LQ 495 - Lacan Quotidien

2Vendredi 27 mars 2015 19h00 [GMT + 1]
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495
Je n’aurais manqué un Séminaire pour rien au monde— PHILIPPE SOLLERS
Nous gagnerons parce que nous n’avons pas d’autre choix — AGNES AFLALO
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AMP/ONU
Quelques remarques sur le rôle des femmes
dans les négociations de paix
par Gil Caroz
Lacan Quotidien publie la version française de l’intervention de Gil Caroz, le 19 mars dernier, à
l'occasion du « Parallel Event » au Forum des ONG de la Commission de la condition des femmes
(CSW). L’auteur s'adresse à un public qui défend la cause des femmes, mais qui est, pour une part,
indifférent, voire hostile, à la psychanalyse, souvent perçue comme une doctrine trop phallocratique.
Son écriture est « orientée par un effort de faire passer la chose de la psychanalyse en enveloppant
l'insupportable par le supportable. Certes, il s'agissait de dire, mais ne pas tout dire permet de rester
dans la zone de l'audible ».
En l'an 2000, le Conseil de sécurité des Nations-Unies a adopté la résolution 1325 sur les
femmes, la paix et la sécurité. Cette résolution réaffirme le rôle important des femmes dans la
prévention et la résolution des conflits et dans les négociations de paix. Elle souligne
l'importance de leur participation égalitaire dans tous les efforts pour maintenir la paix et la
sécurité.
Le penchant des femmes vers des actions qui promeuvent la paix n'est pas une idée
nouvelle. Ainsi est-elle présente dans une comédie d'Aristophane où l'héroïne, Lysistrata,
appelle les femmes de toutes les cités à engager une "grève du sexe", c'est-à-dire à arrêter
toute activité sexuelle tant que les hommes ne reviennent pas à la raison et ne cessent pas la
guerre entre Athènes et Sparte. Les grèves du sexe afin d'appeler à la paix se pratiquent
encore. Ainsi, en 2003, une grève du sexe au Libéria a contribué à l’obtention de la paix après
14 ans de guerre civile. En Colombie, en 2006, une telle grève a permis une diminution de la
violence des gangs. En 2009, c’est au Kenya qu’une grève du sexe a été initiée pour conduire
à l’arrêt d’un conflit interne. Et il y a encore d'autres exemples1.
Cette résolution de l'ONU est parfaitement en phase avec la perspective
psychanalytique. Néanmoins, pour la psychanalyse, la tendance est plutôt de parler d'une
diversité sexuelle que d'une égalité du genre. En effet, le psychanalyste français Jacques
Lacan a différencié, à partir de sa clinique, deux logiques distinctes, l’une masculine et l’autre
féminine.
Je voudrais vous montrer comment, telles que les choses se présentent aujourd’hui, la
logique féminine semble beaucoup plus appropriée que la logique masculine aux
négociations de paix. Ceci sans perdre de vue le fait que la logique n'est pas l'anatomie.
Autrement dit, une personne peut avoir l'anatomie d'un homme, alors qu'elle a des affinités
avec la logique féminine, et vice versa. Freud disait que l'anatomie est le destin. La logique est
plutôt du registre du choix, d'une construction subjective liée au désir.
La logique masculine est aussi qualifiée de "logique phallique". Si vous lisez entre les
lignes, vous pouvez constater que celle-ci n'est pas particulièrement appréciée par Jacques
Lacan qui peut énoncer que le phallus est une "objection de conscience au service à rendre à
l’autre"2. La logique masculine est donc plutôt autistique, auto-érotique, fermée sur sa propre
satisfaction personnelle et individuelle, évitant le mouvement vers l'autre. Le
fonctionnement du pénis est considéré par Lacan comme une métaphore illustrant les limites
du phallus. Une érection ne dure jamais très longtemps, elle a toujours une limite.
D'un point de vue social, la logique phallique donne aux collectivités la structure du
groupe freudien. Freud se réfère à l'Armée et à l'Église comme exemples de tels groupes,
composés d'un nombre défini de membres, tous égaux, tous soumis à une même loi
universelle – tous sauf le leader. Comme il s'agit d'un groupe fermé dont les contours sont
définis, Lacan qualifie la logique masculine de logique du tout. La caractéristique essentielle
de ce type de groupe est que l'amour y est prévalent parmi les membres à l'intérieur du
groupe, alors que la haine est dirigée vers l'extérieur. Vous pouvez mesurer à quel point cette
structure masculine de la société est un terrain fertile au déclenchement de guerres.
Voyons maintenant quels sont les traits essentiels de la logique féminine. Lacan
l'appelle la logique du pas-tout. L'expression "pas-tout" n’est pas faite pour dire que la logique
féminine est imparfaite à ses yeux. Elle signifie bien au contraire qu'alors que la logique
masculine est limitée et fermée sur elle-même, la logique féminine est illustrée par un
ensemble ouvert qui tend vers l'infini. Par conséquent, ici, il n'y a pas "d'objection" à la
relation à l'autre. La logique féminine permet une ouverture et un mouvement vers l'autre.
En d'autres termes, alors que la logique masculine produit un groupe fermé avec une
frontière consistante qui le sépare d'un ennemi situé à l’extérieur, la logique féminine génère,
elle, un groupe ouvert permettant des échanges pluriels et variés.
Par ailleurs, alors que tous les individus d’un groupe à logique masculine sont égaux
dans leur rapport au leader, le groupe féminin promeut la singularité de chaque membre. Je
me souviens d'une photo que j'ai vue il y a quelques années dans un quotidien israélien, le
jour de l'enterrement d'un rabbin illustre. Vous savez que, lors d'une cérémonie juive
orthodoxe, hommes et femmes ne se mélangent pas. C’était un jour pluvieux et tout le
monde avait un parapluie. Sur cette photo prise d'un hélicoptère, on pouvait clairement
distinguer deux groupes. Du côté des hommes, tous les parapluies étaient de la même
couleur sombre, un uni noir ou gris. Du côté des femmes, il n'y avait pas deux parapluies
identiques : plutôt une infinité de couleurs et de dessins, chaque parapluie ayant sa
singularité. Cette affinité de la logique féminine avec la singularité, que nous appelons aussi
la logique du un par un, convient particulièrement à des négociations de paix.
Il n'y a pas de solutions standards et universelles qui conviennent à tous les conflits.
Les négociateurs doivent être attentifs aux coordonnées de chaque partie engagée dans un
conflit afin d'improviser une solution adaptée à la spécificité de chaque situation. Il faut
inventer un arrangement adapté à chaque cas. On constate facilement en quoi la logique
féminine, telle que je l'ai décrite, convient mieux que la logique masculine à ce genre
d'opérations, car elle est ouverte à des solutions pragmatiques, faites sur mesure, plutôt qu'à
des solutions imposées au titre d’un universel.
Un pas supplémentaire est nécessaire pour comprendre les conflits actuels. En suivant
les distinctions entre les logiques masculine et féminine, nous saisissons pourquoi les
hommes et les femmes ne sont pas faits pour se comprendre. Par ailleurs, notre lecture
psychanalytique de la culture et de la société nous conduit à la conclusion que ce
malentendu est un élément majeur dans les guerres contemporaines.
Les guerres ont changé, elles sont moins centrées sur la rivalité phallique que sur la
haine des femmes. Il s'agit de mettre les femmes au pas, leur imposant violemment toutes
sortes de restrictions. Ce phénomène illustre la tendance structurelle de la logique masculine
universelle à mettre au pas la logique féminine du un par un. Notons que cette tendance
apparaît dans un contexte où, dans un grand nombre de pays, les femmes ont déjà obtenu
l'égalité dans beaucoup de domaines de la vie sociale. Une réaction fondamentaliste à ce
développement, sous la forme de la répression des femmes, s’accroît au fur et à mesure que
cette égalité se propage.
Lors des négociations de paix, la relation que l'on a avec la parole est d'une
importance majeure. Là encore, la différence entre les logiques masculine et féminine est
cruciale. La logique masculine, déterminée par la logique du tout, se découvre très limitée.
Elle est susceptible, à tout moment, de conduire les négociations à l’impasse, car son seuil de
tolérance au malentendu est très bas. Tout doit faire sens immédiatement et quand les choses
ne sont pas claires, lorsque les malentendus surgissent, il y a toujours un risque que la parole
s’arrête et que la guerre commence ou recommence.
En revanche, la logique féminine tolère l’incohérence du langage. Elle inclut
l’impossibilité de tout dire. C’est le cas de la figure de Shéhérazade dans les Mille et Une
Nuits. Le Sultan, dans l'histoire qui encadre ces contes, est fait cocu par son épouse. Son
discours est misogyne. Une fois qu'il exécute sa femme infidèle, il décide d'épouser une
vierge chaque jour, et de l'exécuter le lendemain de la nuit de noces, afin de se venger des
femmes et de s’assurer de ne plus jamais être trompé. Shéhérazade est la dernière de la série
de ces femmes, car elle trouve le moyen d'arrêter ce carnage. Lors de la nuit de noces, elle
raconte au sultan une histoire palpitante en la laissant inachevée. Elle répète cela pendant
mille et une nuits, après quoi le Sultan abandonne son projet et décide de la garder avec lui
pour toujours, ayant reconnu ses qualités.
Cette légende nous montre les impasses de la rencontre entre les logiques masculine
et féminine, et aussi un moyen d’en sortir. La logique phallique du Sultan tend vers la guerre
et le massacre. On constate, par contre, que la logique féminine favorise la parole, et plus
encore, une parole tendant vers l'infini plutôt qu’à la violence. Shéhérazade utilise la logique
du pas-tout avec finesse. Elle ne dit pas toute l'histoire... et suscite ainsi chez l'homme un
désir d'en savoir plus, et cette manœuvre transforme la pulsion de mort en un désir de vie.
Le Sultan change. Il dépose ses armes, sans avoir à subir une grève du sexe. Il fait un
mouvement vers la logique féminine, puisqu’il se met à jouir de la parole et des histoires,
plutôt que de la vengeance violente. C’est ce qui peut se produire quand un homme passe
par une analyse. Il arrive qu’il devienne plus tolérant à ce qui lui semble être une
incohérence dans la logique féminine. On peut même dire, alors, qu'il est un peu féminisé.
Nous pouvons nous attendre à ce que, dans le cas de négociations, cette position féminisée
soit davantage disposée à la logique du un par un et à des arrangements inventifs et
pragmatiques entre les singularités des parties.
* Illustration en haut : Revolver noué qui se trouve devant le bâtiment de l'ONU, œuvre fameuse de
Fredrik Reuterswärd, nommée aussi Non-violence. L’artiste l’a créée, bouleversé et en colère après la
mort insensée de son ami John Lennon. Le gouvernement luxembourgeois a acheté l’œuvre et l’a
offerte à l'ONU en 1988.
Lire aussi, dans le contexte du Parallel Event du 19 mars à New York, « Autonomisation des femmes
et psychanalyse” par Patricio Alvarez dans Lacan Quotidien n° 492 et « Ce que la psychanalyse sait des
femmes en tant que « gender » », par Marie-Hélène Brousse dans Lacan Quotidien n° 494.
1 http://en.wikipedia.org/wiki/Sex_strike
2
Lacan J., Le séminaire, Livre, XX, Encore, Paris, Seuil, 1975, p. 13.
L'islam au féminin
par David Vanhoolandt
-1Moi, David, qui ne suis d'aucune confession religieuse, j'ai aimé une femme musulmane : L.
— Musulmane ? Diable ! Et alors même que sa mère portait le hidjab et que son père, haj, avait
foulé le sol de la Mecque, L., en vraie femme, ne céda jamais sur son désir de voir élever la
contingence ontique de notre rencontre amoureuse en nécessité ontologique à laquelle sa famille
se devait désormais de consentir. Et elle y réussit. L. ne m'exhorta, par ailleurs, jamais à faire
un « choix religieux ». — Jamais ? Allons ! — Jamais ! Si, comme le dit ainsi Pascal Quignard,
« est amoureux un être humain [qui tombe] dans l'Autre sans médiation sociale » (ou
familiale, ou religieuse), alors L., c'est sûr, l'était : amoureuse de David. De notre amour,
union, sont aussi nés deux enfants aux couleurs de peau et aux êtres métissés, totalement
aimés et choyés par nos belles familles respectives. — En êtes-vous sûr ? — Certain !
-2Afin d'échapper à la misère économique crue de leur pays, nos parents, ceux de L. et les
miens, avaient pour point commun d'avoir atterri sur le sol belge. La Belgique les avait
accueillis quasi à la même période : 1963-1964. « Accueillis » n'est pas le terme exact :
« employés » ou « exploités » serait plus juste. En effet, tous deux, bien avant même d'avoir
pu apprécier ou savourer la spécialité belge, les frites, se retrouvèrent, immédiatement, au
fond des ténèbres des mines de charbon. L'Italie, soit dit en passant, pour chacun de ses
ressortissants employés dans les charbonnages, recevait, dit-on, chaque mois une tonne de
charbon ! Pendant ce temps-là, les ressortissants (marocains et italiens), eux, étaient logés
dans des bidonvilles, devenus aujourd'hui des musées visités par des hordes de touristes. La
ségrégation était organisée, pensée. Le charbon alimentait les hauts fourneaux qui
produisaient l'acier, lequel faisait la fortune de la bourgeoisie. Nos parents respectifs étaient
ainsi les ambassadeurs, pour reprendre Heidegger, de la pensée calculante. Mais pour
arraisonner, par exemple, un fleuve et exploiter son stock d'énergie, tout comme pour
transformer un terrain vague en mine ou en sidérurgie, encore faut-il, au préalable,
arraisonner l'homme lui-même, c'est-à-dire le considérer comme un simple fond disponible et à
arraisonner. C'est bien ce qu'étaient nos parents. Et pour supporter les abîmes minières et les
diverses insultes – « sales Italiens », « sales Marocains », « bandes de profiteurs des
allocations familiales »... –, si mon grand-père s'annexait la bouteille d'alcool, le père de L.,
lui, disposait du tapis de prière.
Lors de ma rencontre avec L., bien des décennies plus tard, je me souviens ainsi des
résonances de ma propre langue familiale, pétrie par ces expériences d'immigrations,
d'exploitations et de vexations, avec la langue de L.. Nous étions, tous deux, fortement
divisés par les réels de nos propres langues. Et ce sont, entre autres, nos évocations de ces
réels qui nous unirent. Lacan a raison : l'amour est bel et bien un partage ou un nœud de
solitudes et d'exils du non-rapport sexuel.
-3Qu'est-ce donc maintenant que l'après 7 janvier 2015 pour un être qui, comme moi, compte,
dans ses proches, des êtres issus du monde arabo-musulman ? — Sans aucun doute une forme de
honte ! — Non, pour ma part, après le choc, c'est la peur. C'est la peur de voir l'actuel
nivellement politico-médiatico-social ravaler ou écraser certaines et inestimables singularités,
telle celle de L.. L. me disait récemment que l'idée d'un retour au Maroc s'était, pour la
première fois de son existence, imposée à elle. Tout en ajoutant : « Cette idée de retour est, en
fait, bête ! Pour cause, je suis née ici, en Belgique ! Or, ici, en Belgique, je ne me sens plus
chez moi... Tout, du regard suspicieux de la voisine au discours populiste du journaliste en
passant par les propos déplacés de mes collègues, me donne l'impression d'être de trop, de
faire tache !... Mais au Maroc, lorsque j'y passe mes vacances, je ne me sens pas non plus chez
moi... Tout, du regard envieux des autochtones au discours machiste de mâles en passant par
les contrôles incessants de la gendarmerie, me donne l'impression aussi de faire tache !... »
Pourquoi ne pas parler également de la tristesse et de l’incompréhension de nos
enfants qui, dernièrement, ont vu certains de leurs « meilleurs » amis, encouragés par leurs
parents, s'éloigner d'eux ?... Oui, décidément, les musulmans, enfin, les « melons » (sic) ou
« cakes » (sic), tous pareils ! Les contingences historiques susceptibles de faire émerger un
être singulier, non noyé dans la fange funeste des diktats des « fous de Dieu », sont ainsi
oubliées.
-4-
Dans le cadre de ma vie professionnelle, il m'est donné de rencontrer de nombreuses femmes
(femmes et musulmanes) qui, éloignées des clichés ou préjugés, s'ouvrent, comme L., aux
rencontres amicales, professionnelles et/ou amoureuses avec des roumis. Je vois ainsi des
femmes voilées se confier ou dévoiler leur âme à des hommes blancs et athées, et trouver,
parfois, me disent-elles, le repos sur leur épaule. Certaines, épinglées par un questionnement
sur le « mystère de la vie » ou fortement divisées entre les impératifs de l'Autre (funeste) et
leur propre désir, en viennent à s'intéresser à la psychanalyse, à Lacan – deux d'entre-elles
débutèrent même une psychanalyse et une autre n'hésita pas à envoyer son fils « phobique »
chez un lacanien. D'autres, moins rares, sont des fans assidues de Dina Tokio, cette
youtubeuse belle, sexy et joyeuse, styliste musulmane anglaise qui, entre autre, fait du port du
voile (avec la complicité même de son diable de mari !) non pas un fardeau, mais un fard-beau
– ainsi, avec Dina Tokio et d'autres, les Lolitas (Lolitas et musulmanes), assurément,
pullulent. D'autres encore ont décidé de se séparer, de divorcer de leur mari qu'elles
trouvaient « macho » ou « irrespectueux » de leurs élans de libertés (vêtements, sorties...). Etc.
P. Quignard écrit : « Dans les sociétés l'identité de chacun est entièrement soumise au
langage, c'est-à-dire à l'échange de soi par les autres ou de chacun par tous. C'est ce qui les
définit comme sociétés. L'amour est l'événement intemporel par lequel l'identité d'une
femme ou d'un homme cesse soudain d'être entièrement assujettie à l'échange exercé par un
tiers. C'est la parenté désaffiliée, le statut piétiné, la classe bafouée, la généalogie déchirée.
L'amour échappe au texte social, à l'initiation, au temps rituel, à la dette généalogique, à la
ligature familiale, au circuit d'échange des noms, de pouvoirs, de biens. Aussitôt toutes ces
instances cherchent à prendre revanche contre les amants qui les fuient »1.
Pourquoi le nier ? Existent aussi, aujourd'hui, de très nombreuses femmes
musulmanes qui, après avoir cédé sur leur désir à l'endroit d'une rencontre amoureuse,
voient leur corps et leur âme subitement colonisés par la passion triste. Chacune tente,
parfois en vain, d'oublier l'amour qu'elle portait à un homme que l'Autre jugea « infidèle »
ou « mécréant ». Fuir cet Autre pour cet homme que j'aime, me disent certaines d'entre elles,
est une entreprise impossible ou folle où je risque de tout perdre. Et quel est donc ce
« tout » ? L'amour de l'Autre. Et moi de leur rétorquer, généralement – mais, je l'avoue
volontiers aux lecteurs, très souvent en pure perte : si l'Autre conditionne ainsi son amour au
sacrifice de votre singularité, de votre amour ou de ce que vous avez de plus unique, alors cet
amour, qu'il se le garde ! Tout en ajoutant : sachez aussi que plus vous lui cédez, plus vous
disparaîtrez ; plus vous lui donnez, plus vous l'alimenterez ; bref, plus vous le ferez exister,
plus vous in-existerez ! Soyez donc « absolument moderne » (Rimbaud), fidèle à votre
rencontre amoureuse qui témoigne, que vous le vouliez ou non, de l'inexistence de l'Autre ou
que l'Autre, en n'existant que par la forclusion du réel ou des contingences, surprises ou
rencontres amoureuses, est un Autre fondamentalement, et menteur, et contempteur des corps
jouissants.
1
Pascal Quignard, Vie secrète, Paris, Gallimard, coll. « Folio », 1998, p. 140.
DAILY TWEETS du 27 mars 2015
Le Nostalgisme, mal français
Les tweets journaliers de Jacques-Alain Miller
lors de cet entre-deux-tours des élections départementales
@jamplus
Tweet 1
Il n’y a plus à gauche de révolutionnaires, mais des REVOLUs et des gesTIONNAIRES. La
droite capitaliste ? Asphyxiée par la katoréacosphère.
Tweet 2
Le nostalgisme est le mal français au XXIe siècle. Rançon de l’histoire glorieuse de la plus
ancienne et de la plus littéraire des nations.
Tweet 3
D’où le fantasme national : « Qu’il serait beau que l’avenir de la France soit son passé. » Le
#FN n’est rien que le Fantasme National.
Tweet 4
Un fantasme est un axiome, disait Lacan. Impossible de l’invalider en raisonnant. Il faut que
se vide la jouissance nocive qu’il recèle.
Tweet 5
#FN Pour l’heure, c’est partout, dans tous les médias, à tire-larigot, la jouissance du
nostalgisme le plus écœurant. Le public veut ça.
Tweet 6
#FN Les Français n’aimeront jamais l’avenir comme l’aiment les Américains.Mais quand ils
se seront goinfrés de nostalgisme, ils le vomiront.
Tweet 7
« Faut l’temps », comme disait Lacan. Ce ne sera pas dimanche prochain. Endurons. Mais
tolérance zéro pour le nostalgisme, fourrier du #FN.
Tweet 8
#FN Le nostalgisme donne forme idéologique à la dépression qui frappe le pays. Avec
Marine Le Pen dans le cockpit, c’est le crash assuré.
Tweet 9
#FN On demande hommes et femmes de désir pour sauver le cher et vieux pays plein
d’avenir de la dépression sénile qui le ronge.
Tweet 10
LACROIX P.Rosanvallon souligne que le #FN a « percé les digues du monde catholique »
jusqu’alors réticent à son manque de charité-fraternité
Tweet 11
MARIANNE. Julliard : « une gauche digne de son passé » devrait compter sur l’intelligence,
non les sentiments irrationnels, des citoyens.
Tweet 12
Cependant, monsieur, la prise de la Bastille, les 3 Glorieuses, la Commune, l’occupation des
usines sous Blum : intelligence ou déraison ?
Tweet 13
LEFIGARO Ivan Rioufol souhaite un nouveau bipartisme: (FN+ droitiers UMP) versus (Trio
Valls, Juppé, Bayrou + NKM, Pécresse, Baroin).
Tweet 14
Seulement, petit problème : la « mélenchonisation » du #FN, qui le rend inapte à la
« cohabitation avec les libéraux ». Une paille.
Tweet 15
L’HUMA. Cynthia Fleury, psy et philosophe, a confiance dans la sagesse de la nature, qui
« optimise toujours, mais ne maximise jamais. »
Tweet 16
L’HUMA non plus ne maximise pas : elle invite en couv l’électeur de gauche à se mobiliser
pour « donner un coup de frein à l’austérité ».
Tweet 17
#LEMONDE Edito musclé du directeur. Il déplore « la tétanie » ayant accueilli les résultats
du 1er tour, « entre passivité et panique ».
Tweet 18
#LEMONDE Il approuve la dramatisation de l’enjeu par Valls et Sarkozy. Il visionne le
« monde possible » d’une France mariniste.
Tweet 19
#LEMONDE p.10 : Fréjus sous le #FN. On se croirait dans le « Soumission » d’Houellebecq,
avec le FN dans le rôle de la Fraternité musulmane.
Tweet 20
Vu de la gauche de la gauche, « le FN est l’assurance-vie du système. » Ce n’est pas faux.
Que propose Fr. Delapierre ? La VIe République.
Tweet 21
Et Plenel ? Que dit Edwy ? Il ne dit rien. Et cela laisse entendre beaucoup. Qu’il pense que la
conjoncture est pain béni pour le système.
Tweet 22
DAILY TWEETS Demain matin seulement, car je serai ensuite à une réunion d’institutions
cliniques à l’Ecole de la Cause freudienne.
Tweet 23
DAILY TWEETS Dimanche : silence. Lundi et mardi : bilan final, et suspension de mes
tweets de l’entre-deux-tours.
Lacan Quotidien
publié par navarin éditeur
INFORME ET REFLÈTE 7 JOURS SUR 7 L’OPINION ÉCLAIRÉE
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directrice de la rédaction catherine lazarus-matet [email protected]
directrice de la publication eve miller-rose [email protected]
conseiller jacques-alain miller
▪ comité de lecture
pierre-gilles gueguen, catherine lazarus-matet, jacques-alain miller, eve miller-rose, eric zuliani
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édition cécile favreau, luc garcia
diffusion éric zuliani
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technique mark francboizel & olivier ripoll
médiateur patachón valdès [email protected]
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