbes d'égale intensité). L'inventaire et l'analyse de ces données permettent l'établissement de cartes d'intensités maximales ressenties; leur importance et leur fiabilité sont liées à la qualité de l'information et à la période d'observation. Pour le Maroc, plusieurs cartes d'intensités maximales ressenties ont été publiées dont notamment celles de ROTHE (1962), DUVERGE (1969), ALEM et LAMTAHRI (1971), BEN SARI (1978, 1987) ONE-SOFRATOME (1985) et LEVRET (1995). Carte des intensités maximales observées 1901-2000 L’établissement de la carte des intensités observées (19012000) est basé sur les données disponibles au département de Physique du Globe, il s’agit de rapports inédits, de coupures de presse, de publications et des questionnaires. Le dépouillement et la synthèse de ces données ont permis d’évaluer les intensités maximales ponctuelles observées dans 188 localités du Nord du Maroc (Fig. 3). Toutes les intensités sont données en MSK 1964. La carte de la figure 3 représente les courbes des isoséistes pour différentes valeurs d’intensité ; le traçage de ces courbes dépend dans une large mesure du jugement personnel de l’auteur. L’apport de la sismicité historique Pour mieux préciser l’influence de la sismicité historique dans l’évaluation de l’aléa sismique, nous avons choisi trois importants séismes ayant affecté par le passé le Nord du Maroc; ce choix est justifié par d’une part, leur position géographique (Alboran, Atlantique et Pré-Rif) et d’autre part, par leur violence (Fig. 4). Le premier séisme est celui du 22/9/1522, bien connu en Espagne car il a presque détruit la ville d’Almeria où l’intensité IX MSK a été observée (MEZCUA, 1982; MEZCUA et MARTINEZ SOLARES, 1983). En ce qui concerne le Maroc, le séisme est passé sous silence par les sources marocaines ! Néanmoins, on sait que la ville de Fès a été largement touchée et sur 160km à la ronde (EL MRABET, 1991), des dégâts ont été également signalés à Tétouan, alors que le fort de Baddis de Ghomara (Peñon de Velez de la Gomera) s’est effondré sous les effets conjugués du séisme et du Tsunami. Le séisme a été également ressenti à Oran et Tlemcen (GALBIS, 1932; 1940; ROUX, 1934; VOGT, 1985; EL MRABET, 1991; LEVRET, 1995). L’épicentre du séisme serait situé en mer d’Alboran au voisinage d’Almeria vers 36.9°N-2.5°W (MEZCUA et MARTINEZ SOLARES, 1983), mais cette localisation ne tient pas compte des dégâts provoqués au Maroc (VOGT, 1985), on propose un épicentre un peu plus vers le sud d’Almeria plus proche des côtes marocaines par 36.5°N-2.5°W. Le deuxième séisme est celui du 11 mai 1624 (23 Rajab 1033H), qui secoua sévèrement la ville de Fès en provoquant la mort de quelques milliers de personnes et des dégâts importants (EL MRABET, 1991). La secousse a été ressentie fortement à Meknès, à Séfrou, à Baddis de Ghomara, à Salé et à Safi (GALBIS, 1932; 1940; ROUX, 1934; VOGT, 1985; EL MRABET, 1991; LEVRET, 1995). L’intensité maximale du séisme (VIII MSK) a été observée à Fès (LEVRET, 1991) et son épicentre est localisé à proximité de celle-ci par 34.0°N5.0°W (MEZCUA et MARTINEZ SOLARES, 1983). Le troisième événement est celui du 1/11/1755, dit de Lisbonne, est l’un des plus violents séismes de toute l’histoire de l’humanité. Les données sur les dégâts provoqués par ce tremblement de terre sont abondantes (GALBIS, 1932; 1940; ROUX, 1934; VOGT, 1985; EL MRABET, 1991; LEVRET, 1995) ce qui a permis de tracer une carte macrosismique pour le Maroc et pour la péninsule ibérique. CALCUL DES INTENSITERS Pour évaluer les effets engendrés par les séismes historiques plusieurs lois d’atténuation de l’intensité en fonction de la distance hypo ou épicentrale ont été établies. La relation la 2 Taj-Eddine CHERKAOUI & Lahcen ASEBRIY: Le risque sismique dans le Nord du Maroc Figure 4 : Localisation géographique des trois séismes historiques. D : dégâts, R : ressenti, ♒ : tsunami, chiffre romain indique l’intensité en MSK. Figure 5: Carte des intensités maximales ressenties en tenant compte des données historiques. plus utilisée est celle de SPONHEUER-KOVESLIGETHY (SPONHEUER W., 1960) : Io - In = 3 log ( Rn ² + h² h² ) + 1.3 α ( Rn ² + h ² - h) Où Io est l’intensité épicentrale, In est l’intensité ponctuelle à la distance épicentrale Rn, h est la profondeur du foyer; et α est le coefficient d’atténuation, ce dernier est calculé pour un séisme dont les données instrumentales (épicentre et profondeur) sont connues et macrosismiques (Io, In) sont suffisantes. L’application de cette loi d’atténuation suppose que les deux séismes, instrumental et historique, ont des caractéristiques comparables (zone sismotectonique, mécanisme, profondeur). Pour le calcul des intensités qu’on aurait observées lors de ces trois séismes historiques dans le Nord du Maroc, nous avons utilisé les lois d’atténuation établies pour le Maroc (CHERKAOUI, 1991) ; les résultats des calculs sont représentés par la carte de la figure 5. 1 Taj-Eddine CHERKAOUI & Lahcen ASEBRIY: Le risque sismique dans le Nord du Maroc Tableau I : Principaux séismes ressentis ou supposés ressentis avec une intensité notable dans le Nord Région épicentrale Date Heure Io (MSK) Régions affectées Lat N - Long W Lieu 1276 09/12/1320 (35.2° - 6.1°) (36.0° - 10.7°) Larache SW Cap St Vincent Larache Portugal: X 24/08/1356 (36.0° - 10.7°) SW cap St Vincent Portugal: X 22/09/1522 a) (36.9° - 2.5)° b) (36.5° - 2.5°) (34.0° - 5.0°) N. Almeria Alboran Fès IX (34.0° - 5.0°) (Fès) VII Almeria: IX; Baddis: VIII; Fès: VII; Tétouan: VI. Meknès et Séfrou: VII; Baddis: VI; Safi: V; Béni Zeroual et Béni Ouryaghel: R. (Fès): VII. (37.2° - 7.9°) Golfe de Cadix (X) 3h – 4h 23 rajab 1033 h 11/5/1624 13 di el Kiada 1119 h 5/2/1708 17h-18h 27/12/1722 01/11/1755 9h 45 (36.5° - 10.5°) SW. cap St Vincent 27/11/1755 soir (34.0° - 5.5°) Meknès 12/04/1773 5h 15 (37° - 10°) W. cap St. Vincent (IX) (35.3° - 3.0°) Melilla VIII 09/08/1801 (35.3° - 4.1°) Baddis VII (35.3° - 3.0°) Melilla VII 11/02/1848 (35.3° - 3.0°) Melilla VII 08/07/1848 (35.3° - 4.1°) Baddis VII Golfe de Cadix VIII 14h 30 20/10/1883 00h 45 37° - 7° 11/10/1926 6h 38 35.42° - 3.45° 09/08/1930 18h 09 34.3° - 5.4° 24/12/1930 14h 27 05/12/1960 7.5 (12)c Alboran Aïn Defali VII (35.0° - 3.7°) Beni Touzine VII 21h 21 35.69° - 6.62° W. Tanger VII 15/03/1964 22h 30 36.13° - 7.75° Golfe de Cadix 28/02/1969 2h 40 36.01° - 10.57° SW. cap St. Vincent 26/05/1994 8h 26 35.27°- 3.96° Baie d’Al Hoceima VIII Portugal: IX-VII. 8.5–9.0 Lisbonne: IX; Meknès: VIII; Fès, (12)c Marrakech, Larache, Asilah, Salé et Safi: VII; El Jadida, Sebta et Tétouan: VII-VI; Tétouan et Gibraltar: VI; Melilla, Oran et Alger: (R). Fès: VII; (Melilla): <V. (VIII) 31/08/1792 08/04/1821 M Tanger: (VII); Salé: V; Fès ? Destruction de plusieurs maisons et des fortifications dans la ville. Fermeture de l’entrée de la mar Chica par le séisme. Gibraltar et Tanger: R 5.6 (4) 5.2 (4) 4.3 (14) 4.9 (14) 6.2 (13) 7.3 (13) 5.6 Melillia: VII Remarques Pas de références sur le Maroc. Tsunami. Aucune indication sur le Maroc. Tsunami à Baddis. 1, 2, 5, 6, 7, 10 1, 2, 6, 7, 10 1, 5, 6, 10, 12 Décrit uniquement par les sources arabes. 10, 11, 12 1, 2, 5, 6, 7, 10, 11, 12 6, 10, 11, 12 34 prémonitoires 1, 2, 6, et 8 répliques. 10 53 secousses. 1, 2, 6, 10 1, 2, 6, 10 1, 2, 6, 10 1, 2, 6, 10 1, 2, 6, 10, 12 1, 2, 4, 8 Maroc: V Carte macrosismique (9) Carte macrosismique (9). Carte macrosismique (9). Carte macrosismique (13). Plusieurs centaines de répliques. Province d’Al Hoceima : VIII 1, 6, 12 Tsunami. Aucune indication sur le Maroc. Tsunami sur les côtes portugaise, marocaine et espagnole. + plusieurs répliques. + 2 répliques. Portugal: VII; Maroc: VI. 1, 6, 10 1, 6 10 Ouezzane: V; Fès et Khémisset: IV; Salé et Rabat: R Tribu de Beni Touzine Portugal: VII; Maroc: V. Réf. 1, 2, 3, 4, 6, 8, 10 1, 4, 8, 15 3, 6, 8, 9, 15 3, 6, 8, 9, 13, 15 6, 8, 9, 14 13 Références: 1) Galbis Rodríguez [1932, 1940]; 2) Roux [1934]; 3) Duvergé [1969]; 4) Kárnik [1969]; 5) Mezcua [1982]; 6) Mezcua et Martínez Solares [1983]; 7) Vogt [1985]; 8) Cherkaoui [1988]; 9) Cherkaoui [1991]; 10) Elmrabet [1991]; 11) Levret [1991]; 12) Campos Romero [1993]; 13) El Alami et al. [1998] ; 14) Bulletins sismologiques USGS; 15) Bulletins sismologiques SSIS; a) localisation selon référence 6; b) nouvelle localisation; c) magnitude estimée. , I: intensité MSK 1964; M: magnitude; R: séisme ressenti. 2 Taj-Eddine CHERKAOUI & Lahcen ASEBRIY: Le risque sismique dans le Nord du Maroc RESULTATS ET DISCUSSION La carte des intensités maximales observées dans le Nord du Maroc, montre l’influence de la sismicité historique en comparaison avec la carte de la figure 5. Dans la partie occidentale, il semble que l’influence du séisme du 1/11/1755 se fasse ressentir sur toute la côte atlantique et à l’intérieur jusqu’aux environs de Fès avec des intensités > VII MSK ; alors qu’à Fès l’intensité VIII MSK a été certainement dépassée lors du séisme de 1624. Dans la partie Nord, entre Jebha et Saïdia, l’influence des séismes de la mer d’Alboran est importante comme se fut le cas lors du séisme du 22/9/1522. Un autre risque est à prendre en considération est celui du tsunami, il est aussi important que le risque sismique, il concerne toute la côte atlantique et des parties de la côte méditerranéenne. La partie orientale reste à l’abri de tout risque sismique où les intensités ne dépassent pas le degré VI MSK. CONCLUSION Nous avons tenté dans cette étude d’évaluer les intensités observées dans le Nord du Maroc, engendrées par trois importants séismes historiques, en exploitant les lois d’atténuation de l’intensité en fonction de la distance épicentrale établies pour le Maroc. Les résultats montrent l’importance de l’influence de la sismicité historique sur les valeurs de l’aléa sismique. En effet, le temps de récurrence nécessaire à l’accumulation des contraintes pour aboutir à la rupture dans les régions fortement sismiques peut être de quelques dizaines d’années voir quelques d’années, par contre, dans les régions faiblement sismiques comme le Maroc, ce temps pourrait être de plusieurs centaines d’années voir quelques milliers, d’où la nécessité de disposer d’archives les plus anciennes possibles et d’établir des catalogues exhaustifs. La prise en compte des effets des séismes majeurs sur le Nord du Maroc, a permis de tracer l’esquisse d’une carte des intensités maximales observées, celle-ci fait le constat des connaissances actuelles de la sismicité. Références ALEM E.M. & LAMTAHRI E. 1971 - Rapport national pour la XVème Assem. génér. Uni. Géod. Géophys. Intern. Doc. Inédit; 9 p. plus 1 carte. h. t. AÏT BRAHIM L. 1991 - Tectoniques cassantes et états de contraintes récents au Nord du Maroc. Thèse d’Etat; Fac. Scien.; Univ. Mohammed V; Rabat; 233p. AÏT BRAHIM L. & CHOTIN P. 1983 - Mise en évidence d'un épisode compressif dans les calcaires plio-quaternaires du bassin du Saiss, Rif, Maroc. Comptes Rendus de la Académie de Science Paris; 296 (II); pp.: 1333-1336. AÏT BRAHIM L. & CHOTIN P. 1984 - Mise en évidence d'un changement de direction de compression dans l'avant-pays rifain (Maroc) au cours du Tertiaire et du Quaternaire. Bull. Soc. géol., France, n°4, 681-691. AÏT BRAHIM L. & CHOTIN P. 1989 - Genèse et déformation des bassins néogènes du Rif central (Maroc) au cours du rapprochement Europe-Afrique, Geodinamica Acta; 3/4; 295-304. AÏT BRAHIM L., CHOTIN P., TADILI B. & RAMDANI M. 1990 The Targuist seismogene zone and its relation with the thrust front of the external domain on the foreland (Rif, Morocco). In Structure and evolution of the Atlas Mountain System in Morocco, 43, Berlin. ANDRIEUX J. 1971 - La structure du Rif central. Notes et Mém. Serv. géol. Maroc, n° 235, 155p. ANDRIEUX J., FONTBOTE J.M. & MATTAUER M. 1971 - Sur un modèle explicatif de l’arc de Gibraltar. Earth Plan. Sci. Letteres, vol. 12, n° 2, 191-198, 6 fig. ASEBRIY L., BOURGOIS J., CHERKAOUI T.-E. & AZDIMOUSA A. 1993 - Evolution tectonique récente de la zone de faille du Nékor : importance paléogéographique et structurale dans le Rif externe, Maroc. Jour. Afr. Earth Scien.; vol. 17; n° 1; 65-74. BEN SARI D. 1978-1987 - Connaissance géophysique du Maroc. Thèse d'Etat; Univ. Grenoble; 262p; plus fig. 2ème édition; C.N.C.P.R.S.T. éd., 1987; 207p. CAMPOS ROMERO L. M. 1992 - El riesgo de tsunamis en Espagña. Analisis y valoracion geografica. Inst. Geogr. Nacional; Madrid; 204p. CHERKAOUI T.-E. 1988 - Fichier des séismes du Maroc et des régions limitrophes: 1901-1984. Trav. Inst. Scien.; Série géol. géogr. phys.; n°17; Rabat; 158p. plus carte h. t. CHERKAOUI T.-E. 1991 - Contribution à l'étude de l'aléa sismique au Maroc. Thèse de l'Université Joseph Fourier; Grenoble; 246p. CHERKAOUI T.-E., HERQUEL G., ASEBRIY L. & EL ALAMI S.O. 1987 - Projet de barrage sur l'oued Smir (région de Tétouan, Maroc). Etude du risque sismique. In Symposium sur les «tremblements de terre. Evaluation du risque, mesures de prévention et d'aide". Brigue, 7-10 avril 1986; 396-414. CHERKAOUI T.-E., HATZFELD D., JEBLI H., MEDINA F. & CAILLOT V. 1990 - Etude microsismique de la région d'Al Hoceima, Bull. Inst. Sci., Rabat, 14, 25-34. CHOTIN P. & AIT BRAHIM 1988 - Transpression et magmatisme au Néogène-Quaternaire dans le Maroc oriental. C.R. Acad. Sci. Paris, t. 306, SII, 1479-1485. DIDON J., DURAND DELGA M., et KORNPROBST J. 1973 Homologie géologique entre les deux rives du détroit de Gibraltar. Bull. Soc. géol. France, (7), t. XV, p. 77-105, 11 fig., 1 pl. h.t., documents inédits de l'excursion de la Société géologique de France DURAND DELGA M. et FONTBOTE J.M. 1980.- Le cadre structural de la Méditerranée occidentale. 26° Cong. Géol. Intern. Colloque C5, Mém., Bur., Rech. Géol. Min., n°115, p. 67-85, Paris DUVERGE J. 1969 - La séismicité du Maroc. Le séisme d'Agadir et la protection paraséismique. Dip. Ing. Géophys.; Inst. Phys. Globe; Univ. Strasbourg; 110p. EL ALAMI S.O., TADILI B.-A., CHERKAOUI T.-E., MÉDINA F., RAMDANI M., AÏT BRAHIM L. & HARNAFI M. 1998 - The Al Hoceima earthquake of May 26, 1994 and its aftershocks: a seismotectonic study. Annali di geofisica, v. 41, n° 4, pp.: 519537. EL MRABET A., T. 1991 - Histoire sismologique du Maroc. Doc. 3ème cycle, Fac. des Lettres, Univ. Mohammed V, Rabat, 375p. FOUCAULT A. 1971 - Etude géologique des environs des sources du Guadalquivir (Provinces de Jaen et de Grenade, Espagne méridionale). Thèse, Paris, CNRS n° A.O.6343; 2 tomes, 633p. 1 Taj-Eddine CHERKAOUI & Lahcen ASEBRIY: Le risque sismique dans le Nord du Maroc GALBIS RODRIGUEZ J. 1932 - Catalogo sismico de la zona comprendida entre los meridianos 5°E y 20°W de Greenwich y los paralelos 45° y 25°N. I; Inst. Geogr. y Catastral; 807p. GALBIS RODRIGUEZ J. 1940 - Catalogo sismico de la zona comprendida entre los meridianos 5°E y 20°W de Greenwich y los paralelos 45° y 25°N. II; Inst. Geog. y Catastral; 207p. GROUPE DE RECHERCHE NEOTECTONIQUE DE L'ARC DE GIBRALTAR. 1977 - L'histoire tectonique récente (Tortonien à Quaternaire) de l'arc de Gibraltar et des bordures de la mer d'Alboran. Bull. Soc. géol. France; 7; XIX; 3; 575-614. HATZFELD D., CAILLOT V., CHERKAOUI T.-E., JEBLI H. & MEDINA F. 1993 - Microearthquake seismicity and fault plane solutions around the Nékor strike slip fault, Morocco. Earth Planetary Scien. Let.; 120; pp: 31-41. HERNANDEZ J., LAROUZIERE F.D., BOLZE J. & BORDET P. 1987 - Le magmatisme néogène bético-rifain et le couloir de décrochement trans-alboran. Bull. Soc. géol. France, (8), t. III, n°2, 257-267. HERQUEL G., CHERKAOUI T.-E. & ASEBRIY L. 1987 Evaluation du risque sismique dans la région du détroit de Gibraltar. In Symposium sur les "tremblements de terre. Evaluation du risque, mesures de prévention et d'aide". Brigue, 7-10 avril 1986; 155-181. HERVOUET Y. 1985 - Géodynamique alpine (Trias - Actuel) de la marge septentrionale de l'Afrique du Nord au nord du bassin de Guercif (Maroc oriental). Thèse Doct. Etat, Univ. de Pau, France, 367 p. 182 fig. KARNIK V. (1969) - Seismicity of the European area. Part I. (Prague and Dordrecht-Holland); 364p. LEVRET A. 1991 - The effects of the November 1, 1755 "Lisbon" earthquake in Morocco. Tectonophysics; 193; pp: 83-94. LEVRET A. 1995 - Macrosismicité historique et contemporaine du Maroc en vue de l’évaluation de l’aléa sismique sur le site de sidi Boulbra. In « Etude de sites et de faisabilité d’une première centrale électronucléaire au Maroc». Rapport Inédit, Office National de l’Electricité (Maroc.) et Sofratome, 78p. MEZCUA J. 1982 - Catalogo general de isosistas de la peninsula iberica. Inst. Geogr. Nacional; Pub. 202; Madrid; 261p. MEZCUA J. & MARTINEZ SOLARES J.M. 1983 - Sismicidad del area Ibero-Mogrebi. Inst. Geog. Nacional; 203; 301p. MOREL J.C. 1992 - Carte des mouvements récents du Rif. Notes et Mém. Serv. géol., Maroc, n° 365. OFFICE NATIONAL DE L'ELECTRICITE & SOFRATOME 1985 Etude de sites et de faisabilité d'une première centrale électronucléaire au Maroc. Rapport. inédit; 69p. PAQUET J. 1969 - Etude géologique de l’Ouest de la province de Murcie (Espagne). Mém. Soc. Géol. France, NS, mémoire n° 111, t. XLVIII, 270p. RIMI A. & LUCAZEAU F. 1987 - Heat flow density measurements in northern Morocco. Jour. of Afr. Earth Sciences, vol. 6, n° 6, 835843. ROTHE J.- P. 1962 - Le séisme d'Agadir et la séismicité du Maroc. In "Le séisme d'Agadir du 29 Février 1960." Duffaud F., Rothé J.-P., Debrach J., Erimesco P., Choubert G. & Faure-Muret A.". Notes et Mém. Serv. géol. Maroc; 154; 7-29. ROUX G. 1934 - Notes sur les tremblements de terre ressentis au Maroc avant 1933. Mém. Soc. Scien. Nat. Maroc; XXXIX; pp: 42-71. SPONHEUER W. 1960 - Methoden zur herdteifenbestimmung in der makroseismik. Freidberger Forschungshefte, Akademic, Verlag, Berlin, 117p. TADILI B., RAMDANI M., BEN SARI D., CHAPOCHNIKOV K. & BELLOT A. 1986 - Structure de la croûte dans le Nord du Maroc. Ann. Géophys.; 4; 99-104. VOGT J. 1985 - Révision d'anciens séismes ibéro-maghrébins. In "Etudes de sites de faisabilité d'une première centrale électronucléaire au Maroc". In « Etude de sites et de faisabilité d'une première centrale électronucléaire au Maroc.», Office National de l’Electricité et Sofratome, Rapport inédit, 69p. 2
© Copyright 2024 ExpyDoc