essai LES VOILIERS DE REGATE DE 10 A 11 METRES JPK 10.80 L’accord parfait On connaissait le talent conjugué de Jacques Valer et Jean-Pierre Kelbert pour donner naissance à des champions. Forts de dix ans d’expérience, ils livrent avec ce 10.80 une copie qui frise la perfection. EN CHIFFRES Texte : François-Xavier de Crécy. Photos : Jean-Marie Liot et François Van Malleghem. SOMPTUEUX. C’est un terme qui est souvent revenu le jour de l’essai pour qualifier les sensations de barre, le comportement du bateau et la fluidité des manœuvres. Fluides, elles le sont d’autant plus que Jean-Pierre Kelbert, l’un des deux papas du bateau (l’autre étant l’architecte Jacques Valer) est à la baguette et qu’il a le bateau bien en main. Il est vrai qu’il vient de boucler et de remporter la première étape de la Transquadra, de Saint-Nazaire à l’archipel de Madère. On pourrait se sentir intimidé, voire dépassé par la puissance du bateau : il n’en est rien. L’accastillage est tellement bien placé, bien dimensionné, le plan de pont si limpide que tout paraît simple et presque facile. Pourtant les efforts sont importants. Le mât carbone, le gréement en rod, les voiles très raides, tout contribue à solliciter l’accastillage au maximum, mais cela ne se sent pas. Ou plutôt si, cela se sent dans les performances (7 nœuds dans 9 nœuds de vent au près), d’autant que la construction entièrement réalisée en infusion (varangues infusées avec la coque) ne manque pas non plus de raideur. Les aménagements eux-mêmes sont infusés pour un devis de poids optimal. Pourtant, l’intérieur se paie le luxe d’être assez chaleureux avec ses placages bois jusque dans la cabine avant : l’ambiance n’est pas à la chasse aux poids, conformément à la volonté de Jean-Pierre d’inclure la croisière dans le programme. 132 DECEMBRE 2014VOILE MAGAZINE D’ailleurs, les varangues ne dépassent pas du plancher. A tribord, la table à cartes reste confortable à la gîte grâce à un siège concave et un coussin antidérapant. En cas de besoin, on peut toujours appuyer un pied sur la descente. De l’autre côté de cette descente bien gardée, une vraie cuisine avec four, évier et rangements : il ne lui manque qu’un panneau d’aération. Depuis cette zone située autour de la descente, on jouit d’une superbe visibilité sur l’avant grâce à ce drôle de rouf épaulé sur l’arrière et plus étroit au-dessus de la table du carré. En course ou en croisière, c’est un vrai plus en navigation. Vu de l’extérieur, ce rouf en T interpelle avec ses pans coupés tournés vers l’avant, mais on s’y fait vite. Et ce dessin original permet à la fois de protéger le cockpit et de placer dans le passavant des rails transversaux pour rentrer les points de tire. Ce qui n’exclut pas Long. : 10,80 m. Long. flot. : 9,40 m. Largeur : 3,65 m. TE : 2,20 m. Dépl. : 4 750 kg. Lest : 2 150 kg. SV au près : 73 m2. Génois : 33 m2. GV : 40 m2. Spi : 105 m2. Mat. : sand verre/PVC (infusion). Arch. : Jacques Valer. Const. : JPK Composites. Prix : 159 000 €. l’utilisation en régate d’un in-hauler (renvoyé au piano, une seule manœuvre pour les deux bords) et d’un barber pour descendre le point de tire. Le cockpit en deux parties, très large sur l’arrière et plus étroit entre les bancs devant le poste de barre, est un classique. Ce qui l’est moins, c’est la position du barreur sur le plat-bord, légèrement tournée vers l’avant. Ce soin apporté à l’ergonomie, également visible dans le positionnement des cale-pieds, a vraiment porté ses fruits. Toutes les manœuvres utiles au barreur lui tombent sous la main. Quant au winch de génois, il a été à la fois surélevé pour travailler à son aise et rentré pour ne pas avoir à se décaler sous le vent. Plus qu’un simple bateau de régate, ce nouveau JPK est un vrai course-croisière qui prend soin de son équipage et l’aide à durer sur de longues navigations. Pour la Transquadra bien sûr, et plus si affinités. COMME JOHN LENNON a rencontré Paul Mac Cartney, Jean-Pierre Kelbert a croisé Jacques Valer. Et toutes choses égales par ailleurs, la rencontre de ces deux talents parfaitement complémentaires s’est avérée très fructueuse, donnant naissance à une lignée de bateaux excitants, élégants et très compétitifs en IRC : les JPK. Tout a commencé à la fin des années quatre-vingt-dix, quand Jean-Pierre Kelbert courait en IRC sur JOD 35. Lassé de voir le prototype Matamouf of Recoucou truster les podiums, il a cherché et trouvé l’architecte. Jacques Valer n’était pas très chaud pour tenter l’aventure avec Jean-Pierre qui faisait des planches à voile depuis dix ans mais n’avait pas encore construit de bateau. Il lui a quand même confié la préforme du Diam 18, puis s’est finalement lancé dans l’aventure. Ce fut le JPK 960 qui, à peine mis à l’eau, allait remporter sa première régate. C’était l’Obélix Trophy, en mars 2003, premier titre d’un palmarès à rallonge… de partis pris innovants, Un cocktail de solutions éprouvées et à l’image de l’étonnant rouf en T. Il y a deux paires de cale-pieds, pour le barreur et pour un éventuel régleur de grand-voile. Mais le barreur est bien placé pour tout faire. Notez également le poste de veille à l’abri d’un capot coulissant bombé. Chaleureux, lumineux, l’aménagement intérieur est révélateur des ambitions du 10.80 qui vise l’excellence en IRC, mais aussi un vrai confort en mode course-croisière. A VOIR OU A REVOIR… Le siège incurvé de la table à cartes et son coussin-grip offrent un bon maintien, même quand ça gîte fort. La hauteur du winch de rouf est idéale, la protection du capot précieuse. Il manque un hublot ouvrant au-dessus de la cuisine.
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