LK 2014-1 Abiturprüfung Hessen 2014: Französisch

Abiturprüfung Hessen 2014: Französisch Leistungskurs
Vorschlag A
Fatou Diome : « Le Ventre de l’Atlantique » (roman, 2003)
Moussa, jeune footballeur sénégalais, recruté par un « chasseur de talents » pour un
grand club français, vient de commencer son entraînement dans un centre de formation.
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[…] Moussa découvrait la rigueur de l’hiver, les morsures du vent sur sa peau, la
rareté du soleil, puis ce rhume prolongé qui l’obligeait, même sur le terrain, à porter
souvent la main à son nez. Il découvrait aussi ses compagnons du centre de formation, en majorité des Blancs, pas franchement camarades. Au centre, l’esprit
d’équipe, on s’en torchait. Les dents étaient longues, le gibier insuffisant. Les stagiaires savaient qu’ils ne seraient pas tous titularisés. Les quelques places du grand
club s’arrachaient à coups de crampons et d’intimidations. Il fallait avoir des nerfs
d’acier. Moussa n’avait pas l’habitude d’une telle compétition : là-bas, chez lui, on
lui avait appris qu’il ne fallait pas envier, jalouser, ni même rivaliser, que seul Dieu
accorde à chacun ce qui lui est dû dans l’existence. Du sport, en dehors de la promesse de réussite, Moussa n’en attendait qu’une franche camaraderie et le respect
mutuel. Il ne trouva que calculs sordides et mépris. Sur le terrain, il perdait ses
moyens lorsque certains de ses coéquipiers lui hurlaient :
– Hé ! négro ! Tu ne sais pas faire une passe ou quoi ? Allez ! Passe le ballon, ce
n’est pas une noix de coco !
Aux vestiaires, il y en avait toujours un pour le ridiculiser devant les autres :
– Alors ? Tu ne sais pas faire une passe ? T’inquiète, on t’apprendra, on te fera
visiter le bois de Boulogne la nuit, tu seras invisible mais tu pourras tout voir.
– Hé ! les gars ! Peut-être qu’il préfère Pigalle ? Devinez quoi, le mec, il n’a
jamais visité Paris et vous savez ce qu’il m’a sorti la dernière fois ? Eh oui ! C’était le
temps des confidences, quoi, alors forcément, pour oublier le mal de sa cambrousse,
Tarzan s’épanche. Alors, les gars, vous voulez vraiment savoir ce qu’il m’a dit ?
– Eh ! fais pas chier ! criait le caïd. Accouche, qu’on rigole un peu.
– Ben, il dit que c’est un célèbre sculpteur français du XVIIIe siècle, un certain
Jean-Baptiste, qui aurait donné son nom à la rue Pigalle ! Vous entendez ça, les
mecs !
– On se demande où il va chercher tout ça. Me dis pas que ça discute sculpture
sous les bananiers !
[…]
Motivé, Moussa offrait son dos aux blagues déplacées, se retenant de boxer les
auteurs des injures et des quolibets. […] [Il] se consolait avec des mots bien de chez
lui : « les vagues peuvent toujours frapper, elles ne feront qu’affûter le rocher ». […]
Recruté sur son potentiel d’attaquant, Moussa n’avait jamais inscrit le moindre but,
malgré les entraînements intensifs et ses nombreux gris-gris. Lors des vrais matchs, il
lui fallait se contenter de lustrer le banc de touche ou de servir de numéro compléLK 2014-1
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mentaire, souvent placé à contre-emploi dans des postes qui ne lui permettaient nullement de mettre en valeur ses atouts d’attaquant. Il admirait les vestiaires, appréciait
les douches chaudes sous lesquelles il imaginait de belles actions qu’il n’avait jamais
pu réaliser. […] Non seulement le froid lui nouait les muscles, mais il devait fournir
d’énormes efforts pour se traîner avec cette boule de nostalgie qui grossissait dans
son ventre et ne laissait presque plus de place à la nourriture diététique du centre de
formation. […] [Ses] résultats demeuraient décevants. Le centre ne voulait plus de
lui.
[…]
– Écoute, champion, lui dit [son recruteur], j’ai déjà assez dépensé comme ça, et
tu ne progresses vraiment pas. On va arrêter les frais. Tu me dois environ cent mille
balles. Il faudra que tu bosses pour ça. Comme tu le sais, ta carte de séjour est périmée. Si tu t’étais bien débrouillé, le club aurait tout réglé en vitesse : mon fric, tes
papiers, tout, quoi. Mais là, tu n’as ni club ni autre salaire ; le renouvellement de la
(661 mots)
carte de séjour, faut même pas y songer.
Fatou Diome: Le Ventre de l’Atlantique, S. 99 –102 © Editions Anne Carrière, Paris, 2003
Annotationen:
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l. 5
l. 6
les morsures f.
se torcher de vulg.
le gibier
titularisé, e
les blessures f.
ici : se moquer de fam.
ici : dt. die Beute
être intégré, e définitivement dans le club de
football
l. 7
à coups de crampons et d’intimidations ici : dt. mit Hauen und Stechen
l. 12
sordide
méchant, e
être bloqué, e / avoir un black-out
l. 12 /13 perdre ses moyens m.
l. 17
faire une passe
passer le ballon ; jeu de mots ici : rapport sexuel
rapide d’une prostituée avec son client
l. 18
le bois de Boulogne
un lieu très fréquenté de la prostitution à Paris
un quartier / une rue à Paris où se trouvent
l. 19
Pigalle / la rue Pigalle
beaucoup de bars et de cabarets et qui est
fréquenté(e) par les prostituées
l. 21
le mal de sa cambrousse fam.
le mal du pays
l. 22
s’épancher
se confier
l. 23
faire chier qn vulg.
embêter qn
l. 23
accouche vulg.
dt. Heraus mit der Sprache!
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des quolibets m.
des propos moqueurs, des propos méchants
l. 32
affûter
ici : dt. schärfen, härter machen
l. 33
inscrire un but
marquer un but
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le gris-gris
afrikanischer Glücksbringer
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lustrer le banc de touche
dt. die Auswechselbank schmücken
l. 36
à contre-emploi
dt. entgegen seinen Fähigkeiten
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ses atouts m.
ici : son talent
environ 15 000 E
l. 46 / 47 cent mille balles f. fam.
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Aufgaben
1. Résumez le texte. (Material)
(25 BE)
2. Analysez le comportement de Moussa et celui des autres joueurs.
(25 BE)
3. Comparez la situation de Moussa à celle d’un personnage rencontré en
cours.
(25 BE)
4. Après cette expérience, Moussa retourne dans son pays natal. Rédigez
ses pensées sous forme de monologue intérieur.
(25 BE)
Lösungsvorschläge
1. L’extrait du roman « Le ventre de l’Atlantique » de Fatou Diome, paru en 2003,
parle d’un jeune Sénégalais, Moussa, qui n’arrive pas à réaliser son rêve de faire
une carrière de footballeur professionnel en France.
Différentes circonstances empêchent cela. D’abord, ce sont les conditions climatiques qui diffèrent beaucoup de celles en Afrique. À part cela, c’est la concurrence de ses camarades. Au sport, il attend une franche camaraderie et du respect
mutuel comme il l’a connu dans son pays d’origine. Par contre ses compagnons en
France, en majorité des Blancs, l’insultent verbalement et le harcèlent sans arrêt.
Ils se moquent de la couleur de sa peau et de son origine ce qui fait que ses résultats sportifs demeurent décevants. Par conséquent, il se retrouve de plus en plus
sur le banc de touche et le centre ne veut plus de lui. Il n’a plus le soutien financier de son recruteur, il doit travailler pour payer ses dettes et le renouvellement
de sa carte de séjour est en danger.
(169 mots)
2. Moussa va en France afin de réaliser son rêve : il veut devenir footballeur professionnel dans un grand club français. Il arrive dans un centre de formation où
ses nouveaux camarades sont en majorité des Blancs. Il n’y a que peu de joueurs
qui seront titularisés (l. 6) et c’est pourquoi il y a une compétition énorme parmi
les candidats (l. 12).
Moussa n’arrive pas à transférer les idées sportives de son pays natal et le comportement compétitif de ses compagnons lui est étranger. Par conséquent, il s’isole
parce qu’il ne sait pas gérer les offenses reçues et les attaques des autres qui
naissent d’une part de leur peur et de leur jalousie de ne pas être pris. D’autre part,
elles sont simplement du racisme : dans leur moqueries (l. 14 – 28), ils se réfèrent à
des clichés sur les Africains (« les noix de coco », (l. 15), « les bananiers », l. 28),
ils disent qu’on ne voit pas Moussa dans la nuit et ils font comme s’ils étaient
surpris qu’un Noir sache parler de l’art.
Moussa ne se défend pas parce qu’il a peur de ne pas être titularisé. Il s’attache
aux souvenirs de son pays d’origine et ses porte-bonheur africains. Sous l’influence du mal du pays, des problèmes psychiques et de la situation climatique,
des problèmes physiques apparaissent ce qui l’empêche de progresser. (178 mots)
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