D’ailleurs, Moché Rabbenou, lorsqu’il vit, par prophétie, les rabbanim de toutes les futures générations déclara à Hakadoch Baroukh Hou : Tu possèdes quelqu’un comme Rabbi Aquiva et Tu ne donnes pas la Torah par son intermédiaire mais par moi ? Ce qui montre bien la particularité de Rabbi Aquiva et cette situation hors du commun d’avoir une génération possédant 24 000 tanaïm. Rappelons que dans tout le Chass Michna (toutes les michnaïot que nous possédons) qui recouvre plusieurs générations de Tanaïm, il y a au plus 280 tanaïm différents qui sont cités et c’est là toute notre Torah ! Les élèves de Rabbi Aquiva, du fait de leur grand nombre, ont commencé à diminuer à leurs yeux leur propre valeur et leur importance pensant que de toute façon, même sans eux, il y a encore des milliers et des milliers de Rabbanim très élevés. Chaque Rav a donc dû ressentir (même inconsciemment) que s’il n’était pas lui-même au-dessus de la masse et particulièrement brillant, il ne vaudrait pas grand-chose. C’est sûrement de cette manière qu’est née la concurrence qui a régné entre eux, et un manque d’amour de la Torah du prochain ou tout au moins un manque de volonté que les autres grandissent à l’infini dans ce domaine, comme ils l’auraient souhaité pour eux. A PARIS OU À BNÉ BRAK : LA TORAH EST DIVINE En réalité, le grand nombre des élèves de Rabbi Aquiva n’effaçait en rien l’importance de chacun des élèves mais la nature humaine fait que lorsqu’un Talmid voit un grand nombre d’érudits autour de lui, renie de ce fait sa propre valeur et espère alors dépasser les autres. Ceci est une grande erreur car en réalité chacun a un rôle précis à accomplir, un tikkoun (réparation) à faire, sans lesquels le monde n’arrivera pas à sa perfection, ce qui empêchera la venu du Machia’h et l’accès au monde futur. Ainsi, peu importe si les 24000 tanaïm étaient répartis entre plusieurs générations ou se trouvaient tous les uns à côté des autres, ils auraient dû comprendre que cela n’enlève en rien leur valeur unique dans ce monde. La valeur de la Torah et des mitsvot ne dépend pas du lieu où l’on se trouve : que l’on soit à Bné Braq dans un endroit où tous appliquent les mitsvot et étudient la Torah, ou en France où chaque personne qui pratique et étudie est un exemple pour toute la population, dans tous les cas la Torah d’Hachem est une Torah dont la valeur est inestimable. On commence donc à comprendre l’erreur des élèves de Rabbi Aquiva : ils n’ont pas soutenu et donné de la valeur à la Torah qui était étudiée par les autres car ils les voyaient comme des rivaux qui pourraient leur diminuer leur valeur personnelle intrinsèque. UNE TORAH DE VIE ● Reste encore à expliquer le lien entre l’erreur de ces regrettés Tanaïm et le terrible décret dont nous portons encore le deuil. Il est écrit dans Pirké Avot (chap 2, michna 7) : marbé Torah marbé H’aïm - lorsque tu multiplies la Torah, tu multiplies la vie. Comme l’explique Bartenoura : car il est dit à propos de la Torah « Ki hi h’ayékha véorekh yamekha - elle est ta vie et la longueur de tes jours (Devarim 30.20). » Rabbenou Yona ajoute : « se plonger dans la Torah (se fatiguer dedans) allonge les jours de la vie. » Nous voyons déjà un lien étroit entre le développement de la Torah et celui de la vie ; le raisonnement inverse s’applique pour les élèves de Rabbi Aquiva. ● De même, nous lisons juste après (chap 2, michna 8) : Rabbi Yoh’anane Ben Zaccaï disait : Si tu as étudié beaucoup de Torah, ne t’en félicite pas car tu as été créé pour cela. Rachi explique : « c’est pour cela que tu es apparu au monde comme le dit la Torah dans Berechit (1.31) : « Ce fut la nuit, ce fut le jour Yom hachichi, le sixième jour. » Nous apprenons (du hé supplémentaire) qu’Hakadoch Baroukh Hou a posé une condition sur la création : si les Bné Israël reçoivent la Torah le sixième jour : le 6 Sivane, le monde sera maintenu, sinon il retournera au tohou vavohou (néant). Il en ressort que notre obligation est grande dans ce domaine et qu’il ne s’agit pas d’une tova (bonté) que nous faisons à Hachem. » Rabbenou Yona va même jusqu’à donner la parabole suivante : « imaginez que vous soyez vous-même endetté et que vous arriviez à rembourser une partie de votre dette à votre créancier qui attend son argent depuis un moment, vous attendriez-vous à recevoir des félicitations ou des remerciements ? Certainement pas. Il en va de même pour la Torah pour laquelle nous avons été créés. [Rabbenou Yona ajoute :] sache que la Torah est infinie, plus longue que la terre, plus large que les mers (c’est un verset), ainsi même si nous avons beaucoup étudié, cela reste encore limité et il n’y a pas de quoi s’en féliciter. » Il ressort de ces michnayot (7 et 8, chap 2) que la Torah est infiniment liée à la vie : elle allonge la vie et elle est le but de la vie. La faille des élèves de Rabbi Aquiva a donc eu des conséquences vitales. ● Un peu plus haut nous lisions les paroles d’Hillel (chap 1, michna 13) (dans Pirké Avot) : « ou delamossif yassif, ou délayalif katala h’ayav,... - celui qui n’ajoute pas (de tTorah) sera retranché ; celui qui n’étudie pas du tout se rend passible sur sa vie ; celui qui utilise la Torah comme une couronne s’en ira. » Rabbenou Yona explique : « un sage qui est érudit et qui ne souhaite pas que sa sagesse augmente, la michna nous annonce qu’il disparaîtra bien vite. » En l’occurrence, les élèves de Rabbi Aquiva voulaient que leur sagesse grandisse mais pas celle de leurs amis. De même la Michna poursuit : « celui qui utilise la Torah comme une couronne s’en ira. » C'est -à-dire qu’il faut étudier la Torah avec une intention pure et non pour qu’elle nous grandisse et qu’elle nous octroie de la valeur. Dans le cas inverse, la Michna nous annonce que le sage en question s’en ira bien vite. Nous retrouvons ici une mise en garde qui concerne justement l’erreur des élèves de Rabbi Aquiva qui souhaitèrent se distinguer de leurs camarades par un niveau plus élevé que celui des autres. R1. Puisque la Torah est liée à l’essence de la création, et à l’essence de la vie, et que les élèves de Rabbi Aquiva ont voulu la limiter et l’empêcher de se développer chez les autres, Hakadoch Baroukh Hou les a, mesure pour mesure, limités dans leur vie. C’est de cette relation étroite entre la Torah et la vie qui est évoquée dans les différentes michnayot de pirké avot. Celui qui regarde bien dans le Maharcha sur Yebamot verra que tout ce que nous avons expliqué est mentionné en trois mots lorsqu’il dit : « cela est pour mesure car la Torah est la vie. » ☺ On raconte qu’un jour lors d’une réunion entre les plus grands Raché Yechivot (dirigeants de Yechivot) au cours de laquelle ils débattaient de sujets importants qui concernaient le maintien de la Torah, l’un des Rabbanim affirma son point de vue sur la question en disant : il ne faut pas baisser les bras, il ne faut pas s’avouer vaincu, la Torah est notre oxygène, elle nous est indispensable . Le Birkat Chmouël : Rav Baroukh Beer Horovitz frapppa alors du poing sur la table et dit: -la Torah? De l’oxygène? C’est beaucoup plus que cela! La Torah c’est l’essence même de la vie, ce n’est pas de l’oxygène!! 49 JOURS POUR UNE UNIQUE TORAH Nous avons également mentionné que les élèves de Rabbi Aqquiva périrent pendant le Omer. Cela peut s’expliquer par le fait qu’il s’agit justement de la période où nous nous préparons à recevoir la Torah à Chavouot. Hakadoch Baroukh Hou a donc, par son décret voulu prévenir la génération de Rabbi Aquiva et toutes les générations futures qu’il ne faut pas se tromper sur l’essence de la Torah. Il n’y a pas de place dans la Torah pour la concurrence ou pour la jalousie dans la mesure où la Torah est d’essence spirituelle. C’est la sagesse d’Hakadoch Baroukh Hou et à son image elle n’est pas divisible. La meilleure comparaison que l’on pourrait proposer matériellement est celle d’une flamme : lorsque celle-ci allume d’autres mèches, nous viendrait-il à l’esprit qu’elle sera, par là, diminuée ? Et lorsque deux flammes se rencontrent et se côtoient, est-ce que le feu qui va en résulter sera plus petit ? Bien au contraire, lorsqu’une mèche allumée en allume une autre, elle se renforce elle-même et lorsque deux flammes se rencontrent le feu qui en ressort est encore plus grand ! L’erreur des élèves de Rabbi Aquiva fut, à leur immense niveau, d’avoir attribué à la Torah un aspect matériel, divisible et d’avoir fait entrer une certaine concurrence et une certaine jalousie dans leur cœur. C’est dans la période du Omer où nous devons nous préparer à recevoir la Torah qu’Hachem les fit périr afin d’enseigner de génération en génération ce qu’est vraiment la Torah et de montrer à chacun, son immense valeur et à quel point elle est l’essence e la vie ce qui explique ce terrible décret mesure pour mesure. H’AYIM, SIGNIFIE : LES VIES R3. Dans la Torah, nous rencontrons plusieurs fois la peine de Mita (mort). Même si elle ne fut que très peu appliquée elle vient souligner la gravité d’une avéra et ses conséquences. Par exemple, celui qui tue est passible de la mita de Ereg (mort par l’épée). De même, celui qui témoigne à faux sur son ami et déclare que ce dernier est passible de mort, devra mourir de la même manière que lui, si l’on découvre son mensonge en le rendant Zomem (témoin confondu). Dans ces deux cas, la Torah punit de mort le fauteur car lui-même a voulu enlever la vie de son prochain. En réalité, il a voulu enlever la vie matérielle de son prochain mais pas sa vie spirituelle. Faire honte ou faire peur à l’autre est parfois comparé à un meurtre. De même, nos sages nous révèlent que faire fauter les autres et les priver de monde futur est bien pire que de les tuer. Il en ressort qu’il y a plusieurs niveaux de vie et donc plusieurs manières de « tuer son prochain » h’as véchalom ; nous pouvons expliquer que les élèves de Rabbi Aquiva reçurent la mort la plus grave des 903 sortes car eux même ont touché au niveau de vie le plus élevé qui existe : la Torah. SOUTENONS LA TORAH ! Jusqu’à présent, nous avons vu à travers l’exemple des élèves de Rabbi Aquiva la gravité de limiter la Torah chez les autres, d’empêcher son développement et d’avoir un œil étroit et avare par rapport à eux, surtout lorsque la faute est faite par un sage de la Torah. Nous allons maintenant voir la grandeur de celui qui au contraire s'attache à développer la Torah autour de lui, souhaite son épanouissement et soutient financièrement et moralement ceux qui étudient la Torah. Rappelons déjà les paroles de Rachi dans le h’oumach et dans la Guemara Makkot au sujet de l’enseignement de la Michna selon laquelle mida tova merouba (Hachem récompense plus que ce qu’Il ne punit). Rachi rappelle que dans les dix commandements Hakadoch Baroukh Hou promet de récompenser « laAlafim » (jusqu’à deux mille générations) une mitsva qui a été accomplie. Par contre, « al chelichim véal ribéïm lé sonaï » : Il punit les avérot que sur trois ou quatre générations. Rachi déduit qu’Hachem récompense 500 fois plus que la mesure de sa punition. Imaginons-nous donc les mérites que l’on peut avoir lorsque l'on soutient ceux qui étudient et lorsqu'on a un bon cœur quant à leur épanouissement dans ce domaine. C’est d’abord dans la Torah (Devarim 27;26) que l’on parle de la mitsva spécifique de soutenir la Torah et pas juste de l'étudier. Il est écrit : « Arour achère lo yakim... - maudit soit celui qui ne soutiendra pas les paroles de cette Torah pour les faire ! Dira tout le peuple Amen ! » Chlomo Hamélekh, dans son œuvre Michlé, ajoute à cela : « ets h’aïm hi lamh’azikim ba - (inversement) c’est un arbre de vie pour ceux qui la soutiennent (la Torah). » Nos sages disent : il n’est question de ceux qui l’étudient mais de ceux qui la soutiennent. Rabbenou Yona écrit les mots suivants à ce sujet : « Tout homme qui veut être sauvé des pires punitions et notamment mériterait d’être puni pour son manque d’étude, qu’il se précipite dans la mitsva de soutenir la Torah et que dans sa ville les gens étudient grâce à lui. » Notons bien que la valeur de cette mitsva est immense car elle concerne directement la Torah qui est l’essence de la vie et son but. De plus cette mitsva est accessible à n’importe quel homme, peu importe son érudition s’il veut bien soutenir matériellement ou même moralement ceux qui étudient autour de lui. La Guemara dans Ketouvot (111 b) compare les hommes qui font profiter les Talmidé H’akhamim de leurs biens ou même qui s’attachent à eux ou se rapprochent d’eux par tous les moyens possibles à des personnes qui colleraient à la Chekhina (Présence divine). C’est à eux que s’applique le verset : « véatem madbikim b’Hachem Elokhékhem, h'ayim koulkhem ayom- vous êtes collés à Hachem votre D., tous vivants aujourd'hui » Nos sages disent en effet: est-il possible d’être collés à Hachem alors qu’Hachem est un feu dévorant ? Apprends de là que celui qui marie sa fille à un Talmid H’akham, fait du commerce avec lui ou le fait profiter de ses biens, la Torah le considère comme s’il avait collé véritablement à la Chekhina. La Guemara dans Brakhot enseigne : celui qui invite un Talmid H’akham et le sert c’est comme s’il avait approché un korbane tamid (sacrifice perpétuel). Rabbi Eliezer explique à la fin du traité Brakhot : Hachem a donné une grande brakha à un non juif Oved car il avait gardé chez lui pendant quelques temps l’arche contenant les louh’ot et précise qu’à plus forte raison celui qui reçoit un vrai talmid h’akham (érudit) recevra une grande bénédiction dans sa maison. Rappelons que Oved fut béni de soixante-deux enfants et petitsenfants. Le midrach raba sur Chir Hachirim (Chap 6) écrit : Rabbi Yeochoua Ben Lévi a enseigné : ceux qui soutiennent l’étude ont une grande part dans toute la Torah qui est développée grâce à eux et mérite des richesses dans ce monde-ci et un grand sakhar dans le monde futur et la Torah qui est étudiée est appelée à leur nom. Nous finirons en citant le Zohar (Vayeh’i) qui demande : Pourquoi Hakadoch Baroukh Hou a-t-il fait précéder la brakha de Zevouloune à la brakha d’Issakhar à chaque fois qu’Il les bénissait alors qu’Issakhar était l’aîné. La réponse est que Zevouloune a eu le zkhout (mérite) de prendre le pain de sa bouche pour le mettre dans celle d’Issakhar et de soutenir activement la Torah . Celui qui lui ressemble recevra également des brakhot en bas et en haut et mérite chné choulh’anot (les deux tables) c’est-à-dire une récompense dans les deux mondes, chose qu’on ne peut garantir à aucun homme d'habitude, explique le zohar. Il mérite la richesse et la bénédiction dans ce monde-ci et un bon h’elek (part) dans le monde futur.
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