(MAITRE KONE MOHAMED LAMINE) Contre

REPUBLIQUE DE COTE
D’IVOIRE
----------------COUR D’APPEL D’ABIDJAN
---------------TRIBUNAL DE COMMERCE
D’ABIDJAN
---------------
AUDIENCE PUBLIQUE DU 24 AVRIL 2014
RG N° 943/2014
-------------
Assisté de Maître FALOLA ESTELLE SANDRINE, Greffier ;
L’an deux mil quatorze
Et le vingt-quatre avril
Nous, TOURE AMINATA, Juge délégué dans les fonctions du
Président du Tribunal de commerce d’Abidjan, statuant en
matière de référés ;
Avons rendu l’ordonnance dont la teneur suit :
ORDONNANCE DU JUGE DES
Par exploit en date du 03 avril 2014 de maître ZADI TOH JEAN
REFERES
LUC huissier de justice à Abidjan, monsieur BADDREDINE
-------------HANI ABBAS a fait servir assignation à la société de
Affaire :
COMPAGNIE IVOIRIENNE D’ELECTRICITE dite CIE d’avoir à
comparaître devant la juridiction présidentielle de ce siège aux
-MONSIEUR
fins d’entendre, faire défense à la COMPAGNIE IVOIRIENNE
BADDREDINE HANI
D’ELECTRICITE dite CIE de suspendre la fourniture d’énergie
ABBAS
électrique à et ce, sous astreintes comminatoires de 500.000
FCFA par jour de retard à compter de la coupure d’électricité ;
MAITRE KONE MOHAMED
LAMINE
Au soutien de son action, monsieur BADDREDINE HANI
ABBAS expose qu’il a souscrit à un contrat d’abonnement auprès
Contre
de la COMPAGNIE IVOIRIENNE D’ELECTRICITE dite CIE
suivant un contrat de fourniture d’électricité pour un usage
-LA COMPAGNIE
professionnel ;
IVOIRIENNE
D’ELECTRICITE dite CIE
Il précise qu’il s’est toujours acquitté de ses factures d’électricité,
de sorte qu’il n’est redevable d’aucune somme envers la CIE ;
MAITRE ADJOUSSOU
THIAM
Le 21 février 2014, la CIE lui a adressé un courrier pour
-------------l’informer de ce qu’au cours de la période allant du mois de
DECISION :
juillet à septembre 2013, l’énergie qu’il a réellement consommée
Contradictoire
est de 21.518.639 FCFA, alors que la facture d’électricité y
afférente indique le montant de 5.927.374 FCFA ;
Au principal renvoyons les parties à se
pourvoir ainsi qu’elles aviseront ;
Dès à présent, vu l’urgence et par
provision ;
De ce fait, sans aucune preuve tangible pour soutenir l’anomalie
alléguée, la CIE lui a adressé une facture dite de redressement à
hauteur de 15.590.935 FCFA ;
Nous déclarons incompétent pour
connaitre de la présente action, au profit
du juge du fond ;
Il explique que la CIE dit être parvenue à cette conclusion après
une simple lecture de l’énergie enregistrée par son compteur ;
Mettons les dépens de l’instance à la
charge de Monsieur BADDREDINE
HANI ABBAS.
Or, note fait-il noter, sa consommation énergétique n’a pas
sensiblement varié au cours des périodes avant et après la
période concernée ;
C’est pourquoi, fait-il savoir, il a contesté la facture de
redressement ainsi émise dans une correspondance datée du 21
février 2014 ;
Mais, sans tenir compte des réserves émises contre la facture de
1
redressement susvisée, la CIE l’a enjoint de payer le montant de
celle-ci sous peine de suspension immédiate de la fourniture
d’électricité ;
Estimant que le péril serait grave pour ses activités, si la CIE
procédait à cette suspension, il sollicite donc de la juridiction de
céans de faire droit à sa demande, car la facture qu’il conteste,
n’est pas justifiée ;
En réplique la COMPAGNIE IVOIRIENNE D’ELECTRICITE
dite CIE soulève d’abord l’incompétence de la juridiction des
référés, motif pris de ce que celle-ci ne peut valablement se
prononcer sur la contestation de la facture complémentaire
querellée, laquelle selon elle est une question de fond, dévolue
justement au juge du fond ;
Ensuite, elle fait valoir que l’action de Monsieur BADDREDINE
HANI ABBAS est irrecevable aux motifs que son abonné
véritable est la société EURO SHOES et non Monsieur
BADDREDINE HANI ABBAS ;
EURO SHOES est une société à responsabilité limitée, comme
cela ressort de certains actes servis par elle dans des procédures
antérieures,
Dès lors elle jouit d’une personnalité juridique propre distincte
de celle de son représentant légal ;
Se fondant sur l’article 17 de la convention de concession de
service public de l’électricité, aux termes duquel seul l’abonné
peut ester en justice contre la CIE, pour les litiges nés à l’issue
de l’exécution du contrat d’abonnement, elle estime que
Monsieur BADDREDINE HANI ABBAS n’a pas la qualité pour
agir au sens de l’article 3 du code de procédure civile ;
Subsidiairement sur le fond du litige, elle souligne que son
adversaire doit être débouté de sa demande, car elle estime avoir
agi conformément aux dispositions des articles 13.2 et 13.3 du
contrat d’abonnement liant les parties ;
En vertu dudit contrat d’abonnement, elle dispose du privilège
du préalable, qui est une prérogative de puissance publique,
laquelle s’impose à tous les usagers du service public ;
Ainsi, tout abonné recevant une facture d’électricité doit au
préalable s’exécuter avant toute discussion ;
Au regard de tout ce qui précède, elle conclut au rejet de la
demande de Monsieur BADDREDINE HANI ABBAS ;
DES MOTIFS
En la forme
2
Sur le caractère de la décision
La CIE ayant comparu, il y a lieu de
contradictoire ;
statuer par décision
Sur l’exception d’incompétence
Monsieur BADDREDINE HANI ABBAS sollicite qu’il soit fait
défense à la CIE de lui suspendre la fourniture d’électricité, au
motif qu’il conteste la facture complémentaire émise par cette
dernière, parce qu’elle n’est pas justifiée ;
Relativement à cette demande, la CIE soulève l’exception
d’incompétence de la juridiction des référés, au motif qu’en
connaitre, relève de la compétence du juge du fond qui seul, peut
estimer si la facture est justifiée ou pas ;
Aux termes de l’article 226 alinéa 1 du code de procédure civile
commerciale et administrative : « Le juge des référés statue par
ordonnance. Sa décision ne peut en aucun cas porter préjudice
au principal. » ;
Il s’infère de ce texte que le juge des référés ne peut ordonner
une mesure, qu’à la condition que sa décision ne porte pas
atteinte au fond du litige ;
La juridiction des référés préjudicie au fond chaque fois que
préalablement à la prise de la mesure sollicitée, il doit se
prononcer sur une question relevant du fond du litige ;
En l’espèce la requête visant à interdire à la CIE de procéder à la
suspension de la fourniture d’électricité au motif que la facture
complémentaire de 15.590.935 FCFA n’est pas fondée, nécessite
que la juridiction des référés, juge de l’évidence, se prononce
sur le bien fondé de la facture querellée ;
Ainsi, le juge des référés ne peut se prononcer sur la demande de
Monsieur BADDREDINE HANI ABBAS, sans chercher à situer
les responsabilités en déterminant la faute de l’abonné, qui
aurait conduit à l’émission de la facture complémentaire
susdite ;
Ce faisant, le juge des référés, juge de l’évidence et des mesures
provisoires, statuera sur une question de fond, ce qui ne relève
point de ses attributions en application de l’article 226 sus visé;
Il y a donc lieu de se déclarer incompétent pour connaitre de la
présente action tendant à faire défense à la CIE d’interrompre la
fourniture de l’électricité sollicitée par Monsieur BADDREDINE
HANI ABBAS, et ce, au profit du juge du fond ;
Sur les dépens
Le demandeur succombant, il sied de mettre les dépens de
l’instance à sa charge ;
3
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de
référés et en premier ressort ;
Au principal renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu’elles
aviseront ;
Dès à présent, vu l’urgence et par provision ;
Nous déclarons incompétent pour connaitre de la présente
action, au profit du juge du fond ;
Mettons les dépens de l’instance à la charge de Monsieur
BADDREDINE HANI ABBAS.
ET AVONS SIGNE LE PRESIDENT ET LE GREFFIER. /
4