JUIN 2014 AvanCées dans les myopathies inflammatoires Ce document présente l'état actuel des connaissances scientifiques sur les myopathies inflammatoires, mis à jour à l'occasion des Journées des Familles 2014 de l'AFMTéléthon. Il est téléchargeable sur le site internet de l'AFM-Téléthon : WEB www.afm-telethon.fr . Pour en savoir plus sur les myopathies inflammatoires, vous pouvez consulter le Zoom sur... les myopathies dysimmunitaires (myosites) et les Repères Savoir et Comprendre qui traitent de sujets scientifiques, médicaux, psychologiques et sociaux. Destinés aux personnes atteintes de maladies neuromusculaires et à leurs familles, ils sont disponibles sur le site internet de l'AFM-Téléthon et auprès du Service régional de votre région. > dermatomyosite (DM) > polymyosite (PM) > myosite à inclusions (IBM) Ils ne peuvent en aucun cas se substituer à l'avis d'un médecin, même s'ils peuvent vous faciliter le dialogue avec l'équipe soignante. Avancées dans les myopathies inflammatoires Savoir & Comprendre Sommaire Rédaction Myoinfo, Département d'information sur les maladies neuromusculaires de l'AFM-Téléthon, Évry Validation Pr. Olivier Benveniste et Dr. Aude Rigolet, Service de médecine interne, Hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris Faits marquants .....................................................................................2 Que sont les myopathies inflammatoires ? ........................................ 3 A quoi les myopathies inflammatoires sont-elles dues ? .................. 3 Où en est la recherche dans les myopathies inflammatoires ?......... 5 Des bases de données pour mieux connaître les myopathies inflammatoires .................................................................................................................5 Mieux décrire l’histoire naturelle de la myosite à inclusions............................ 6 Développer des modèles animaux et cellulaires pour mieux comprendre les mécanismes sous-jacents aux myosites ..........................................................6 Pistes thérapeutiques et traitements dans les myosites ..................................7 Arsenal thérapeutique dans la dermatomyosite et la polymyosite ............... 7 Mise à jour de la revue Cochrane sur les traitements des dermatomyosites et les polymyosites ....................................................................... 7 Effets positifs de l'entrainement physique dans les myosites ......................... 8 Essais de BAF312................................................................................................................ 8 Dans les myosites réfractaires ...................................................................................... 8 Pistes thérapeutiques et traitements dans la myosite à inclusion ...............9 L'alemtuzumab ................................................................................................................... 9 L'exercice physique ........................................................................................................... 9 Inhiber la myostatine par thérapie génique............................................................ 9 Inhiber la myostatine par le BYM338......................................................................... 9 La rapamycine .................................................................................................................. 10 * * * Faits marquants > Le compte rendu d'un séminaire de travail consacré à la myosite à inclusion organisé par l’ENMC du 2 au 4 novembre 2011 à Naarden (PaysBas), a été publié en décembre 2013. > Le compte rendu d'un autre séminaire organisé par l'ENMC du 30 novembre au 2 décembre 2012 à Naarden et portant sur le diagnostic anatomo-pathologique dans les myosites idiopathiques, a été publié en septembre 2013. > Une base de données pour le suivi des personnes atteintes de myosites a été créée par un laboratoire de l’hôpital Pitié-Salpêtrière (Paris). > Des souris modèles de polymyosite expérimentale ont été mises au point. > Effets bénéfiques du réentrainement à l’endurance chez 23 personnes atteintes de myosites. > Dans les myosites • Deux essais de BAF312, un immunomodulateur, sont en cours, l'un chez 56 personnes atteintes de dermatomyosite et l'autre chez 30 personnes 2 ǀ AFMTéléthon ǀ Juin 2014 Avancées dans les myopathies inflammatoires Savoir & Comprendre atteintes de polymyosite, au Canada, aux États-Unis, en Hongrie, au Japon, en Pologne et en République Tchèque. Recrutement en cours. > Dans les myosites réfractaires • Essai FORCE chez 12 personnes atteintes de myosite réfractaire en France. Le rituximab entraîne une amélioration dans environ 50% des cas. • Essai de phase II du tocilizumab, un immunomodulateur. En préparation aux États-Unis. > Dans les myosites à inclusions • Essai de phase I de thérapie génique avec le gène de la follistatine chez 15 personnes aux États-Unis. Recrutement en cours. • Essai de phase II/III de BYM338 chez 240 personnes atteintes de myosites à inclusion (dont une dizaine en France). Recrutement en cours. • Essai de la rapamycine, un immunosuppresseur. En préparation en France. Que sont les myopathies inflammatoires ? Les myopathies inflammatoires (ou myosites) constituent le groupe des maladies inflammatoires du muscle. Ces maladies sont dites autoimmunes et ne sont pas héréditaires. Les myopathies inflammatoires sont des maladies rares, qui touchent environ 6 à 7 personnes sur 100 000. Elles sont caractérisées par une faiblesse musculaire (de la simple gêne à la paralysie complète) et plus rarement par des douleurs musculaires. Suivant les formes de myosites, sont parfois associées des douleurs articulaires ou des manifestations cutanées, une atteinte cardiaque et une atteinte pulmonaire qui en font aussi la gravité. La classification des myosites est établie en fonction des types de symptômes, de caractéristiques immunologiques et de l'aspect du tissu musculaire au microscope (critères histologiques). Ces dernières années, la classification des myosites a été en constante évolution. On distingue actuellement 5 principaux types de myosites : - la dermatomyosite (DM) - la polymyosite (PM) - la myosite de chevauchement - la myosite à inclusions - la myopathie nécrosante auto-immune. À quoi les myopathies inflammatoires sont-elles dues ? Dans les myopathies inflammatoires, le système immunitaire se dérègle et attaque des éléments de l'organisme (maladie auto-immune), notamment le muscle squelettique. Une maladie auto-immune est une maladie dans laquelle le système immunitaire (chargé normalement de protéger un organisme contre des attaques extérieures : microbe, virus…) se dérègle et va attaquer des éléments de l'organisme de son hôte. Une maladie est dite rare quand elle touche moins d'une personne sur 2 000. Les maladies rares font l'objet d'une politique de santé publique commune dans les domaines de la recherche, de l'information et de la prise en charge. Les muscles squelettiques sont les muscles attachés au squelette. En se contractant, ils font bouger les différentes parties de notre corps. Sous le contrôle de la volonté, ils sont également appelés muscles volontaires ou encore muscles striés à cause de leur aspect strié au microscope. 3 ǀ AFMTéléthon ǀ Juin 2014 Savoir & Comprendre Avancées dans les myopathies inflammatoires Des mécanismes immunitaires différents rentrent en jeu selon le type de myosites. Le complément est un système complexe, composé de différentes protéines, qui est impliqué dans la défense de l'organisme par le système immunitaire. Les lymphocytes T cytotoxiques CD8+ sont des globules blancs spécialisés du système immunitaire. Ils libèrent des protéines toxiques, dirigées contre les cellules qu'ils attaquent. Ces protéines toxiques font des trous dans la membrane cellulaire, provoquant une entrée excessive d'eau dans les cellules, qui finissent par éclater. La nécrose cellulaire est une mort accidentelle des cellules, due à des facteurs extérieurs (manque d'oxygène, intoxication, maladie...). Si la cellule est trop endommagée, elle se nécrose : elle se gorge d'eau au point d'éclater. Cela conduit au déversement du contenu de la cellule dans le milieu environnant, provoquant une inflammation et des lésions des tissus alentours. Les auto-anticorps sont des anticorps qui réagissent contre des éléments de son propre organisme, comme le muscle. La créatine kinase est une enzyme musculaire qui joue un rôle dans la production d'énergie directement utilisable par les cellules. Abondamment présente dans les cellules musculaires, elle est libérée dans la circulation sanguine en cas d'atteinte musculaire. Son dosage dans le sang est utile au diagnostic de certaines myopathies. 4 ǀ AFMTéléthon ǀ Juin 2014 Dans la dermatomyosite (DM), le système immunitaire attaque en premier lieu les vaisseaux sanguins de la peau et du muscle par une accumulation anormale du complément dans ces vaisseaux. Les raisons de cette sur-activation anormale du complément demeurent inconnues, même si quelques hypothèses ont été émises par les chercheurs. La destruction des vaisseaux sanguins provoque une diminution de l'apport de sang aux fibres musculaires qui vont alors diminuer de volume : elles s'atrophient. Par la suite, différents types de cellules immunitaires vont envahir la zone lésée (infiltrat inflammatoire), aggravant l'état des fibres musculaires. Dans la polymyosite (PM), les fibres musculaires présentent à leur surface des signaux anormaux caractéristiques d'un agent étranger (microbe, virus…). Les lymphocytes T de type cytotoxiques (CD8+) réagissent à ces signaux en attaquant les fibres musculaires et en les détruisant. Dans la myosite à inclusions, on observe d'une part la présence dans les fibres musculaires d’agrégats de protéines toxiques, appelés inclusions. D'autre part, certaines fibres musculaires sont envahies de cellules immunitaires, notamment des lymphocytes T CD8+, comme dans la polymyosite. On ne connaît pas la cause initiale de l'attaque immunitaire et il est possible que les caractéristiques auto-immunes de cette maladie ne soient que les conséquences d'un autre événement primaire (telle que l’apparition des inclusions). La myosite nécrosante est une myosite caractérisée par une nécrose musculaire importante et avec peu ou pas d’infiltrat inflammatoire. On distingue les formes liées à la présence d’auto-anticorps spécifiques comme les anti-SRP (pour signal recognition particles ou particules de reconnaissance du signal) ou myopathie à SRP, ou comme les anticorps anti-HMGCoR (pour 3-hydroxy-3-methylglutaryl coenzyme A reductase) récemment découverts, de formes sans auto-anticorps parfois associées à une néoplasie. Il a récemment été montré une corrélation stricte entre les niveaux d’autoanticorps anti-SRP ou anti- HMGCoR et l’activité créatine kinase. Une première étude française réalisée chez 206 personnes atteintes de myopathie nécrosante a montré que 45 étaient atteintes d’une forme liée aux anti-HMGCoR et 44% d’entre elles étaient sous statines. La grande majorité (97,7%) des personnes avec des anti-HMGCoR présentaient un déficit musculaire ; aucun signe extra-musculaire n’a été rapporté. La myosite de chevauchement est une myosite qui se définit par la présence de manifestations extra-musculaires ou extra-cutanées ou d'autoanticorps spécifiques des myosites (par exemple le syndrome des antisynthétases qui associe la présence de l’auto-anticorps anti-Jo-1, une myosite, et des atteintes articulaires, cutanées et pulmonaires). Avancées dans les myopathies inflammatoires Savoir & Comprendre Concernant les autres myosites, les mécanismes en cause sont beaucoup moins bien connus, ce d'autant que leur distinction au sein du groupe des myosites est très récente. Où en est la recherche dans les myopathies inflammatoires ? Un atelier organisé par l'ENMC a été consacré à la myosite à inclusion. Organisé du 2 au 4 décembre 2011 à Naarden (Pays-Bas), il a réuni 24 participants (cliniciens, chercheurs, parents) venus de 9 pays (Allemagne, Australie, Belgique, Danemark, États-Unis, France, Pays Bas, Royaume-Uni et Suède). Le compte rendu de cet atelier ENMC a été publié en décembre 2013. Les critères de diagnostic des myosites à inclusion, les recherches immunologiques et génétiques, les études d’histoire naturelle, les protocoles d’essais cliniques, les critères d’évaluation, les bases de données et les standards de soins… ont été les principaux sujets abordés au cours de cet atelier. À l’issue de cet atelier, des critères de diagnostic plus spécifiques ont été proposés afin de mieux identifier les cas pour lesquels un traitement pourrait être efficace. Ont été soulignés le besoin d’harmoniser les bases de données et l'intérêt du test musculaire quantitatif du quadriceps pour évaluer l’efficacité d’un traitement dans le cadre des essais de cliniques. Un autre atelier ENMC, consacré au diagnostic anatomo-pathologique (c'est-à-dire l'observation au microscope des lésions du tissu musculaire prélevé par biopsie musculaire) dans les myopathies inflammatoires idiopathiques, a eu lieu du 30 novembre au 2 décembre 2012 à Naarden (Pays-Bas). Il a réuni 21 participants (cliniciens, chercheurs, parents) venus de 9 pays (Allemagne, Belgique, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Pays-Bas, Royaume-Uni et Suède). Son compte rendu a été publié en septembre 2013. Les discussions ont porté sur la classification des myopathies inflammatoires, la standardisation et l’interprétation des biopsies musculaires, les modifications tissulaires, les nouvelles découvertes sur les auto-anticorps et les régulateurs immunitaires dans les myopathies inflammatoires. Des bases de données pour mieux connaître les myopathies inflammatoires Le développement de bases de données de patients permet d’effectuer un recensement (exhaustif en cas de registre) des personnes atteintes d'une même maladie, de préciser l’histoire naturelle de celle-ci et d'établir des corrélations génotype/phénotype. La détermination de l’histoire naturelle de la maladie est un pré-requis essentiel avant la mise en place d'essais thérapeutiques. Ceci est encore plus vrai quand la progression de la maladie est variable comme dans ces myopathies inflammatoires. L'European Neuromuscular Centre (ENMC) est une organisation internationale visant à soutenir la recherche dans le domaine des maladies neuromusculaires. Il organise régulièrement des rencontres internationales rassemblant scientifiques et cliniciens sur une thématique donnée. WEB www.enmc.org/ Ce que les médecins appellent l'histoire naturelle d'une maladie est la description des différentes manifestations d'une maladie et de leur évolution au cours du temps en l'absence de tout traitement (médicaments, kinésithérapie, chirurgie…). Les études de corrélations génotype/phénotype recherchent l'existence de liens entre les caractéristiques génétiques, le génotype, et les caractéristiques s'exprimant de façon apparente, le phénotype (taille, couleur et forme des yeux, couleur des cheveux, manifestation d'une maladie...). On peut ainsi identifier une relation plus ou moins étroite entre la présence d'une anomalie génétique de tel ou tel type et celle de telles ou telles manifestations d'une maladie génétique. 5 ǀ AFMTéléthon ǀ Juin 2014 Savoir & Comprendre Avancées dans les myopathies inflammatoires Une base de données a été créée par un laboratoire de l’hôpital PitiéSalpêtrière (Paris) pour le suivi des personnes atteintes de myosites. Les premiers dossiers ont été saisis en août 2013. A l’heure actuelle, la base de données pour les myosites compte 950 dossiers. Mieux décrire l’histoire naturelle de la myosite à inclusions Des études sur des groupes importants de patients ont permis de mieux caractériser certaines myosites sur les plans clinique et immunologique. Un modèle cellulaire permet d'étudier les mécanismes biologiques d'une maladie à partir de cellules cultivés en laboratoire qui reproduisent les caractéristiques de cette maladie. Ces cellules peuvent provenir de personnes atteintes par la maladie, ou avoir été crées en laboratoire. Elles peuvent aussi servir à tester les effets d'un traitement potentiel. Un modèle animal est un animal qui reproduit les caractéristiques de la maladie (à la fois sur le plan génétique et sur le plan clinique) permettant l'étude des mécanismes de la maladie ou l'essai de traitements potentiels. Myobank-AFM Téléthon / Institut de Myologie est une banque de tissus pour la recherche qui a été créée par l'AFM pour recueillir et conserver des prélèvements de tissus (muscle, peau...) et les acheminer vers des équipes de recherche qui travaillent dans le domaine des maladies rares. >> ADN, cellules, tissus... des banques pour la recherche Repères Savoir & Comprendre, AFM, Février 2009. WEB www.institut-myologie.org/ > Recherche > Banque de Tissus MYOBANK-AFM de l’Institut de Myologie 6 ǀ AFMTéléthon ǀ Juin 2014 Une étude de l'évolution de la myosite à inclusions sporadique a été réalisée pendant 9 mois en France chez 22 personnes atteintes de la maladie. Le but était non seulement d'étudier l'histoire naturelle de la maladie, mais aussi d’identifier des critères de mesures utiles pour de futurs essais cliniques. Les résultats publiés en 2012 ont montré qu’au bout de 9 mois, les fonctions musculaires les plus faibles concernaient la préhension de la main, la flexion du poignet et la flexion du coude, l'extension du genou et la flexion de la cheville. La force d'extension du genou est celle qui a diminué le plus au cours de cette étude. Ce travail s’est poursuivi pendant 4 ans chez 13 personnes atteintes de myopathie à inclusion sporadique. Les résultats publiés très récemment montrent que la force musculaire a continué de se dégrader, spécialement celles de l'extension du genou, de la flexion et de l'extension de la cheville. Ces travaux confirment après 4 ans de suivi que la force d'extension du genou est un bon marqueur pour le suivi des personnes atteintes de myosite à inclusion sporadique. Développer des modèles animaux et cellulaires pour mieux comprendre les mécanismes sous-jacents aux myosites Pour étudier les mécanismes moléculaires et cellulaires en jeu dans les myosites et tester de nouvelles pistes thérapeutiques, les chercheurs développent des modèles animaux qui reproduisent les signes cliniques de la maladie. Si les modèles animaux de dermatomyosite sont très difficiles à obtenir, des souris modèles de polymyosite et de myosite à inclusions ont été développées, notamment par des équipes françaises. Des souris modèles d'une polymyosite expérimentale ont été très récemment obtenues en leur injectant de la myosine. Les souris présentaient une faiblesse musculaire et une inflammation proche de celle observée dans la polymyosite chez l’homme. Les chercheurs travaillent aussi sur des cellules musculaires de personnes atteintes de myosite et provenant de biopsie musculaire ou de don de tissu. Faire un don de tissu en pratique A l'occasion d'une intervention chirurgicale dont vous avez besoin ou lors d'une biopsie, vous pouvez, si vous le souhaitez profiter de cette occasion pour faire don de tissu à Myobank AFM-Téléthon / Institut de Myologie. Avancées dans les myopathies inflammatoires Savoir & Comprendre Pour ce faire, parlez-en à votre chirurgien, et celui-ci, ou vous-même, informe Myobank : - par téléphone au 01 42 17 74 63 / 01 42 17 75 06 - par e-mail à l'adresse [email protected]. Myobank se met alors en contact avec le médecin pour organiser, dans des conditions réglementaires et sanitaires strictes, le recueil du matériel biologique (tissus, cellules, ADN), son stockage et son acheminement vers les équipes de recherche qui en font la demande. L'étude de souris modèles a notamment montré l'implication des cellules T régulatrices (lymphocytes Treg) dans le développement des myosites. Les cellules T régulatrices (lymphocytes Treg) sont des cellules immunitaires capables de moduler l'activité des lymphocytes T. Dans la polymyosite et dans la myosite à inclusions, ces lymphocytes Treg seraient altérés et moins nombreux, entrainant une sur-activation des lymphocytes T toxiques pour les cellules musculaires. Une piste thérapeutique pourrait consister à cibler les lymphocytes T suractivés ou à augmenter le nombre ce lymphocytes Treg. Des modèles de souris atteintes de myopathie nécrosante sont en cours de développement. Pistes thérapeutiques et traitements dans les myosites Le traitement actuel repose sur une panoplie de médicaments visant à moduler l'activité du système immunitaire (immunosuppresseurs). Ces traitements sont plus ou moins efficaces selon les myosites, les personnes et les périodes de la maladie. Arsenal thérapeutique dans la dermatomyosite et la polymyosite • Corticothérapie associée à des mesures diététiques. • Agents immunosuppresseurs : méthotrexate, azathioprine, mycophénolate mofétil… • Immunoglobulines par voie intraveineuse • Anti-lymphocytes B : Rituximab®. Mise à jour de la revue Cochrane sur les traitements des dermatomyosites et les polymyosites En 2012, une mise à jour d’une revue Cochrane publiée en 2005 fait le point sur les traitements immunosuppresseurs et immunomodulateurs dans les dermatomyosites et les polymyosites. Les auteurs ont retenu 10 essais correspondant à un total de 258 participants. Comme le nombre de participants à ces études était faible, les données restent à confirmer. Les 4 essais dans lesquels les participants ont été répartis par tirage au sort dans les différents groupes (essais randomisés), comparant la plasmaphérèse et la leucaphérèse, l’eculizumab, l’infliximab ou l’azathioprine à un placebo, ont tous montré des résultats négatifs. Concernant 3 des 4 essais comparant 2 immunosuppresseurs (azathioprine et méthotrexate, ciclosporine et méthotrexate, ou encore méthotrexate intramusculaire et méthotrexate oral avec azathioprine), aucune différence significative n’a été observée. Dans l’ensemble, les immunosuppresseurs se sont parfois accompagnés d'effets secondaires. Une revue Cochrane a pour but d'identifier quelles pratiques de soins sont efficaces, celles qui ne marchent pas et celles qui éventuellement sont néfastes. Elle repose sur une compilation et une analyse exhaustive de la littérature médicale et scientifique sur un sujet donné. Le processus suit une méthodologie rigoureuse : recensement des études publiées, sélection de celles qui sont méthodologiquement recevables, analyse de leurs données combinées (méta-analyse). Le résultat de cette méta-analyse fait généralement autorité. Dans un essai randomisé, les participants sont répartis par tirage au sort dans les différents groupes. La plasmaphérèse consiste à enlever des éléments du plasma sanguin. Le sang est prélevé dans une veine et le plasma en est séparé par une machine pour être traité. Une fois les éléments prélevés, les cellules sanguines sont réinjectées aux patients. La leucaphérèse consiste à prélever dans le sang d’une personne une variété de globules blancs spécialisés dans la défense anti-bactérienne, les leucocytes. 7 ǀ AFMTéléthon ǀ Juin 2014 Savoir & Comprendre Avancées dans les myopathies inflammatoires Les auteurs de cette analyse concluent à la nécessité de poursuivre les essais randomisés de qualité pour mieux évaluer le rapport bénéfices/effets secondaires de ces traitements. Effets positifs de l'entrainement physique dans les myosites En Suède, les effets du réentrainement à l’endurance ont été évalués chez 23 personnes atteintes de dermatomyosite ou de polymyosite. Le programme de réentrainement, réalisé sur bicyclette ergométrique, s’est étalé sur 12 semaines. Douze personnes ont bénéficié du programme de réentraînement, tandis que les 11 personnes contrôles recevaient uniquement leur traitement. Ce programme a entrainé des effets positifs sur l’endurance et surtout sur la qualité de vie et le ressenti de l’évolution de la maladie. Au cours d'un essai clinique de phase II, un médicament, dont il a été montré au préalable qu'il était bien toléré (au cours d'un essai de phase I) est administré à un groupe de malades dans le but de déterminer l'efficacité thérapeutique, les doses optimales et la sécurité du traitement (Quel est le mode d’administration et la dose maximale tolérée ?). La phase II peut être divisée en deux étapes : la phase IIa étudie le dosage et la phase IIb l'efficacité du traitement. >> Essais cliniques et maladies neuromusculaires, Repères Savoir & Comprendre, AFM, Juillet 2010. Le rituximab est un immunosuppresseur de nouvelle génération capable d'inactiver certains lymphocytes B. Les lymphocytes B sont des globules blancs spécialisés dans un certain type de réaction immunitaire : ils produisent les anticorps qui neutralisent des substances ou des molécules considérées comme étrangères par l'organisme. Essais de BAF312 Le BAF312 est un modulateur d’un récepteur essentiel à la circulation des lymphocytes, le récepteur de la sphingosine 1-phosphate. Ce récepteur représente une cible médicamenteuse dans les maladies auto-immunes (en particulier dans la sclérose en plaques). Deux essais de phase II, l’un dans la dermatomyosite (56 participants) et l’autre dans la polymyosite (30 participants) sont en cours pour évaluer les effets de BAF312. Les 2 essais se déroulent au Canada, aux États-Unis, en Hongrie, au Japon, en Pologne et en République Tchèque. Dans les myosites réfractaires Dans certains cas, les traitements habituellement utilisés ne permettent pas ou sont insuffisant pour améliorer les manifestations de la myosite. Les médecins parlent de forme réfractaire. Essai FORCE Le rituximab est un médicament qui bloque l'activité des lymphocytes B, déjà utilisé dans le traitement de certains cancers. L’essai FORCE, un essai multicentrique français de phase II, coordonné par O. Benveniste (Paris), financé par l'AP-HP, est terminé. Il a évalué l'effet sur 18 mois du rituximab, chez 12 personnes atteintes de myosites réfractaires. La phase clinique de l'essai est terminée et les données sont en cours d’analyse. Des résultats préliminaires montrent une amélioration de la force musculaire dans environ 50% des cas. Essai FORCE en cours d’analyse • Essai multicentrique de phase II du rituximab en intraveineux : 2 injections intraveineuses de 1 g de rituximab à 2 semaines d'intervalle suivies d’une troisième six mois plus tard. - Phase clinique de l'essai terminée. Données en cours d’analyse. - Investigateur principal : Pr O.Benveniste (Centre de référence Maladies neuromusculaires, Hôpital Pitié-Salpétrière, Paris) Essai du tocilizumab Comme le rituximab, le tocilizumab est un immunomodulateur. Il est indiqué pour le traitement de la polyarthrite rhumatoïde. 8 ǀ AFMTéléthon ǀ Juin 2014 Avancées dans les myopathies inflammatoires Savoir & Comprendre Une étude pilote de phase II pour évaluer les effets du tocilizumab dans les dermatomyosites et les polymyosites réfractaires est en préparation aux États-Unis. L’essai devrait débuter en 2014 et concernera 40 participants. Pistes thérapeutiques et traitements dans la myosite à inclusion Dans la myosite à inclusions, aucun traitement immunosuppresseur habituellement utilisé n'est bénéfique, renforçant l'hypothèse que cette maladie n'a pas qu’une origine auto-immune. L'alemtuzumab L'alemtuzumab (Campath®) a montré un effet bénéfique lors d’un essai sur 13 patients. Cet anticorps agit en supprimant certaines cellules du système immunitaire, responsables en partie de la maladie. Les effets secondaires du Campath® peuvent toutefois engager le pronostic vital. L'exercice physique Plusieurs études confirment les effets bénéfiques de l’exercice physique. Les programmes d’entrainement physique sont parfaitement tolérés et permettent d’augmenter l'endurance (les capacités aérobiques) des individus testés et d’améliorer la force de certains groupes musculaires. Inhiber la myostatine par thérapie génique La thérapie génique consiste à remplacer le gène défectueux ou manquant par un gène thérapeutique. Les chercheurs ont développé différents types de vecteurs et de techniques permettant le transfert du gène thérapeutique jusqu'au noyau des cellules malades : les vecteurs viraux (virus dont les éléments pathogènes sont remplacés par le gène thérapeutique), les vecteurs synthétiques (plasmide, vecteurs lipidiques,…) et des techniques "physiques" (électroporation, biolistique...). Dans la myosite à inclusions, la faiblesse musculaire conduit progressivement à la perte de la marche. Une piste thérapeutique consiste à augmenter la taille et la force des fibres musculaires, en inhibant la voie de la myostatine, un inhibiteur naturel de la croissance musculaire. Un essai de phase I en ouvert, coordonné par J. Mendell (Colombus, ÉtatsUnis), est en cours aux États-Unis pour étudier l’innocuité de l’injection du gène de la follistatine (un inhibiteur naturel de la myostatine) à l’aide d’un AAV dans la cuisse ou dans la jambe de 15 patients atteints de myosites à inclusion. La taille des fibres musculaires sera observée par biopsie 180 jours (environ 6 mois) après l’administration. La fin de l’essai est prévue pour fin 2016. Essai en cours aux États-Unis • Essai de phase I en ouvert du transfert du gène de la follistatine - Recrutement en cours - Fin de l’essai prévue pour la fin de l’année 2016. - Investigateur principal : J. Mendell (Colombus, États-Unis) Inhiber la myostatine par le BYM338 Le BYM338 est un anticorps qui empêche le fonctionnement du récepteur de la myostatine. Des travaux antérieurs ont montré que le BYM338 Au cours d'un essai clinique de phase I un médicament dont l'intérêt thérapeutique a été montré sur des modèles animaux et/ou cellulaires (essais précliniques) est administré pour la première fois à un petit groupe de volontaires sains, plus rarement à des malades, afin d'évaluer leur tolérance à la substance en fonction de la dose (Comment le futur traitement estil absorbé et éliminé ? Comment se fait sa répartition dans les organes ? Est-il toxique et à quelles doses ? Existe-t-il des effets secondaires ?). >> Essais cliniques et maladies neuromusculaires, Repères Savoir & Comprendre, AFM, Juillet 2010. Un essai en ouvert est un essai thérapeutique dans lequel les médecins et les participants ont connaissance du traitement à l'essai. Le virus adéno-associé (AAV pour adeno-associated virus) est un petit virus à ADN, qui peut infecter l'être humain. Toutefois, il ne provoque pas de maladie et n'entraine qu'une réponse immunitaire de défense modérée. Une fois à l'intérieur des cellules, l’AAV, comme tous les virus, incorpore ses gènes dans l'ensemble des gènes de la cellule infectée. Il est utilisé en génie génétique comme vecteur pour la thérapie génique. 9 ǀ AFMTéléthon ǀ Juin 2014 Savoir & Comprendre Avancées dans les myopathies inflammatoires augmente la masse musculaire et protège le muscle de l'atrophie et de la perte de force chez la souris. En août 2013, la société pharmaceutique Novartis a annoncé que la Food and Drug Administration (FDA) avait accordé au BYM338 (bimagrumab) la désignation d’"avancée thérapeutique majeure" dans la myosite à inclusion. Cette désignation, qui permet d’accélérer la procédure en vue d’une autorisation de mise sur le marché, fait suite aux résultats positifs de l’essai de phase II du BYM338 aux États-Unis. Cet essai a évalué pendant 2 mois l’efficacité, la tolérance et l’innocuité du BYM338 chez 14 personnes atteintes de myosite à inclusion. Ces résultats présentés en octobre 2013 au congrès de l’American Neurological Association ont montré que le BYM338 augmente la masse et la force musculaires, sans induire d’effet secondaire. Un essai de phase II/III permet de tester l'efficacité d'un traitement potentiel et son dosage en une seule étape : les phases II (dose et mode d'administration) et III (efficacité) de l'essai clinique sont regroupées en une seule. Au terme de l'essai, si les résultats sont positifs, une autorisation de mise sur le marché (AMM) peut être donnée. >> Essais cliniques et maladies neuromusculaires, Repères Savoir & Comprendre, AFM, Juillet 2010. Forte de ces résultats, la société Novartis a débuté en septembre 2013 un essai de phase II/III pour évaluer les effets de trois doses (une forte, une moyenne et une faible doses) de BYM338 par rapport à un placebo chez 240 personnes atteintes de myosite à inclusion pendant un an. La fin de l’essai est estimée pour décembre 2015. Cet essai international devrait inclure des participants en France. La rapamycine La rapamycine est un immunosuppresseur déjà utilisé pour les greffes de rein. Elle inhibe les lymphocytes T et préserve les lymphocytes T régulateurs. Une étude de la rapamycine sur 25 jours a montré un effet bénéfique dans des souris modèles de polymyosite expérimentale, aussi bien comme traitement préventif que curatif. La force musculaire des souris était améliorée et l’inflammation musculaire diminuée. Un essai de phase II, en double aveugle, contre placebo de la rapamycine dans la myosite à inclusions est en préparation en France. L’essai, soutenu par l’AFM-Téléthon, devrait débuter en 2014 et inclure 44 patients. >> Tout au long de l'année, suivez l'actualité de la recherche dans les maladies neuromusculaires sur WEB www.afm-telethon.fr > Voir toutes les actus > Maladies 10 ǀ AFMTéléthon ǀ Juin 2014
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