Monnaie, finance Nicolas Canry M1-M2 MEEF 2014-2015 Plan • Introduction générale • Première partie : la finance I. Les marchés financiers (fonctions et fonctionnement / les marchés dérivés / les taux d'intérêt / bulles et krachs financiers, etc.) II. Les banques (fonctions / risques et gestion des risques / bilans bancaires / ratios de liquidité et de solvabilité, etc.) • Deuxième partie : la monnaie I. Fonctions de la monnaie et création monétaire (base et masse monétaires, banques privées - banque centrale, le prêteur en dernier ressort, etc.) II. La monnaie dans les théories classique et keynésienne (neutralité de la monnaie, monnaie et taux d'intérêt chez Keynes, la courbe de Phillips et ses interprétations, etc.) III. Politique monétaire (taux directeurs, canaux de la politique monétaire, Quantitative Easing, etc.) Introduction Les grandes équations comptables (en économie fermée) • Optique équilibre du marché des biens : → L’offre de biens (Y) est égale à la demande de biens, sous forme de consommation ou d’investissement : Y=C+I • Optique revenu : → Le produit des ventes (Y) sert à rémunérer les facteurs de production, travail et capital : Y = Salaires + Revenus du capital • Optique utilisation du revenu : Tout revenu (travail ou capital) est soit consommé, soit épargné : Y=C+S Un résultat fondamental Par conséquent, on a toujours : Y=C+S =C+I I=S C’est une égalité fondamentale en économie : à l’équilibre, le montant de l’épargne est égal à celui de l’investissement. La partie « finance » de ce cours va se concentrer sur l’analyse de cette relation : comment est-elle réalisée ? Quels agents interviennent ? Sur quels marché ? Avec quels prix ? Bref, comment sont financés les projets d’investissement d’une économie donnée ? Théories néoclassique et keynésienne s’opposent sur les processus économique assurant la réalisation de cette égalité : – Pour les néoclassiques, épargne et investissement correspondent respectivement aux offre et demande de fonds sur le marché financier (ou marché des fonds prêtables). Dans ces conditions et comme sur tout marché, c’est un prix, le taux d’intérêt, qui par ses variations, va garantir cette égalité. Dans la partie « finance » du cours, on va se placer le plus souvent dans ce cadre d’analyse. – Pour Keynes, le taux d’intérêt ne permet pas d’égaliser épargne et investissement : ce sont les variations du niveau d’activité (production) qui permettra à l’épargne de s’ajuster au volume d’investissement réalisé par les entreprises. On étudiera ce point de vue alternatif fondamental dans la partie consacrée à la « monnaie » Schéma « standard » • Les ménages récupèrent l’intégralité du revenu national, soit en tant que salariés (revenus du travail), soit en tant que créanciers ou actionnaires (revenus du capital). • Les ménages n’ont pas d’activité d’investissement ; seules les entreprises investissent. Dans ce cas, le relation précédente étudie comment l’épargne des ménages et l’investissement réalisé par les entreprises sont mis en relation. Hypothèses alternatives • Introduction de l’Etat : Y = C + I + G et Y=C+S+T d’où S = I + (G – T) On étudie alors comment l’épargne des ménage finance l’investissement des entreprises et le déficit public. • Comportement d’investissement des ménages (achat de logements neufs) : Biens (actifs) immobiliers S Epargne financière = Capacité de financement Hypothèses alternatives • Une partie du revenu national est conservée par les entreprises (profits non redistribués) Rémunération du travail Création de richesse Rémunération du capital Intérêts Profits Dividendes Epargne des entreprises = Autofinancement Dans ce cas, l’épargne nationale est constituée de la somme de l’épargne des ménages et de l’épargne des entreprises. Epargne privée en France (en % du PIB) Ainsi S = Sm + Se= Im + Ie = I Au niveau macroéconomique (en considérant l’ensemble des ménages et des entreprises dans leur ensemble), on notera que l’investissement des ménages est autofinancée (puisque les ménages dégagent une capacité de financement), de même qu’une partie de l’investissement des entreprises. La part non autofinancée vaut : Ie – Se = Sm – Im • Ouverture de l’économie : S = I + (G – T) + (X – M) Le solde commercial donne la position financière de la nation Sphère réelle vs financière • En comptabilité, Les soldes de la sphère réelle donnent les positions financières de chaque agent (a-t-il dépensé plus ou moins que ces ressources ?) • La sphère financière (en termes de flux) étudie la mise en relation des agents à capacité de financement (« épargnants », « prêteurs », offreurs de « fonds prêtables ») et les agents à besoin de financement (« emprunteurs », demandeur de « fonds prêtables », etc.) • A l’équilibre, la somme des capacités de financements est égale à la somme des besoins de financement (en valeur absolue). Epargne et investissement privés en France 26,0 24,0 22,0 20,0 18,0 Epargne privée ramenée au PIB 16,0 Investissement privé ramené au PIB 14,0 12,0 1949 1954 1959 1964 1969 1974 1979 1984 1989 1994 1999 2004 2009 2014 10,0 Capacité et besoin de financement des secteurs institutionnels (% du PIB) en France Capacité/Besoin de financement des secteurs institutionnels en % du PIB, 1949-2013, base 2005 10 8 6 4 Households 2 Firms 0 APU -2 Nation -4 -6 -8 2015 2010 2005 2000 1995 1990 1985 1980 1975 1970 1965 1960 1955 1950 1945 -10 « Global Imbalances » Source : Blanchard Milesi-Ferretti (2010), “Global Imbalances: in Midstream ?”, CEPR Working Paper. Réserves de change des pays émergents Source : Bénassy-Quéré A., Farhi E. Gourinchas P.-O., Mistral J. Pisani-Ferry J. et Rey H., (2011), « Réformer le système monétaire international », Rapport du CAE. Déséquilibres financiers internationaux 10,0 28,0 9,0 26,0 8,0 24,0 7,0 22,0 6,0 20,0 5,0 18,0 4,0 16,0 3,0 14,0 2,0 12,0 1,0 10,0 0,0 8,0 1965 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010 2015 Indicateur de déséquilibre financier international (échelle de gauche, trait simple) et "taux d'exportation" au niveau mondial (échelle de droite, motifs ronds) en %, 19672010, 85 pays. Source : CEPII, base Chelem. Excès d’épargne mondial avant 2008 • Accélération de la libération des mouvements de capitaux depuis le milieu des années 1980. • Accroissement de la mondialisation et des déséquilibres internationaux dans les années 1990 et jusque 2008. • Excès d’épargne au niveau mondial évoqué par B. Bernanke dès 2005 = saving glut. • Causes identifiées : crises asiatiques de 1997-98 (les pays d’Asie réduisent leur dépendance financière en dégagent des excédents commerciaux), excédents commerciaux des pays producteurs de pétrole (prix du pétrole en hausse dans les années 2000), taux d’épargne des ménages chinois très élevé (épargne de précaution, conséquence de la politique de l’enfant unique, etc.), excédent commercial allemand historiquement fort (lois Hartz), etc. Le saving glut est-il responsable de la crise des subprimes ? • Flux d’épargne (de capitaux) allant en sens contraire de ce que prédit la théorie économique : en provenance des pays émergents et à destination des pays développés, où la rentabilité du capital est relativement faible. • Etats-Unis : le système financier propose des produits d’épargne sûrs et attractifs pour le reste du monde. Recyclage de l’épargne mondiale au niveau national : rôle de « consommateur en dernier ressort ». • Les Etats-Unis étant une économie riche et mature, les besoins d’épargne restent limités, notamment chez les emprunteurs traditionnels. Recherche par les institutions financières de nouveaux « compartiments » ou agents à qui prêter cet argent : ménages peu solvables n’ayant généralement pas accès au crédit. • Développement dans cette perspective des « innovations financières » : subprimes, titrisation, etc. Finance Comment est réalisée l’épargne I = S ? On suppose que les ménages n’ont pas d’investissement. • On a déjà vu qu’une partie de l’investissement des entreprises pouvait être autofinancée sur les profits passés non redistribués (qui constituent l’épargne des entreprises). • La part non autofinancée de l’investissement doit être « prêtée » par les ménages. La mise en relation des agents à BF (entreprises) et des agents à CAF (ménages) peuvent transiter par deux canaux : – Elle peut faire intervenir un intermédiaire financier, généralement une banque. On parle alors de finance intermédiée ou finance indirecte. – Elle peut s’effectuer sur un marché, le marché financier. On confronte alors l’offre et la demande de fonds. Un prix, le taux d’intérêt, va assurer l’égalisation de l’offre et de la demande et donc la convergence vers l’équilibre du marché. I. Finance directe 1. le marché financier… r Offre de fonds prêtables = S r* Demande de fonds prêtables = I Fonds prêtables Les variations du taux d’intérêt assurent l’équilibre du marché : I(r*) = S(r*) Introduction des dépenses publiques – Effet d’éviction r* S – T S r1* r0* I I+G–T Fonds prêtables I0 I1 Au nouvel équilibre, la variation du taux d’intérêt nominal réel assure l’égalité : S (r*) = I (r*) + (G – T) … ou finance intermédiée Entreprise Ménage Banque Consommation Investissement Crédit BF = - I BF = - I Dépôts Revenu Y Epargne = CAF Dépôts Epargne = CAF Crédit « Les dépôts (des ménages) font les crédits (aux entreprises) ». Titres et crédit • Les titres échangés sur les marchés financiers peuvent être des actions ou des créances, qui sont de fait des crédits mais qui peuvent être échangés/revendus sur le marché (secondaire) : on parle de titres de créance négociables (TCN). • Lettre de change = ancêtre des titres de créance négociables (créances qui étaient endossables : on pouvait payer un de ses créanciers avec une reconnaissance de dette d’un de ses débiteurs). Les lettres de changes ont permis de réduire significativement les flux de monnaie-métal (grâce aussi aux chambres de compensation), ce qui a sans doute contribué au développement des échanges commerciaux. • Chèque = lettre de change non endossable. 2. Variété des marchés financiers • Jusqu’à présent, on a supposé que les débiteurs cherchaient des financements pour leurs projets d’investissement mais ils peuvent de fait financer d’autres types de dépenses : dépenses de consommation finale (ménages) ou intermédiaires (entreprises), besoins de trésorerie de courtterme, etc. • Si la théorie économique suppose généralement qu’il existe un marché financier unique, il existe en réalité une grande variété de marchés financiers, en fonction de la nature des titres échangés et/ou de leur échéance. Marché monétaire • C’est le marché où les agents financiers (sociétés financières) ou non financiers (sociétés non financières, Etat) obtiennent des financements de court ou moyen terme. • Le nom du titre dépend de l’agent qui l’émet : – Certificats de dépôt quand l’émetteur est un agent financier (banque, caisse d’épargne, assurance, etc.). Marché interbancaire. – Billets de trésorerie si l’émetteur est une société (SNF) ; le taux d’intérêt dépend de la notation de l’entreprise. – Bons du Trésor (BT) négociables si l’émetteur est le Trésor Public (BT à taux fixe et intérêts précomptés pour les échéances courtes (< 1 an), BTAN – BT à intérêts annuels normalisés pour les échéances entre 2 et 5 ans) – Bons à moyens terme négociables (SNF ou SF). Taux interbancaire à 1 jour dans la zone € (Eonia) Marché obligataire • Marché de la dette à plus long terme. • Comme les TCN, les obligations sont des reconnaissances de dette négociables qui peuvent être revendues sur le marché secondaire. • Grande variété d’obligations : taux fixe ou variable (indexation sur l’inflation), avec ou sans coupon (obligation zéro coupon, remboursée à un cours supérieur à son prix d’émission), absence d’échéance (versement d’une rente perpétuelle = obligation perpétuelle), etc. • Obligation standard = obligation à taux fixe, donnant droit à une rémunération périodique appelée coupon = intérêts versés. • Emetteurs : grandes entreprises financières ou non mais aussi et surtout l’Etat et les APU. OAT = Obligation Assimilable du Trésor. • Banques et assurances en sont les principaux détenteurs (souvent pour le compte des ménages = contrats d’assurance-vie). A savoir • Valeur faciale de l’obligation : montant figurant sur l’obligation et que le débiteur s’engage à rembourser au détenteur du titre à l’échéance du titre. • Obligation 0 coupon : obligation dont la valeur d’acquisition est inférieure à la valeur faciale (on parle aussi du « pair »), notamment parce que les intérêts sont payés par le débiteur au moment de l’émission et non à l’échéance du titre. • Exemple : obligation 0 coupon à 1 an d’une valeur faciale 1000 € au taux de 5 % donne droit au versement de 50 € d’intérêt : elle sera donc acquise 950 € (mais le remboursement sera bien de 1000 €). • Pour obligation à coupon : taux de coupon = Coupon Valeur faciale Marché boursier • C’est le marché où s’échangent des actions. • A la différence des titres étudiés jusqu’alors, l’action n’est pas une reconnaissance de dette (et n’est donc en aucun cas remboursable) mais un titre de propriété. • Son détenteur, l’actionnaire, est propriétaire d’une part de l’entreprise (donnant droit au versement de dividendes = profits de l’entreprise). • La rémunération liée à une action (le dividende) est donc variable et est à ce titre considérée comme plus risquée (le dividendes et la valeur de l’action tombent à 0 si la société fait faillite ; le créancier a priorité sur l’actionnaire). • Emetteurs : grandes sociétés. • Détenteurs : ménages (peu en France), sociétés (prises de participation), investisseurs institutionnels (assurances, OPCVM = SICAV + FCP, Fonds de pensions, etc.) Janvier 1970 Janvier 1972 Janvier 1974 Janvier 1976 Janvier 1978 Janvier 1980 Janvier 1982 Janvier 1984 Janvier 1986 Janvier 1988 Janvier 1990 Janvier 1992 Janvier 1994 Janvier 1996 Janvier 1998 Janvier 2000 Janvier 2002 Janvier 2004 Janvier 2006 Janvier 2008 Janvier 2010 Janvier 2012 Janvier 2014 Janvier 2016 Indice boursier américain (Dow Jones), base 100 année 2010 Janvier 1970 – Août 2014 (Sources : OCDE) 160 140 120 100 80 60 40 20 0 Janvier 1970 Janvier 1972 Janvier 1974 Janvier 1976 Janvier 1978 Janvier 1980 Janvier 1982 Janvier 1984 Janvier 1986 Janvier 1988 Janvier 1990 Janvier 1992 Janvier 1994 Janvier 1996 Janvier 1998 Janvier 2000 Janvier 2002 Janvier 2004 Janvier 2006 Janvier 2008 Janvier 2010 Janvier 2012 Janvier 2014 Janvier 2016 Indice boursier français (CAC 40), base 100 année 2010 Janvier 1970 – Août 2014 (Sources : OCDE) 180 160 140 120 100 80 60 40 20 0 Janvier 1970 Janvier 1972 Janvier 1974 Janvier 1976 Janvier 1978 Janvier 1980 Janvier 1982 Janvier 1984 Janvier 1986 Janvier 1988 Janvier 1990 Janvier 1992 Janvier 1994 Janvier 1996 Janvier 1998 Janvier 2000 Janvier 2002 Janvier 2004 Janvier 2006 Janvier 2008 Janvier 2010 Janvier 2012 Janvier 2014 Janvier 2016 Indice boursier Japonais (Nikkei), base 100 année 2010 Janvier 1970 – Août 2014 (Sources : OCDE)25 340 320 300 280 260 240 220 200 180 160 140 120 100 80 60 40 20 0 Au Japon, des marchés financiers historiquement peu développés • Avant 1980, marchés financiers peu développés au Japon, l’intermédiation bancaire jouant un rôle central (relation privilégiée grande firme / banque principale). • A partir de 1984, déréglementation et développement rapide des marchés financiers, notamment sous la pression des Etats-Unis. • Ce développement a été assez mal géré parce qu’il s’est rapidement accompagné de l’apparition d’une bulle financière de grande ampleur, se traduisant par une hausse du prix des actifs financiers (obligations, actions) mais aussi immobiliers. • Craignant la concurrence des marchés, les banques ont adopté une stratégie de crédit très agressive : distribution facile de crédits bon marché. Par ailleurs, elles se sont aussi tournées vers les PME, qui ont un accès plus difficile aux marchés financiers. Le rôle des banques dans l’apparition des bulles • Montée de l’investissement, mais à rentabilité assez faible du fait de projets peu « productifs » et peu porteurs (actifs immobiliers). • Apparition d’une bulle immobilière puis financière. • En 1989, les pouvoirs publics, conscients de la situation vont conduire une politique monétaire restrictive pour tenter de limiter l’offre de crédit dans l’économie, à l’origine du gonflement de la bulle. • Cette politique va cependant précipiter l’éclatement de la bulle immobilière : les cours, qui avaient grimpé jusque 1989, vont brusquement chuter. • Le changement de politique des pouvoirs publics laisse penser aux agents qu’il n’est désormais plus possible d’acheter aujourd’hui pour revendre à un cours supérieur demain, si bien que le marché se retourne : c’est le début du krach qui va paralyser l ’économie japonaise une bonne quinzaine d’années). Janvier 1970 Janvier 1972 Janvier 1974 Janvier 1976 Janvier 1978 Janvier 1980 Janvier 1982 Janvier 1984 Janvier 1986 Janvier 1988 Janvier 1990 Janvier 1992 Janvier 1994 Janvier 1996 Janvier 1998 Janvier 2000 Janvier 2002 Janvier 2004 Janvier 2006 Janvier 2008 Janvier 2010 Janvier 2012 Janvier 2014 Janvier 2016 Indice boursier espagnol, base 100 année 2010 Janvier 1970 – Août 2014 (Sources : OCDE) 180 160 140 120 100 80 60 40 20 0 Marchés dérivés (1) • Sur ces marchés, les agents viennent se prémunir contre des pertes monétaires futures, consécutives à des variations de prix (taux d’intérêt, taux de change mais aussi cours de matières premières, etc.) qu’il est difficile pour eux d’anticiper. • Pour ce faire, ils trouvent un agent qui accepte d’effectuer une transaction dans le futur à un prix fixé dès à présent. Il y a donc transfert de risque vers un second agent qui accepte de supporter ce risque à la place du premier. • Si ce second agent est spécialisé dans ce type de transactions, on peut espérer qu’il soit plus en mesure de gérer convenablement ce risque (spécialisation et économie d’échelle). • Surtout, cet agent réduira son risque global en recherchant systématiquement des transactions dont les risques « se compensent » mutuellement : si, par exemple, il passe un contrat avec un agent cherchant à se protéger contre une baisse du dollar contre l’euro, il passera une transaction « symétrique » (et de même montant) avec un agent cherchant à se couvrir contre une baisse de l’euro contre le dollar, si bien qu’in fine, l’exposition de cet agent au risque de change sera neutralisée. Marchés dérivés (2) • L’intermédiaire assure un service de prise de risque (service d’assurance) qu’il facture. En pratique toutefois, l’agent peut parier sur les évolutions du cours de l’actif sous-jacent pour essayer de gagner une plus-value. • Les marchés dérivés sont le compartiment du marché financier qui s’est le plus développé depuis la déréglementation des marchés au début des années 1980. • Brender et Pisani : au niveau macroéconomique, ces marchés sont utiles car ils permettent de redistribuer les risques vers les agents qui acceptent de les prendre (ménages japonais vs projets d’investissement dans les PVD). • Mais c’est aussi un compartiment très « spéculatif » des marchés financiers. Marchés dérivés (3) • Un produit dérivé est un contrat/actifs dont la valeur dépend, dérive de celle d’un actif ou indice (groupement d’actifs) sous-jacent. • C’est un engagement négocié entre deux contreparties qui permet d’acheter ou de vendre une quantité déterminée d’un actif (le sous-jacent) à une date prédéterminée (la date d’échéance) et à un prix convenu à l’avance. • Produits les plus connus: – Les contrats à terme (contrat ferme) ou futures (marché organisé, chambre de compensation, dépôt de garantie) – Les Options (l’engagement d’achat ou de vente peut être levé moyennant versement d’une prime au preneur de risque) – Les Swaps (Contrat d’échange de flux de revenus à taux variable contre flux de revenu à taux fixe). Taux d’intérêt, taux de change. – Les couverture contre les défauts de crédit (Crédit Default Swaps). Les CDS • Apparus dans les années 1980. • Ce sont des contrats d’assurance liés à des crédits (on s’assure contre un défaut de l’emprunteur) et négociables (peuvent être revendus). • Dans ces conditions, on peut détenir un contrat d’assurance portant sur des crédits ou des « biens » qu’on ne détient pas (la maison de son voisin). • Il est possible de détenir plusieurs contrats couvrant le même risque. • Cela peut conduire à des excès très préjudiciables… • Exemple 1 : faillite de Lehman Brothers en 2008 : le risque de défaut de cette banque était couvert des dizaines de fois par des CDS… Démultiplication des effets (nationalisation de l’assureur AIG). • Exemple 2 : Goldman Sachs s’est couvert plusieurs fois contre le défaut de certains de de ses débiteurs (notamment CIT) et avait ainsi intérêt à ce que ses débiteurs fassent défaut ! • Ce sont ces titres dont la valeur de marché s’est effondrée en 2008 (augmentation de la prime de risque). Marché des changes En fin de cours si on a le temps. 3. Synthèse : les services rendus par les marchés financiers (1) • Service financier (émission de titres sur le marché dit « primaire »). • Service de liquidité permettant aux créanciers de « récupérer » leur argent sans attendre l’échéance des titres : ceux-ci peuvent en effet être revendus, en cas de nécessité, sur le marché « secondaire » (sorte de marché des titres d’occasion). Cette fonction est fondamentale car, sans elle, certains agents à capacité de financement refuseraient certainement de se porter acquéreurs de titres les contraignant à immobiliser leur épargne durant une période trop longue ; le service de liquidité favorise donc le développement des transactions sur le marché primaire. En cas de krach, le service de liquidité n’est plus assuré. Titre = crédit négociable. Un titre a donc plus de « fonctionnalités » qu’un crédit (qui est illiquide). Synthèse : les services rendus par les marchés financiers (2) Innovation financière = titrisation des crédits ; on forme des paquets de crédits pour en réduire le risque et on peut alors revendre ces crédits. Avantage : le risque de crédit n’est plus concentré à l’actif des banques. Inconvénient : aléa moral ; les banques moins regardantes sur les clients. La qualité moyenne des crédits baisse. Ces « paquets » de crédits sont structurés, hiérarchisés : tranches « senior » (AAA), « mezzanine » (BBB), « equity » (tranche la plus risquée). • Service de transfert de risque, via les marchés dérivés (voir précédemment). Titrisation Banque Crédit immobiler Liquidités Banque Autre Crédit Véhicule*, conduit Crédit (Residential) immobilier Mortgage Backed Securities = (R)MBS Véhicule*, conduit Autre Crédit ABS ou CDO Autre agent (Residential) Mortgage Backed Securities = (R)MBS Autre agent ABS ou CDO Liquidités * Exactement : Special Purpose Vehicle, SPV (Shadow banking) ABS = Asset Backed Securities ; CDO = Collaterized Debt Obligation. Autre agent = banques d’investissement, Hedge Fund… 4. Le(s) taux d’intérêt • Dans la théorie standard, le taux d’intérêt est le prix du temps, le prix de la patience (prêteur) ou de l’impatience (emprunteur) ; c’est différent dans la théorie keynésienne (où le taux d’intérêt rémunère la prise de risque). • Préférence pour le présent : – Prêteur : combien faut-il me donner dans 1 an pour que j’accepte de renoncer à 100 € aujourd’hui. Plus le taux proposé est élevé, plus l’individu est impatient (a une forte préférence pour le présent) car il réclame beaucoup demain pour renoncer à 100 € aujourd’hui. – Emprunteur : combien suis-je prêt à payer dans un an pour récupérer 100 € aujourd’hui. Plus le taux proposé est élevé, plus l’individu est (également) impatient (a une forte préférence pour le présent) car il est prêt à payer cher demain pour avoir tout de suite de l’argent. Taux nominal vs taux réel • Dans toute la théorie standard, les agents raisonnent sur des prix relatifs ; ils raisonnent en termes de pouvoir d’achat : prix d’un bien par rapport à un autre bien, pouvoir d’achat du salaire (en termes de biens). • Les agents ne sont pas victimes d’illusion monétaire (effet Fisher : le taux nominal augmente quand les agents anticipent une hausse de l’inflation, si bien que le taux réel reste inchangé). • En ce sens, le taux d’intérêt qu’intègrent les agents dans leurs calculs économiques (prêt ou emprunts) est le taux d’intérêt réel (et non le taux nominal), c’est-à-dire un taux corrigé du niveau des prix (ou de son évolution). 1+𝑖 𝑎 1 + 𝑖𝑟 = ⇒ 𝑖 ≈ 𝑖 − 𝜋 𝑟 1 + 𝜋𝑎 • Ainsi, c’est le taux d’intérêt réel qui assure l’équilibre sur le marché financier. Effet Fisher Taux d’intérêt nominal S1 S0 I1 I0 Fonds prêtables Actualisation • Le taux de préférence pour le présent permet d’actualiser les revenus futurs. • Si ma préférence pour le présent vaut θ, l’équivalent d’1 € aujourd’hui est de (1+ θ) € dans un an, (1+ θ)2 € dans deux ans, etc. • Symétriquement x € dans 2 ans = x / (1+ θ)2 aujourd’hui. • Si θ > r : réduction des prêts, augmentation des emprunts : r va augmenter • Si θ < r : augmentation des prêts, réductions des emprunts : r va baisser → Les mécanismes de marché font que l’on converge vers r = θ à l’équilibre. Valeur fondamentale (1) • Supposons un titre rapportant un revenu d au cours de (n+1) périodes • La valeur actualisée du titre vaut : VA = 𝑑 𝑛 𝑖=0 (1+𝑟)𝑖 • C’est cette valeur que l’on doit comparer au prix courant d’achat (ou de vente) du titre : si le prix d’achat P > VA, il est rentable de vendre ; si au contraire P < VA, il est rentable d’acheter le titre. • Si le titre est une obligation, dont la valeur faciale d’émission est X, il faudra acheter ou vendre l’obligation selon que sa valeur sur le marché est inférieure ou supérieure à : 𝑑 𝑛 𝑖=0 (1+𝑟)𝑖 + 𝑋 (1+𝑟)𝑛 Valeur fondamentale (2) • Taux actuariel (ou taux interne de rentabilité = TIR) : taux d’intérêt qui permet d’égaliser valeur courante du titre et les flux de revenus futurs actualisés (+ remboursement du principal) auquel ce titre donne droit. • Pour calculer le prix auquel on est disposé à acheter à titre il faut substituer au taux actuariel le taux de rendement exigé dans le calcul de la valeur actualisée du titre (rendement qu’on réévalue généralement quand l’incertitude s’accroît). • Quand l’incertitude s’accroît ou les perspectives économiques se détériorent, le rendement attendu pour conserver le titre doit s’accroître, ce qui fait baisser la valeur à laquelle on est disposé à acheter le titre. • En cas d’efficience des marchés (l'ensemble des informations disponibles concernant un actif financier est immédiatement intégré dans le prix de cet actif (Fama, 1965)), le prix d’une action est égale à sa valeur fondamentale, à savoir le flux actualisés des dividendes futurs auxquels cette action donne droit (voir plus loin). Le lien entre cours du titre et taux d’intérêt (1) • Supposons qu’une obligation d’une valeur de 100 (sa valeur « faciale ») a été émise en le 31/12/2009 avec une promesse de remboursement et versement d’intérêt de 10 % au 31/12/2010, c’est-à-dire la promesse de l’émetteur de verser 100 (principal) + 10 d’intérêts à son détenteur (le créancier) un an plus tard. • Un individu A (un ménage) a acheté ce titre 100 le jour de son émission (le 31/12/2009) sur le marché financier (primaire). • Malheureusement, un souci financier et un urgent besoin de liquidité (monnaie) le pousse à revendre ce titre sur le marché secondaire le 1er/01/2010. Le cours du titre sur le marché a alors chuté et vaut 97 : le marché secondaire rend un service de liquidité à A (qui peut récupérer 97) mais ce service de liquidité n’est pas parfait : en ce sens, le fait de détenir un titre est « risqué » car le montant que l’on peut récupérer avec son titre ne dépend pas de sa valeur faciale mais de son cours sur le marché le jour de sa « revente ». Le lien entre cours du titre et taux d’intérêt (2) • Supposons que le titre soit racheté à A (le 1er/01/2010) par l’agent B, un autre ménage. Celui-ci le conserve jusqu’au 31/12/2010. A ce jour (si tout se passe bien), il sera le créancier de l’entreprise émettrice qui lui remettra donc 110, comme spécifié sur le titre. Pour cet agent B, la rentabilité du titre (son rendement) est ainsi de (110 – 97) / 97 = 13,4 %. • Ainsi, le taux d’intérêt rémunérant le titre (en fait : son taux de rendement, à distinguer du taux de coupon) augmente quand la valeur marchande du titre (son cours) baisse et il augmente quand le cours du titre sur le marché baisse (dans notre exemple le taux d’intérêt est passé de 10 % à 13,4 % quand le cours est passé de 100 à 97). • La valeur du taux de rendement est bien sûr une référence essentielle pour tout émetteur de titre sur le marché primaire (pour rester attractif, l’intérêt proposé par les émetteurs sur le marché primaire doit être au moins égal au taux proposé sur le marché secondaire)… et réciproquement. Quels facteurs déterminent les taux d’intérêt ? • « Conditions » sur le marché financier (niveaux de l’offre et de la demande ; cf. précédemment). • La durée du prêt : bien que ce phénomène ne soit pas systématique, on remarque que le taux d’intérêt croît, toutes choses égales par ailleurs, avec la durée du crédit (on exige une rémunération supérieure pour une immobilisation plus longue). • Le risque de l’émetteur : ceteris paribus, le taux d’intérêt exigé croît avec le risque de défaut associé à chaque émetteur = prime de risque ou spread. Rôle central des agences de notations (rating agencies : Standard and Poor’s, Moody’s, Fitch) dans l’évaluations des débiteurs, des Etats ou des entreprises. • La devise d’émission (prime de risque de change quand la devise d’émission est jugée instable). Cf. Crise asiatique de 1997-98. Rendement et risque 12 14 10 12 10 8 Produit 1 6 Produit 2 4 8 Produit 3 Produit 2 6 Rendement produit 3 2 0 0 1 6 11 16 21 26 31 36 41 46 51 56 61 66 71 76 81 86 91 96 2 1 8 15 22 29 36 43 50 57 64 71 78 85 92 99 4 Produits 1 et 2 ont le même rendement (mathématiquement : la même moyenne de 6 ; graphique de gauche) mais ils n’ont pas le même risque (mathématiquement : la même variance ou écart-type ; la variance du produit 2 est nulle). Un individu ayant une aversion, même faible, au risque (≠ neutralité au risque) préférera le produit 2, moins risqué (et rendement identique), au produit 1. Le supplément de risque doit être rémunéré par un rendement plus élevé : produit 3 (graphique de droite). Primes de risque dans la zone € (1) • De Grauwe et Ji (2012) : risque sous-estimé entre 1999 et 2007, risque surestimé entre 2008 et 2012 ! 56 Primes de risque dans la zone € (2) Nouvelle convergence depuis 2012 (Effet annonces de M. Draghi) Source : Natixis, Flash Economie n° 812, Octobre 2014 La crise grecque • En 2010, on découvre que l’Etat grec a falsifié les chiffres de ses comptes (déficits). • Que se passe-t-il lorsque la crédibilité d’un Etat (la croyance qu’ont les agents dans sa capacité à honorer ses engagements passés) est atteinte ? – Les agents peuvent tout simplement refuser d’octroyer de nouvelles ligne de crédit. – Les agents considèrent désormais que les titres émis par cet Etat sont risqués ; ils vont accepter de les détenir mais exiger un rendement supérieur pour compenser l’élévation du risque : augmentation de la prime de risque et donc du coût de financement pour l’Etat Effet « boule de neige ». – L’Etat doit restaurer sa crédibilité et la confiance des créanciers en mettant des mesures fiscales énergiques : augmentation de la fiscalité et/ou baisse de ses dépenses. Taux courts vs taux longs (1) • Courbe des taux : représentation graphique de la valeur des taux pour un continuum d’échéances (du taux journalier au taux à 30 ans par exemple). • Généralement mais pas systématiquement, la courbe des taux est croissante : le taux rémunérant les titres d’échéance longue est supérieur à celui des titres d’échéance courte : • L’explication principale pour ce phénomène est la préférence pour la liquidité : on réclame une prime pour immobiliser plus longtemps son épargne (déjà vu ; théorie dite de la segmentation). • Théorie alternative, dite des anticipations : la détermination du taux long résulte de l’anticipation des évolutions de taux courts. Exemple avec 2 périodes (TL = taux long = taux annuel sur titre à maturité de 2 périodes ; TC = taux court = titre à maturité d’une période) : le TL se fixe de telle sorte qu’aucun arbitrage n’est possible une fois anticipé (à la période 1) le TC de la période 2 : (1 + TL)2 = (1 + TC1)*(1 + (TC2)a) Taux courts vs taux longs (2) • Si (TC2)a > TC1, il ressort de l’équation précédente que TL > TC : la courbe de taux en croissante. • En revanche, si (TC2)a < TC1, TL < TC : la courbe des taux devient décroissante. • La courbe de taux est croissante (resp. décroissante) si les agents anticipent une remontée (resp. baisse) des taux courts. • Cette théorie postule qu’il existe un taux de long terme d’équilibre qui va servir de référence aux agents : – Si le taux court < taux de référence : anticipation d’une remontée future du taux court, si bien que le taux long > taux court : courbe de taux croissante. – Si le taux court > taux de référence : anticipation d’une baisse future du taux court, si bien que le taux long < taux court : courbe de taux décroissante. • Le sens de la courbe de taux dépend du niveau courant des taux courts (par rapport au taux de référence ; fait stylisé). En théorie, le taux court converge vers le taux de référence de long terme et la courbe de taux est horizontale. Taux courts vs taux longs (3) • On peut faire la synthèse de ces deux théories en analysant le degré de substituabilité entre titres de maturités différentes. Substituabilité Nulle Théorie de la segmentation. Les agents ont une préférence pour les titres courts et réclame une prime sur les titres longs. La courbe de taux est croissante Intermédiaire Théorie de la prime de liquidité = synthèse des deux autres théories : Les agents font des arbitrages entre titres courts et longs mais conservent néanmoins une préférence pour la liquidité (existence d’une prime de risque sur les taux longs). Parfaite Théorie des anticipations. Le taux long dépend de l’anticipation des évolutions de taux courts. Comme le taux court anticipé est corrélé aux variations courante de taux court, il existe une forte corrélation positive entre taux court et longs. Taux courts vs taux longs : la politique monétaire • La politique monétaire consiste généralement pour une banque centrale à agir sur les taux courts (en offrant des liquidités sur le marché interbancaire, de court-terme) : l’évolution des taux longs peut donc refléter l’opinion des marché sur l’évolution de la politique monétaire. • Depuis 2008 toutefois, politique monétaire non conventionnelle de la Fed (banque centrale américaine) qui intervient aussi sur les marchés obligataires pour maintenir les taux longs à des niveaux faibles (Quantitative Easing). • L’inversion de la courbe de taux (TL < TC) expose grandement les banques au risque de taux (la rémunération de l’actif ne couvrant alors plus la rémunération payée par les banques sur leurs engagements de passif). 5. Qu’est-ce qu’une bulle ? (1) La valeur fondamentale des titres • Le prix de marché d’une action est censé refléter les perspectives de dividendes futurs (profits) auxquels cette action donne droit, c’est-à-dire ce qu’on appelle valeur fondamentale du titre. • On dira que le marché financier est efficient si, compte tenu de toute l’information disponible à un instant considéré, le prix de marché des actions se confond avec leur valeur fondamentale. • Si le marché n’est pas efficient en revanche, le prix de marché peut s’écarter de la valeur fondamentale du titre. • Le marché peut ne pas être efficient du fait de la difficulté à « évaluer » correctement le futur (profits futurs), notamment en période d’incertitude face à l’avenir. • Certains auteurs affirment d’ailleurs que la valeur fondamentale (intrinsèque) n’existe pas (Orléan). Qu’est-ce qu’une bulle ? (2) Représentations, spécularité et mimétisme • En situation d’incertitude, il peut être parfaitement rationnel de regarder ce que pensent les autres intervenants du marché de la valeur des titres : quelle représentation du futur – et donc de la valeur de ces titres – ont-ils ? • Le problème est que cette représentation fonctionne en circuit fermé : j’essaie de comprendre ce que les autres pensent mais, symétriquement, les autres me « regardent » et ce qu’ils pensent va dépendre de ce que moi je pense ! Cf. « Concours de beauté » (Keynes, 1936). • On débouche sur des logiques circulaires et spéculaires (spéculer vient du latin speculum : « miroir »…) • … débouchant sur des comportements mimétiques ou moutonniers, où l’ensemble du marché peut suivre le comportement initié par un seul intervenant (sans même que ce comportement ait forcément un lien avec l’information que le marché recherche). Qu’est-ce qu’une bulle ? (3) Bulles et krachs • Les comportements purement spéculatifs (par opposition aux comportements d’entreprise, visant à évaluer la valeur fondamentale du titre) aboutissent à des comportements analogues : ce qui compte pour bien spéculer (acheter un titre pour le revendre à un prix supérieur), c’est d’évaluer non pas la valeur fondamentale mais le prix que le marché attribue (ou va attribuer) à un titre. • La difficulté est que ces mécanismes peuvent être déstabilisants (et éloigner durablement le prix du titre de sa valeur fondamentale). • En effet, dans les comportements mimétiques, c’est la hausse du prix observé sur le marché qui va pousser l’ensemble des intervenants à demander/acheter le titre : la hausse/baisse du prix génère un accroissement/baisse de la demande, ce qui est contraire aux lois du marché (la demande augmente quand le prix baisse) : la hausse/baisse du prix s’autoentretient : bulle/krach. Effet « bulle » Demande Excès de demande Prix Excès d’offre Effet « krach » Offre Quantités Les « forces » du marché sont désormais déstabilisatrices. L’équilibre existe mais il est désormais instable. Cycles financiers chez H. Minsky • les marchés financiers connaissent des cycles d’activité alternant phases d’optimisme et de pessimisme. • En période d’euphorie, les épargnants sont disposés à financer des projets plus risqués et la demande de titres est importante (les taux baissent). • Les emprunteurs n’hésitent pas à recourir à un fort effet de levier (endettement à taux faible pour financer l’achat d’actifs dont la valeur augmente régulièrement) dans la perspective de revendre le titre à un cours supérieur. • Quand le marché se retourne (notamment parce que plus personne n’anticipe de nouvelles hausses de cours), la vente des titres ne suffit plus pour honorer les engagements et des défauts de paiement en chaîne peuvent survenir. • Les banques sont généralement les premières victimes de ces défauts de paiement des débiteurs, ce qui les amène généralement à réduire très brutalement leur offre de crédit (credit crunch). Cf. Japon, années 1990. Finance et croissance • Idée générale : le développement des marchés financier a peut-être permis une meilleurs allocation du capital au niveau mondial ; si c’est le cas, ils ont pu contribuer au soutien de la croissance économique. • Cependant, le développement des marchés financiers s’est également accompagné d’une succession de crises financières plus ou moins locales, plus ou moins sévères (krach boursier de New-York, bulle et krach au Japon vers 1990 ; crise mexicaine (1994), crise asiatique (1997-98), crise russe (1999), éclatement de la bulle Internet (vers 2000), crise des subprimes en 2008, crise des dettes souveraines en Europe depuis 2010, etc.) • Plus grande croissance peut-être, mais certainement plus grande volatilité de la croissance depuis 25 ans ! • Question : la croissance précède-t-elle le développement de la finance (développement industriel notamment) ? ou est-ce l’inverse ? • Beaucoup d’auteurs (King et Levine (1997), Rajan et Zingales (1998), Levine et Zervos (1998)) trouvent que le développement financier a un effet significatif et positif sur la croissance (réduction des coûts de financement)… mais le développement financier peut concerner tout aussi bien le marché que les banques (les deux offrant en fait des services distincts). Pas de lien facilement identifiable entre croissance et volatilité. II. Les banques 1. Finance directe vs indirecte (1) • En théorie, les mécanismes de marché semblent plus efficaces pour assurer une bonne allocation de l’épargne vers les meilleurs projets d’investissement. • En pratique, l’intervention de la banque peut s’avérer préférable : – Les échéances, l’horizon temporel des prêteurs et des emprunteurs diffèrent généralement : les ménages souhaitent « prêter » court, ils veulent pouvoir accéder à leurs dépôts d’épargne quand bon leur semble ; les entreprises au contraire souhaitent s’endetter à long terme (attendre que les investissements portent leurs fruits avant de rembourser). La banque doit donc assurer un service de transformation des échéances. Cette activité est risquée (liquidité) mais elle est possible grâce à la loi des grands nombres, qui fait que si chaque ménage prête court, les ménages dans leur ensemble, prêtent long. Finance directe vs indirecte (2) – Il existe une forte asymétrie d’information entre le prêteur et l’emprunteur ; contrairement à l’emprunteur, le prêteur doit connaître la « qualité » de la personne à qui il prête : cette quête d’information est difficile et très coûteuse ; certains se spécialisent dans ce type d’activité (division du travail) : ce sont les banques, qui mobilisent ce faisant des rendements d’échelle. – Informations sur la clientèle fidélisée, « durable ». – Les banques peuvent également réduire le risque en le diversifiant. – La banque assure également une gestion des moyens de paiement que n’assurent pas les marchés. – La banque a une fonction de création monétaire (monnaie scripturale ; cf. Partie monnaie) 2. Taux d’intermédiation (1) • Depuis le début des années 1980, déréglementation des marchés dans les pays développés et montée en puissance de la finance directe : désintermédiation financière. • Phénomène particulièrement marquée en Europe continentale et au Japon où le rôle des banques dans le financement était historiquement élevé (finance de marché dans les pays anglo-saxons). • Les banques ont ainsi vu leur activité traditionnelle perdre de l’importance et ont dû réagir : – notamment en développant leur activement d’investissement de portefeuille et se portant acquéreuse de titres sur les marchés – Eventuellement en adoptant une stratégie plus agressive en direction de leur clientèle (Cf. Bulle immobilière et crise au Japon à la fin des années 1980). Taux d’intermédiation (2) • Taux d’intermédiation = Financements intermédiés / Financements externes • Financement externe = partie non autofinancée des financements. • Numérateur au sens strict : Crédits bancaires • Numérateur au sens large : Crédits bancaires + Titres achetés par les IF • Le taux d’intermédiation au sens large diminue bien moins que le taux au sens strict. 3. Les risques que doivent gérer les banques • Risques associés à la transformation des échéances : – Risque de liquidité (déjà vu) – Risque de taux : quand les taux débiteurs au passif de la banque excédent ses taux créditeurs à son actif. • Risque de crédit (ou de contrepartie) : c’est le risque qu’une partie des clients (auxquels la banque a accordé des crédits) n’honore pas ses engagements. • Risque de marché : quand le cours des titres (actions notamment) à l’actif de la banque baisse. Solvabilité vs liquidité des banques (1) • Liquidité : pour une banque, capacité à dégager les fonds nécessaires pour faire face à tout moment à ses engagements (venant de sa clientèle – retrait de dépôts – ou d’autres banques – dettes interbancaires). • Il est généralement mesuré par le rapport entre actifs liquides détenus par la banque (liquidités et titres jugés sans risque) et les engagements de court terme de la banque. • Couverture du risque de liquidité : – Constitution de réserves obligatoires auprès de la banque centrale. – Ratios de liquidité (Bâle III, 2013, suite à l’asséchement du marché interbancaire durant la crise de 2008 = LCR, Liquidity Coverage Ratio, à partir de 2015 ; jugé peu contraignant à ce stade). – Garantie des dépôts par l’Etat (réduit la crainte et donc la probabilité de panique des agents mais augmente l’aléa moral des banques). Cf. Northen Rock en 2008. Solvabilité vs liquidité des banques (2) • Solvabilité : capacité propre d’une banque à couvrir les risques liés à son activité (risque de marché, risque de crédit et risque opérationnel). La capacité propre est celle des actionnaires (qui apportent le capital mais ne peuvent rien exiger) par opposition aux créanciers (qui ont priorité sur les actionnaires et exigent le remboursement des créances). • La solvabilité est mesurée par le rapport entre les fonds propres (passif non exigible) et les actifs (pondérés ou non de leur risque) : – Les ratios de levier ou « debt to equity » sont des ratios de solvabilité non pondérés (Bâle III : ratio de levier > 3 %, période d’observation jusque 2017 ; Peu contraignant en l’état, l’actif pouvant encore représenter plus de 33 fois la valeur des fonds propres !) – Les ratios de Cooke (Bâle I, 1988) et McDonough (Bâle II, 2004 ; notion de fonds propres plus restrictive + intégration des risques de marché) sont des ratios de solvabilité pondérés : les différents postes d’actifs sont pondérés par le niveau de risque de non remboursement du débiteur. Critiqués ces derniers temps. – Bâle III restreint encore la définition de ce que sont les fonds propres (renforce leur « qualité »). Ratios pondérés • Ratio Cooke : Fonds propres de la banque > 8 % des risques de crédits • Ratio McDonough : Fonds propres de la banque > 8 % des (risques de crédits (85 %) + de marché (5 %) + opérationnels (10 %)) Limite : tous les organismes ne sont pas soumis à ces ratios (Hedge funds, etc.) Le bilan d’une société non financière Actifs non financiers Actifs immobilisés Actifs circulants (stocks…) Actifs financiers Titres détenus Crédits Liquidités Capitaux propres (actions, réserves…) Dettes Dettes à long terme Dettes à court terme En cas de problème, le créancier est toujours prioritaire sur le propriétaire (actionnaire). Le bilan d’une banque Actifs non financiers Actifs immobilisés Capitaux propres (actions, réserves, bénéfice/perte…) Actifs financiers Crédits à la clientèle Dettes Titres détenus (portefeuille) Dettes à long terme Crédits interbancaires Dettes interbancaires Liquidités (notamment réserves Dépôts obligatoires et excédentaires) Le bilan d’une banque : ratios de solvabilité Actifs financiers = X Crédits à la clientèle Titres détenus (portefeuille) Crédits interbancaires Liquidités Capitaux Propres = Y Dettes = Z Dettes à long terme Dettes interbancaires Dépôts Ratio de levier = Actifs Financiers / Capitaux propres = X / Y Debt to Equity ratio = Dettes / Fonds propres = Z / Y = (X – Y) / Y = ratio de levier – 1. Les ratios Actifs financiers X = Capitaux/Fonds propres Y Dettes Z X–Y • Debt to Equity ratio = = = = ratio de levier – 1. Y Fonds propres Y • Ratio de levier = • Ratio de rendement = Return on Asset (ROA) = Profits nets Actifs • Ratio de rentabilité = Return on Equity (ROE) = Profits nets Fonds propres • On constate que : ROE = ROA * Ratio de levier • Le ROE est négativement corrélé au volume de fonds propres. Augmenter son ratio de levier permet d’accroître la rentabilité des fonds propres mais accroît aussi les risques. Arbitrage bancaire : rentabilité vs sécurité • Une banque cherche à gagner de l’argent en acquérant, avec l’argent qu’elle « emprunte » (son passif) , des actifs plus rémunérateurs. • Elle est néanmoins confrontée à des contraintes de liquidité et de solvabilité qui la pousse à détenir également des actifs sûrs, liquides, donc moins rémunérés (par exemple des réserves). • Un autre moyen de réduire sa probabilité d’être insolvable (quand sa richesse nette devient < 0, quand l’Actif < Passif hors fonds propres) est de détenir davantage de capitaux propres (des fonds propres). Toutefois, détenir beaucoup de fonds propres réduit la rentabilité du capital de la banque (le Return to Equity ou ROE). • Dans tous les cas, la banque doit systématiquement arbitrer entre sécurité (beaucoup de réserves ou beaucoup de fonds propres) et rentabilité. Le bilan d’une banque : risque de solvabilité élevé Actifs financiers = X Crédits à la clientèle Titres détenus (portefeuille) Crédits interbancaires Liquidités Capitaux Propres = Y Dettes = Z Dettes à long terme Dettes interbancaires Dépôts Ratio de levier élevé : une petite baisse de la valeur de l’actif (crédits douteux et/ou baisse de la valeur des titres) peut suffire à empêcher la banque d’honorer ses engagements auprès des créanciers, surtout si les dettes sont principalement à court terme. Le bilan d’une banque : risque de solvabilité faible Actifs financiers = X Crédits à la clientèle Titres détenus (portefeuille) Crédits interbancaires Liquidités Capitaux Propres = Y Dettes = Z Dettes à long terme Dettes interbancaires Dépôts Irlande et Espagne, une histoire très différente • Contrairement à la Grèce, ce sont bien les banques privées qui sont à l’origine de la crise en Espagne et en Irlande : la chute de l’immobilier et de la bourse ont « plombé » l’actif (titres et créances) des banques privées. • Les banques irlandaises (surtout) et espagnoles se sont retrouvées en état d’insolvabilité (l’apparition de créances non remboursées à leur actif les empêchent d’honorer elles-mêmes leurs engagements de passif). • Les Etats irlandais et espagnols ont alors décidé de garantir les dettes bancaires et de racheter l’ensemble des dettes des banques privées irlandaises, ce qui a fait exploser son propre endettement et remis en cause sa propre solvabilité. • La situation est aggravée par un cercle vicieux : les banques détenant des titres publics à leur actif, la détérioration de la situation de l’Etat amplifie en retour la crise bancaire. La crise depuis 2007 et l’effet sur les dettes souveraines au niveau européen (1) Source : Eurostat 100,0 Union européenne (25 pays) 90,0 80,0 Allemagne (incluant l'ancienne RDA à partir de 1991) 70,0 60,0 France 50,0 40,0 Royaume-Uni 2016 2014 2012 2010 2008 2006 2004 2002 2000 1998 1996 1994 30,0 La crise depuis 2007 et l’effet sur les dettes souveraines au niveau européen (2) Source : Eurostat 190,0 170,0 150,0 130,0 Espagne 110,0 Irlande 90,0 Portugal 70,0 Italie 50,0 Grèce 30,0 2016 2014 2012 2010 2008 2006 2004 2002 2000 1998 1996 1994 10,0 Le bilan d’une banque : risque de liquidité élevé Crédits à la clientèle (Long terme) Capitaux Propres = Y Dettes à long terme Dettes interbancaires de court terme Dépôts des clients Crédits interbancaires de court terme Liquidités, dont réserves On voit que la titrisation des crédit à la clientèle permet d’accroître le ratio de liquidité des banques. 4. Concentration bancaire • Fort mouvement de concentration bancaire depuis une vingtaine d’années, notamment en France (BNP Paribas, Crédit Agricole, Société Générale). Ce phénomène a été accentué par la crise de 2008. • Phénomène généralement invoqué : la production service bancaire seraient à rendements croissants (économies d’échelle) ; loi des grands nombres, etc. • Inconvénient : augmentation des prix dans un contexte de réduction de la concurrence (marché oligopolistique). • En réalité, aucune étude n’a véritablement démontré cette hypothèse (lobby bancaire ?) • Conséquence : renforce l’aléa moral des grandes banques, « too big to fail » (l’Etat est contraint de les renflouer quoiqu’il arrive car leur faillite entraînerait une crise systémique préjudiciable à l’ensemble de la collectivité) ; aggravation du risque systémique. Banque de dépôts vs banque d’affaires • Aujourd’hui la plupart des banques sont des banques dites universelles : elles effectuent à la fois les activités traditionnelles des banques commerciales (banque de détails ou de dépôts ; collecte des dépôts de la clientèle et octroi de crédit) et des activités traditionnelles et plus risquées banques d’affaires ou banques d’investissement (gestion de portefeuille). • De nombreux économistes y voient une des causes de l’accroissement des risques financiers (utilisation du passif voulu « sans risque » pour des opérations jugées très risquées côté actif). • Historiquement : instauration du Glass-Steagall Act (ou Banking Act) instaurant cette séparation après les faillites bancaires de 1933 aux Etats-Unis. Cet « act » est abrogé en 1999. Suite à la crise, la question de la responsabilité de cette abrogation dans l’apparition de la crise a été soulevée ; le rétablissement du Glass-Steagall act fait également débat aux Etats-Unis (mais aussi en Europe). Pourquoi les banques rationnent-elles le crédit ? Le modèle de Stiglitz Weiss (1) • Plusieurs entreprises indicées par i : • Projet d’investissement d’un montant K dont B < K financé par emprunt, • R = pi Ris + (1 – pi) Rf • Tous les projets ont le même rendement mais pas le même risque. • Projet d’autant plus risqué que pi est faible (et Ris est élevé). • Si réussite du projet : remboursement de (1 + r)B ; sinon remboursement de Rf < (1 + r)B < Ris • Exemple Rf = 0. Dans ce cas, il n’y a aucun remboursement en cas de défaut. On montre alors qu’il y une incitation plus forte pour les firmes qui ont un projet risqué. • Espérance de gain = pi (Ri – (1 + r)B) + (1 – pi)*0 = pi (Ris – (1 + r)B) croît avec pi. • La banque est price-maker : elle fixe le taux d’intérêt. Modèle de Stiglitz Weiss (2) • Quand la banque augmente son taux d’intérêt : – Elle augmente la rémunération gagnée sur tous les crédits remboursés (1+r)B. – Dans le même temps, elle dissuade certaines entreprises d’investir (celles dont le rendement Ris passe sous (1+r)B). Or ces entreprises sont des entreprises qui ont un Ris plutôt faible et une probabilité de succès pi plutôt élevée → En augmentant le taux d’intérêt, la banque fait fuir les entreprises qui ont la plus grande probabilité de la rembourser = sélection adverse. • Le premier effet améliore le profit de la banque, le second (augmentation du pourcentage de défauts) le détériore. • Le modèle montre que le premier effet l’emporte dans un premier temps ; audelà d’un taux r*, le second effet prend le dessus et le profit de la banque baisse : sa courbe d’offre de crédit n’est pas croissante, elle est coudée. • La banque aura tendance a ne jamais fixé un taux au-delà de r* même si la demande des entreprises est élevée : rationnement du crédit et risque de sous-emploi. Monnaie 1. La création monétaire des banques (1) Entreprise Banque Consommation Investissement BF = - I Ménage Crédit Dépôts Revenu Y Epargne = CAF 1 Banque Crédit Dépôts 2 1. « Les dépôts (des ménages) font les crédits (aux entreprises)». 2. « Les crédits (des banques) font les dépôts (des ménages, entreprisses) ». La création monétaire des banques (2) • Il s’agit bien sûr de la création de monnaie privée, scripturale. Chaque banque privée émet une monnaie qui lui est propre. • La Banque Centrale conserve le monopole de l’émission de monnaie légale, centrale (billets, pièces). • Les règlements entre banques commerciales s’effectuent en monnaie centrale. • La banque centrale joue le rôle de prêteur en dernier ressort. • Les limites à la création de monnaie privée par les banques : – Pouvoir convertir « sa » monnaie en monnaie légale. – Obligation légale de détenir des réserves obligatoires (chaque banque doit conserver sur un compte à la banque centrale des réserves sous forme de billets correspondant à un pourcentage réglementaire du montant des dépôts qu’elles présentent à leur passif). La création monétaire des banques (3) Banque A Actif = X Banque A Actif = X + 10 Dépôts = X 4 Crédit 10 Dépôts 10 6 Banque B Actif = Y 5 Banque B Dépôts = Y 5 Crédit 10 Dépôts = X + 9 Dette envers B =1 Dépôts 10 Actif = Y + 10 Dépôts = Y + 11 Créance sur A =1 1. Les deux banques n’émettent en fait pas la même monnaie (€A et €B). 2. Après compensation, la banque B réclame 1 €B à la banque A (en échange de son €A). Le prêteur en dernier ressort • La banque A doit être en mesure d’honorer la paiement d’1 €B en l’échange de l’€A que lui présente la banque B. • S’il est n’est pas en mesure de le faire : – Possibilité pour B de faire crédit à A. – Faillite de A. – Les soldes interbancaires sont réglés dans une monnaie « supérieure », la monnaie légale fournie par la banque centrale : l’€. Si A dispose de réserves de billets en €, elle va puiser dans ses réserves pour honorer ses engagements vis à vis de B. – Sinon, elle va pouvoir emprunter (si la BC accepte) des billets en se refinançant auprès de la banque centrale = prêteur en dernier ressort. • Le taux directeur est le taux auquel la banque prête de la monnaie centrale aux banques privées sur le marché interbancaire. • Les banques sont tenues de constituer des réserves de billets pour faire face à la demande de monnaie centrale de leur clientèle et des autres banques. Leur « capacité » à créer de la monnaie est donc « limitée ». Cas 1 : la banque puise dans ses réserves Cas 2 : la banque se refinance auprès de la banque centrale Banque A Banque A Actif = X + 10 Dépôts = X + 9 Actif = X + 10 Refinancement = +1 Billets = - 1 Banque B Actif = Y + 10 Billets = + 1 Dépôts = X + 9 Dépôts = Y + 11 Banque B Actif = Y + 10 Dépôts = Y + 11 Billets = + 1 1. Dans le premier cas, la banque A dispose de réserves (obligatoires) de billets dans lesquelles elle va puiser. 2. Dans le second cas, elle emprunte ces billets à la BC (refinancement) ; le taux d’emprunt est le taux directeur fixé par la banque centrale. Base et Masse monétaires • La monnaie centrale circulant dans l’économie (pièces et billets, réserves des banques comprises) constitue la base monétaire. La base monétaire figure au Passif de la BC. • Si l’on ajoute les monnaies (scripturales) des banques de « second rang » circulant dans l’économie (les dépôts des agents figurant au Passif des banques privées), on obtient la masse monétaire. • Deux théories les relient : – Multiplicateur de base : en connaissant la préférences des agents – agents non financiers et banques privées – pour la monnaie centrale, la banque centrale peut précisément évaluer la masse monétaire en fixant la base monétaire et le taux de réserves obligatoires des banques. L’offre de monnaie centrale est exogène ; la BC décide de la base et de la masse monétaire (qui doit s’ajuster) par son action. – Diviseur de crédit : c’est l’hypothèse symétrique postulant que la masse monétaire créée par la banque résulte de la demande de crédit provenant des agents non financiers. Les banques privées se refinancent ensuite auprès de la BC pour obtenir les billets dont elles va avoir besoin (réserves obligatoires et demande de la clientèle) : cette fois c’est la monnaie centrale qui s’ajuste (elle devient endogène), suivant le principe du diviseur de crédit Augmentation de la base monétaire : banques centrales, « prêteurs » en dernier ressort durant la crise des Subprimes Source : Natixis, Flash Economie, Avril 2013 Politique monétaire : le saisissant contraste entre Etats-Unis et Europe Source : Natixis, Flash Economie n° 813, Octobre 2014 Trappe à liquidité Source : Natixis, Flash Economie, Avril 2013 Fonctions de la monnaie • Unité de compte (définit le prix des biens). • Intermédiaire des échanges (fonction centrale chez les néoclassiques ; requiert la confiance, fiducia). • Réserve de valeur (fondamentale dans la théorie keynésienne). 2. La monnaie dans la théorie standard • Dans la théorie standard, au terme de l’analyse de tous les marchés, les agents connaissent l’ensemble des prix relatifs en vigueur pour effectuer leurs échanges : p1/p2 (pommes, poires, etc.), w/p, r/p, etc. • Dans ce raisonnement, le « prix » d’un bien n’a aucun sens : ce qui compte, ce sont les « taux de change » entre les biens ou les revenus : combien de pommes puis-je acheter avec une poire, combiens de tomates avec mon salaire, combien de pommes avec mes intérêts ? Etc. • Le problème est que les agents qui offrent des pommes peuvent vouloir/demander des poires en échange alors que les offreurs de poires demandent des tomates (et ce sont les vendeurs de tomates qui demandent des pommes). • On introduit la monnaie pour faciliter/lubrifier les échanges et éviter le troc qui est compliqué et fastidieux, notamment dans des économies où la division du travail est importante → La monnaie met de « l’huile dans les rouages » en l’absence de double coïncidence des besoins. • Il est essentiel que les agents aient confiance dans la monnaie qui circule. La monnaie fixe le niveaux des prix nominaux sans modifier les prix réels • Avant l’introduction de la monnaie, les agents ne connaissent que les prix relatifs (w/p, r/p, etc.), ils ignorent les prix nominaux p, w, r. • L’introduction de la monnaie détermine les prix nominaux sans modifier les prix réels. Exemple : équilibre sur marché du travail w/p = 2. L’injection de 20 € de monnaie fixe le prix nominal du bien de consommation à p = 5. Dans ces conditions w se fixera forcément à 10 de telle sorte que w/p = 10/5 = 2. L’injection de 40 € de monnaie fixe le prix nominal du bien de consommation à p = 10. Dans ces conditions w va augmenter et se fixer à 20 de telle sorte que w/p reste inchangé à 2 = 20/10. Neutralité de la monnaie • L’introduction de la monnaie n’ayant aucun effet sur les prix relatifs, elle n’a aucun effet non plus sur les quantités produites ou échangées dans l’économie. • La monnaie n’a d’effet que sur le niveau des prix. • Seule la flexibilité des prix (relatifs) sur les marchés garantit le pleinemploi des facteurs de production ; la monnaie ne permet pas d’agir (version nuancée : durablement) sur le niveau de production dans l’économie. • C’est pourquoi on parle de neutralité de la monnaie dans la théorie standard. La théorie quantitative de la monnaie • Le rôle de la monnaie (au niveau macroéconomique) est synthétisé dans une équation intitulé théorie quantitative de la monnaie : MV PY M = quantité de monnaie en circulation, P = niveau des prix et Y = niveau de production. • V est appelé vitesse de circulation de la monnaie. C’est un paramètre plutôt institutionnel, qu’on peut supposer exogène. Il mesure la rapidité avec laquelle une unité de monnaie (un billet par exemple) circule, c’est-à-dire le nombre de transactions que permet de réaliser cette unité de monnaie au cours d’une période donnée (plus V est grand plus la quantité de monnaie nécessaire à la réalisation des échanges pourra être réduite). • Par ailleurs, on a vu que la production d’équilibre est déterminée sur le marché du travail. Par conséquent, la quantité de monnaie injectée par l’Etat se répercute mécaniquement (et proportionnellement) dans le niveau des prix. Courbe de Phillips • Courbe de Phillips : relation décroissante entre inflation et chômage : la politique monétaire a une incidence sur l’activité (stimulation de l’investissement) • Friedman : c’est l’illusion monétaire générée par l’inflation (baisse non perçue du salaire réel) qui permet de relancer la demande de travail et l’activité ; à moyen terme cependant, les agents « intègrent » l’inflation, le chômage remonte : courbe de Phillips verticale à long terme. • Lucas (anticipations rationnelles) : les agents ne se font pas avoir deux fois par les autorités monétaires ; ils anticipent parfaitement l’inflation et ajustent très rapidement le salaire nominal : la politique monétaire n’a aucun effet, la courbe de Phillips est verticale, même à court-terme. Demande d’encaisses réelles • Côté demande : plus le revenu d’un agent est élevé, plus il demandera de monnaie pour pouvoir acheter les biens qu’il consomme (à vitesse de circulation de la monnaie donnée) • Au niveau agrégé, plus les transactions sont importantes et plus la demande de monnaie sera élevée → la demande de monnaie des agents dépend de Y et résulte d’un motif de transaction. • Ce motif de transaction dépend du niveau des prix : plus le niveau des prix est élevé, plus la demande de monnaie sera importante (toutes choses égales par ailleurs) : la demande de monnaie des agents est toujours une demande réelle : d M d f (Y ) M F ( P, Y ) P Offre de monnaie • Dans le même temps, l’offre nominale de monnaie est assuré par le seul agent ayant le pouvoir de création de monnaie (légale), l’Etat. On considère que cette quantité de monnaie offerte est fixée de façon exogène par l’Etat : Ms M • Insistons sur le fait que les agents doivent avoir confiance dans la monnaie mise en circulation par l’Etat (monnaie fiduciaire = monnaie dans laquelle on a confiance), notamment dans sa valeur (il ne faut pas que la monnaie perde de valeur entre le moment où je vends sur un marché et le moment où j’achète sur un autre). • Cf. Episode hyperinflationniste en Allemagne en 1922-23 : retour au troc et/ou recours à une devise étrangère, généralement le dollar, pour les échanges. Le marché de la monnaie détermine le niveau général des prix Offre de monnaie P Md(Y1) Y1 < Y* Md(Y*) P* M* M La demande de monnaie doit forcément s’ajuster à l’offre (exogène) de monnaie décidée par l’Etat : c’est le niveau des prix qui permet l’ajustement. Effet d’une augmentation de l’offre de monnaie P Ms1 Ms2 Md(Y*) P*2 P*1 M* 1 M* 2 M L’augmentation de l’offre de monnaie ne fait qu’élever le niveau général des prix. Mais les prix relatifs (réels) restent inchangés. 3. La monnaie et le taux d’intérêt chez Keynes • Selon Keynes, le taux d’intérêt n’assure pas l’égalité entre épargne et investissement. • Selon Keynes, le taux d’intérêt d’équilibre résulte de l’arbitrage effectué par les ménages entre différentes formes d’épargne. • Les ménages peuvent ainsi décider de placer leur épargne : – Soit sous forme de titres : l’épargne est alors rémunérée mais elle est aussi détenue sous forme d’un actif plus risqué (dont la valeur peut avoir baissé le jour où on a besoin de le revendre contre monnaie sur le marché secondaire). – Soit sous forme de monnaie : l’épargne est alors non rémunérée (détenue sur un compte bancaire) mais elle est plus sûre car totalement liquide (aucun risque de perte). • Le taux d’intérêt est la variable qui va déterminer cet arbitrage : il mesure en effet le coût d’opportunité de la liquidité (c’est-à-dire le manque à gagner lié à la décision de détenir son épargne sous forme d’un actif liquide, donc très sûr, à savoir la monnaie). Le taux d’intérêt mesure notre aversion pour le risque (plus il est élevé, plus nous réclamons un prix élevé pour notre prise risque). • Plus le taux d’intérêt (rémunérant le titres) est faible plus le manque à gagner lié à la détention de liquidité est lui-même faible : les agents sont peu incités à « courir » le risque de détenir des titres car ce risque est mal rémunéré. • Inversement, plus le taux d’intérêt est élevé, plus le manque à gagner lié à la détention de monnaie est important : le risque lié à la détention de titres étant bien rémunéré, la détention de titre est plus attractive. • Ainsi, la demande de monnaie, ou plus exactement la part de l’épargne que les agents souhaitent détenir sous forme de monnaie, est une fonction décroissante du taux d’intérêt. • De son côté, l’offre de monnaie injectée par l’Etat dans l’économie est exogène (comme dans la théorie néoclassique). • Ainsi, le taux d’intérêt est la variable qui va permettre d’ajuster offre et demande sur le marché de la monnaie : le taux d’intérêt va se fixer de telle sorte que la demande de monnaie des agents soit exactement égale à l’offre exogène fournie par l’Etat. Ms (offre de monnaie) Taux d’intérêt Epargne des agents r* Md (Demande de monnaie) Monnaie Titres Monnaie Epargne des agents Le taux d’intérêt d’équilibre permet de déterminer la composition de l’épargne des agents entre titres et monnaie. Vague de pessimisme des agents et crainte de l’avenir : la préférence pour la liquidité s’accroît → Pour détenir le même montant de titres, les agents exigent un taux d’intérêt plus important. Dit autrement, pour un taux d’intérêt donné, la demande de monnaie augmente, celle de titres diminue (la demande de monnaie est translatée vers la droite). Finalement, le taux d’intérêt d’équilibre augmente (car l’offre de monnaie reste inchangée). Taux d’intérêt Ms (offre de monnaie) Epargne des agents (r*)2 (r*)1 (Md)2 = vague de pessimisme (Md)1 Monnaie • Selon Keynes, le taux d’intérêt est la variable au travers de laquelle se reflète la représentation que se font les agents de l’avenir : – Plus cette représentation est optimiste, plus le taux d’intérêt est bas (la préférence pour la liquidité est faible, la demande de titres plus importante, ce qui réduit les taux d’intérêt). – Inversement, plus cette représentation est pessimiste, plus le taux d’intérêt va être élevé. → L’incidence macroéconomique passe par le comportement d’investissement des entreprises, qui va baisser quand le taux d’intérêt s’élève (le financement des dépenses d’investissement s’élève et certains projets deviennent non rentables) : r* ↑ I ↓ Demande Globale ↓ Y* ↓ Chômage ↑ Les critiques de Friedman à la théorie keynésienne de la préférence pour la liquidité • On vient de voir que chez Keynes : 𝑀 ↗ ⇒ 𝑟 ↘ = effet liquidité. • Friedman note cependant que : – (1) – (2) – (3) 𝑀 ↗ ⇒ 𝑌 ↗ ⇒ 𝑀𝑑 ↗ ⇒ 𝑟 ↗ Inflation anticipée ↗ ⇒ rendement obligataire ↘ ⇒ 𝑀𝑑 ↗ ⇒ 𝑟 ↗ p ↗ ⇒ 𝑀𝑑 ↗ ⇒ 𝑟 ↗ • L’effet liquidité est rapide, tout comme l’effet (2) = anticipation. Les effets (1) et (3) sont plus lents. • A terme, un accroissement de l’offre de monnaie peut se traduire par une hausse (≠ Keynes) du taux d’intérêt, notamment si l’effet (1) est important. Théorie du choix de portefeuille • Théorie développée par H. Markowitz (1952 ; prix Nobel en 1990) et J. Tobin (1958 ; prix Nobel 1981). • Le choix des agents n’est pas binaire (contrairement à ce que suggère la théorie keynésienne, où les agents sont divisés en deux catégories : ceux qui détiennent de la monnaie et ceux qui détiennent des titres) : ils peuvent détenir à la fois des titres et de la monnaie. • Il est important de diversifier son portefeuille pour en réduire le risque, à rendement donné (« ne pas mettre tous les œufs dans le même panier »). • En pratique, on peut placer son épargne dans une gamme très variée de « produits » ou d’actifs ; grand éventail de choix dans la liquidité (monnaie, livrets, assurance-vie, actions, etc.) 4. La politique monétaire Dans le cadre de la théorie keynésienne, la politique monétaire de l’Etat a un effet sur le niveau d’activité économique et pas (uniquement) sur le niveau des prix (théorie néoclassique) : une hausse de l’offre de monnaie réduit en effet le taux d’intérêt d’équilibre, stimule l’investissent et finalement la production. Taux d’intérêt (Ms)1 (Ms)2 Epargne des agents (r*)1 (r*)2 Md Monnaie Politique monétaire de l’Etat en réaction à une forte demande de liquidité sur les marchés Taux d’intérêt (Ms) 1 (Ms) 2 Epargne des agents (r*)1 = (r*)2 (Md)2 = vague de pessimisme (Md)1 Monnaie L’injection de liquidités par les autorités monétaires (augmentation de l’offre de monnaie) limite la chute des cours (des titres) et évite l’augmentation des taux d’intérêt. Les taux directeurs • En pratique, la banque centrale n’agit pas directement sur la quantité de monnaie, elle « joue » sur le taux d’intérêt auquel elle prête aux agents et notamment aux banques privées. • Au jour le jour, la banque centrale fixe un taux de crédit et un taux de dépôt et s’engage à honorer toutes les demandes qui lui sont faites à ces taux. • Une banque prêteuse n’acceptera pas moins que le taux de dépôt proposé par la banque centrale. • Une banque emprunteuse n’acceptera pas un taux supérieur au taux de crédit fixé par la banque centrale. • Dans ces conditions, le taux interbancaire se fixe dans le corridor fixé par la banque centrale pour ses taux directeurs. • Quand la BC veut resserrer les conditions monétaires elle rehausse le corridor ; dans le cas contraire, elle l’abaisse. • Même principe pour les besoins à court-terme ( > 1 jour) mais la banque centrale peut alors prendre des titres en gage, voire acheter/vendre des titres aux banque (politique d’open market). Les taux courts • Les taux directeurs des banques centrales (au jour le jour) : – Taux de rémunération (ou taux de facilité) des dépôts : taux auquel les réserves (obligatoires ou non) des banques auprès de la BC sont rémunérées. – Taux de refinancement (taux « refi » ou, en anglais, « repo », pour repossession) : taux auquel la BC prête aux banques. – Taux d’escompte (Fed) ou taux du prêt marginal (BCE) : taux auquel une banque peut emprunter en apportant un dépôt de garantie (sous forme de titre). L’intérêt est payé à l’avance (il est déduit de la somme prêtée). • Les taux du marché interbancaire : – Eonia (Euro OverNight Index Average) : taux du marché interbancaire « en blanc » (non gagé par un titre) au jour le jour. – Euribor (EURo InterBank Offered Rate) : taux du marché interbancaire pour des échéances entre 1 semaine et un an (1,2 ou 3 semaines, 1, 2 3, etc. 12 12 mois) ; équivalent à Londres = Libor (London InterBank Offered Rate), utilisé aussi aux Etats-Unis. Taux directeurs : Fed vs BCE depuis 1999 Source : http://france-inflation.com/taux-directeurs-bce-fed.php Les canaux de la politique monétaire (1) • Canal des taux d’intérêt : c’est sans doute le plus connu. Quand la banque centrale augmente l’offre de monnaie, elle fait baisser les taux sur le marché financier et stimule donc la demande de crédit privée. La baisse concerne les taux nominaux mais peut aussi transiter par les anticipations d’inflation et in fine les taux réel. – Taylor (1995) : effet significatif sur les dépenses de consommation et d’investissement ≠ Bernanke et Gertler (1995) : incidence faible, l’investissement étant peu sensible aux variations du coût du capital ! • Canal du crédit bancaire : quand le taux de l’endettement (taux directeur) au passif des banques baisse, celles-ci répercutent la baisse sur les taux des crédits qu’elles octroient à leur clientèle. Dit autrement, la hausse de leurs réserves leur permet d’augmenter leur offre de crédit : choc positif d’offre de crédit, qui fait baisser les taux et stimule la demande privée (consommation et investissement). Les canaux de la politique monétaire (2) • Canal du taux de change : la baisse des taux d’intérêt réels au niveau national réduit la rémunération des dépôts et titres nationaux ; sortie de capitaux et dépréciation de la monnaie, qui stimule ne retour les exportations. • Canal du Q de Tobin (Q de Tobin = Valeur boursière de l’entreprise / valeur de son capital physique, à l’actif du bilan). Quand Q > 1, le capital physique est bon marché pour les entreprises (l’émission d’une action rapporte beaucoup) qui sont incitées à investir davantage. Or la politique monétaire stimule généralement l’achat d’actions (inflation… des actifs financiers). • Effet de richesse des ménages : politique monétaire accommodante augmente la richesse (en actions ou immobilière) des ménages et stimule donc leur consommation courante. • Canal des bilans d’entreprise : la hausse du cours des actions réduit le risque de défaut des entreprises, réduit le risque pour le prêteur et stimule l’investissement. • Etc. ! Le Quantitative Easing (1) • En période normale, la politique monétaire consiste principalement pour la BC à moduler le taux interbancaire (à court-terme) à l’aide de son taux directeur (même si on attend des effets réels via les canaux vus précédemment). • Le Quantitative Easing consiste en des mesures non conventionnelles de politique monétaire mises en place afin de faire face à des crises financières de grande ampleur (Japon à partir de 2001, Etats-Unis à partir de 2008). • Aux Etats-Unis : – QE1, 2009 : rachat de titres de créances « toxiques » ou « douteuses » aux banques, principalement des Mortgage-Backed Securities (1 700 milliards de $). C’est essentiel : monétisation des pertes ! – QE2, 2010-2011 : QE1 + achat massif d’obligations du Trésor (créances de long terme) pour faciliter la politique budgétaire et baisser, plus généralement, les taux longs sur l’ensemble des marchés obligataires (1 000 milliards de $). – QE3, 2012-2013 : achat d’actifs et d’obligations du Trésor pour 85 milliards de $ par mois. Devrait être réduit de manière progressive à partir de… ? Le Quantitative Easing (2) • Les objectifs sont donc de : – restaurer les bilans bancaires (les débarrasser des créances « douteuses, des actifs « pourris », sans valeur, ce qui n’avait pas été suffisamment fait au Japon durant les années 1990) afin de limiter le Credit Crunch (refus des banques d’octroyer de nouveaux crédits aux agents privés). – jouer sur les taux longs afin de faciliter le financement public et de stimuler le crédit privé. • Cela implique que la BC accepte l’expansion forte de son bilan (plus de monnaie légale au Passif et plus de titres (MBS, obligations, etc.) à son Actif). • Actuellement : la Fed annonce qu’elle réduit très progressivement les mesures non conventionnelles de sa politique monétaire. L’évolution des taux longs aux Etats-Unis et Europe depuis 2008 Source : Natixis, Eco hebdo n° 34, Septembre 2014 Les taux baissent aux Etats-Unis (QE) ; ils ont augmenté en Europe durant la crise des dettes souveraines et sont en forte baisse depuis. Achat d’actifs publics par les BC Source : Natixis, Flash Economie, Avril 2013 Les achats de la BCE progressent à partir de 2011 mais à une échelle bien moindre qu’aux Etats-Unis. Credit Crunch évité ? Source : Natixis, Flash Economie, Avril 2013 Le crédit aux agents privés semble enfin repartir aux Etats-Unis à partir de 2012 ; il continue de stagner en Europe !
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