la diplomatie économique, un pas en avant

Diplomatie économique • TRIBUNES
LA DIPLOMATIE ÉCONOMIQUE,
UN PAS EN AVANT …
Par André FERRAND
Dirigeant d'entreprise
ff
Sénateur UMP des Français
ff
établis hors de France
Membre de la commission des
ff
L
Finances du Sénat
© Photo Olivier Bolvin / MAE
orsque cette expression est apparue, courant
2012, elle a fait froncer beaucoup de sourcils au
ministère de l’Économie et des Finances qui,
d’évidence, n’apprécie guère cette intrusion du
ministère des Affaires étrangères dans son pré
carré du commerce extérieur. Parmi les diplomates eux-mêmes, beaucoup se sont étonnés :
« de la diplomatie économique, nous en faisons naturellement
depuis toujours et les intérêts économiques de la France font
évidemment partie de nos préoccupations. Était-il nécessaire
de créer ce vocable qui apparaît comme un chiffon rouge brandi
devant les yeux de nos « amis » de Bercy ? »
Et il est vrai qu’au cours de ces dernières années, les questions
d’ordre économique ont pris plus d’importance dans les agendas
de nos postes diplomatiques et nos chefs de missions ont progressivement acquis le réflexe économique ; ceci d’autant plus
que leurs lettres de mission comme leurs plans d’actions comportent une partie consacrée à ce secteur.
Par ailleurs, là où existent des sections de Conseillers du commerce extérieur de la France (à l’étranger, quelque 2600 responsables français d’entreprises), il est vrai qu’ils sont, grâce à eux,
sensibilisés à la situation du marché local et de nos entreprises et
ont parfois l’occasion de retrouver autour d’une table les différents
acteurs publics et privés de notre présence économique.
Mais il reste vrai aussi que tous ces acteurs, nombreux : nos entrepreneurs, les services économiques (DG du Trésor), Ubifrance,
les chambres de commerce françaises locales, l’AFII (Agence
française pour les investissements internationaux), Atout
France, Sopexa (Groupe marketing international alimentaire,
vin et art de vivre), l’AFD (Agence française de développement),
les CCEF… agissent trop souvent en ordre dispersé. Toutes les
expressions inventées ou reprises par les différents ministres
du Commerce extérieur, « chasser en meute », « naviguer en
escadre », l’ « équipe de France de l’export », n’ont que rarement
trouvé une réelle concrétisation sur le terrain. Parfois même ces
acteurs ne se connaissent pas car ils n’ont pas l’occasion de se
rencontrer. Il paraît donc évident qu’il faut coordonner et organiser ce travail en commun. Il faut déboucher sur la constitution,
au sein de nos communautés à l’étranger, de ces « équipes de
France » dont l’ambassadeur est le capitaine naturel. Évidemment, et comme dans d’autres domaines, il importe que le leader
ait le profil qui corresponde à ses responsabilités. J’ai pu, heureusement, constater avec plaisir que tel était de plus en plus le cas.
Toutes les expressions
inventées ou reprises par
les différents ministres
du Commerce extérieur,
« chasser en meute »,
« naviguer en escadre »,
l’ « équipe de France
de l’export », n’ont que
rarement trouvé une réelle
concrétisation sur le terrain
Ainsi, si la « diplomatie économique » répond à cette nécessité d’organiser notre jeu collectif, il faut souhaiter son succès.
Il faut que les « conseils économiques » que les ambassadeurs
ont désormais pour mission de réunir soient de véritables
conseils d’administration de l’Entreprise France et débouchent
sur des résultats concrets. Il faut se féliciter qu’au moment où
l’avenir de notre pays, objet de nos inquiétudes, dépend plus
que jamais de notre capacité à rétablir la santé de notre économie en allant chercher à l’étranger marchés et investissements,
notre réseau diplomatique en fasse une priorité. C’est ce que
pensent nos principaux voisins et concurrents européens dont
les dispositifs d’appui au commerce extérieur s’articulent à la
fois sur les deux ministères.
Il faut que les deux nôtres apprennent à mieux travailler
ensemble. Ils sont déjà amenés à devoir le faire dans le cadre
de l’AFD dont ils assurent de concert la tutelle. Ils s’apprêtent
à aussi devoir s’organiser pour assurer la gestion du nouvel ensemble issu de la réunion d’Ubifrance et de l’AFII sur laquelle ils
viennent de se mettre d’accord !
Cependant, beaucoup de témoignages nous apprennent qu’il
existe encore d’importantes marges de progrès sur le chemin de
la synergie entre les deux « maisons ». Mais il se trouve qu’aujourd’hui la situation est telle que nous n’avons plus le choix. Il
faut aller de l’avant et rapidement.
Il faut s’entendre sur une gouvernance intégrée dont la légitimité et l’autorité s’imposeront sans discussion auprès de tous
les réseaux. Avec, en ligne de mire, la construction d’un toit
unique qui abritera la Maison sur laquelle flottera le drapeau de
la marque « France » ! ●
La Revue du Trombinoscope | Février 2014 | 25