Résumés CIFQ2005

Journées Nationales sur l'Énergie Solaire
8 au 10 juillet 2014 Campus université Perpignan
SIMULATION DYNAMIQUE DU RÉCEPTEUR D’UN CAPTEUR DE FRESNEL LINEAIRE
Emeric TAPACHES a , Jean CASTAING-LASVIGNOTTES a, Franck LUCAS a, Olivier MARC a,
Jean-Jacques BEZIAN b, François VEYNANDT b, Michel PONS c
Laboratoire de Physique et Ingénierie Mathématique pour l’Énergie et l’Environnement (PIMENT)
40, avenue de Soweto – BP 373 – 97455 Saint Pierre CEDEX – Ile de la Réunion
b Centre de Recherche d'Albi en génie des Procédés des Solides Divisés, de l'Énergie et de l'Environnement (RAPSODEE), UMR
CNRS 5302. École des Mines d'Albi, Campus Jarlard – 81013 ALBI
c LIMSI-CNRS, UPR3251, Bât 508 Rue J. von Neumann, Campus, 91403 Orsay Cedex
a
Contact e-mail : [email protected]
RÉSUMÉ
La plupart des modèles numériques de récepteurs solaires à miroirs de Fresnel ou cylindro-paraboliques sont des
modèles « pseudo-stationnaires ». Le LIMSI et PIMENT ont développé un modèle dynamique du récepteur d’un capteur
de Fresnel linéaire, SOLIFRE. À partir des champs de rayonnement visible absorbé sur les surfaces du tube récepteur,
du réflecteur secondaire et du vitrage (champs obtenus par EDStar, RAPSODEE), le modèle SOLIFRE calcule
l’évolution des températures le long du récepteur en simulant les échanges radiatifs en infra-rouge (radiositéséclairements), les échanges convectifs dans la cavité formée par le réflecteur secondaire et la vitre de protection, et la
dissipation radiative et convective vers l’air extérieur. Le modèle est utilisé pour simuler une ligne de 20 mètres de large
et 50 mètres de long dans les conditions météorologiques de La Réunion. La résolution temporelle permet d’étudier les
effets des procédures de régulation : le débit de fluide caloporteur est adapté pour maintenir la température de sortie
proche de la consigne et pour éviter les surchauffes du fluide caloporteur. Les démarrages du matin et les
comportements en cas de passages nuageux donnent lieu à des Stratégies particulières, dont les résultats s’avèrent
tout-à-fait satisfaisants.
Mots Clés : Modèle numérique, couplage rayonnement-convection-conduction, régulation de température.
INTRODUCTION
La filière solaire thermodynamique à concentration est une des voies possibles pour la production d’électricité. Parmi les
capteurs solaires utilisés dans cette filière, la technologie linéaire de Fresnel connaît un intérêt grandissant du fait de
son compromis attractif entre performance, simplicité de mise en œuvre et coût [1].
La plupart des modèles de capteurs solaires à concentration linéaire présentés dans la littérature sont basés sur une
approche pseudo-stationnaire, et si quelques articles présentent des simulations dynamiques et des procédures de
contrôle pour des centrales cylindro-paraboliques [2-5], il semble qu’aucun ne traite de cette problématique pour des
capteurs linéaires de Fresnel. Or, la maîtrise des conséquences des transitoires est cruciale pour, d’abord éviter des
surchauffes locales qui dégraderaient prématurément le fluide caloporteur ou les éléments du récepteur et ensuite
maximiser l’énergie captée en adoptant des procédures de conduite aussi efficaces que possible. Un modèle dynamique
de récepteur linéaire, couplé à un code développé par l’équipe RAPSODEE pour simuler les aspects optiques de la
concentration, a donc été développé par PIMENT et le LIMSI.
DESCRIPTION DU CAPTEUR ÉTUDIÉ
Le concentrateur linéaire de Fresnel est constitué de 14 lignes de miroirs, chacune constituée de 12 miroirs en ligne
nord-sud et rendus focalisants par une légère déformation cylindrique. Ces miroirs mesurent quatre mètres de long et un
mètre de large ; le champ fait donc environ 20 mètres de large et 50 mètres de long.
Le récepteur linéaire (Figure 1 à gauche) est composé d’un concentrateur parabolique composé (CPC) qui reconcentre
le rayonnement solaire sur le tube absorbeur, et d’un vitrage qui ferme l’ensemble en face avant en délimitant une cavité
d’air. Le fluide caloporteur circulant dans le tube est la même huile de synthèse que celle utilisée dans la centrale à
cylindro-paraboliques de Saguaro en Arizona (XCELTHERM®600, Radco Ind.). Le réflecteur est isolé thermiquement.
Sur sa longueur, le récepteur linéaire est supporté par quatre poteaux équipés de protections réfléchissantes.
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8 au 10 juillet 2014 Campus université Perpignan
MODÈLE NUMÉRIQUE
Nos simulations numériques reposent sur deux codes, un premier code simulant la concentration du rayonnement
solaire et un second code, baptisé SOLIFRE (SOlar LInear Fresnel REceptor), simulant les transferts thermiques au
sein du récepteur linéaire.
Le modèle optique
Ce modèle, initialement développé par F. Veynandt à RAPSODEE Albi [6], calcule, en fonction de la géométrie du
capteur, de la position du soleil dans le ciel et de l’intensité du DNI, la distribution des flux solaires absorbés par les
différents éléments du récepteur après toutes les réflexions possibles sur les autres éléments. L’environnement de
développement EDStar permet de modéliser toute la géométrie du capteur solaire à l’aide de la bibliothèque de
synthèse d’image PBRT (cf. Figure 1 à droite), puis d’effectuer des calculs de lancers de rayons et ainsi d’estimer les
distributions de densité de flux recherchées ainsi que les divers facteurs de forme [7]. La façon dont nous avons utilisé
ce code est décrite dans notre article du dernier congrès SFT [8].
Le modèle thermique SOLIFRE
Le modèle thermique SOLIFRE, basé sur un code volumes finis, simule en instationnaire les transferts suivants : 1/
entre éléments de la cavité (tube, réflecteur, vitrage), par radiation infra-rouge et par convection et conduction dans l’air
contenu dans la cavité ; 2/ à l’intérieur de chaque élément par conduction, transversalement et longitudinalement et 3/
par dissipation à travers le vitrage ou l’isolant vers l’air extérieur, c.-à-d. conduction puis transfert radiatif plus convectif
vers l’air. Les hypothèses et particularités du modèle sont, elles aussi, décrites en [8]. La particularité de ce code est
qu’il profite de la procédure itérative, rendue nécessaire par le problème radiatif, pour ajuster en fonction des conditions
locales nombre de grandeurs ou paramètres physiques, tels que propriétés thermophysiques du fluide caloporteur,
vitesse du fluide, coefficients d’échange convectifs entre le tube et le fluide ou dans la cavité. Ce modèle tient compte
des transferts radiatifs et convectifs avec l’extérieur (pour le vitrage et l’isolant) ou à travers la cavité interne (pour le
tube, le réflecteur et le vitrage) et des transferts conductifs. La conduction transverse entre éléments en contact est
traitée implicitement. Le flux solaire absorbé localement est donné par les calculs optiques. La résolution itérative
imposée par le problème radiatif permet d’intégrer au modèle la conduction longitudinale, des cp éventuellement fonction
de la température, des coefficients d’échange externes dépendant de la vitesse du vent, et des coefficients d’échange
internes à la cavité dépendant du Rayleigh selon les corrélations établies pour deux cylindres coaxiaux horizontaux à
températures différentes [8]. Le modèle SOLIFRE a été développé sous l’environnement DELPHI avec une structure de
code orienté objet.
SIMULATIONS
Stratégie de commande globale et régulation des températures du fluide caloporteur à l’intérieur du
récepteur
Notre stratégie de commande globale a été mise au point pour une centrale équipée de deux stocks de chaleur sensible
(l’un « chaud » à 500 K et l’autre « froid » à 400 K) et d’un cycle thermodynamique. Tout au long de la journée, le stock
« chaud » est rempli à la température consigne (500 K). L’énergie ainsi stockée sert à produire de l’électricité en début
de nuit (écrêtage de la pointe de consommation du soir).
La régulation que nous avons codée tient compte de ce que le fluide met plusieurs minutes (environ sept en nominal)
 f ⋅ (Tout − Tin )
pour parcourir la longueur totale du récepteur ; son principe consiste à 1/ considérer que le produit m
ne varie que lentement, 2/ anticiper l’évolution de la température de sortie du fluide Tout , et 3/ amortir la réponse.
L’avance de l’anticipation et la constante de temps de l’amortissement sont comparables au temps de parcours du
fluide. Les détails sont donnés en [8]. L’autre contrainte est que la température de la paroi intérieure du tube absorbeur
(film fluide) ne dépasse pas 600 K, température au-delà de laquelle le fluide se dégrade. Les reprises de fonctionnement
après un passage nuageux sont les moments qui présentent le plus fort risque de surchauffe. Il est alors crucial
d’intégrer les mesures de flux solaire et des connaissances, éventuellement empiriques, sur la centrale pour trouver une
bonne stratégie.
Application du contrôle sur une journée avec passages nuageux
Pour cette simulation, le récepteur linéaire a été discrétisé longitudinalement en 75 maille. Pour ce premier test, le
maillage transversal est limité à un seul élément respectivement pour le tube, le réflecteur (et donc l’isolant) et le vitrage.
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8 au 10 juillet 2014 Campus université Perpignan
Sur un PC équipé de 8 Go de RAM et d’un processeur Intel® Core™ i7-2640M CPU @ 2.80GHz, la simulation d’une
journée d’environ 10 heures (7 h 42 - 17 h 18) dure environ 3 min en temps réel.
La simulation reportée en Figure 5 montre comment lors d’un démarrage la régulation anticipe l’approche de la
température consigne de sortie, et évite un dépassement. Elle montre aussi que même en environnement fluctuant
(entre 10 et 12) la température de sortie ne s’écarte quasiment pas de la valeur consigne. De même, les passages
nuageux de l’après-midi sont aussi très bien gérés. Le graphe de droite comment les fluctuations qui seraient induites
par un démarrage trop tardif (avec la même procédure) sont rapidement amorties. La Figure 6 montre les effets d’un
contrôle imparfait lors d’un épisode de passages nuageux fréquents (même jour entre 12 et 13). Lors d’un retour du
soleil (situation la plus périlleuse), le contrôle est dépassé et la température de film dépasse notablement la limite de
600 K (graphe de gauche), alors qu’un contrôle tenant compte aussi de la valeur instantanée de l’ensoleillement permet
d’éviter ce dépassement (graphe de droite).
Seul un modèle dynamique peut simuler le comportement dans ces situations, et les pertes d’énergie résultant des
précautions nécessaires pour éviter les surchauffes. Notre modèle permet maintenant d’étudier le productible annuel
dans un climat réel, en particulier soumis à de fréquents passages nuageux successifs.
CONCLUSION
Notre modèle dynamique permet d’étudier la gestion des transitoires à l’aide de procédures de régulation sur le débit
d’entrée du fluide caloporteur. La procédure de régulation étudiée dans cet article fonctionne bien pour des passages
nuageux isolés ainsi que pour des passages nuageux à plus haute fréquence d’apparition. Une perspective intéressante
serait d’utiliser des moyens de prédiction du DNI à court terme. Par contre, avant de s’engager sur cette perspective, il
faudra encore valider ce modèle avec des données expérimentales. Une fois amélioré et validé, ce modèle pourra servir
d’outil d’aide au dimensionnement et de mise au point de procédures de régulation.
RÉFÉRENCES
[1] G. Zhu, T. Wendelin, M. J. Wagner et C. Kutscher, History, current state, and future of linear Fresnel concentrating
solar collectors, Solar Energy, in press-X (2014), X.
[2] C. M. Cirre, M. Berenguel, L. Valenzuela et E. F. Camacho, Feedback linearization control for a distributed solar
collector field, Control Engineering Practice, 15-12 (2007), 1533-1544.
[3] M. Eck et T. Hirsch, Dynamics and control of parabolic trough collector loops with direct steam generation, Solar
Energy, 81-2 (2007), 268-279.
[4] F. Manenti et Z. Ravaghi-Ardebili, Dynamic simulation of concentrating solar power plant and two-tanks direct
thermal energy storage, Energy, 55 (2013), 89-97.
[5] K. M. Powell et T. F. Edgar, Modeling and control of a solar thermal power plant with thermal energy storage,
Chemical Engineering Science, 71 (2012), 138-145.
[6] F. Veynandt, Cogénération héliothermodynamique avec concentrateur linéaire de Fresnel : modélisation de
l’ensemble du procédé, Thèse Ecole des Mines Albi, Albi (2011).
[7] J. Delatorre et J. J. B. G. Baud, S. Blanco, C. Caliot, J.F. Cornet, C. Coustet, J. Dauchet, M. El Hafi, V. Eymet, R.
Fournier, J. Gautrais, O. Gourmel, D. Joseph, N. Meilhac, A. Pajot, M. Paulin, P. Perez, B. Piaud, M. Roger, et al.,
Monte Carlo advances and concentrated solar applications, Solar Energy, in press-X (2014), X.
[8] E. Tapachès, J. Castaing-Lasvignottes, F. Lucas, J._J. Bézian, F. Veynandt, and M. Pons, Modélisation dynamique
des transferts de chaleur au sein d’un récepteur linéaire de Fresnel : application d’une régulation lors de passages
nuageux, Actes Congrès Français de Thermique SFT 2014, 3-6 juin, Lyon, France, J. Bonjour & P. Laurent Ed.,
Pub. SFT-Paris France, ISBN 978-2-37111-003-8, (2014), Vol. 2 145-152.
REMERCIEMENTS
Ce travail a été réalisé dans le cadre du projet de recherche SolarTherm. Les auteurs remercient la région Réunion pour
le financement de ce projet et de la thèse qui lui est associée.
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8 au 10 juillet 2014 Campus université Perpignan
Figure 1 : À gauche, section transversale du récepteur linéaire avec (1) fluide, (2) tube absorbeur, (3) cavité d’air, (4)
réflecteur transversal, (5) réflecteur secondaire, (6) isolant, (7) vitrage et (8) réflecteurs latéraux. À droite, modélisation
du capteur sous EDStar
Figure 2 : Simulation en météo réelle, jour assez nuageux ; effets d’un démarrage tardif à droite. Courbe fine noire :
température maximale de film fluide, courbe rouge : température de sortie de fluide (bulk), courbe bleue : vitesse du
fluide commandée. En haut, Flux solaire DNI.
Figure 3 : Zoom sur l’épisode de passages nuageux entre 12 et 13. Contrôle imparfait à gauche, contrôle amélioré à
droite. La ligne pointillée au milieu du cercle rouge représente la température maximale admissible pour le film fluide.