L’actualité de l’éducation spécialisée décryptée par la Fondation Officielle de la Jeunesse Numéro 1 – Décembre 2013 Version digitale également disponible sur l’App « Kiosque FOJ » (distribuée sur l’App Store et Google Play) DOSSIER L’apprentissage de l’autonomie : point de la situation MINI CHEFS PLUS LOIN ENTREVUES Ma recette préférée Yapaka en Belgique L’atelier création à La Pommière p. 13 p. 10 et 11 p. 8 et 9 Il n’est jamais évident de quitter le cocon familial, de voler de ses propres ailes, de faire appel à son libre arbitre et enfin de devenir autonome. Nous y avons tous été confrontés un jour. Pour les jeunes que nous accueillons à l’Orif, c’est une tâche encore plus ardue si l’on y ajoute des relations familiales complexes et peu soutenantes, des problèmes physiques ou psychiques et, dans la plupart des cas, un échec scolaire les obligeant à prendre un chemin différent de celui des autres. Le point qui nous semble essentiel pour atteindre cette autonomie est de redonner confiance en soi au jeune et de lui faire ressentir que l’on croit en lui, quelle que soit l’exigence de son projet. Cette confiance retrouvée, bien souvent après un long cheminement, est le début d’une future autonomie, car, de fait, le jeune sera plus armé, conscient de manière objective de ses forces et de ses faiblesses, pour affronter un monde de plus en plus exigeant. Concrètement il convient d’avancer par étape en fixant des objectifs simples, à court terme, afin de montrer au jeune qu’il est enfin capable de réussir. Il faut ensuite le laisser reproduire, sans aide, ces mêmes objectifs et ainsi de place un objectif à long terme, posé par le jeune lui-même, et réalisé sans assistance. Par exemple, une mosaïque pour un carreleur ou une fresque pour un peintre en bâtiment. Cet apprentissage de l’autonoL’autonomie, c’est mie se fera sur plusieurs axes. Celui du domaine professionaussi accepter un nel, bien évidemment, mais cadre et évoluer aussi sur l’axe de l’autonomie dans celui‑ci personnelle en aidant le jeune de manière à se construire et développer indépendante. son savoir-être. Il faut également l’aider à s’organiser pour suite. les tâches administratives courantes. Plus on avancera dans cette formation plus les objectifs devront être en rapport avec la réalité. Il pourra également être mis en Une chose essentielle dans cette quête est de ne pas « casser » les rêves de ces jeunes, même si, souvent, ils savent très bien qu’ils AU CŒUR DU SUJET Bruno Maillet, directeur adjoint de L’Orif de Vernier, expose le travail fait auprès des jeunes pour les préparer à l’autonomie, sujet de ce premier numéro de Initiale F. L’Orif a pour mission l’observation, la formation et l’intégration socioprofessionnelles des personnes atteintes dans leur santé ou en difficulté. 2 - Initiale F – n° 1 – Décembre 2013 | Au cœur du sujet | Édito AU CŒUR DU SUJET seront difficilement réalisables. Il s’agira plutôt de les amener à adapter ces rêves à leurs compétences et possibilités. L’autonomie, c’est aussi accepter des lois, un cadre, et évoluer dans celui-ci de manière indépendante. Enfin cette soif de liberté doit faire comprendre au jeune que ses décisions auront un effet positif ou négatif sur sa vie et qu’il est le maître de ses choix, donc qu’il est autonome. Bruno Maillet, directeur adjoint L’orif en bref Au-delà de la formation, de l’observation ou de l’orientation, la mission de l’Orif est l’intégration professionnelle durable du plus grande nombre dans le premier marché du travail. La dimension romande permet de proposer un large éventail de prestations au plus près des besoins des mandataires et des bénéficiaires. Aide maçon, peintre en bâtiment, paysagiste, aide en cuisine et en restauration sont les cursus professionnels proposés à l’Orif. Les publics concernés sont principalement des adultes, homme ou femme, souffrant d’une atteinte à la santé et ne pouvant plus être actifs dans leur métier initial. Ainsi que des adolescents et adolescentes présentant des déficiences motrices ou comportementales ou ayant un parcours scolaire en école spécialisée et qui n’ont pas encore de formation professionnelle. La cuisine du restaurant sur Le Pont au centre de formation Pont-Rouge source : www.orif.ch L’âge adulte, c’est à quel âge ? ÉDITO S’intéresser à l’apprentissage de l’autonomie, processus qui est différent selon la situation du jeune est le sujet central de ce numéro repris par les professionnels sous des angles différents mais complémentaires. Le journal de la FOJ est désormais disponible en version numérique sur le Kiosque FOJ, l’application mobile pour les publications. Une nouvelle orientation est donnée à ce journal au travers d’une démarche d’ouverture et de sollicitation des divers acteurs de l’éducation spécialisée que je vous propose de découvrir dans ce premier numéro de Initiale F sur le thème de l’apprentissage de l’autonomie. Les professionnels engagés dans ce travail ont eu à cœur de nous éclairer sur leur travail et les préoccupations des jeunes aujourd’hui. En effet, cette question a toujours été centrale dans le monde de l’éducation. Les éducateurs travaillent avec des jeunes afin qu’ils puissent acquérir les compétences suffisantes pour devenir des adultes autonomes et indépendants. Ce processus est toujours complexe et n’est en aucun cas linéaire. Lors d’une récente conférence au sein de la HETS, il a même été dit que nous devenions des adultes autonomes vers l’âge proche de 30 ans ! Pour les jeunes des foyers, la limite des 18 ans est rédhibitoire. Le passage à l’âge adulte des jeunes des foyers éducatifs est le plus souvent un moment de grandes angoisses. Tout change. Les personnes de références disparaissent rapidement. Les lieux de vie changent du tout au tout. D’un lieu protégé, ils doivent apprendre rapidement à gérer la solitude et l’autodétermination dans des structures moins encadrantes. Les équipes éducatives de la FOJ ont pris conscience de ces étapes si rapides et si déstabilisantes pour les jeunes qui vivent dans les foyers éducatifs. Elles proposent aujourd’hui un accompagnement qui renforce l’autodétermination et l’acquisition de compétences tant du quotidien que dans des démarches administratives. De même, la gestion du quotidien dans les foyers pour adolescents est vraiment déléguée aux jeunes afin d’expérimenter dans ce contexte une plus grande autonomie. Ces démarches semblent être du simple bon sens afin de leur permettre une expérimentation positive de ces différentes étapes de l’autonomie, bien que l’âge de 18 ans est bien jeune pour être totalement autonome. Olivier Baud, secrétaire général Initiale F – n° 1 – Décembre 2013 | Au cœur du sujet – 3 18 ans, et si c’était demain ? A l’approche de la majorité, les jeunes se posent moultes questions pour faire face aux nouvelles responsabilités qui surviennent. Préparer le jeune à la majorité est une étape qui lui permettra de trouver les ressources nécessaires pour rebondir durant sa vie d’adulte. Vanessa Panella Umiker et Anaël Bluteau, éducateurs à la Villa Rigaud, géré par la FOJ, ont mis en place des ateliers pratiques. Cet outil, né de la demande de différents jeunes, a pour objectif de leur apporter de quoi agrémenter leur balluchon de futur adulte. En effet, grand nombre des jeunes accueillis à la Villa Rigaud n’avaient aucune connaissance administrative sur ce qui les attendait une fois la majorité atteinte et certains ne savaient même pas comment payer une facture. Des thèmes variés A travers les principaux thèmes de la vie administrative tels que les diverses assurances, impôts, logement, ce dossier permet à ces jeunes d’avoir un premier aperçu des responsabilités auxquelles ils peuvent se trouver confrontés une fois la majorité passée. Un atelier mensuel est animé traitant à chaque fois un sujet différent et planifié à l’avance selon un programme défini. Pour cette année scolaire 2013-2014, en vue de répondre à l’intérêt de tous, l’idée est d’étendre cet atelier en l’adressant à tous les résidents de la FOJ. Certes, l’âge importe peu, mais il est évident que cela ne sert pas à grand-chose de s’y prendre deux ou trois ans avant… L’expérience montre qu’il est judicieux de débuter l’apprentissage de ces démarches à 17 ans (ou l’année des 17 ans). Ces ateliers se déroulent un mercredi soir par mois, durant une heure et demie environ. Chaque participant doit avoir lu le sujet du soir, afin d’être efficace dès le départ. En effet, certains sujets sont conséquents, et les lire lors de l’atelier serait contre-productif. C’est pourquoi, le dossier papier sera systématiquement fourni aux participants avant la première séance. Les questions Durant la soirée, les participants pourront s’exprimer sur leurs incompréhensions afin qu’elles soient éclaircies, partager leurs connaissances et expériences. Selon les sujets abordés, des exercices seront proposés afin de rendre plus concrets les éléments visités. ateliers. Ces ateliers de récapitulation permettront de répondre aux questions des jeunes gens et jeunes femmes, de revenir sur certains sujets ou points restés incompris. Vient qui veut Que ceux qui ne sont pas intéressés se rassurent, l’atelier n’est pas obligatoire. Mieux encore, les besoins de chacun pouvant varier, les ateliers sont accessibles indépendamment les uns des autres. Autrement dit, les résidents peuvent venir au(x) atelier(s) qui leur(s) convient(nent) ! Par contre, pour des questions d’organisation, nous souhaitons que chacun puisse s’inscrire en avance, afin d’être accueilli comme il se doit et, le cas échéant, envoyer le dossier. Un atelier sans inscrit est un atelier annulé ! De même, par respect pour tous, nous demandons que si un participant ne devait ne plus venir, il se doit d’en informer dès que possible les éducateurs, et avant l’atelier, afin que nous ne l’attendions pas en vain. Vanessa Panella Umiker, éducatrice Six sujets sont abordés en huis mois. Cela signifie que nous faisons un atelier récapitulatif après les « troisième » et « sixième » Les lieux des ateliers Les dates et thèmes des ateliers en cours Les ateliers ont lieu de 19h à 20h30 à la salle de réunion du bâtiment administratif du Chalet Savigny : Chemin de la Montage 51 - 1224 Chêne-Bougeries. L’arrêt de bus est « Montagne » pour les lignes 1 et 9 ou « Léonard Sismondi » pour la ligne 34 • 30 octobre 2013 : Factures • 27 novembre 2013 : Assurances maladies • 18 décembre 2013: Assurances Ménage et RC • 22 janvier 2014 : Atelier récapitulatif • 26 février 2014 : Gestion d’un budget • 26 mars 2014 : Logement • 30 avril 2014 : Impôts • 28 mai 2014 : Atelier récapitulatif et bilan Tu es intéressé ? Alors pour s’inscrire il suffit d’envoyer un mail à l’adresse suivante : [email protected] ou de téléphoner et laisser un message si besoin au : 022 869 15 07, sans oublier de donner ton nom, prénom et adresse, pour l’envoi du dossier et ton numéro de téléphone. AU CŒUR DU SUJET Nous présentions notre dossier de préparation à la majorité, outil que nous avons créé dans le cadre de la prise en charge des adolescents du foyer de progression qu’était la Villa Rigaud. 4 - Initiale F – n° 1 – Décembre 2013 | Au cœur du sujet Le passage à l’âge adulte Point Jeunes répond aux sollicitations des jeunes âgés de 18 à 25 ans. Rémi Marchal et Mélanie Villard, éducateurs à Point Jeunes, ont pris le temps de répondre à nos questions pour permettre un éclairage sur les préoccupations des jeunes aujourd’hui et le délicat passage à l’âge adulte. Une équipe pluridisciplinaire de quarante personnes composée d’éducateurs spécialisés, d’assistants sociaux, d’assistants administratifs et consultants en intervention communautaire, travaillent à Point Jeunes. Ce lieu qui existe depuis plus de trentre ans, est géré par l’Hospice Général, et regroupe tous les accès utiles aux jeunes adultes de 18 à 25 ans et leurs proches qui souhaitent avoir des conseils, informations, soutien, accompagnement et suivi dans la réalisation de leurs projets et l’acquisition d’autonomie. AU CŒUR DU SUJET Le concept permet aux jeunes d’avoir accès à un centre d’information et de documentation, d’échanger et de rencontrer d’autres jeunes, ou acteurs professionnels concernés mais également d’avoir un suivi individuel afin d’activer les partenariats utiles à la réduction des difficultés identifiées. La mission de Point Jeunes se situe au niveau de la prévention, offre une permanence d’accueil et téléphonique, met à disposition des hébergements avec suivi éducatif et répond aux demandes d’aide et d’information émanant de collectivités concernées par des problématiques liées à la jeunesse. Mélanie Villard et Rémi Marchal, éducateurs à Point Jeunes ont bien voulu répondre à nos questions pour ce premier numéro de Initiale F. Quelles sont les principales préoccupations des jeunes qui viennent vous demander conseils ? La formation, le travail, le logement, les finances sont les principales préoccupations, mais d’autres problématiques peuvent être importantes telles que les relations familiales, les dépendances en terme de consommation, de jeu. Les problèmes de santé au sens large, les problèmes d’ordre psychiques et physiques, les problématiques interculturelles. Comment s’articule votre travail auprès des jeunes ? Il y a quatre entités au sein de Point jeunes. Un centre d’informations et de prévention qui inclut la permanence, un lieu d’accueil ouvert de 12h à 17h30 du lundi au vendredi. La permanence est la porte d’entrée de Point Jeunes. Les personnes sont reçues sans rendez-vous et en toute confidentialité. Les jeunes et leurs proches, en demande d’aide et de conseils, viennent de leur propre volonté, en adhésion libre. Ce sont les éducateurs qui gèrent la permanence et nous nous décrivons volontiers commes des généralistes «spécialistes» des problématiques jeunes adultes, ce qui sous entend un vaste champ d’intervention. Il s’agit d’un travail d’information, de conseils, d’écoute, de médiation et de coordination avec les différents partenaires du réseau. Suivant le besoin, on peut accompagner les jeunes sur une durée plus longue jusqu’à ce qu’ils aient retrouvé ou atteint une certaine autonomie. Depuis juin 2012, une nouvelle prestation s’est développée à Point Jeunes. Il s’agit d’un service social composé d’assistants sociaux qui accompagnent les jeunes adultes dans leur projet et leur délivrent également des prestations financières. C’est un suivi social au sens large du terme. Les hébergements sont composés de deux foyers. Un foyer d’urgence de seuil assez bas, Gabriel Sabet qui accueille huit jeunes en rupture pour une durée de trois mois environ. Les appartements de la Servette ont douze places. Pour y entrer, le jeune doit avoir un revenu minimal de CHF 1200.- par mois et doit être engagé dans un processus de formation ou dans un processus professionnel. Il y a un certain délai d’attente pour obtenir un logement dans ces appartements. La durée du séjour varie entre un an et un an et demi, le temps que le jeune soit autonome. Dans ces deux hébergements, une équipe d’éducateurs accompagne les jeunes tout au long du séjour. L’EPIC (équipe de prévention et d’intervention communautaire) est composée d’une équipe pluridisciplinaire qui intervient sur Plus d’infos Point Jeunes Philippe Sprauel, responsable accueil téléphonique T 022 420 55 55 Glacis-de-Rive 12 1207 Genève www.hospicegeneral.ch/prestations/ point-jeunes.html Coup de pouce pour majeur Guide de renseignements pratiques à l’attention des jeunes adultes de la région genevoise. Gratuit. Initiale F – n° 1 – Décembre 2013 | Au cœur du sujet – 5 Quels sont les outils utilisés pour aider les jeunes à développer leur autonomie ? Nous les informons, les aidons à faire leurs démarches, nous sommes des personnes ressources, nous les aidons à trouver des solutions, à travers des outils concrets tels que les ateliers thématiques animés par des intervenants extérieurs spécialisés dans le domaine. Portés sur des thèmes tels que le logement, la recherche de formation, l’apprentissage civique, les assurances, les types de facture, la gestion administrative. Nous avons un espace informatique disponible gratuitement, avec accès à internet et téléphonique gratuits dans les locaux situés à la permanence de Point Jeunes. Les hébergements sont aussi des réponses concrètes que nous leur proposons. Les outils tels que l’approche centrée sur la solution, la coresponsabilisation et la responsabilisation sont utilisés. Notons que le jeune n’est pas uniquement le porteur de ses responsabilités. Il s’agit de mobiliser au sens large l’ensemble des acteurs autour du jeune. Un travail de médiation, de soutien à la parentalité et de coaching du jeune est engagé selon le situation. Les outils qui impliquent le jeune et le réseau tiennent compte de son environnement socio-affectif de manière à travailler autour de lui dans une approche systémique voire une approche plus large. Nous sommes aussi dans des logiques de «confrontation bienveillante», afin de l’amener à réfléchir à sa situation et l’aider à prendre les bonnes décisions. Nous sommes des ressources pour les professionnels et les partenaires locaux avec qui nous faisons le relais. Le champ d’action est principalement d’ordre socio-éducatif. Vous êtes maintenant le relais prioritaire pour l’aide aux jeunes de 18 à 25 ans, quels sont vos partenaires privilégiés ? Nous collaborons avec les foyers pour adolescents et le SPMi afin de préparer au mieux le passage du jeune à la majorité. Pour les jeunes qui vivent en foyers, la majorité sous-entend beaucoup de changements pour eux, notamment leur lieu de vie, leurs repères, et gérer leur budget et leurs paperasses. Ces collaborations sont primordiales et déterminantes pour que cette transition soit bien anticipée et préparée. Nos autres partenaires sont le réseau sanitaire (unités spécialisées comme Jade et Phénix) qui ont trait aux soins psychiques, le réseau de formation (OFPC et toutes les structures d’insertion professionnelle développée dans les différentes communes et en Ville de Genève), l’OCE, les SEMO (semestre de motivation) et les résidences pour jeunes notamment. Notre collaboration avec les communes est importante compte tenu que certaines ont développé plusieurs dispositifs destinés aux jeunes en difficulté. Mélanie Villard, éducatrice La majorité marque la limite entre l’adolescence et l’âge adulte, les jeunes se sentent-ils préparés à entrer dans ce monde-là ? La majorité devrait être le lieu de passage désigné entre l’adolescent et l’adulte. C’est une vision théorique de la situation, la réalité est toute autre. D’où l’importance de préparer au mieux ce passage, de l’anticiper. Il y a une différence importante en fonction des familles. Une famille issue de l’immigration pourrait avoir plus de mal à opérer ce passage dans les meilleures conditions. Le milieu socio-culturel peut jouer aussi un rôle important. Certains jeunes sont contents de devenir adultes mais sans mesurer la part d’obligation auxquelles ils seront confrontés. Nous sommes là pour les amener à prendre leurs responsabilités, les informer sur leurs droits et leurs devoirs, et aussi les aider à réaliser leurs projets afin qu’ils deviennent pleinement acteurs de leur vie. Propos restitués par Valérie Milleret Rémi Marchal, éducateur AU CŒUR DU SUJET des problématiques d’ordre communautaire. Sur la base d’une demande des partenaires, l’EPIC accompagne la mise en place de projets de prévention concernant des problématiques vécues par des groupes de jeunes (par exemple, problèmes de consommation, d’incivilité, d’harcèlement et d’intégration au sens large). Les partenaires de l’EPIC sont principalement les acteurs en lien avec les jeunes : associations, travailleurs sociaux, communes, enseignants, police, etc. 6 - Initiale F – n° 1 – Décembre 2013 | Au cœur du sujet L’apprentissage de la solitude L’apprentissage de l’autonomie passe par l’apprentissage de la solitude. Pascal Chanton, directeur de résidences pour jeunes travailleurs, ap‑ prentis et étudiants non universitaires, apporte un éclairage intéressant basé sur une expérience riche de moments passés aux côtés des jeunes, et témoin privilégié de leurs doutes et de leurs interrogations. Responsable des résidences Village-Suisse, Le Voltaire et Pont-Rouge depuis quelques années, il m’est souvent apparu que la gestion de la solitude pour un jeune résidant n’est pas si facile. C’est un apprentissage à ne pas ignorer car il peut perturber, ou pire, mettre en danger tous les autres apprentissages: apprendre un métier, apprendre à gérer son budget, apprendre ses devoirs de citoyens, etc. Se retrouver seul dans sa chambre ou dans son studio, malgré le fait que cette indépendance, il l’a désirée et même sublimée, peut être source d’angoisse pour un jeune habitué à évoluer au sein d’un groupe, que ce soit sa famille, ses pairs ou à l’école. AU CŒUR DU SUJET Les propos ci-après illustrent autant de moments de solitude subis : « Après ma journée qui s’est bien ou mal passée. Mes amis sont rentrés chez eux. Je dois me coucher pour être en forme demain, mais… Je suis seul !!! Je n’arrive pas à dormir. Je vais encore sur les réseaux sociaux, tv, internet pour habiter le silence ou couvrir les bruits de l’immeuble. Que vais-je faire de mes week-end ? Etc. » Afin d’enrichir mes propos, j’ai repris ces quelques extraits choisis par Henri Charcosset sur le livre intitulé La psychologie de la solitude, écrit par Gérard Macqueron qui me semblent très intéressants : « Et pourtant cette solitude fait partie de notre expérience de vie. Elle est incontournable et vouloir la fuir, c’est se fuir soimême. Même si notre besoin de l’autre est très grand, il ne peut remplir totalement notre vie et nous apporter la sécurité que nous recherchons. Cette sécurité, il faudra la trouver en nous-même. Toutes les situations désagréables, douloureuses, éprouvantes, vécues dans la solitude nous en donnent une représentation biaisée et stigmatisée. Nous associons implicitement la solitude à ces moments de notre vie, comme si elle était la cause de ce ressenti négatif, alors qu’elle est la conséquence d’une situation pénible. A l’inverse, nous n’avons en général pas suffisamment appris à avoir des moments bénéfiques de solitude. Nous n’avons pas appris à être seul ». Nietzsche l’avait souligné : « Le défaut le plus répandu de notre type de formation et d’éducation : personne n’apprend, personne n’aspire, personne n’enseigne… à supporter la solitude ». « A chaque fois que je me retrouve seul, cela se passe mal. » « J’ai appris beaucoup de choses, mais pas à vivre seul. » « Pourquoi faire les choses seul quand on peut les partager à deux ? » « Penser aux autres me permet de ne pas penser à moi. » Dès leur plus jeune âge, nos enfants sont donc en activité permanente. Les temps libres sont supprimés. L’oisiveté combattue. Cela a le mérite de les stimuler. La solitude fait peur, parce qu’elle ravive en nous des souvenirs douloureux, mais aussi parce que nous n’avons pas appris à l’apprivoiser. Chacun s’emploie à ne pas être confronté à cette source de tant de souffrances sans réfléchir sur la manière dont il pourrait apprendre à mieux la vivre. Une des craintes des parents n’est-elle pas que leur enfant s’ennuie, qu’il n’ait, seul, rien à faire ? Mais si tel est l’objectif, diminuer le temps libre de l’enfant augmente-t-il réellement ses performances ? Sera-t-il pour autant plus tard un adulte plus éveillé, plus cultivé, plus épanoui ? Et quid de la capacité de penser, du potentiel créatif, des désirs profonds de l’enfant ? Initiale F – n° 1 – Décembre 2013 | Au cœur du sujet | Meilleures pages – 7 Dans ce programme chargé, qui s’intéresse A nous, parents et éducateurs, d’accepter véritablement à ce qu’il ressent, éprouve, de les voir parfois s’ennuyer, perdre du vit intérieurement ? Qui apprend aux en- temps afin que naissent les désirs, que se fants à comprendre leurs développent la créativité et Les situations émotions, à identifier leurs le rêve. désagréables, besoins profonds, à verbadouloureuses, liser leur ressenti ? Plus tard, L’ennui permet une retraite éprouvantes, vécues adultes, comment poursur soi, un temps propice à ront-ils rester seuls s’ils ne la réflexion pour permettre dans la solitude nous l’ont jamais expérimenté une projection dans un en donnent une auparavant ? Sauront-ils avenir qui se dessine parreprésentation biaisée gérer ce face-à-face avec fois sous des courbes anet stigmatisée. eux-mêmes sans angoisse ? guleuses mais où cette parenthèse vouée à la soliPourtant, c’est la solitude, et pas l’accu- tude permet à la personne de résoudre mulation des activités ou des apprentis- d’éventuelles interrogations. sages, qui permet d’avoir une meilleure connaissance de soi, une conscience de soi Je pense que ces propos doivent toujours plus juste, élément indispensable à notre être présents lors de nos réflexions sur notre épanouissement personnel. Parce que nous pratique professionnelle qu’est la prise en n’avons pas appris à apprécier la solitude, charge des jeunes ! demeure en nous l’angoisse d’une solitude amère, et tous les moyens sont bons pour Pascal Chanton, y échapper. C’est dès l’enfance que nous directeur des résidences devrions éduquer nos enfants à supporter et aimer la solitude. Les adonaissants La construction de l’autonomie correspond à l’aspiration et aux ressources que se donne l’individu pour agrandir un monde à soi. Comment construit-on ? Comment agranditon un monde à soi ? Plusieurs ouvrages ont paru sur l’adolescence avec des points de vue assez différents. L’ouvrage de François de Singly sur les Adonaissants présente, dans la veine de précédents travaux de l’auteur, une lecture identitaire de cet âge de la vie, dont le thème central est l’oscillation, non conflictuelle, des adolescents entre l’identité liée à la famille et celle liée au groupe des pairs. Sa vision est finalement relativement optimiste. Le livre repose sur une série d’enquêtes qualitatives et quantitatives auprès des adolescents ou pré-adolescents eux-mêmes âgés de 11 à 13 ans. La thèse centrale du livre est que la pré- cocité croissante de l’accès à une forme d’autonomie des adolescents, dès les années de collège, crée un nouvel espace identitaire que l’auteur définit comme un « moment de non coïncidence entre le nous familial et le nous générationnel ». Ce moment, constitué d’une autonomie sans indépendance (économique), conduit l’adolescent, selon François de Singly, à osciller entre deux identités, celle qui est liée à sa famille et celle qui est liée à son groupe des pairs, c’est le thème central du livre. L’auteur n’interprète pas cependant cette dualité comme un moment de confrontation entre les générations. Il conteste l’idée qu’il « n’y ait plus de règles à la maison » et il fournit des exemples montrant que ces règles continuent de s’appliquer, dans le domaine des horaires, des sorties, du travail scolaire par exemple. Il n’entre pas vraiment dans l’examen de la question du degré auquel ces règles, énoncées, s’appliquent effectivement. En effet la dualité adolescente dont parle l’auteur peut avoir pour conséquence que les règles édictées à la maison ne s’appliquent pas forcément à l’extérieur du domicile familial, là où les adolescents sont, de plus en plus fréquemment, hors du contrôle des parents. Cette dualité de l’univers adolescent peut, au point extrême, construire des jeunes à double face, dans certaines cités par exemple où la socialisation par le groupe des pairs vient concurrencer et dans une large mesure supplanter la socialisation familiale. Il peut arriver alors que les jeunes maintiennent simplement les apparences de l’obéissance et du conformisme. Laetitia Buchet, éducatrice MEILLEURES PAGES François de Singly, sociologue, vient de publier une récente étude sur ceux qu’il appelle les « adonaissants ». Une lecture recommandée par Laetitia Buchet, éducatrice. 8 - Initiale F – n° 1 – Décembre 2013 | Entrevues La création L’atelier création au foyer La Pommière s’inscrit dans un contexte de changements. Vincent Châtelain, éducateur, revient sur le concept de cet espace en exposant la spécificité du foyer La Pommière et laisse la parole aux jeunes et à ses collègues. Le travail de la céramique développé au sein de l’atelier de création ENTREVUES L’espace de création au foyer la Pommière s’inscrit aujourd’hui dans un contexte de changements. En effet, le travail éducatif au foyer met de plus en plus l’accent sur un accompagnement individualisé, centré sur les ressources, les besoins et les rythmes de chaque jeune. Marinette Milliet et Vincent Châtelain les éducateurs garants de l’atelier création proposé aux jeunes de la Pommière à raison d’une soirée par semaine, s’expriment dans cet article sur le sens et les effets de cet espace créatif. Ils présentent cet espace de création au travers de mots et d’idées présentés spontanément et illustrant « pelle mêle » ce qui se passe, se dit, se ressent ou s’observe aujourd’hui dans ce lieu. L’espace, qu’est-ce-qui s’y vit, qu’est-cequi se passe, qu’est-ce-qui se voit ? c’est un lieu d’énergie qui offre la possibilité aux jeunes de : • Profiter du support créatif comme outil de médiation. • Venir rendre visite sans obligation. • S’y investir pleinement ou non. • Réviser ses devoirs. •Oser. • Prendre une place. • Ne pas venir du tout. • Venir manger du cake et boire un thé. • Parfois sortir des murs (Atelier d’artiste, galeries, marché de Noël de Chêne-Bourg) • Faire des demandes. •Râler. • Etre en contact avec l’estime de soi. • Exposer, rendre visible et parfois vendre ses créations. • Expliquer la démarche, la technique, l’intention à d’autres. • Etre en retard. • Etre lent. • Venir nourrir la dynamique du présent, que les jeunes filles soient seules ou à plusieurs. L’espace atelier est un lieu en mouvance et en réflexion. Cela questionne aujourd’hui sur : • Son sens. • La place du groupe ; de l’individu. • Ce qu’il permet d’être et de faire. • Le(s) lien(s) qui y émerge(nt) ou pas. • Le regard extérieur porté sur le travail abouti. • La motivation des jeunes ; de l’équipe. • L’engagement des jeunes. • L’offre et son rythme dans le temps. • L’implication de l’engagement d’un projet extérieur. • La place à la solidarité ; à l’entraide. • Les projets réalisés en groupe ou seule. • L’espace donné aux propositions des jeunes et à leurs envies. • La possibilité de nommer cet « espace atelier » différemment. Quelques questions posées par Johanie Spady, stagiaire, aux jeunes de la Pommière sur l’atelier création, son contexte, ses effets et ses changements. Johanie : Pour toi, à quoi ça sert un atelier création ? Rim : Franchement pour moi à rien, mais pour d’autres ça peut être cool. Si elles aiment bien l’art, le fait de créer quelque chose peut leur apporter de la satisfaction. Initiale F – n° 1 – Décembre 2013 | Entrevues – 9 Johanie : Qu’est-ce que tu attends de l’atelier ? Rim : Le fait d’être en groupe me plait assez. Noura : Je découvre car c’est la première fois que j’ai l’occasion de faire ce genre de création. Johanie : Est-ce que tu penses que tu investirais différemment l’atelier avec d’autres adultes, d’autres jeunes, des personnes extérieures au foyer ? Rim : Cela dépendrait surtout des objets proposés à la confection. Côtoyer différentes personnes ne me poserait pas de problème. C’est plus une question de compétence. Noura : Je ne suis pas sûre que je participerai à l’atelier de la même manière s’il devait y avoir d’autres éducateurs. Je préfère que les éducateurs restent les mêmes, mais les jeunes peuvent changer; cela ne me dérange pas. Le point de vue de deux de nos collègues. Johanie : Comment l’atelier création s’inscrit dans le contexte actuel de changement ? Nordine : Le mot atelier fait référence à un atelier de travail, alors que le terme activité laisse présager la notion de loisir, de plaisir. L’atelier création n’est plus obligatoire, et laisse la liberté aux jeunes de participer et de s’investir de leur plein gré, ce qui rend ce temps plus convivial, sans tension ni besoin de recadrer. Cette activité n’est pas un lieu de production, mais plutôt un espace de partage et d’échange. Cet espace favorise le lien et une ouverture, en sortant du cadre, des formalités et du face à face lors d’entretiens formels dans un bureau. Globalement, les filles sont plus apaisées, plus en lien. En effet, le fait de laisser le choix aux jeunes en continuant à leur proposer des activités tel que « l’atelier » création, leur offre des espaces d’expression ouverts. Chacune est libre d’en bénéficier et donc, d’en jouir pleinement. En effet, on ne peut pas forcer quelqu’un à s’exprimer, il doit nécessairement se sentir libre pour le faire. Avant, les éducateurs devaient porter la charge de cette activité en faisant participer les jeunes sans qu’elles puissent trouver le sens à leur participation. Aujourd’hui, elles même choisissent d’être présentes sans pour autant y participer activement. Elles y trouvent certainement des bénéfices dans le lien et les échanges largement favorisés par le cadre chaleureux et la disponibilité des éducateurs. En conclusion, cet état d’esprit autour de l’activité créatrice, illustre bien la dynamique et la volonté de changement portées par l’équipe Sans que les jeunes en privilégiant la singularité, s’en rendent les ressources et le rythme de compte, l’atelier a chaque jeune. un impact positif sur l’estime Isabelle : Pour moi, c’est un d’elles-mêmes. bol d’air frais que les filles peuvent prendre. Je vois bien qu’elles peuvent en retirer quelque chose. Le fait de descendre dans l’espace atelier est intéressant. Avoir une pièce réservée à la création amène et ajoute un effet de parenthèse. Cela est certainement un plus dans le fait que les filles adhèrent à l’atelier. Sans qu’elles s’en rendent compte cela a un impact positif sur elles (meilleure estime d’elles-mêmes) qui leur fait du bien. Propos restitués par Johanie Spady L’atelier céramique ENTREVUES Noura : J’aime créer et faire des choses avec mes mains. J’apprends beaucoup de techniques de création. 10 - Initiale F – n° 1 –Décembre 2013 | Plus loin Yapaka Lorsqu’un événement violent ou accidentel surgit dans une institution, c’est tout un système qui en est impacté. Faire face à cet événement devient, dès lors, une nécessité. Qu’il s’agisse des bénéficiaires, des personnes qui y travaillent ou de l’institution elle-même, chacun sera amené à s’ajuster pour qu’un nouvel équilibre advienne et que la vie puisse reprendre son cours. La crise vient révéler les failles de tout système. Ceci peut rendre inutilisable les ressources en présence. Les repères pour penser la crise et ses effets pour que chacun, à son niveau, puisse inventer une façon de réagir la plus respectueuse de ses propres besoins et de ceux d’autrui. Lorsque un événement surgit, la perturbation et la rupture d’équilibre sont présentes aussi bien pour l’institution que pour les individus qui la composent. PLUS LOIN Cela se traduit par toute une série de phénomènes avec lesquels il faudra composer. Tout d’abord, toute situation de crise entraîne une avalanche de difficultés. Au départ, le système se trouve submergé et ne peut résoudre ses problèmes selon les règles d’organisation et de fonctionnement habituelles. Cette situation peut entraîner elle-même un dysfonctionnement et un emballement du système. Le dysfonctionnement est accompagné par un accroissement des difficultés, des incertitudes et donc de l’angoisse. Le choc se vit de plusieurs manières, tout d’abord en fonction de la proximité physique avec l’événement mais aussi en regard des liens d’attachement et de la proximité relationnelle avec les personnes qui y sont impliquées directement. Dans tout événement traumatique, la menace est en fait une menace de mort. Le bouleversement psychique que suscite cette rencontre avec la mort vient remettre en cause les croyances et le sentiment de sécurité des impliqués qui, en temps normal, constituent un système intégré de défense stabilisant et protégeant les personnes au quotidien. L’expérience humaine à ce moment est bien celle du choc et de la rupture. La personne qui l’éprouve peut y réagir de différentes façons. Rencontrer les besoins Dans les premiers temps de la crise, un des enjeux principaux consiste à rencontrer les besoins des personnes impliquées dans l’événement. Il importe donc, dans un premier temps, d’identifier les personnes qui partagent ces besoins et de les rassembler dans ce que nous appelons des « groupes cibles ». Nous pouvons en considérer deux principaux. Tout d’abord, il existe le groupe des impliqués directs. Ce sont ceux qui ont vécu l’événement ou en ont été les témoins. Ensuite, il y a le groupe des impliqués indirects. Il est formé par les personnes qui n’ont pas vécu l’événement directement mais qui sont impliquées de par leur proximité affective avec les membres du premier Initiale F – n° 1 – Décembre 2013 | plus loin – 11 En effet, l’événement traumatique propage ses ondes de chocs à la façon d’une pierre que l’on jette à l’eau. Plus on se situe près du centre de l’impact, plus on en ressent les effets. Les principaux besoins qui se manifestent en situation de crise sont au nombre de cinq. Il s’agit des besoins primaires, de sécurité, d’information, de reconnaissance et d’appartenance. Ils sont toujours présents mais leurs intensités diffèrent selon le temps dans lequel les impliqués se trouvent, le contexte particulier de l’événement et la distance (géographique et relationnelle) qui les éloignent du « point d’impact ». D’une façon générale, les besoins primaires, de sécurité et d’information seront plus prégnants dans la phase de choc ou d’urgence. Les besoins de reconnaissance et d’appartenance, bien que présents dès le début, pourront continuer à se faire entendre bien longtemps après l’impact de l’événement. Tous ces besoins sont étroitement liés les uns aux autres. Aller à la rencontre de l’un permet souvent de rencontrer les suivants. L’institution impactée De manière globale, un événement critique viendra bousculer le système dans son entièreté. En effet, une institution constitue bien un système où viennent se rejoindre ces deux sphères individuelles et collectives avec pour objectif de les articuler autour d’un projet commun. L’institution est donc par essence un lieu d’échanges entre les différentes parties qui la composent C’est en cela qu’elle se distingue de « l’établissement ». L’institution se construit ou se déconstruit au-delà de l’établi, à partir de l’intervention de tous ses membres et donc, y compris des bénéficiaires des services qui s’y trouvent engagés. Face à l’événement traumatique, nous allons voir que tout le défi de l’institution consiste à maintenir cette fonction d’échange (et donc aussi de parole), c’est-à-dire de rester (ou de saisir l’opportunité de le devenir) une institution, là où elle pourrait être tentée de se réfugier dans de l’établissement, c’est-à-dire du déshumanisant! Et les tentations pour ce faire sont nombreuses. En effet, nos institutions sont de leur époque, c’est-à-dire d’un temps où l’individualisme et la recherche de performances se posent en maîtres et tentent d’imposer une conception de la santé tout aussi individuelle. Penser les effets de l’événement critique de façon globale nous invite à considérer, non seulement les individus, mais également les différents groupes qui composent l’institution et les organismes auxquels ils se réfèrent. Prendre conscience de la crise et la considérer dans tous ses aspects permettront d’éviter un blocage. La menace qui plane sur l’institution est néanmoins mobilisatrice de moyens d’action. L’enjeu de la gestion de la crise consiste à favoriser la mise en œuvre de ceux-ci et de les compléter, si nécessaire, par des ressources externes : • Gérer la crise au niveau institutionnel. • Anticiper les risques, prendre des mesures préventives et préparer un dispositif de réponse. • Repérer les premiers signes de la crise. • La reconnaître lorsqu’elle est là. • Faire un premier bilan : gravité, urgence, enjeux. • Identifier les groupes affectés et leurs besoins anticipés et observés. Plus d’infos Yapaka est un programme de prévention de la maltraitance à l’initiative du Ministère de la Fédération Wallonie-Bruxelles de Belgique. Éviter la maltraitance… Oui, mais comment ? Nous aimerions tant quelques idées fortes, un mode d’emploi, un guide pour savoir comment procéder. Mais tout comme il n’y a pas de recette miracle pour être parent parfait, il n’y a pas de réponse préfabriquée pour éviter la maltraitance. A chacun de se débrouiller... Mais cette débrouille peut s’avérer galère, détresse et solitude ou au contraire créativité pour autant que l’on trouve appui et solidarité : le coup de pouce d’un ami, d’un voisin, d’un proche, l’aide d’un professionnel... yapaka tente de lancer des pistes. • Faire un relevé des ressources disponibles. • Mobiliser les ressources complémentaires • Prendre les décisions permettant de faire correspondre les besoins et les ressources • Activer l’aide et en suivre les effets. Ces balises sont, en fait, des principes généraux qui sont applicables par l’institution et les personnes, quelques soient la situation ou le moment. Il y a tellement de différences selon les contextes, les types d’institution et les caractéristiques de l’événement, que nous ne pouvions être exhaustifs. Un livre de « recettes » aurait été tout à fait inutile car inapplicable. Par contre, suivre des principes permet à chaque institution de créer son propre « plat » avec ses propres épices et en comptant sur ses propres ressources du moment. L’important étant qu’au bout du processus, les impliqués aient vu leurs besoins rencontrés et que l’institution puisse trouver un nouvel équilibre. source : www.yapaka.be/livre/evenementtraumatique-en-institution PLUS LOIN groupe. Bien entendu, ce groupe peut par ricochet, être élargi encore. 12 - Initiale F – n° 1 – Décembre 2013 | Tribune libre Réflexions légères Poète à ses heures, Nicole Hideg, éducateur, aime nous faire partager ses réflexions sur le lacher prise pour vivre et laisser vivre. Lors de nos réunions en vue de l’élaboration de ce numéro, apparaient immanquablement dans la discussion et à juste titre d’ailleurs, le besoin d’intéresser le lectorat, de rendre notre publication piquante, de suciter une vocation chez le lecteur ou la lectrice… du léger, du rire, du court mais pas trop, de l’intérêt, de l’émotion, de l’éducatif, et pourquoi pas de l’écologique… du simple quoi ! • En Suisse. • Où est la Suisse ? • En Europe (enfin presque, oui et non, je me perds). • Où est l’Europe ? • Sur la terre, c’est une zone de celle-ci. • Où se trouve la terre ? • Dans l’univers, à peu près sur une des branches de la galaxie. Où se trouve l’Univers ? Euh… Je commencerai par vous résumer la discussion inspirée du livre le guerrier pacifique écrit par Dan Millman. Le professeur (l’éducateur, pourquoi pas) pose cette question assez élémentaire a priori : Je n’ose m’aventurer sur le chemin de cette autre question qui en a usé plus d’un : Qui sommes-nous ? • Où es-tu aujourd’hui en ce moment ? • Eh bien ici avec toi. • Où ici ? •Genève. • Où est Genève ? s’en servir pour vivre ce fameux lâcher prise ! Je ne saurai jamais alors pourquoi m’en angoisser, observer un nuage se former, se déformer se reformer quel régal ! Cesser par moment de vouloir comprendre l’autre, de lui dire ce qu’il devrait faire, d’analyser faits et gestes pour ensuite prévoir l’imprévisible me fait du bien. Arrêter de me sentir coupable de ne pas arriver à rendre l’autre l’heureux, responsable de sa vie, de le changer pour qu’il corresponde à mes attentes ! Vivre et laisser vivre...quel défi permanent ! Cette déroutante incertitude me rappelle que nous ne savons que peu de choses… Et bien tant mieux ! Au lieu de s’en angoisser et de vouloir à tout prix tout savoir, décortiquer jusqu’à l’extrême pourquoi ne pas s’en satisfaire et Vivre l’instant présent, laisser la raison du cœur être, permettre à notre essence de s’exprimer voilà ce que je nous souhaite à tous pour cette nouvelle année. Nicolas Hideg, éducateur Réflexions tout court TRIBUNE LIBRE Pas de journal sans tribune libre, et pas de tribune libre sans expression libre. Force est de constater que cette rubrique a su résister au temps. Lecteur assidu des sujets qui sont proposés dans cette rubrique qui a su résister au temps et à la refonte du journal de la FOJ, je souhaiterais rebondir sur ce que Nicolas Hideg, poète et éducateur, a relaté plus haut. Vivre et laisser vivre, ces belles paroles nous laissent rêveurs et circonspects. Il est si facile de se les approprier mais en vérité, de quoi s’agit-il ? Les vastes possibilités d’appréciation personnelle permettent mille explications de texte. Laisser à l’autre le soin de prendre sa place, de se tromper, de faire des erreurs, de ne pas juger, de ne pas se juger, mais rester dans cet espace où chacun peut trouver sa place. La mission première de la FOJ est dévolue à la cause de la jeunesse en difficulté au sens large. Le personnel éducatif qui y travaille a acquis un savoir-faire et un savoirêtre propres au travail social. Les réflexions légères de Nicolas me poussent à croire que la légèreté dans le milieu où il évolue est une ressource à apprivoiser. Ce principe s’applique à toute personne hors du champs social puisque qu’aujourd’hui, ce merveilleux bol d’air frais permet de passer des moments délestés de tant de médiocrité pour voir l’autre tel qu’il est et non tel que l’on voudrait qu’il soit. La sagesse, diront certains. Vivons l’instant présent avec ce profond sentiment de profiter pleinement des êtres qui nous entourent. En cette fin d’année 2013 qui est passée comme un éclair, je vous souhaite mes meilleurs voeux de légèreté pour l’année à venir. Un auteur anonyme Initiale F – n° 1 – Décembre 2013 | Mini chefs | Dans mes bulles – 13 Fondant au chocolat Recette facile de Gérard Duret, façonnée par Ismaël, 7 ans MINI CHEFS Ingrédients : • 250 g de chocolat • 200 g de beurre • 100 g de farine • 200 g de sucre • 8 œufs • 1 sachet de poudre à lever • Fondre le chocolat et le beurre Mélanger au fouet le sucre, la farine et la levure, les verser dans le chocolat et le beurre fondu, bien mélanger au fouet en ajoutant les œufs, beurrer et fariner les moules, remplir au 2/3 et cuire au four th. 180° Cuisson : dans un moule à gâteau, 30 min. = biscuit dans un moule à tarte, 12-15 min. = mœlleux dans un moule à ramequin, 8 min. = fondant Lucas, 13 ans, adore dessiner. Il s’est prêté une fois encore à une représentation humoristique d’une tranche de vie. “Les gens qui disent que leurs dessins ne sont pas beaux, ils doivent juste avoir de la patience.” Lucas, 13 ans DANS MES BULLES Ismaël, 7 ans et Gérard Duret, cuisinier aux foyers de Gilly 14 - Initiale F – n° 1 – Décembre 2013 | Positive attitude | Bon plan POSITIVE ATTITUDE La permanence juridique des étudiants gratuite et sans rendez-vous La maison de quartier de la Jonction accueille dans son local la permanence juridique des étudiants (PJE). Notre association regroupe des étudiants en droit qui proposent leurs services à titre gracieux. Ils prodiguent à toute personne qui les consulte des conseils juridiques gratuits dans la mesure de leurs compétences ou, à défaut, les orientent vers d’autres organismes qui pourraient leur venir en aide. ↘ Rue du Village-Suisse 3 1205 Genève [email protected] 076 632 52 26 Mardi de 14h à 16h Jeudi de 16h à 20h (numéro accessible uniquement lors des heures d’ouverture) i Balade au bord de l’Aire Tout près des foyers de la FOJ situés sur le domaine des Ormeaux, une promenade au bord de l’Aire vous fera découvrir de merveilleux sentiers. A pieds ou à vélo, il est si facile de s’aventurer sur ces chemins d’écoliers. BON PLAN Circuit pédestre : ▶ Grand-Lancy ▶ Pont Rouge ▶ Chemin des Verjus Traverser la route du Grand-Lancy pour rejoindre l’Aire en suivant le chemin du Gué. Partir du joli petit jardin public, situé à côté de la salle communale. Suivre la rive droite de l’Aire, passer en dessous de la villa Bernasconi, traverser une passerelle façon Vermont, puis arriver au Pont Rouge où la rivière disparaît, absorbée par les dalles de béton. A cet endroit, le contraste est saisissant entre la zone industrielle de la Praille et le charme bucolique de la rivière. Faire demi tour en changeant de rive ou de sentier, passer le pont du Gué, poursuivre en passant sous le viaduc, puis sous la route du Grand-Lancy, pour arriver à la jonction avec le nant du Voiret, suivre celui-ci pour déboucher sur le chemin du Verjus. Compter une petite heure de flânerie. Initiale F – n° 1 –Décembre 2013 | restez connectés | concours – 15 Le blog de 100drine 100drine (Sandrine), personnage de fiction, tient son blog depuis novembre 2005. Ce blog permet de poursuivre l’aventure d’Hubert, un ado comme les autres, confronté aux problèmes de son âge et d’ouvrir un espace d’échange. Via Internet et par les blogs en particulier, des millions d’ados du monde entier livrent leurs états d’âme, partagent leurs questions, leurs peurs, leurs fou-rires, s’échangent des infos,… un peu à la manière d’un journal intime des temps modernes. Ils maîtrisent techniquement et manipulent quotidiennement ce média: un adolescent sur deux a son propre blog. Ce coin de toile, le blog de 100drine vient donc s’inscrire dans cette communauté virtuelle. Pour se différencier dans cette masse et garder son objectif de projet de prévention primaire, il s’impose dans un ton, une forme d’écriture différente: la fiction. RESTEZ CONNECTÉS Ce blog est un des éléments d’un programme de prévention adressé aux ados et à leurs parents. Cette option permet de jouer sur les mêmes ressorts identificatoires que le livre tout en mettant en avant un espace via lequel chacun peut réagir. En effet, ce blog fait le pari d’ouvrir un espace d’écriture participative, il s’agit d’un blog à plusieurs mains dans lequel chacun peut venir à son tour déposer son petit grain de sel, prendre la plume, envoyer des photos, des dessins. Le blog : www.100drine.be Infos Encourager la lecture chez les tout-petits grâce au prix p’tits mômes et à la participation des enfants au concours prévu en 2014 L’album gagnant pour l’édition 2013 est : LUNAPARC EN PYJAMARAMA de Michaël Leblond et Frédérique Bertrand. Crée en 2006, par les Bibliothèques municipales de Genève, le Prix P’tits Mômes s’adresse à des enfants en âge préscolaire. Le prix est diffusé dans les espaces de vie enfantine et les bibliothèques de la Ville de Genève. 24 mai 2014 à 11h00 au parc des Bas‑ tions Remise officielle du Prix, en pré‑ sence des Magistrats Madame Esther Alder et Monsieur Sami Kanaan Le Prix P’tits Mômes est financé par le Fond Rapin de la Ville de Genève. Il récompense un auteur ou un illustrateur. Le jury du Prix P’tits Mômes constitué de la coordinatrice des manifestations culturelles jeunesse des Bibliothèques municipales, de trois bibliothécaires et de trois éducateurs de la petite enfance, se réunit au mois de septembre et sélectionne parmi une cinquantaine d’albums de l’année en cours, 4 ouvrages pour le Prix. Au mois d’octobre, les institutions s’inscrivent pour faire participer les enfants au Prix. Les lots de livres et le matériel de vote sont distribués au début du mois de janvier dans les institutions. Les enfants découvrent les albums et font leur choix. Les bulletins de vote doivent être retournés d’ici la fin du mois de mars aux Bibliothèques municipales. Prix P’tits Mômes est décerné dans le cadre du Festival livre et petite enfance au mois de mai, au parc des Bastions. C‘est l’occasion pour les enfants de rencontrer le lauréat. source : www.ville-geneve.ch/ CONCOURS Le prix p’tits mômes PROCHAINEMENT LIRE ALEX, le placement expliqué aux enfants Des idées d’activités proposées par les professionnels de la Fondation Officielle de la Jeunesse Présentation du livre par son auteur et table ronde sur le même sujet DÉCOUVRIR Théâtrochamp Théâtre d’enfants et d’adolescents présente Du 28 janvier au 9 février 2014 Lundi 27 janvier 2014 17h30 Virginie ou le silence n’était pas d’or Centre de formation Pont-Rouge Restaurant sur le Pont Rampe du Pont-Rouge 4 1213 Petit-Lancy - www.foj.ch Salle communale Jean-Jacques Gauthier Chêne-Bougeries T 022 349 49 82 [email protected] BOUGER SORTIR FABRIQUER La Flux school Caritas Jeunesse Atelier du Vallon offre une formation artistique pluridisciplinaire autour de l’art urbain, pour les jeunes en rupture de 16 à 25 ans! est une association genevoise qui offre des solutions ludiques pour les enfants de 4 à 18 ans durant les vacances scolaires! Fabrication de nichoirs Camps de ski en tous genres Flux School T 022 308 14 50 Rue jacques-Dalphin 10 1227 Carouge www.fluxlaboratory.com T 022 708 04 04 www.caritas-jeunesse.ch Les oiseaux de l’Allondon sont nombreux : aidons-les à passer l’hiver en toute quiétude. Au menu de cet atelier, fabrication de 5 à 10 nichoirs différents et leur installation. Pro natura T 022 311 10 10 www.pronatura.ge.ch Secrétariat général Rampe du Pont-Rouge 4 • 1213 Petit-lancy T 022 347 02 85 • F 022 346 28 87 • [email protected] • www.foj.ch
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