Chapitre II La Franc-maçonnerie avant Versailles

Jacques Rolland
VERSAILLES
Le rêve maçonnique d’un roi
L’entrée ouverte
au palais fermé d’un roi
Table des matières
Mes remerciements.......................................................................................... 7
Prologue................................................................................................................. 9
Chapitre I – Le Roi danse...........................................................................13
Chapitre II – La Franc-maçonnerie avant Versailles......................19
Chapitre III – Mazarin Un livre étrange :
Le Songe de Poliphile.....................................................27
Chapitre IV – Discussion...........................................................................31
Chapitre V – Le Songe de Poliphile
et Le rêve maçonnique d’un Roy...............................37
Chapitre VI – Les incroyables correspondances..............................41
Chapitre VII – Une histoire symbolique.............................................49
Chapitre VIII – Le Soleil............................................................................57
Chapitre IX – L’Entrée ouverte au palais fermé d’un Roy...........63
Chapitre X – Une géométrie sacrée........................................................71
Chapitre XI – Le Nord des appartements..........................................77
Chapitre XII – Discussion – L’anamorphose....................................85
Chapitre XIII – Tout est double à Versailles.....................................91
Chapitre XIV – Discussion.......................................................................97
Chapitre XV – La conquête de la lumière....................................... 103
Chapitre XVI – Les mathématiques à Versailles.......................... 107
Chapitre XVII – Le rituel........................................................................ 113
Chapitre XVIII – Le sens de l’Histoire
ou Faire du Futur une Promesse.................... 119
Chapitre XIX – Discussion.................................................................... 123
Chapitre XX – Nicolas Fouquet.......................................................... 127
Chapitre XXI – Le vitrail et la galerie des Glaces........................ 131
Chapitre XXII – Universalité et Unité.............................................. 133
Chapitre XXIII – L’androgynie à Versailles.................................... 135
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Versailles – Le rêve maçonnique d’un roi
Chapitre XXIV – Le Chat botté.......................................................... 139
Chapitre XXV – Dieu le Feu................................................................. 145
Chapitre XXVI – Le dessein noir et blanc
ou Le damier maçonnique................................. 147
Chapitre XXVII – Doctrines solaire et lunaire............................ 151
Chapitre XXVIII – Les spectacles à Versailles............................. 155
Chapitre XXIX – Jean-Baptiste Lully............................................... 159
Chapitre XXX – La Franc-maçonnerie dans les palais............. 163
Chapitre XXXI – La création de l’Ordre sous Louis XV........ 173
Chapitre XXXII – Salomon.................................................................. 181
Conclusion – Quelle leçon tirer de Versailles ?.............................. 185
Sources bibliographiques........................................................................ 187
Ouvrages du même auteur...................................................................... 189
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Chapitre I
Le Roi danse
Le goût du spectacle
Louis XIV, dans ses Mémoires, écrira que le soleil, par sa lumière
©Depositphotos – Georgios
communiquée aux autres astres, recèle quelque chose de divin.
Louis XIV de France (1638-1715) – Gravure de J. Cook, 1886.
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Versailles – Le rêve maçonnique d’un roi
Tout part en fait du Carrousel, dont le nom a été conservé
jusqu’à nous. À l’époque, il s’agissait, bien que considérablement
amoindrie, d’une lutte entre cavaliers tournoyant autour d’un axe
avec un vainqueur, celui qui arrivait le premier. Mais point de
tournoi, évidemment. En 1661, le Roi y participa, y brilla, même
s’il ne gagna pas la course.
Est-ce de cette journée que date « le Roi-Soleil » ?
Car cette fête, dite du Carrousel, eut lieu devant la population
de Paris, ce qui constitua une première à l’époque et d’ailleurs
dans toute l’histoire de ce pays. On verra comment et à quel
point Louis XIV sut faire participer, en tant que spectateurs, les
habitants de Paris, peu habitués à ce genre de spectacle.
D’où lui vint ce goût du spectacle et de la mise en scène ?
Parmi les diverses hypothèses, relevons-en une qui a une réelle
importance. Dès son jeune âge, Louis XIV apprit deux arts : jouer
de la guitare et danser.
On ne trouve pratiquement jamais, dans les biographies de nos
rois – ni de ceux des autres pays – un enfant, bientôt monarque,
grattant une guitare ou s’exerçant à des entrechats.
Il danse non dans un bal donné par la Reine-Mère, mais sur une
scène, et c’est là que se trouvent à la fois un paradoxe d’éducation
tout comme une singulière méthode de formation : sa formation
dans un invisible conservatoire de danse et de musique.
Jouer d’un instrument – pour lui guitare et luth – revient à
séduire un auditeur ou un auditoire, et surtout à déchiffrer une
partition écrite en un langage codé.
Danser seul ou en compagnie d’artistes reconnus revient à se
montrer sous un tout autre jour qu’Henri le Balafré, Concini et
consorts ne se le permirent jamais.
On change et d’époque et de personnage. Car, à six ans, ce
personnage s’affirme. Sait-on, par exemple, qu’il va danser au
théâtre du Petit-Bourbon à Paris ? Cela mérite attention.
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Chapitre 1
Un théâtre ?
Oui, mais pas n’importe quel théâtre. Il contenait, nous disent
les archives, entre 2 500 et 2 800 places, plus que l’Opéra Bastille !
Pour l’époque, c’est déjà considérable.
Nous n’en avons pas terminé avec le spectacle.
Combien de fois s’est-il donné ?
Une seule représentation, comme une fête à la Cour ? Pas du
tout. Pas moins de dix représentations – c’est nous qui soulignons.
Qu’est-ce que cela veut dire ?
Cela veut dire que 30 000 Parisiens ont vu le spectacle et,
surtout, ont vu leur jeune Roi danser pour son plus grand plaisir
– car il danse fort bien – et pour le leur.
Car l’image d’un Roi qui danse, à douze ans et pour une petite
décennie, est unique dans l’imaginaire populaire et expliquera
partiellement l’étonnante popularité du monarque, pourtant féru
et imbu de rituels d’une rigueur plus qu’espagnole.
Un Roi joueur de guitare
Il chante donc, il fredonne en s’accompagnant d’une guitare
probablement importée d’Espagne. Que chante-t-il ? Des motets,
des chants d’Église ? Pas du tout. Il chante, car d’autres en auront
écrit les paroles, l’amour pour la nièce de Mazarin, Marie Mancini.
« Que votre empire, Amour, est un cruel empire », fredonnait-il
au moment de l’inévitable séparation d’avec la jeune fille.
Les notes égrenées sur un luth précédent inévitablement les
paroles du chant. Une danse est bien sûr une chorégraphie, une
gestuelle soigneusement élaborée. Bref, une succession d’attitudes
corporelles où tout est étudié savamment.
Un danseur adopte instinctivement des postures mettant en
valeur son corps et son costume.
De ce fait, indéniablement, par l’adoption, dès son plus jeune
âge, d’attitudes corporelles codifiées plus ou moins statufiées,
Louis XIV va s’enfermer délibérément dans un corset de rigidité,
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Versailles – Le rêve maçonnique d’un roi
pourtant fait d’une souplesse occulte, qui lui vaudra son épithète
de Grand Roi par son allure incontestablement supérieure.
La danse vise à un cérémonial gestuel. Ainsi un danseur a-t-il la
tête recouverte d’un bandeau, de faux cheveux, destinés à ennoblir
un peu plus son visage.
Car si, au départ, Louis XIV danse avec de « jeunes amis »,
des courtisans titrés, rapidement il va décider – ou on décidera
pour lui – de s’y adonner avec des danseurs professionnels. Et là
adviendra la réussite professionnelle de J. B. Lully.
Des spectacles pour le royaume
Il aura fait ses gammes avec les courtisans l’entourant. Désormais,
il va danser seul, c’est-à-dire sans eux, sans la Cour. Il va aussi être
l’unique monarque, en Europe, à danser sur des scènes publiques.
C’est en 1661 que Louis XIV, voulant réglementer la danse, sur
les conseils de son mentor Mazarin, institua l’Académie royale de
danse.
Cette assemblée, composée de treize membres choisis parmi les
plus compétents, eut la charge de surveiller et superviser tout ce
qui se faisait dans le royaume en matière de danse.
Il faut prêter une grande attention à un article stipulant que nul
ne pouvait montrer ou inventer un pas sans qu’il ne fût approuvé
par leur autorité.
Indiscutablement, Lully fut à la source et à l’origine de ce qui
désormais s’intitulera la « comédie-ballet ». En général composée
de pair avec Molière, et qui va laisser place à l’opéra-ballet.
Si 1653 est la date à laquelle Louis XIV apparaît pour la
première fois sur une scène ouverte au public, avec les Amants
magnifiques, puis le Bourgois gentilhomme, Lully poursuivra, seul,
avec Atys, de renommée mondiale en 1676.
Dès 1661 également, pratiquement au moment de Vaux-leVicomte, Lully est nommé surintendant de la musique royale, et en
1672, ce qui équivaut à une consécration, directeur de l’Académie
royale de musique. De ce fait, Lully, qui ne peut souffrir ses
collègues au point de les éliminer, détiendra un quasi-monopole
de toute la production musicale en France.
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Chapitre 1
Musique et jardins vont donc s’entrecroiser. C’est bien pourquoi
de nos jours, Versailles nous invite à des mardis musicaux où, aux
oreilles ravies de milliers de touristes pour la plupart étrangers, on
joue des airs de cour, composés à l’occasion des innombrables fêtes
de Versailles.
Et les décors sont si intimement liés à ces performances que l’on
ne sait d’où provient la musique. Et l’on voit ces touristes chercher
des yeux les invisibles orchestres jouant, pour leur ravissement, des
musiques de Charpentier, Campra, Lully…
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Chapitre II
La Franc-maçonnerie
avant Versailles
Les clefs d’une révolution sociale
Peut-on parler d’une Franc-maçonnerie au Moyen Âge parce que
composée essentiellement de gens d’une même profession ? Ce qui
fut le cas des tailleurs de pierre.
Aussi évoquera-t-on la Maçonnerie franche du compagnonnage.
Elle se distingue par contre sérieusement de la Franc-maçonnerie
du xviie siècle qui, par vocation, par essence, s’efforce de rassembler
des personnes n’ayant pas obligatoirement la même profession.
Les Anglais, plus chauvins que nous, admettent et certifient que
leur Maçonnerie est la seule valable parce qu’ils la détiennent et
la font remonter à un de ses « créateurs », Cromwell. Cromwell
doublé de son secrétaire Milton, qui n’est autre que l’auteur du
Paradis perdu. Or, dans ce long poème, trois classes dominent
incontestablement : les nobles, les pasteurs et les souverains.
Par là se trouve ainsi définie la Franc-maçonnerie anglaise par
opposition à la nôtre au xviie siècle.
Pour Cromwell, il s’agit prioritairement d’une opération
d’envergure politique. Ainsi les travaux maçonniques sont-ils
innombrables et de valeur fort inégale.
De cette façon devons-nous juger Rabelais pour son Livre V
et Colonna pour son Songe de Poliphile. Car, pour l’un comme
pour l’autre, l’architecture de l’art du maçon y tient une place
incontestable, voire même essentielle. Personne ne s’y est trompé
puisque Colonna – moine tout comme Rabelais – a été également
rangé parmi les grands architectes de l’Italie.
Son œuvre est une longue description de monuments
imaginaires sous une banale histoire romanesque. On peut donc
s’étonner de son succès, sauf à savoir que cette lourdeur descriptive
est uniquement le prélude à dévoiler des secrets d’architecture
maçonnique.
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