Sujet n° 34 DROIT PENAL DES MINEURS

Demi-journée "Marathon" de formation continue
8 novembre 2014
Sujet n° 34
DROIT PENAL DES MINEURS
(Olivier BOILLAT, Juge au Tribunal des mineurs)
Législation
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a) Adoptées et entrées en vigueur
•
Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950
(CEDH ; RS 0.101).
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Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants du 10
décembre 1984 (RS 0.105).
•
Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou
dégradants du 26 novembre 1987 (RS 0.106).
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•
Convention relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989 (RS 0.107).
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•
Règlement sur la surveillance des mineurs du 25 mai 1945 (RSM ; J 6 20.04).
•
Règlement sur l'assistance juridique et l'indemnisation des conseils juridiques et défenseurs d'office en
matière civile, administrative et pénale du 28 juillet 2010 (RAJ ; E 2 05.04).
•
•
Loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ ; E 2 05).
Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP ; RS 311.0).
Loi fédérale régissant la condition pénale des mineurs du 20 juin 2003 (DPMin ; RS 311.1).
Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (CPP ; 312.0).
Loi fédérale sur la procédure pénale applicable aux mineurs du 20 mars 2009 (PPMin ; RS 312.1).
Concordat sur l'exécution de la détention pénale des personnes mineurs des cantons romands (et
partiellement du Tessin) du 24 mars 2005 (CEDPM ; E 4 58).
Loi sur l'office de la jeunesse du 28 juin 1958 (LOJeun ; J 6 05).
Loi pénale genevoise du 17 novembre 2006 (LPG ; E 4 05).
Loi d'application du code pénal suisse et d'autres lois fédérales en matière pénale du 27 août 2009
(LaCP ; E 4 10).
Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale du 22 décembre 2010 (RTFMP ; E 4 10.03).
b) Projets
•
Modification de l'article 1 alinéa 2 lettre j DPMin relatif à l'imprescriptibilité: pas de renvoi au CP pour
l'imprescriptibilité des actes d'ordre sexuel ou pornographique commis sur des enfants impubères
(http://www.admin.ch/opc/fr/official-compilation/2012/5951.pdf).
•
Nouveaux articles 16a et 19 alinéa 4 DPMin relatifs à l'interdiction d'exercer une activité, l'interdiction de
contact et l'interdiction géographique (http://www.admin.ch/opc/fr/official-compilation/2014/2055.pdf).
"Marathon"
Samedi 8 novembre 2014
Jurisprudence________ _____________________________________
a) Jurisprudence fédérale (31.08.2012-31.08.2014)
1.
ATF 139 IV 48 du 22 octobre 2012 (français)
http://jumpcgi.bger.ch/cgi-bin/JumpCGI?id=BGE_139_IV_48
Recours contre un arrêt de la Cour de Justice de Genève, confirmant la compétence du Tribunal
des mineurs pour ordonner une mise en détention pour motifs de sureté, lorsque l'accusation est
engagée devant lui. Rejeté.
Le Tribunal Fédéral confirme qu'en vertu des articles 26 al. 3 et 34 al. 5 PPMin, lorsque
l'accusation est engagée devant le tribunal des mineurs, c'est ce dernier, et non le tribunal des
mesures de contrainte (TMC) qui est compétent pour statuer sur la détention pour des motifs de
sûreté. Le Tribunal Fédéral rappelle que les avantages liés à l'intervention d'une juridiction
spécialisée telle que le tribunal des mineurs sont toujours d'actualité. A cet égard, il est rappelé
que selon l'article 27 alinéa 1 PPMin, la détention doit demeurer exceptionnelle, les travaux
législatifs relatifs à cette disposition soulignant que l'autorité doit se livrer à un examen particulier
de toutes les mesures de substitution envisageables, "même les plus originales permettant
d'éviter à un mineur de se retrouver en milieu pénitentiaire" (FF 2006 1351 ad. art. 30). Au vu de
ces éléments, le Tribunal Fédéral souligne que l'intervention d'une juridiction spécialisée est
manifestement mieux à même d'assurer l'application du principe du "droit ajusté à l'auteur" tel
qu'il a été voulu par le législateur (csd. 2). L'examen de la détention par le juge du fond est
admissible en procédure pénale des mineurs. A ce propos, le Tribunal Fédéral rappelle que le
prévenu dispose d'un droit de récuser le Juge des mineurs sans avoir à motiver sa demande et
que dès lors, si le législateur n'a pas voulu systématiquement sanctionner la participation aux
débats du juge qui a instruit la cause, cela est vrai à plus forte raison pour celui qui a statué sur la
détention. Au vu de ces éléments, le Tribunal Fédéral considère que l'argument tiré de
l'impartialité du juge doit être écarté (csd. 3). Le Tribunal rappelle ensuite que le recours est
ouvert auprès du TMC, puis de l'autorité de recours, conformément à l'article 39 al. 3 PPMin (csd.
4).
2.
ATF 6B_330/2012 du 14 janvier 2013 (allemand)
http://jumpcgi.bger.ch/cgi-bin/JumpCGI?id=14.01.2013_6B_330/2012
Dans le cadre du recours d'un prévenu majeur, âgé de 19 ans et demi au moment des faits,
contre la peine qui lui a été infligée au plan cantonal – laquelle différait considérablement de celle
prononcée à l'encontre de son coauteur mineur lors des faits - le Tribunal Fédéral rappelle tout
d'abord qu'en droit pénal des adultes, le choix de la sanction répond à d'autres principes que
ceux qui prévalent en droit pénal des mineurs (représailles plutôt qu'éducation et formation). Au
vu de ces éléments, le Tribunal Fédéral souligne notamment que le recourant ne peut pas se
prévaloir de la condamnation infligée à son coauteur selon le droit pénal des mineurs.
3.
ATF 1B_33/2013 du 19 mars 2013 (français)
http://jumpcgi.bger.ch/cgi-bin/JumpCGI?id=19.03.2013_1B_33/2013
Recours contre un arrêt de la Cour de Justice de Genève, confirmant la décision du Juge des
mineurs d'autoriser, dans le cadre d'une procédure pénale ouverte par le Ministère public à
l'encontre d'un jeune adulte, la consultation de l'intégralité des procédures instruites et jugées par
le Tribunal des mineurs. Rejeté.
2
"Marathon"
Samedi 8 novembre 2014
Le Tribunal Fédéral partage l'avis de la Cour de justice concernant le fait que le secret ayant
entouré les procédures d'un mineur doit céder le pas à la transparence lorsque les infractions
commises en tant que majeur sont très graves ou de même nature que celles perpétrées avant
l'âge de 18 ans ou lorsqu'il existe un risque de récidive. Dans ces circonstances, le Tribunal
Fédéral confirme que l'intérêt public, voire la sécurité publique, doivent l'emporter sur l'intérêt
privé au maintien du secret dont le majeur a bénéficié lorsqu'il était mineur.
Au vu de ces éléments, le Tribunal Fédéral considère que la pesée des intérêts telle qu'opérée
par la Cour dans la décision attaquée ne prête pas le flanc à la critique, dès lors que les
infractions retenues à l'encontre du recourant étaient non seulement très graves – tentative de
meurtre, contrainte sexuelle et viol notamment – mais aussi de même nature que celles
commises par ce dernier avant sa majorité, étant encore souligné qu'à la gravité de ces actes
s'ajoutait le risque de récidive très élevé et le profil psychiatrique de l'intéressé.
Note : L'arrêt rendu par la Cour de Justice dans cette affaire est développé sous "Jurisprudence
cantonale" ch. 12 infra.
4.
ATF 6B_739/2012 du 13 mai 2013 (allemand)
http://jumpcgi.bger.ch/cgi-bin/JumpCGI?id=13.05.2013_6B_739/2012
Dans le cadre d'un recours contre une obligation d'entretien, le Tribunal Fédéral retient que
l'exécution des mesures de protection comme le placement pénal, y compris le placement
provisionnel, relève des frais de placement (art. 45 al. 1 PPMin) et ne saurait être assimilé à des
frais d'investigation devant être réglés dans le jugement pénal.
5.
ATF 6B_85/2014 du 18 février 2014 (allemand) : affaire "Carlos"
http://jumpcgi.bger.ch/cgi-bin/JumpCGI?id=18.02.2014_6B_85/2014
Recours contre la décision, prise en procédure d'exécution de peines et mesures, de placer en
milieu fermé, à titre provisionnel et sans nouvelle expertise psychologique, un prévenu placé en
milieu ouvert. Admis.
Le Tribunal Fédéral rappelle tout d'abord que le placement en milieu fermé ne peut être ordonné
que lorsqu'une telle mesure est indispensable pour la protection personnelle du mineur ou pour le
traitement de son trouble psychique, ou lorsqu'elle est nécessaire pour protéger les tiers d'une
grave menace/danger de la part du mineur (art. 15 al. 2 DPMin), étant précisé qu'avant
d'ordonner un tel placement, l'autorité doit requérir une expertise médicale ou psychologique (art.
15 al. 3 DPMin).
Le Tribunal Fédéral relève toutefois que même si, en procédure d'exécution de peines et
mesures, la possibilité d'ordonner un placement provisoire à court terme en milieu fermé – soit
avant l'élaboration d'une expertise -, n'est pas expressément mentionnée par la DPMin, il ressort
des documents législatifs qu'une telle solution doit pouvoir être envisagée dans les situations de
crise, notamment lorsqu'un mineur refuse toute collaboration, qu'il est inaccessible à toute
thérapie éducative et qu'il commet, en outre, d'autres graves délits, respectivement s'empêtre
dans des difficultés toujours plus grandes.
Cela étant, en l'espèce, le Tribunal Fédéral considère qu'un tel placement provisionnel en milieu
fermé n'aurait pas dû être ordonné, dès lors que dans le cadre du placement en milieu ouvert
prononcé depuis plus d'une année, le mineur se comportait de manière fiable, stable, montrait
des progrès personnels et scolaires, et ne s'était rendu coupable de rien de relevant au plan
délictuel. Le Tribunal Fédéral constate ainsi que l'arrêt brutal des mesures de protection en cours
au profit d'un placement provisionnel en milieu fermé n'avait aucun rapport avec le comportement
du mineur, mais que ce changement de mesure était motivé par les critiques des médias et la
pression publique grandissante concernant le coût de son placement en milieu ouvert.
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