mars juin septembre décembre 2011 le sociographe recherches en travail social 2012 2013 2014 2015 numéro quarante-huit Nouvelle gestion sociale des SDF Dossier coordonné par Anne-Françoise Dequiré (Maître de conférences, Institut social de Lille (Université catholique de Lille)) et Stéphane Rullac (Responsable du pôle recherche de BUC Ressources) Orientations Pour promouvoir et favoriser la recherche en travail social, des instituts de travail social se sont associés autour du projet du Sociographe pour contribuer à travailler les articulations entre réalités sociales, pratiques professionnelles et prescriptions politiques de ce qu’on nomme le « travail social ». En période de transformations importantes, il semble nécessaire de restituer au plus près les témoignages comme ce qui fonde les réalités des individus et peut permettre de mieux adapter les pratiques professionnelles et les volontés politiques. En cela, Le sociographe se propose d’exploiter tous les éléments qui traversent la question sociale, pour contribuer à tracer ce qui pourrait faire objet commun entre recherche de terrain, écrits de formations et collecte de témoignages « socio-graphiques ». Il nous reste à inventer une « socio-graphie » comme ce qui pourrait être une « épistémologie du témoignage ». Toute réalité sociale et historique ne se dévoile-t-elle pas par le jeu des valeurs accordées ou non à des témoignages ? Le sociographe propose un cadre de travail, d’écritures, de lectures et d’échanges pour développer une réflexion sur les méthodes et les pratiques d’intervention. Sont attendus des articles qui : 1/ décrivent des pratiques sociales ; 2/ présentent des pratiques professionnelles qui se placent devant des populations ; 3/ questionnent des politiques sociales ; 4/ tentent de conceptualiser des réalités sociales. Le sociographe. 1011, rue du pont de Lavérune. CS 70022. F-34077 Montpellier cedex 3 Tel : 04 67 07 82 73 / E-mail : [email protected] / www.lesociographe.org 45 46 47 48 49 50 Debut_48:Debut_28.qxd 01/12/2014 09:49 Page 1 Debut_48:Debut_28.qxd 01/12/2014 09:49 Page 2 Revue publiée par... En France : Askoria, Buc Ressources (Yvelines), l’ESTES Strasbourg, l’ESTS du Nord-Pas de Calais, l’IREIS Rhône-Alpes, les IRTS de Basse-Normandie, de Champagne-Ardenne, d’Ile-de-France Montrouge Neuilly-sur-Marne, du Languedoc-Roussillon, du Nord-Pas de Calais, de PACA et Corse, de Poitou-Charentes et de la Réunion, l’Institut social de Lille. ...En partenariat avec les établissements gestionnaires : ADSSEAD, ANAJI, La maison des enfants, La Sauvegarde du Nord. ... A l’étranger : Centre jeunesse de Québec (Canada), HETS (Suisse), ISSSP (Portugal). Numéro ISSN : 1297 - 6628 Numéro ISBN : 978-2-918621-22-5 Dépôt légal : décembre 2014 La responsabilité des articles incombe à leurs auteurs. Remerciements à Eric Lemaire pour son aide sur la couverture. Comité d’orientation scientifique > Jacques Ardoino (Professeur émérite, Paris VIII), Brigitte Bouquet (Professeur émérite, CNAM), Robert Castel U (Directeur de recherches émérite, EHESS), Jacques Donzelot (Maître de conférences, Université de Nanterre), Eugène Enriquez (Professeur émérite, Paris VII), Claude Javeau (Professeur émérite, Université libre de Bruxelles), Emmanuel Jovelin (Professeur, Université catholique de Lille), François Laplantine (Professeur émérite, Lyon 2), David Le Breton (Professeur, Université de Strasbourg), Edgar Morin (Directeur de recherches émérite, CNRS), Jean-Bernard Paturet (Professeur, Montpellier III) Comité des directeurs > Michel Charpy (IRTS CA), Bertrand Coppin (ESTS NPDC), Stéphane Doutrelon (IRTS Poitou-Charentes), Jacques Fraisse (IRTS LR), Monique Girier (IRTS Réunion), Jean-Michel Godet (IRTS BN), Michel Hochart (BUC Ressources), Christophe Itier (La Sauvegarde du Nord), Hervé Létang (IRTS Ile-de-France Montrouge Neuilly-sur-Marne), Joëlle Libois (HETS-Genève Suisse), Jean-Pierre Guffroy (IRTS NPDC), Béatrice Muller (ESTES), Manuel Pelissié (IREIS Rhône-Alpes), José Alberto Reis (ISSP, Portugal), François Sentis (IRTS PACA-Corse), Agnès Vinchon (ISL), Jérôme Wenz (Askoria) Comité de rédaction > Irène Albert (IRTS Réunion), Sophie Ansart (IRTS NPDC), Didier Cattin (HETS-Genève, Suisse), Corinne Chaput-Le Bars (IRTS BN), Anne-Françoise Dequiré (ISL), Charles Foxonet (membre fondateur), Danièle Gallinaro (IRTS Réunion), Berta Granja (ISSP, Portugal), Hassan Hajjaj (IRTS PACA-Corse), Laurence Hardy (Askoria), Monique Jeannet (IRTS LR), Marie-Gabrielle Mathely (IRTS PACA-Corse), Alexis Mombelet (IRTS Ile-deFrance Montrouge Neuilly-sur-Marne), Didier Morel (ESTS NPDC), Brigitte Mortier (IRTS LR), Marc Rouzeau (Askoria), Stéphane Rullac (Buc Ressources), Guy Schmitt (ESTES), Ahmed Nordine Touil (IREIS Rhône-Alpes), Catherine Tourrilhes (IRTS CA), Didier Wouters (La Sauvegarde du Nord), Comité de lecture > Elodie Bonnel (Assistante sociale, 59), Thierry Braganti (Formateur, IRTS CA, 51), Michèle Ciotta (Assistante sociale, service de santé au travail, 92), Alice Delboë (Chargée de mission, ESTS NPDC), Dominique Devieilhe (Formateur, IRTS BN, 14), Gérald Dudoit (Consultant-formateur, 34), Isabelle Fernandez-Fabre (Formatrice, IRTS BN, 14), Isabelle Fiand (Responsable d’activités et de projets, Askoria, 35), Marie-Anne Gaudin (Formatrice, IRTS BN, 14), Yannick Guillaume (Cadre pédagogique, IRTS CA, 51), Nabil Hajji (Adjoint de direction, ITES, 29), Jeanne Hillion (Assistante de service social, 29), Maurice Jeannet (Consultant, à la retraite, 34), Muriel Lebarbier (Chef de service, CHRS, 14), Ana Paula Levivier (Psychologue clinicien, IME, 51), Sabine Maillot (Formatrice, IRTS PACA-Corse, 13), Sophie Mathieu-Cabouat (Directrice SESSAD-IMP-Pro-SPFS, Les Platanes, 30), Arnaud Papin (Coordinateur de projets socio-éducatifs, 34), Jacqueline Pâris (Formatrice, IRTS LR, 34), Muriel Prost (Documentaliste, IREIS, 42), Ibrahima Samba (Superviseur, réseau de transport, 77), Stéphane Schmitt (Assistant de service social, CRAM, 67), Shérif Toubal (Formateur, IFME Nîmes), Vincent Tournier (Psychothérapeute et formateur, 34), Corinne Unsen (Responsable de formation, IFME Nîmes) Directeur de publication > Jacques Fraisse Rédacteur en chef > Guy-Noël Pasquet Secrétaire de rédaction et concepteur graphique > Marc Trigueros Suivi des abonnements > Yan Fontaine Impression > Présence graphique (37, Monts) - N° d’imprimeur : 070724671-2500 Editeur > Champ social éditions, soutenu par la Région Languedoc-Roussillon Debut_48:Debut_28.qxd 01/12/2014 09:49 Page 3 Sommaire / 3 (numéro quarante-huit/ 4/ Editorial Une adresse pour les SDF − DOSSIER − 7/ Anne-Françoise Dequiré et Stéphane Rullac Les « SDF » ou le marqueur d’une modernité en trompe l’oeil (présentation du dossier) 1/ Ici et ailleurs 11/ Pascal Noblet Les Enfants de Don Quichotte. De la « stabilisation » au « logement d’abord » 21/ Antonin Margier, Céline Bellot et Richard Morin L’itinérance en milieu urbain. Deux voies de normalisation 33/ Anne-Françoise Dequiré, Emmanuel Jovelin et Sarah Toulotte L’accompagnement social des jeunes en errance en Grande-Bretagne 45/ Claire Ansermet et Jean-Pierre Tabin Misère de la gestion de la misère. En Suisse 2/ Nouveaux dispositifs 57/ Vicent Montalban Aroca Une juste distribution des places ? Les Services intégrés de l’accueil et de l’orientation 67/ Corinne Chaput-Le Bars et Arnaud Morange Le Housing-first. L’expérimentation à la française 3/ ... Accompagnements renouvelés 79/ Pascale Pichon Sortir de la rue. Question de recherche et enjeu d’action 91/ Sophie Rouay-Lambert Où va la parole des SDF ? La « marge » peut-elle enfin instruire l’institutionnel ? − POLYGRAPHIE − 107/ Didier Wouters Polyphonie du cadre (présentation de la rubrique) 108/ Isabelle Houllier et Aurélie Taine La « prise en conte » du travail quotidien. Conversation à deux voix 119/ Benoit Serriot Négocier. Une pratique du cadre au service de l’accompagnement 123/ Sébastien Fournier L’Atelier bois. Un support éducatif / décembre 2014) Poursuite, p. 102 / Résumés/ Abstracts, p. 130 / Notes de lecture, p. 134 / Agenda, p. 142 / Achat, p. 143 / Parutions, p. 144 Debut_48:Debut_28.qxd 01/12/2014 09:49 Page 4 / 4 Editorial Une adresse pour les SDF Dans le froid de l’hiver, peut-être faut-il penser à livrer un Sociographe tout chaud...! Un Sociographe qui donne un peu de chaleur, mais les mots peuvent-ils réchauffer ? Bien sûr, on pourra toujours dire qu’une parole peut chauffer le cœur ou l’âme, réconforter en quelque sorte. Et on pourra toujours se targuer de faire quelque chose pour ceux qui ont froid, au moins parce que chaque année, l’hiver livre son lot de palabres condescendantes, de pamphlets indignés, de discours politiques pour faire quelque chose pour ces gens de peu qui ont froid. Faut-il railler ces rengaines, ces leitmotivs ? Sans doute, parce que malgré toutes ces bonnes intentions, le froid continue à tuer chaque année et qu’on ne peut s’y résigner. Pour autant, mieux vaut encore des mots qu’un silence assourdissant...! Si les mots ne suffisent pas et ne sauraient donner bonne conscience, ils ont au moins le mérite d’exister. Mieux vaut une parole qui ne change certes pas la condition, mais une parole tout de même. Ce qui exaspère souvent, c’est que la parole ne s’adresse pas forcément à ceux qui en auraient le plus besoin. Fautil parler du froid ? Sans doute, mais plutôt à ceux qui ont froid plutôt que de réserver les échanges entre ceux qui sont bien au chaud. Aussi, parler des conditions insupportables de la rue, c’est peut-être d’abord s’adresser à ceux qui y sont. Au moins pour un « bonjour », pour un « désolé de ne pas vous donner la pièce ». Au mieux pour leur demander s’ils veulent un vêtement, prendre une douche, manger un morceau ou boire un coup. Parler aux gens de la rue n’est pas la même chose que de parler des gens de la rue. Le problème c’est que parler aux gens de la rue est une activité guère gratifiante et peu valorisante alors qu’on peut faire carrière en parlant des gens de la rue. Gestionnaires, travailleurs sociaux, politiques, chercheurs, enseignants et même éditorialistes comme moi à l’instant dans ces lignes, peuvent vivre du fait de parler des gens de la rue en attendant de parler peut-être aux gens de la rue. On est payé pour parler des gens alors que c’est un coût de parler aux gens. Un coût parce que ce n’est pas facile de regarder la misère, de s’y arrêter. On sait qu’elle est là, à nos portes et qu’elle peut aussi nous emporter avec elle. Ne pas voir les gens de la rue, c’est aussi sans doute manifester sa crainte d’en être un jour. Et lorsqu’on ne veut même plus les croiser, c’est sans doute qu’on fait partie de ceux qui produisent cette misère en s’appropriant, au-delà du raisonnable, des ressources qui ne peuvent plus être données à d’autres. Ainsi, parlant des gens de la rue plutôt qu’aux gens de la rue, on peut égrener à l’infini le chapelet du lien social en passant d’une perle à une autre sans conserver le fil qui les lie, le fil du récit d’une certaine manière. C’est que le lien social, avant d’être un objet de discussion et de discours, c’est cette façon que nous Debut_48:Debut_28.qxd 01/12/2014 09:49 Page 5 Editorial / 5 avons de parler à l’autre plus que de parler des autres. Ce dont souffre sans doute la personne dans la rue, c’est qu’on ne lui adresse pas la parole. Entendons là qu’il n’a pas d’adresse. Une adresse, c’est d’abord être destinataire d’une parole, d’un message, d’un lien. Bien sûr que le paysage urbain est condensé de monde, stressant, rempli, touffu, dense, grouillant, scintillant, lumineux et qu’on ne peut prêter attention et réagir à tout ce qui s’y passe. Mais de la même manière qu’on peut interagir devant les vitrines, on pourrait aussi interagir devant les gens. Chacun de nous, dans l’espace public, est comme une écriture. Nous donnons à voir, à interprétation, à réaction, par nos gestes, la façon dont on s’est préparé le matin pour sortir, par nos regards. Parfois nous sommes lus et nous lisons l’autre et nous adressons un sourire, un regard, un bonjour ou au contraire nous tournons ostensiblement la tête. Parfois hélas, on peut traverser toute une journée et toute une ville sans que nous produisions aucune réaction, comme si nous étions transparents, vaporeux dans un ciel trop chargé. Il semble alors que nous n’écrivons rien, que nous ne participons à rien. C’est peut-être là la condition du SDF. Alors si le Sociographe peut contribuer au moins à redonner le goût à lire et à écrire, ayons au moins l’ambition de contribuer à ce que l’autre soit une écriture qu’on lit et qui nous lie les uns aux autres. En cela, la publication devrait toujours être une façon de travailler le social et une contribution à son récit qui en est son sédiment. GNP Approches de chercheurs dans le travail social sous la direction de Catherine Tourrilhes et Nadia Veyrié (Hors-série 7, 2014) Ce numéro rassemblent des contributions de chercheurs qui offrent une pluralité d’approches dans le travail social tant dans les objets, les terrains, les méthodologies, les postures que dans leurs liens avec la formation, les terrains professionnels et les publics. Ces démarches singulières de recherche, qui font résonnance entre elles, montrent que l’approche du chercheur ne se réduit pas à une méthode. Elle est une attitude qui intègre le doute, la prudence et le respect pour l’objet étudié, une posture qui met au coeur de la démarche l’implication, l’analyse critique et l’incontournable éthique. Recherche en travail social : les approches participatives sous la direction de Dominique Paturel (Champ social éditions, collection Le sociographe, 2014) Cet ouvrage reprend les interrogations sur ce que peut être l’approche participative dans la recherche en travail social en fonction des destinataires de l’intervention, par rapport aux relations de pouvoirs et dans la constructions des savoirs. La diversité des chercheurs et de leurs approches reflètent l’état des travaux aujourd’hui sur la recherche participative à propos de la question sociale en Europe. D’autre part, Dominique Paturel, chercheure à l’Inra, qui a dirigé cette publication, fait partie de ces chercheurs qui ont le souci de l’interface entre le développement, la recherche et la société. Plus d’infos : www.champsocial.com Debut_48:Debut_28.qxd 01/12/2014 09:49 Page 6 / 6 Dossier coordonné par Anne-Françoise Dequiré (Maître de conférences, Institut social de Lille (Université catholique de Lille)) et Stéphane Rullac (Responsable du pôle recherche de BUC Ressources) [email protected] / [email protected] Debut_48:Debut_28.qxd 01/12/2014 09:49 Page 7 Présentation, 48, 2014 / 7 Les «SDF » ou le marqueur d’une modernité en trompe l’oeil L’acronyme « SDF » (Sans domicile fixe) a fait son apparition dans les années 1990, comme le marqueur d’une nouvelle approche de la prise en charge de l’éternelle problématique sociale de la très grande pauvreté, qui amène certains à vivre et à trouver des ressources partiellement ou totalement dans l’espace public. Dès lors, la population SDF est devenue une figure collectivement partagée et une représentation évidente du nouveau clochard, mendiant ou encore vagabond. Les médias, mais aussi les scientifiques, ont alors progressivement commenté ce nouveau groupe, qui trouve pourtant davantage sa cohérence sociologique dans les dispositifs assistanciels qui les réunissent, plutôt que dans une éventuelle culture commune intrinsèque à chacun de ses membres. Cependant, comme une prophétie auto réalisée, ce supposé groupe a été progressivement l’objet de politiques sociales de plus en plus développées, pour tenter de gérer techniquement ce qui est devenue « la question SDF ». De fait, les SDF sont aujourd’hui des usagers du travail social, dans ce qu’il convient d’appeler le secteur AHI (Accueil hébergement insertion). Né dans l’urgence sociale en 1992, au cœur du SAMU Social de Paris, l’AHI dispose aujourd’hui de nombreux textes juridiques, de droits (inconditionnalité de l’hébergement, continuité de la prise en charge, droit à l’hébergement opposable, etc.), de dispositifs très nombreux (citons par exemple les Centres d’hébergement d’urgence et de stabilisation) et enfin, d’un référentiel d’activités depuis 2005. Notons par exemple que le SIAO (Service intégré d’accueil et d’orientation) vient d’être consacré par loi dit ALUR (Accès au logement et à un urbanisme rénové), votée en février 2014. La principale question qui a structuré ce dossier est de savoir dans quelle mesure les trois lettres constituant le sigle « SDF » permettent-elles de désigner une population homogène, au seul titre de leur accompagnement. Notre intérêt de départ était principalement centré sur la France qui expérimente maintenant depuis plus de 20 ans une tentative de rationaliser techniquement ce que nous avons choisi de dénommer comme constituant une nouvelle gestion sociale des SDF. Cependant, les différents auteurs qui ont contribué nous ont emmenés en dehors de nos frontières, en s’inscrivant pourtant pleinement dans la problématique proposée ; preuve s’il en est que les différents pays européens sont aujourd’hui confrontés à des problématiques sociales, non pas comparables mais du moins assez proches. Debut_48:Debut_28.qxd 01/12/2014 09:49 Page 8 / 8 Dans ce dossier consacré à la « nouvelle gestion sociale des SDF », les auteurs tentent de questionner cette tentative moderne de manager la question SDF en France et « ailleurs » : quels sont ces nouveaux dispositifs en faveur des SDF ? quels sont leurs impacts sur les types d’accompagnement ? comment les anciens dispositifs cohabitentils avec les nouveaux ? comment évaluer leurs pertinences ? La première partie se propose de croiser les nouvelles politiques en France et « ailleurs ». D’abord, le texte de Pascal Noblet présente le profil des personnes SDF et revient sur l’évolution majeure suscitée par les Enfants de Don Quichotte en 2007 et sur les transformations du dispositif d’hébergement en France, qui se sont alors éloignés du règne de l’urgence sociale. Antonin Margier, Claire Bellot et Richard Morin mettent en exergue deux modèles de gestion de la question de l’itinérance à travers les politiques mises en œuvre dans des villes canadiennes. Puis AnneFrançoise Dequiré, Emmanuel Jovelin et Sarah Toulotte relatent les résultats d’une recherche relative à l’évaluation des politiques et initiatives en faveur des jeunes en errance dans le Kent, en Angleterre. Enfin, Claire Ansermet et Jean-Pierre Tabin s’intéressent, dans le cadre d’une étude sur la mendicité, à trois dispositifs sociaux d’une ville de Suisse Romande : L’Abri, la Cantine, la Laverie en présentant le fonctionnement et les règles de ces derniers. Dans une seconde partie consacrée aux nouveaux dispositifs, Vicent Montalban Aroca s’interroge sur la création des SIAO engendrant à la fois résistances mais aussi nouvelles pratiques. Quant à Corinne Chaput et Arnaud Morange, ils présentent le dispositif Housing first dont la finalité est l’orientation vers un logement autonome de 100 sans-abri atteints de troubles psychiatriques et la comparaison de leur insertion avec 100 autres personnes inscrites dans le système d’urgence classique. Pour finir, une dernière partie intitulée « Accompagnements renouvelés » recueille une contribution de Pascale Pichon qui s’appuie sur l’expression familière « sortir de la rue » et montre comment l’analyse des situations empiriques des chercheurs engendre trois théories de la sortie reposant sur le répertoire de ces modalités d’expression. Enfin, Sophie Rouay-Lambert s’attache à montrer ce que dit la parole des personnes SDF, notamment des espaces de vie et de leurs contraintes. Nous percevons alors que la parole des SDF reflète un mal-être chez les travailleurs du social et les failles de la politique sociale. Ces différents textes montrent, chacun à leur manière, que la question sociale de la grande pauvreté, du vagabondage et de la mendicité, résiste d’abord au temps mais aussi à notre technicité contemporaine. Voir un homme hirsute en guenilles « résidentialisant » un banc public, nous renvoie à des situations connues depuis des siècles. Malgré nos tentatives de « bonne gestion » et de dépenses conséquentes (la France est notamment le pays européen qui investit le plus pour ces questions), notre modernité n’est toujours pas en mesure de « régler » cette forme de grande pauvreté de toujours, qui s’est aujourd’hui rapatriée au cœur des villes, dans une errance urbaine moderne. Ces articles sont des invitations à revoir notre copie, sans Debut_48:Debut_28.qxd 01/12/2014 09:49 Page 9 Le sociographe, 48, 2014 / 9 . toutefois tomber dans l’illusion que vivre à la rue serait un choix, ni une forme imprescriptible de liberté. Rappelons que d’après Le collectif Les morts dans la rue, 453 personnes ont laissé leur vie sur nos bitumes Anne-Françoise Dequiré et Stéphane Rullac Présentation vidéo du n°48 sur www.champsocial.com Rencontre avec les auteurs du dossier le 10 février 2015 (cf. Agenda, p. 142)
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