Initiale F N°1

L’actualité de l’éducation spécialisée décryptée
par la Fondation Officielle de la Jeunesse
Numéro 1 – Décembre 2013
Version digitale également
disponible sur l’App « Kiosque FOJ »
(distribuée sur l’App Store et Google Play)
DOSSIER
L’apprentissage
de l’autonomie :
point de la situation
MINI CHEFS
PLUS LOIN
ENTREVUES
Ma recette
préférée
Yapaka en
Belgique
L’atelier création
à La Pommière
p. 13
p. 10 et 11
p. 8 et 9
Il n’est jamais évident de quitter le cocon
familial, de voler de ses propres ailes, de
faire appel à son libre arbitre et enfin de
devenir autonome. Nous y avons tous été
confrontés un jour.
Pour les jeunes que nous accueillons à
l’Orif, c’est une tâche encore plus ardue si
l’on y ajoute des relations familiales complexes et peu soutenantes, des problèmes
physiques ou psychiques et, dans la plupart
des cas, un échec scolaire les obligeant à
prendre un chemin différent de celui des
autres.
Le point qui nous semble essentiel pour
atteindre cette autonomie est de redonner
confiance en soi au jeune et de lui faire
ressentir que l’on croit en lui, quelle que
soit l’exigence de son projet.
Cette confiance retrouvée, bien souvent
après un long cheminement, est le début
d’une future autonomie, car, de fait, le
jeune sera plus armé, conscient de manière
objective de ses forces et de ses faiblesses,
pour affronter un monde de plus en plus
exigeant.
Concrètement il convient
d’avancer par étape en fixant
des objectifs simples, à court
terme, afin de montrer au
jeune qu’il est enfin capable
de réussir. Il faut ensuite le
laisser reproduire, sans aide,
ces mêmes objectifs et ainsi de
place un objectif à long terme, posé par le
jeune lui-même, et réalisé sans assistance.
Par exemple, une mosaïque pour un carreleur ou une fresque pour un peintre en
bâtiment.
Cet apprentissage de l’autonoL’autonomie, c’est mie se fera sur plusieurs axes.
Celui du domaine professionaussi accepter un
nel, bien évidemment, mais
cadre et évoluer
aussi sur l’axe de l’autonomie
dans celui‑ci
personnelle en aidant le jeune
de manière
à se construire et développer
indépendante.
son savoir-être. Il faut également l’aider à s’organiser pour
suite.
les tâches administratives courantes.
Plus on avancera dans cette formation plus
les objectifs devront être en rapport avec la
réalité. Il pourra également être mis en
Une chose essentielle dans cette quête est
de ne pas « casser » les rêves de ces jeunes,
même si, souvent, ils savent très bien qu’ils
AU CŒUR DU SUJET
Bruno Maillet, directeur adjoint de L’Orif de Vernier, expose le travail fait
auprès des jeunes pour les préparer à l’autonomie, sujet de ce premier
numéro de Initiale F. L’Orif a pour mission l’observation, la formation
et l’intégration socioprofessionnelles des personnes atteintes dans leur
santé ou en difficulté.
2 - Initiale F – n° 1 – Décembre 2013 | Au cœur du sujet | Édito
AU CŒUR DU SUJET
seront difficilement réalisables. Il s’agira
plutôt de les amener à adapter ces rêves à
leurs compétences et possibilités. L’autonomie, c’est aussi accepter des lois, un
cadre, et évoluer dans celui-ci de manière
indépendante.
Enfin cette soif de liberté doit faire comprendre au jeune que ses décisions auront
un effet positif ou négatif sur sa vie et qu’il
est le maître de ses choix, donc qu’il est
autonome.
Bruno Maillet,
directeur adjoint
L’orif en bref
Au-delà de la formation, de l’observation ou de l’orientation, la mission
de l’Orif est l’intégration professionnelle durable du plus grande nombre
dans le premier marché du travail. La
dimension romande permet de proposer un large éventail de prestations
au plus près des besoins des mandataires et des bénéficiaires. Aide maçon,
peintre en bâtiment, paysagiste, aide
en cuisine et en restauration sont les­
cursus professionnels proposés à l’Orif.
Les publics concernés sont principalement des adultes, homme ou femme,
souffrant d’une atteinte à la santé et
ne pouvant plus être actifs dans leur
métier initial. Ainsi que des adolescents et adolescentes présentant des
déficiences motrices ou comportementales ou ayant un parcours scolaire en
école spécialisée et qui n’ont pas encore de formation professionnelle.
La cuisine du restaurant sur Le Pont au centre de formation Pont-Rouge
source : www.orif.ch
L’âge adulte, c’est à quel âge ?
ÉDITO
S’intéresser à l’apprentissage de l’autonomie, processus qui est différent
selon la situation du jeune est le sujet central de ce numéro repris par
les professionnels sous des angles différents mais complémentaires.
Le journal de la FOJ est
désormais disponible
en version numérique
sur le Kiosque FOJ,
l’application mobile
pour les publications.
Une nouvelle orientation est donnée à ce
journal au travers
d’une démarche d’ouverture et de sollicitation des divers acteurs de l’éducation spécialisée que je vous propose de découvrir
dans ce premier numéro de Initiale F sur le
thème de l’apprentissage de l’autonomie.
Les professionnels engagés dans ce travail
ont eu à cœur de nous éclairer sur leur travail
et les préoccupations des jeunes aujourd’hui.
En effet, cette question a toujours été centrale dans le monde de l’éducation. Les
éducateurs travaillent avec des jeunes afin
qu’ils puissent acquérir les compétences
suffisantes pour devenir des adultes autonomes et indépendants. Ce processus est
toujours complexe et n’est en aucun cas
linéaire. Lors d’une récente conférence au
sein de la HETS, il a même été dit que nous
devenions des adultes autonomes vers l’âge
proche de 30 ans !
Pour les jeunes des foyers, la limite des 18
ans est rédhibitoire. Le passage à l’âge
adulte des jeunes des foyers éducatifs est le
plus souvent un moment de grandes angoisses. Tout change. Les personnes de références disparaissent rapidement. Les lieux
de vie changent du tout au tout. D’un lieu
protégé, ils doivent apprendre rapidement
à gérer la solitude et l’autodétermination
dans des structures moins encadrantes.
Les équipes éducatives de la FOJ ont pris
conscience de ces étapes si rapides et si
déstabilisantes pour les jeunes qui vivent
dans les foyers éducatifs. Elles proposent
aujourd’hui un accompagnement qui renforce l’autodétermination et l’acquisition
de compétences tant du quotidien que dans
des démarches administratives. De même,
la gestion du quotidien dans les foyers pour
adolescents est vraiment déléguée aux
jeunes afin d’expérimenter dans ce contexte
une plus grande autonomie.
Ces démarches semblent être du simple bon
sens afin de leur permettre une expérimentation positive de ces différentes étapes de
l’autonomie, bien que l’âge de 18 ans est
bien jeune pour être totalement autonome.
Olivier Baud, secrétaire général
Initiale F – n° 1 – Décembre 2013 | Au cœur du sujet – 3
18 ans, et si c’était demain ?
A l’approche de la majorité, les jeunes se posent moultes questions pour
faire face aux nouvelles responsabilités qui surviennent. Préparer le jeune
à la majorité est une étape qui lui permettra de trouver les ressources
nécessaires pour rebondir durant sa vie d’adulte. Vanessa Panella Umiker
et Anaël Bluteau, éducateurs à la Villa Rigaud, géré par la FOJ, ont mis
en place des ateliers pratiques.
Cet outil, né de la demande de différents
jeunes, a pour objectif de leur apporter de
quoi agrémenter leur balluchon de futur
adulte.
En effet, grand nombre des jeunes accueillis à la Villa Rigaud n’avaient aucune
connaissance administrative sur ce qui les
attendait une fois la majorité atteinte et
certains ne savaient même pas comment
payer une facture.
Des thèmes variés
A travers les principaux thèmes de la vie
administrative tels que les diverses assurances, impôts, logement, ce dossier permet
à ces jeunes d’avoir un premier aperçu des
responsabilités auxquelles ils peuvent se
trouver confrontés une fois la majorité passée.
Un atelier mensuel est animé traitant à
chaque fois un sujet différent et planifié à
l’avance selon un programme défini. Pour
cette année scolaire 2013-2014, en vue de
répondre à l’intérêt de tous, l’idée est
d’étendre cet atelier en l’adressant à tous
les résidents de la FOJ. Certes, l’âge importe
peu, mais il est évident que cela ne sert pas
à grand-chose de s’y prendre deux ou trois
ans avant… L’expérience montre qu’il est
judicieux de débuter l’apprentissage de ces
démarches à 17 ans (ou l’année des 17 ans).
Ces ateliers se déroulent un mercredi soir
par mois, durant une heure et demie environ. Chaque participant doit avoir lu le
sujet du soir, afin d’être efficace dès le
départ.
En effet, certains sujets sont conséquents,
et les lire lors de l’atelier serait contre-productif. C’est pourquoi, le dossier papier
sera systématiquement fourni aux participants avant la première séance.
Les questions
Durant la soirée, les participants pourront
s’exprimer sur leurs incompréhensions afin
qu’elles soient éclaircies, partager leurs
connaissances et expériences. Selon les
sujets abordés, des exercices seront proposés afin de rendre plus concrets les éléments visités.
ateliers. Ces ateliers de récapitulation permettront de répondre aux questions des
jeunes gens et jeunes femmes, de revenir
sur certains sujets ou points restés incompris.
Vient qui veut
Que ceux qui ne sont pas intéressés se rassurent, l’atelier n’est pas obligatoire. Mieux
encore, les besoins de chacun pouvant
varier, les ateliers sont accessibles indépendamment les uns des autres. Autrement
dit, les résidents peuvent venir au(x)
atelier(s) qui leur(s) convient(nent) !
Par contre, pour des questions d’organisation, nous souhaitons que chacun puisse
s’inscrire en avance, afin d’être accueilli
comme il se doit et, le cas échéant, envoyer
le dossier. Un atelier sans inscrit est un atelier annulé ! De même, par respect pour
tous, nous demandons que si un participant ne devait ne plus venir, il se doit d’en
informer dès que possible les éducateurs,
et avant l’atelier, afin que nous ne l’attendions pas en vain.
Vanessa Panella Umiker, éducatrice
Six sujets sont abordés en huis mois. Cela
signifie que nous faisons un atelier récapitulatif après les « troisième » et « sixième »
Les lieux des ateliers
Les dates et thèmes des ateliers en cours
Les ateliers ont lieu de 19h à 20h30 à la salle de réunion du
bâtiment administratif du Chalet Savigny :
Chemin de la Montage 51 - 1224 Chêne-Bougeries. L’arrêt de bus
est « Montagne » pour les lignes 1 et 9 ou « Léonard Sismondi »
pour la ligne 34
• 30 octobre 2013 : Factures
• 27 novembre 2013 : Assurances maladies
• 18 décembre 2013: Assurances Ménage et RC
• 22 janvier 2014 : Atelier récapitulatif
• 26 février 2014 : Gestion d’un budget
• 26 mars 2014 : Logement
• 30 avril 2014 : Impôts
• 28 mai 2014 : Atelier récapitulatif et bilan
Tu es intéressé ? Alors pour s’inscrire il suffit d’envoyer un mail
à l’adresse suivante : [email protected] ou de téléphoner et laisser un message si besoin au : 022 869 15 07, sans
oublier de donner ton nom, prénom et adresse, pour l’envoi
du dossier et ton numéro de téléphone.
AU CŒUR DU SUJET
Nous présentions notre dossier de préparation à la majorité, outil que nous avons
créé dans le cadre de la prise en charge des
adolescents du foyer de progression qu’était
la Villa Rigaud.
4 - Initiale F – n° 1 – Décembre 2013 | Au cœur du sujet
Le passage à l’âge adulte
Point Jeunes répond aux sollicitations des jeunes âgés de 18 à 25 ans.
Rémi Marchal et Mélanie Villard, éducateurs à Point Jeunes, ont pris le
temps de répondre à nos questions pour permettre un éclairage sur les
préoccupations des jeunes aujourd’hui et le délicat passage à l’âge adulte.
Une équipe pluridisciplinaire de quarante
personnes composée d’éducateurs spécialisés, d’assistants sociaux, d’assistants administratifs et consultants en intervention
communautaire, travaillent à Point Jeunes.
Ce lieu qui existe depuis plus de trentre ans,
est géré par l’Hospice Général, et regroupe
tous les accès utiles aux jeunes adultes de 18
à 25 ans et leurs proches qui souhaitent avoir
des conseils, informations, soutien, accompagnement et suivi dans la réalisation de
leurs projets et l’acquisition d’autonomie.
AU CŒUR DU SUJET
Le concept permet aux jeunes d’avoir accès
à un centre d’information et de documentation, d’échanger et de rencontrer d’autres
jeunes, ou acteurs professionnels concernés
mais également d’avoir un suivi individuel
afin d’activer les partenariats utiles à la
réduction des difficultés identifiées. La mission de Point Jeunes se situe au niveau de
la prévention, offre une permanence d’accueil et téléphonique, met à disposition des
hébergements avec suivi éducatif et répond
aux demandes d’aide et d’information
émanant de collectivités concernées par des
problématiques liées à la jeunesse.
Mélanie Villard et Rémi Marchal, éducateurs
à Point Jeunes ont bien voulu répondre à
nos questions pour ce premier numéro de
Initiale F.
Quelles sont les principales
préoccupations des jeunes qui
viennent vous demander conseils ?
La formation, le travail, le logement, les
finances sont les principales préoccupations, mais d’autres problématiques
peuvent être importantes telles que les
relations familiales, les dépendances en
terme de consommation, de jeu. Les problèmes de santé au sens large, les problèmes d’ordre psychiques et physiques, les
problématiques interculturelles.
Comment s’articule votre
travail auprès des jeunes ?
Il y a quatre entités au sein de Point jeunes.
Un centre d’informations et de prévention
qui inclut la permanence, un lieu d’accueil
ouvert de 12h à 17h30 du lundi au vendredi.
La permanence est la porte d’entrée de
Point Jeunes. Les personnes sont reçues
sans rendez-vous et en toute confidentialité. Les jeunes et leurs proches, en demande d’aide et de conseils, viennent de
leur propre volonté, en adhésion libre. Ce
sont les éducateurs qui gèrent la permanence et nous nous décrivons volontiers
commes des généralistes «spécialistes» des
problématiques jeunes adultes, ce qui sous
entend un vaste champ d’intervention.
Il s’agit d’un travail d’information, de
conseils, d’écoute, de médiation et de
coordination avec les différents partenaires
du réseau. Suivant le besoin, on peut accompagner les jeunes sur une durée plus
longue jusqu’à ce qu’ils aient retrouvé ou
atteint une certaine autonomie.
Depuis juin 2012, une nouvelle prestation
s’est développée à Point Jeunes. Il s’agit
d’un service social composé d’assistants
sociaux qui accompagnent les jeunes
adultes dans leur projet et leur délivrent
également des prestations financières. C’est
un suivi social au sens large du terme.
Les hébergements sont composés de deux
foyers. Un foyer d’urgence de seuil assez bas,
Gabriel Sabet qui accueille huit jeunes en
rupture pour une durée de trois mois environ. Les appartements de la Servette ont
douze places. Pour y entrer, le jeune doit
avoir un revenu minimal de CHF 1200.- par
mois et doit être engagé dans un processus
de formation ou dans un processus professionnel. Il y a un certain délai d’attente
pour obtenir un logement dans ces appartements. La durée du séjour varie entre un
an et un an et demi, le temps que le jeune
soit autonome. Dans ces deux hébergements, une équipe d’éducateurs accompagne les jeunes tout au long du séjour.
L’EPIC (équipe de prévention et d’intervention communautaire) est composée d’une
équipe pluridisciplinaire qui intervient sur
Plus d’infos
Point Jeunes
Philippe Sprauel, responsable
accueil téléphonique
T 022 420 55 55
Glacis-de-Rive 12
1207 Genève
www.hospicegeneral.ch/prestations/
point-jeunes.html
Coup de pouce pour majeur
Guide de renseignements pratiques
à l’attention des jeunes adultes de
la région genevoise.
Gratuit.
Initiale F – n° 1 – Décembre 2013 | Au cœur du sujet – 5
Quels sont les outils utilisés pour aider
les jeunes à développer leur autonomie ?
Nous les informons, les aidons à faire leurs
démarches, nous sommes des personnes
ressources, nous les aidons à trouver des
solutions, à travers des outils concrets tels
que les ateliers thématiques animés par des
intervenants extérieurs spécialisés dans le
domaine. Portés sur des thèmes tels que le
logement, la recherche de formation, l’apprentissage civique, les assurances, les
types de facture, la gestion administrative.
Nous avons un espace informatique disponible gratuitement, avec accès à internet et
téléphonique gratuits dans les locaux situés
à la permanence de Point Jeunes. Les hébergements sont aussi des réponses
concrètes que nous leur proposons.
Les outils tels que l’approche centrée sur la
solution, la coresponsabilisation et la responsabilisation sont utilisés. Notons que le
jeune n’est pas uniquement le porteur de
ses responsabilités. Il s’agit de mobiliser au
sens large l’ensemble des acteurs autour
du jeune. Un travail de médiation, de soutien à la parentalité et de coaching du
jeune est engagé selon le situation.
Les outils qui impliquent le jeune et le
réseau tiennent compte de son environnement socio-affectif de manière à travailler
autour de lui dans une approche systémique voire une approche plus large. Nous
sommes aussi dans des logiques de
«confrontation bienveillante», afin de
l’amener à réfléchir à sa situation et l’aider
à prendre les bonnes décisions. Nous
sommes des ressources pour les professionnels et les partenaires locaux avec qui nous
faisons le relais. Le champ d’action est
principalement d’ordre socio-éducatif.
Vous êtes maintenant le relais prioritaire
pour l’aide aux jeunes de 18 à 25 ans,
quels sont vos partenaires privilégiés ?
Nous collaborons avec les foyers pour adolescents et le SPMi afin de préparer au
mieux le passage du jeune à la majorité.
Pour les jeunes qui vivent en foyers, la
majorité sous-entend beaucoup de changements pour eux, notamment leur lieu de
vie, leurs repères, et gérer leur budget et
leurs paperasses.
Ces collaborations sont primordiales et
déterminantes pour que cette transition soit
bien anticipée et préparée.
Nos autres partenaires sont le réseau sanitaire (unités spécialisées comme Jade et
Phénix) qui ont trait aux soins psychiques,
le réseau de formation (OFPC et toutes les
structures d’insertion professionnelle développée dans les différentes communes et
en Ville de Genève), l’OCE, les SEMO (semestre de motivation) et les résidences pour
jeunes notamment. Notre collaboration
avec les communes est importante compte
tenu que certaines ont développé plusieurs
dispositifs destinés aux jeunes en difficulté.
Mélanie Villard, éducatrice
La majorité marque la limite
entre l’adolescence et l’âge adulte,
les jeunes se sentent-ils préparés
à entrer dans ce monde-là ?
La majorité devrait être le lieu de passage
désigné entre l’adolescent et l’adulte. C’est
une vision théorique de la situation, la
réalité est toute autre. D’où l’importance
de préparer au mieux ce passage, de l’anticiper. Il y a une différence importante en
fonction des familles. Une famille issue de
l’immigration pourrait avoir plus de mal à
opérer ce passage dans les meilleures
conditions. Le milieu socio-culturel peut
jouer aussi un rôle important.
Certains jeunes sont contents de devenir
adultes mais sans mesurer la part d’obligation auxquelles ils seront confrontés.
Nous sommes là pour les amener à prendre
leurs responsabilités, les informer sur leurs
droits et leurs devoirs, et aussi les aider à
réaliser leurs projets afin qu’ils deviennent
pleinement acteurs de leur vie.
Propos restitués par Valérie Milleret
Rémi Marchal, éducateur
AU CŒUR DU SUJET
des problématiques d’ordre communautaire. Sur la base d’une demande des partenaires, l’EPIC accompagne la mise en
place de projets de prévention concernant
des problématiques vécues par des groupes
de jeunes (par exemple, problèmes de
consommation, d’incivilité, d’harcèlement
et d’intégration au sens large). Les partenaires de l’EPIC sont principalement les
acteurs en lien avec les jeunes : associations, travailleurs sociaux, communes,
enseignants, police, etc.
6 - Initiale F – n° 1 – Décembre 2013 | Au cœur du sujet
L’apprentissage de la solitude
L’apprentissage de l’autonomie passe par l’apprentissage de la solitude.
Pascal Chanton, directeur de résidences pour jeunes travailleurs, ap‑
prentis et étudiants non universitaires, apporte un éclairage intéressant
basé sur une expérience riche de moments passés aux côtés des jeunes,
et témoin privilégié de leurs doutes et de leurs interrogations.
Responsable des résidences Village-Suisse,
Le Voltaire et Pont-Rouge depuis quelques
années, il m’est souvent apparu que la gestion de la solitude pour un jeune résidant
n’est pas si facile.
C’est un apprentissage à ne pas ignorer car
il peut perturber, ou pire, mettre en danger
tous les autres apprentissages: apprendre
un métier, apprendre à gérer son budget,
apprendre ses devoirs de citoyens, etc.
Se retrouver seul dans sa chambre ou dans
son studio, malgré le fait que cette indépendance, il l’a désirée et même sublimée,
peut être source d’angoisse pour un jeune
habitué à évoluer au sein d’un groupe, que
ce soit sa famille, ses pairs ou à l’école.
AU CŒUR DU SUJET
Les propos ci-après illustrent autant de
moments de solitude subis : « Après ma
journée qui s’est bien ou mal passée. Mes
amis sont rentrés chez eux. Je dois me coucher pour être en forme demain, mais… Je
suis seul !!! Je n’arrive pas à dormir. Je vais
encore sur les réseaux sociaux, tv, internet
pour habiter le silence ou couvrir les bruits
de l’immeuble. Que vais-je faire de mes
week-end ? Etc. »
Afin d’enrichir mes propos, j’ai repris ces
quelques extraits choisis par Henri Charcosset sur le livre intitulé La psychologie de la
solitude, écrit par Gérard Macqueron qui
me semblent très intéressants :
« Et pourtant cette solitude fait partie de
notre expérience de vie. Elle est incontournable et vouloir la fuir, c’est se fuir soimême. Même si notre besoin de l’autre est
très grand, il ne peut remplir totalement
notre vie et nous apporter la sécurité que
nous recherchons. Cette sécurité, il faudra
la trouver en nous-même.
Toutes les situations désagréables, douloureuses, éprouvantes, vécues dans la solitude nous en donnent une représentation
biaisée et stigmatisée. Nous associons implicitement la solitude à ces moments de
notre vie, comme si elle était la cause de
ce ressenti négatif, alors qu’elle est la
conséquence d’une situation pénible. A
l’inverse, nous n’avons en général pas suffisamment appris à avoir des moments
bénéfiques de solitude. Nous n’avons pas
appris à être seul ».
Nietzsche l’avait souligné : « Le défaut le
plus répandu de notre type de formation et
d’éducation : personne n’apprend, personne n’aspire, personne n’enseigne… à
supporter la solitude ».
« A chaque fois que je me retrouve seul,
cela se passe mal. »
« J’ai appris beaucoup de choses, mais pas
à vivre seul. »
« Pourquoi faire les choses seul quand on
peut les partager à deux ? »
« Penser aux autres me permet de ne pas
penser à moi. »
Dès leur plus jeune âge, nos enfants sont
donc en activité permanente. Les temps
libres sont supprimés. L’oisiveté combattue.
Cela a le mérite de les stimuler.
La solitude fait peur, parce qu’elle ravive
en nous des souvenirs douloureux, mais
aussi parce que nous n’avons pas appris à
l’apprivoiser.
Chacun s’emploie à ne pas être confronté à
cette source de tant de souffrances sans
réfléchir sur la manière dont il pourrait
apprendre à mieux la vivre. Une des craintes
des parents n’est-elle pas que leur enfant
s’ennuie, qu’il n’ait, seul, rien à faire ?
Mais si tel est l’objectif, diminuer le temps
libre de l’enfant augmente-t-il réellement
ses performances ? Sera-t-il pour autant
plus tard un adulte plus éveillé, plus cultivé, plus épanoui ? Et quid de la capacité de
penser, du potentiel créatif, des désirs profonds de l’enfant ?
Initiale F – n° 1 – Décembre 2013 | Au cœur du sujet | Meilleures pages – 7
Dans ce programme chargé, qui s’intéresse A nous, parents et éducateurs, d’accepter
véritablement à ce qu’il ressent, éprouve, de les voir parfois s’ennuyer, perdre du
vit intérieurement ? Qui apprend aux en- temps afin que naissent les désirs, que se
fants à comprendre leurs
développent la créativité et
Les situations
émotions, à identifier leurs
le rêve. désagréables,
besoins profonds, à verbadouloureuses,
liser leur ressenti ? Plus tard,
L’ennui permet une retraite
éprouvantes, vécues
adultes, comment poursur soi, un temps propice à
ront-ils rester seuls s’ils ne
la réflexion pour permettre
dans la solitude nous
l’ont jamais expérimenté
une projection dans un
en donnent une
auparavant ?
Sauront-ils
avenir qui se dessine parreprésentation biaisée
gérer ce face-à-face avec
fois sous des courbes anet stigmatisée.
eux-mêmes sans angoisse ?
guleuses mais où cette
parenthèse vouée à la soliPourtant, c’est la solitude, et pas l’accu- tude permet à la personne de résoudre
mulation des activités ou des apprentis- d’éventuelles interrogations.
sages, qui permet d’avoir une meilleure
connaissance de soi, une conscience de soi Je pense que ces propos doivent toujours
plus juste, élément indispensable à notre être présents lors de nos réflexions sur notre
épanouissement personnel. Parce que nous pratique professionnelle qu’est la prise en
n’avons pas appris à apprécier la solitude, charge des jeunes ! demeure en nous l’angoisse d’une solitude
amère, et tous les moyens sont bons pour
Pascal Chanton,
y échapper. C’est dès l’enfance que nous
directeur des résidences
devrions éduquer nos enfants à supporter
et aimer la solitude.
Les adonaissants
La construction de l’autonomie correspond
à l’aspiration et aux ressources que se donne
l’individu pour agrandir un monde à soi.
Comment construit-on ? Comment agranditon un monde à soi ?
Plusieurs ouvrages ont paru sur l’adolescence
avec des points de vue assez différents. L’ouvrage de François de Singly sur les Adonaissants présente, dans la veine de précédents
travaux de l’auteur, une lecture identitaire
de cet âge de la vie, dont le thème central
est l’oscillation, non conflictuelle, des adolescents entre l’identité liée à la famille et
celle liée au groupe des pairs. Sa vision est
finalement relativement optimiste. Le livre
repose sur une série d’enquêtes qualitatives
et quantitatives auprès des adolescents ou
pré-adolescents eux-mêmes âgés de 11 à 13
ans. La thèse centrale du livre est que la pré-
cocité croissante de l’accès à une forme
d’autonomie des adolescents, dès les années
de collège, crée un nouvel espace identitaire
que l’auteur définit comme un « moment de
non coïncidence entre le nous familial et le
nous générationnel ». Ce moment, constitué
d’une autonomie sans indépendance (économique), conduit l’adolescent, selon François de Singly, à osciller entre deux identités,
celle qui est liée à sa famille et celle qui est
liée à son groupe des pairs, c’est le thème
central du livre. L’auteur n’interprète pas
cependant cette dualité comme un moment
de confrontation entre les générations. Il
conteste l’idée qu’il « n’y ait plus de règles
à la maison » et il fournit des exemples montrant que ces règles continuent de s’appliquer, dans le domaine des horaires, des
sorties, du travail scolaire par exemple. Il
n’entre pas vraiment dans l’examen de la
question du degré auquel ces règles, énoncées, s’appliquent effectivement. En effet la
dualité adolescente dont parle l’auteur peut
avoir pour conséquence que les règles édictées à la maison ne s’appliquent pas forcément à l’extérieur du domicile familial, là où
les adolescents sont, de plus en plus fréquemment, hors du contrôle des parents.
Cette dualité de l’univers adolescent peut,
au point extrême, construire des jeunes à
double face, dans certaines cités par exemple
où la socialisation par le groupe des pairs
vient concurrencer et dans une large mesure
supplanter la socialisation familiale. Il peut
arriver alors que les jeunes maintiennent
simplement les apparences de l’obéissance
et du conformisme.
Laetitia Buchet,
éducatrice
MEILLEURES PAGES
François de Singly, sociologue, vient de publier une récente étude sur
ceux qu’il appelle les « adonaissants ». Une lecture recommandée par
Laetitia Buchet, éducatrice.
8 - Initiale F – n° 1 – Décembre 2013 | Entrevues
La création
L’atelier création au foyer La Pommière s’inscrit
dans un contexte de changements. Vincent
Châtelain, éducateur, revient sur le concept de
cet espace en exposant la spécificité du foyer
La Pommière et laisse la parole aux jeunes et à
ses collègues.
Le travail de la céramique développé au sein de l’atelier de création
ENTREVUES
L’espace de création au foyer la Pommière
s’inscrit aujourd’hui dans un contexte de
changements. En effet, le travail éducatif
au foyer met de plus en plus l’accent sur un
accompagnement individualisé, centré sur
les ressources, les besoins et les rythmes de
chaque jeune.
Marinette Milliet et Vincent Châtelain les
éducateurs garants de l’atelier création proposé aux jeunes de la Pommière à raison
d’une soirée par semaine, s’expriment dans
cet article sur le sens et les effets de cet
espace créatif. Ils présentent cet espace de
création au travers de mots et d’idées présentés spontanément et illustrant « pelle
mêle » ce qui se passe, se dit, se ressent ou
s’observe aujourd’hui dans ce lieu.
L’espace, qu’est-ce-qui s’y vit, qu’est-cequi se passe, qu’est-ce-qui se voit ? c’est
un lieu d’énergie qui offre la possibilité aux
jeunes de :
• Profiter du support créatif comme outil
de médiation.
• Venir rendre visite sans obligation.
• S’y investir pleinement ou non.
• Réviser ses devoirs.
•Oser.
• Prendre une place.
• Ne pas venir du tout.
• Venir manger du cake et boire un thé.
• Parfois sortir des murs (Atelier d’artiste,
galeries, marché de Noël de Chêne-Bourg)
• Faire des demandes.
•Râler.
• Etre en contact avec l’estime de soi.
• Exposer, rendre visible et parfois vendre
ses créations.
• Expliquer la démarche, la technique,
l’intention à d’autres.
• Etre en retard.
• Etre lent.
• Venir nourrir la dynamique du présent,
que les jeunes filles soient seules ou
à plusieurs.
L’espace atelier est un lieu en mouvance et
en réflexion. Cela questionne aujourd’hui sur :
• Son sens.
• La place du groupe ; de l’individu.
• Ce qu’il permet d’être et de faire.
• Le(s) lien(s) qui y émerge(nt) ou pas.
• Le regard extérieur porté sur le travail
abouti.
• La motivation des jeunes ; de l’équipe.
• L’engagement des jeunes.
• L’offre et son rythme dans le temps.
• L’implication de l’engagement d’un
projet extérieur.
• La place à la solidarité ; à l’entraide.
• Les projets réalisés en groupe ou seule.
• L’espace donné aux propositions
des jeunes et à leurs envies.
• La possibilité de nommer cet
« espace atelier » différemment.
Quelques questions posées par Johanie
Spady, stagiaire, aux jeunes de la
Pommière sur l’atelier création, son
contexte, ses effets et ses changements.
Johanie : Pour toi, à quoi
ça sert un atelier création ?
Rim : Franchement pour moi à rien, mais
pour d’autres ça peut être cool. Si elles
aiment bien l’art, le fait de créer quelque
chose peut leur apporter de la satisfaction.
Initiale F – n° 1 – Décembre 2013 | Entrevues – 9
Johanie : Qu’est-ce que
tu attends de l’atelier ?
Rim : Le fait d’être en groupe me plait assez.
Noura : Je découvre car c’est la première fois
que j’ai l’occasion de faire ce genre de création.
Johanie : Est-ce que tu penses que tu
investirais différemment l’atelier avec
d’autres adultes, d’autres jeunes, des
personnes extérieures au foyer ?
Rim : Cela dépendrait surtout des objets
proposés à la confection. Côtoyer différentes
personnes ne me poserait pas de problème.
C’est plus une question de compétence.
Noura : Je ne suis pas sûre que je participerai à l’atelier de la même manière s’il
devait y avoir d’autres éducateurs.
Je préfère que les éducateurs restent les
mêmes, mais les jeunes peuvent changer;
cela ne me dérange pas.
Le point de vue de deux de nos collègues.
Johanie : Comment l’atelier création
s’inscrit dans le contexte actuel de
­changement ?
Nordine : Le mot atelier fait référence à un
atelier de travail, alors que le terme activité laisse présager la notion de loisir, de
plaisir. L’atelier création n’est plus obligatoire, et laisse la liberté aux jeunes de participer et de s’investir de leur plein gré, ce
qui rend ce temps plus convivial, sans tension ni besoin de recadrer. Cette activité
n’est pas un lieu de production, mais plutôt un espace de partage et d’échange. Cet
espace favorise le lien et une ouverture, en
sortant du cadre, des formalités et du face
à face lors d’entretiens formels dans un
bureau. Globalement, les filles sont plus
apaisées, plus en lien. En effet, le fait de
laisser le choix aux jeunes en continuant à
leur proposer des activités tel que « l’atelier » création, leur offre des espaces d’expression ouverts. Chacune est libre d’en
bénéficier et donc, d’en jouir pleinement.
En effet, on ne peut pas forcer quelqu’un
à s’exprimer, il doit nécessairement se sentir libre pour le faire. Avant, les éducateurs
devaient porter la charge de cette activité
en faisant participer les jeunes sans qu’elles
puissent trouver le sens à leur participation.
Aujourd’hui, elles même choisissent d’être
présentes sans pour autant y participer
activement. Elles y trouvent certainement
des bénéfices dans le lien et les échanges
largement favorisés par le cadre chaleureux
et la disponibilité des éducateurs.
En conclusion, cet état d’esprit autour de
l’activité créatrice, illustre bien la dynamique et la volonté de changement portées par l’équipe
Sans que les jeunes
en privilégiant la singularité,
s’en rendent
les ressources et le rythme de
compte, l’atelier a
chaque jeune.
un impact positif
sur l’estime
Isabelle : Pour moi, c’est un
d’elles-mêmes.
bol d’air frais que les filles
peuvent prendre. Je vois bien
qu’elles peuvent en retirer quelque chose.
Le fait de descendre dans l’espace atelier
est intéressant. Avoir une pièce réservée à
la création amène et ajoute un effet de
parenthèse. Cela est certainement un plus
dans le fait que les filles adhèrent à l’atelier.
Sans qu’elles s’en rendent compte cela a un
impact positif sur elles (meilleure estime
d’elles-mêmes) qui leur fait du bien.
Propos restitués par Johanie Spady
L’atelier céramique
ENTREVUES
Noura : J’aime créer et faire des choses avec
mes mains. J’apprends beaucoup de techniques de création.
10 - Initiale F – n° 1 –Décembre 2013 | Plus loin
Yapaka
Lorsqu’un événement violent ou accidentel surgit dans une institution,
c’est tout un système qui en est impacté. Faire face à cet événement
devient, dès lors, une nécessité. Qu’il s’agisse des bénéficiaires, des
personnes qui y travaillent ou de l’institution elle-même, chacun sera
amené à s’ajuster pour qu’un nouvel équilibre advienne et que la vie
puisse reprendre son cours.
La crise vient révéler les failles de tout système. Ceci peut rendre inutilisable les ressources en présence.
Les repères pour penser la crise et ses effets
pour que chacun, à son niveau, puisse
inventer une façon de réagir la plus respectueuse de ses propres besoins et de ceux
d’autrui. Lorsque un événement surgit, la
perturbation et la rupture d’équilibre sont
présentes aussi bien pour l’institution que
pour les individus qui la composent.
PLUS LOIN
Cela se traduit par toute une série de phénomènes avec lesquels il faudra composer.
Tout d’abord, toute situation de crise entraîne une avalanche de difficultés. Au
départ, le système se trouve submergé et
ne peut résoudre ses problèmes selon les
règles d’organisation et de fonctionnement
habituelles. Cette situation peut entraîner
elle-même un dysfonctionnement et un
emballement du système. Le dysfonctionnement est accompagné par un accroissement des difficultés, des incertitudes et donc
de l’angoisse. Le choc se vit de plusieurs
manières, tout d’abord en fonction de la
proximité physique avec l’événement mais
aussi en regard des liens d’attachement et
de la proximité relationnelle avec les personnes qui y sont impliquées directement.
Dans tout événement traumatique, la menace est en fait une menace de mort. Le
bouleversement psychique que suscite cette
rencontre avec la mort vient remettre en
cause les croyances et le sentiment de sécurité des impliqués qui, en temps normal,
constituent un système intégré de défense
stabilisant et protégeant les personnes au
quotidien.
L’expérience humaine à ce moment est bien
celle du choc et de la rupture. La personne
qui l’éprouve peut y réagir de différentes
façons.
Rencontrer les besoins
Dans les premiers temps de la crise, un des
enjeux principaux consiste à rencontrer les
besoins des personnes impliquées dans
l’événement. Il importe donc, dans un
premier temps, d’identifier les personnes
qui partagent ces besoins et de les
­rassembler dans ce que nous appelons des
« groupes cibles ».
Nous pouvons en considérer deux principaux. Tout d’abord, il existe le groupe des
impliqués directs. Ce sont ceux qui ont
vécu l’événement ou en ont été les témoins.
Ensuite, il y a le groupe des impliqués indirects. Il est formé par les personnes qui
n’ont pas vécu l’événement directement
mais qui sont impliquées de par leur proximité affective avec les membres du premier
Initiale F – n° 1 – Décembre 2013 | plus loin – 11
En effet, l’événement traumatique propage
ses ondes de chocs à la façon d’une pierre
que l’on jette à l’eau. Plus on se situe près
du centre de l’impact, plus on en ressent
les effets.
Les principaux besoins qui se manifestent
en situation de crise sont au nombre de
cinq. Il s’agit des besoins primaires, de
sécurité, d’information, de reconnaissance
et d’appartenance. Ils sont toujours présents mais leurs intensités diffèrent selon
le temps dans lequel les impliqués se
trouvent, le contexte particulier de l’événement et la distance (géographique et
relationnelle) qui les éloignent du « point
d’impact ». D’une façon générale, les besoins primaires, de sécurité et d’information seront plus prégnants dans la phase
de choc ou d’urgence.
Les besoins de reconnaissance et d’appartenance, bien que présents dès le début,
pourront continuer à se faire entendre bien
longtemps après l’impact de l’événement.
Tous ces besoins sont étroitement liés les
uns aux autres. Aller à la rencontre de l’un
permet souvent de rencontrer les suivants.
L’institution impactée
De manière globale, un événement critique
viendra bousculer le système dans son entièreté. En effet, une institution constitue bien
un système où viennent se rejoindre ces deux
sphères individuelles et collectives avec pour
objectif de les articuler autour d’un projet
commun. L’institution est donc par essence
un lieu d’échanges entre les différentes parties qui la composent C’est en cela qu’elle se
distingue de « l’établissement ».
L’institution se construit ou se déconstruit
au-delà de l’établi, à partir de l’intervention de tous ses membres et donc, y compris
des bénéficiaires des services qui s’y
trouvent engagés. Face à l’événement traumatique, nous allons voir que tout le défi
de l’institution consiste à maintenir cette
fonction d’échange (et donc aussi de parole), c’est-à-dire de rester (ou de saisir
l’opportunité de le devenir) une institution,
là où elle pourrait être tentée de se réfugier
dans de l’établissement, c’est-à-dire du
déshumanisant!
Et les tentations pour ce faire sont nombreuses. En effet, nos institutions sont de
leur époque, c’est-à-dire d’un temps où
l’individualisme et la recherche de performances se posent en maîtres et tentent
d’imposer une conception de la santé tout
aussi individuelle.
Penser les effets de l’événement critique de
façon globale nous invite à considérer, non
seulement les individus, mais également
les différents groupes qui composent l’institution et les organismes auxquels ils se
réfèrent. Prendre conscience de la crise et
la considérer dans tous ses aspects permettront d’éviter un blocage. La menace qui
plane sur l’institution est néanmoins mobilisatrice de moyens d’action.
L’enjeu de la gestion de la crise consiste à
favoriser la mise en œuvre de ceux-ci et de
les compléter, si nécessaire, par des ressources externes :
• Gérer la crise au niveau institutionnel.
• Anticiper les risques, prendre
des ­mesures préventives et préparer
un ­dispositif de réponse.
• Repérer les premiers signes de la crise.
• La reconnaître lorsqu’elle est là.
• Faire un premier bilan : gravité,
­urgence, enjeux.
• Identifier les groupes affectés et
leurs besoins anticipés et observés.
Plus d’infos
Yapaka
est un programme de prévention de la
maltraitance à l’initiative du Ministère
de la Fédération Wallonie-Bruxelles de
Belgique. Éviter la maltraitance… Oui,
mais comment ? Nous aimerions tant
quelques idées fortes, un mode
d’emploi, un guide pour savoir comment procéder. Mais tout comme il
n’y a pas de recette miracle pour être
parent parfait, il n’y a pas de réponse
préfabriquée pour éviter la maltraitance. A chacun de se débrouiller...
Mais cette débrouille peut s’avérer
galère, détresse et solitude ou au
contraire créativité pour autant que
l’on trouve appui et solidarité : le
coup de pouce d’un ami, d’un voisin,
d’un proche, l’aide d’un professionnel... yapaka tente de lancer des
pistes.
• Faire un relevé des ressources
­disponibles.
• Mobiliser les ressources complémentaires
• Prendre les décisions permettant
de faire correspondre les besoins
et les ressources
• Activer l’aide et en suivre les effets.
Ces balises sont, en fait, des principes généraux qui sont applicables par l’institution
et les personnes, quelques soient la situation ou le moment. Il y a tellement de différences selon les contextes, les types
d’institution et les caractéristiques de l’événement, que nous ne pouvions être exhaustifs. Un livre de « recettes » aurait été tout à
fait inutile car inapplicable.
Par contre, suivre des principes permet à
chaque institution de créer son propre
« plat » avec ses propres épices et en comptant sur ses propres ressources du moment.
L’important étant qu’au bout du processus,
les impliqués aient vu leurs besoins rencontrés et que l’institution puisse trouver
un nouvel équilibre.
source :
www.yapaka.be/livre/­­evenementtraumatique-en-institution
PLUS LOIN
groupe. Bien entendu, ce groupe peut par
ricochet, être élargi encore.
12 - Initiale F – n° 1 – Décembre 2013 | Tribune libre
Réflexions légères
Poète à ses heures, Nicole Hideg, éducateur, aime nous faire partager ses
réflexions sur le lacher prise pour vivre et laisser vivre.
Lors de nos réunions en vue de l’élaboration
de ce numéro, apparaient immanquablement dans la discussion et à juste titre
d’ailleurs, le besoin d’intéresser le lectorat,
de rendre notre publication piquante, de
suciter une vocation chez le lecteur ou la
lectrice… du léger, du rire, du court mais
pas trop, de l’intérêt, de l’émotion, de
l’éducatif, et pourquoi pas de l’écologique… du simple quoi !
• En Suisse.
• Où est la Suisse ?
• En Europe (enfin presque,
oui et non, je me perds).
• Où est l’Europe ?
• Sur la terre, c’est une zone de celle-ci.
• Où se trouve la terre ?
• Dans l’univers, à peu près sur une des
branches de la galaxie. Où se trouve
l’Univers ? Euh…
Je commencerai par vous résumer la discussion inspirée du livre le guerrier pacifique écrit par Dan Millman. Le professeur
(l’éducateur, pourquoi pas) pose cette
question assez élémentaire a priori :
Je n’ose m’aventurer sur le chemin de cette
autre question qui en a usé plus d’un :
Qui sommes-nous ?
• Où es-tu aujourd’hui en ce moment ?
• Eh bien ici avec toi.
• Où ici ?
•Genève.
• Où est Genève ?
s’en servir pour vivre ce fameux lâcher
prise ! Je ne saurai jamais alors pourquoi
m’en angoisser, observer un nuage se former, se déformer se reformer quel régal !
Cesser par moment de vouloir comprendre
l’autre, de lui dire ce qu’il devrait faire,
d’analyser faits et gestes pour ensuite prévoir l’imprévisible me fait du bien.
Arrêter de me sentir coupable de ne pas
arriver à rendre l’autre l’heureux, responsable de sa vie, de le changer pour qu’il
corresponde à mes attentes !
Vivre et laisser vivre...quel défi permanent !
Cette déroutante incertitude me rappelle
que nous ne savons que peu de choses…
Et bien tant mieux !
Au lieu de s’en angoisser et de vouloir à
tout prix tout savoir, décortiquer jusqu’à
l’extrême pourquoi ne pas s’en satisfaire et
Vivre l’instant présent, laisser la raison du
cœur être, permettre à notre essence de
s’exprimer voilà ce que je nous souhaite à
tous pour cette nouvelle année.
Nicolas Hideg, éducateur
Réflexions tout court
TRIBUNE LIBRE
Pas de journal sans tribune libre, et pas de tribune libre sans expression
libre. Force est de constater que cette rubrique a su résister au temps.
Lecteur assidu des sujets qui sont proposés
dans cette rubrique qui a su résister au
temps et à la refonte du journal de la FOJ,
je souhaiterais rebondir sur ce que Nicolas
Hideg, poète et éducateur, a relaté plus
haut.
Vivre et laisser vivre, ces belles paroles nous
laissent rêveurs et circonspects. Il est si
facile de se les approprier mais en vérité,
de quoi s’agit-il ? Les vastes possibilités
d’appréciation personnelle permettent
mille explications de texte.
Laisser à l’autre le soin de prendre sa place,
de se tromper, de faire des erreurs, de ne
pas juger, de ne pas se juger, mais rester
dans cet espace où chacun peut trouver sa
place.
La mission première de la FOJ est dévolue
à la cause de la jeunesse en difficulté au
sens large. Le personnel éducatif qui y travaille a acquis un savoir-faire et un savoirêtre propres au travail social.
Les réflexions légères de Nicolas me
poussent à croire que la légèreté dans le
milieu où il évolue est une ressource à apprivoiser.
Ce principe s’applique à toute personne
hors du champs social puisque qu’aujourd’hui, ce merveilleux bol d’air frais
permet de passer des moments délestés de
tant de médiocrité pour voir l’autre tel qu’il
est et non tel que l’on voudrait qu’il soit.
La sagesse, diront certains. Vivons l’instant
présent avec ce profond sentiment de profiter pleinement des êtres qui nous entourent.
En cette fin d’année 2013 qui est passée
comme un éclair, je vous souhaite mes
meilleurs voeux de légèreté pour l’année à
venir.
Un auteur anonyme
Initiale F – n° 1 – Décembre 2013 | Mini chefs | Dans mes bulles – 13
Fondant au chocolat
Recette facile de Gérard Duret,
façonnée par Ismaël, 7 ans
MINI CHEFS
Ingrédients :
• 250 g de chocolat
• 200 g de beurre
• 100 g de farine
• 200 g de sucre
• 8 œufs
• 1 sachet de poudre à lever
• Fondre le chocolat et le beurre
Mélanger au fouet le sucre, la farine et la levure, les verser
dans le chocolat et le beurre fondu, bien mélanger au fouet
en ajoutant les œufs, beurrer et fariner les moules, remplir
au 2/3 et cuire au four th. 180°
Cuisson :
dans un moule à gâteau, 30 min. = biscuit
dans un moule à tarte, 12-15 min. = mœlleux
dans un moule à ramequin, 8 min. = fondant
Lucas, 13 ans, adore dessiner. Il s’est prêté
une fois encore à une représentation
humoristique d’une tranche de vie.
“Les gens qui disent que leurs
dessins ne sont pas beaux, ils
doivent juste avoir de la patience.”
Lucas, 13 ans
DANS MES BULLES
Ismaël, 7 ans et Gérard Duret, cuisinier aux foyers de Gilly
14 - Initiale F – n° 1 – Décembre 2013 | Positive attitude | Bon plan
POSITIVE ATTITUDE
La permanence juridique
des étudiants gratuite
et sans rendez-vous
La maison de quartier de la Jonction accueille dans
son local la permanence juridique des étudiants (PJE).
Notre association regroupe des étudiants en droit qui
proposent leurs services à titre gracieux. Ils prodiguent
à toute personne qui les consulte des conseils juridiques
gratuits dans la mesure de leurs compétences ou,
à défaut, les orientent vers d’autres organismes
qui pourraient leur venir en aide.
↘
Rue du Village-Suisse 3
1205 Genève
[email protected]
076 632 52 26
Mardi de 14h à 16h
Jeudi de 16h à 20h
(numéro accessible uniquement
lors des heures d’ouverture)
i
Balade au bord de l’Aire
Tout près des foyers de la FOJ situés sur le domaine des Ormeaux, une
promenade au bord de l’Aire vous fera découvrir de merveilleux sentiers.
A pieds ou à vélo, il est si facile de s’aventurer sur ces chemins d’écoliers.
BON PLAN
Circuit pédestre :
▶ Grand-Lancy ▶ Pont Rouge
▶ Chemin des Verjus
Traverser la route du Grand-Lancy pour
rejoindre l’Aire en suivant le chemin du
Gué. Partir du joli petit jardin public, situé
à côté de la salle communale. Suivre la rive
droite de l’Aire, passer en dessous de la
villa Bernasconi, traverser une passerelle
façon Vermont, puis arriver au Pont Rouge
où la rivière disparaît, absorbée par les
dalles de béton.
A cet endroit, le contraste est saisissant
entre la zone industrielle de la Praille et le
charme bucolique de la rivière. Faire demi
tour en changeant de rive ou de sentier,
passer le pont du Gué, poursuivre en passant sous le viaduc, puis sous la route du
Grand-Lancy, pour arriver à la jonction avec
le nant du Voiret, suivre celui-ci pour déboucher sur le chemin du Verjus. Compter
une petite heure de flânerie.
Initiale F – n° 1 –Décembre 2013 | restez connectés | concours – 15
Le blog de 100drine
100drine (Sandrine), personnage de fiction, tient son blog depuis novembre 2005.
Ce blog permet de poursuivre l’aventure
d’Hubert, un ado comme les autres,
confronté aux problèmes de son âge et
d’ouvrir un espace d’échange. Via Internet
et par les blogs en particulier, des millions
d’ados du monde entier livrent leurs états
d’âme, partagent leurs questions, leurs
peurs, leurs fou-rires, s’échangent des
infos,… un peu à la manière d’un journal
intime des temps modernes. Ils maîtrisent
techniquement et manipulent quotidiennement ce média: un adolescent sur deux
a son propre blog. Ce coin de toile, le blog
de 100drine vient donc s’inscrire dans cette
communauté virtuelle.
Pour se différencier dans cette masse et
garder son objectif de projet de prévention primaire, il s’impose dans un ton,
une forme d’écriture différente: la fiction.
RESTEZ CONNECTÉS
Ce blog est un des éléments d’un programme de prévention adressé aux ados et
à leurs parents.
Cette option permet de jouer sur les
mêmes ressorts identificatoires que le
livre tout en mettant en avant un espace
via lequel chacun peut réagir. En effet,
ce blog fait le pari d’ouvrir un espace
d’écriture participative, il s’agit d’un
blog à plusieurs mains dans lequel
chacun peut venir à son tour déposer
son petit grain de sel, prendre la
plume, envoyer des photos, des dessins.
Le blog :
www.100drine.be
Infos
Encourager la lecture chez les tout-petits grâce au prix p’tits mômes
et à la participation des enfants au concours prévu en 2014
L’album gagnant pour l’édition 2013 est :
LUNAPARC EN PYJAMARAMA de Michaël
Leblond et Frédérique Bertrand.
Crée en 2006, par les Bibliothèques municipales de Genève, le Prix P’tits Mômes
s’adresse à des enfants en âge préscolaire.
Le prix est diffusé dans les espaces de vie
enfantine et les bibliothèques de la Ville
de Genève.
24 mai 2014 à 11h00 au parc des Bas‑
tions Remise officielle du Prix, en pré‑
sence des Magistrats Madame Esther
Alder et Monsieur Sami Kanaan
Le Prix P’tits Mômes est financé par le Fond
Rapin de la Ville de Genève. Il récompense
un auteur ou un illustrateur.
Le jury du Prix P’tits Mômes constitué de
la coordinatrice des manifestations culturelles jeunesse des Bibliothèques municipales, de trois bibliothécaires et de trois
éducateurs de la petite enfance, se réunit
au mois de septembre et sélectionne parmi une cinquantaine d’albums de l’année
en cours, 4 ouvrages pour le Prix.
Au mois d’octobre, les institutions s’inscrivent pour faire participer les enfants au
Prix. Les lots de livres et le matériel de vote
sont distribués au début du mois de janvier
dans les institutions. Les enfants découvrent les albums et font leur choix. Les
bulletins de vote doivent être retournés
d’ici la fin du mois de mars aux Bibliothèques municipales.
Prix P’tits Mômes est décerné dans le cadre
du Festival livre et petite enfance au mois
de mai, au parc des Bastions. C‘est l’occasion
pour les enfants de rencontrer le lauréat.
source :
www.ville-geneve.ch/
CONCOURS
Le prix p’tits mômes
PROCHAINEMENT
LIRE
ALEX,
le placement expliqué
aux enfants
Des idées d’activités proposées par
les professionnels de la Fondation
Officielle de la Jeunesse
Présentation du livre par son
auteur et table ronde sur le
même sujet
DÉCOUVRIR
Théâtrochamp
Théâtre d’enfants
et d’adolescents présente
Du 28 janvier
au 9 février 2014
Lundi 27 janvier 2014
17h30
Virginie ou le silence
n’était pas d’or
Centre de formation
Pont-Rouge
Restaurant sur le Pont
Rampe du Pont-Rouge 4
1213 Petit-Lancy - www.foj.ch
Salle communale
Jean-Jacques Gauthier
Chêne-Bougeries
T 022 349 49 82
[email protected]
BOUGER
SORTIR
FABRIQUER
La Flux school
Caritas Jeunesse
Atelier du Vallon
offre une formation
artistique pluridisciplinaire
autour de l’art urbain, pour
les jeunes en rupture de 16 à
25 ans!
est une association
genevoise qui offre des
solutions ludiques pour les
enfants de 4 à 18 ans durant
les vacances scolaires!
Fabrication de nichoirs
Camps de ski en tous genres
Flux School
T 022 308 14 50
Rue jacques-Dalphin 10
1227 Carouge
www.fluxlaboratory.com
T 022 708 04 04
www.caritas-jeunesse.ch
Les oiseaux de l’Allondon
sont nombreux : aidons-les
à passer l’hiver en toute
quiétude. Au menu de cet
atelier, fabrication de 5 à
10 nichoirs différents et leur
installation.
Pro natura
T 022 311 10 10
www.pronatura.ge.ch
Secrétariat général
Rampe du Pont-Rouge 4 • 1213 Petit-lancy
T 022 347 02 85 • F 022 346 28 87 • [email protected] • www.foj.ch