Dossier Fe n° 504

DOSSIER
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Enseignement professionnel, filières technologiques
Des jeunes bien
dans leur peau
Avec le service
ICF (Information
et conseil aux
familles) de l’Apel
nationale.
Photos du dossier : Léa Crespi
tous nos remerciements aux Compagnons du Devoir et du Tour de France / Section Charpente et Menuiserie /
Site de Gennevilliers, à l’Institut Nicolas-Barré, à Armentières (59), et au lycée L’initiative, à Paris (75).
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Combattre
Je ne souhaite pas que mon fils
soit ouvrier toute sa vie !
les idées reçues
La réponse de Jean-Marc Petit, en charge de
l’orientation et de la formation professionnelle, au
Sgec, délégué général Rénasup (Réseau national
d’enseignement supérieur privé).
Les voies professionnelles et technologiques n’ont pas en France la
réputation qu’elles méritent. Réponses de spécialistes qui tordent le
cou à certaines idées fausses.
Propos recueillis par Sylvie Bocquet
La voie professionnelle ou technologique,
c’est une voie de garage !
La réponse de Christine Rossignol, responsable du pôle scolarité
aux Apprentis d’Auteuil.
w
Il y a moins de chômage dans certaines
sections professionnelles comme le
bâtiment, par exemple, que dans certaines
filières générales. Et les élèves des voies
technologiques et professionnelles ont des
atouts que leurs camarades des voies générales n’ont pas : une bonne connaissance du
milieu de l’entreprise (l’opportunité de faire
des stages, des enseignants qui sont euxmêmes des professionnels, un vocabulaire
adapté), une plus grande maturité, l’acquisition de connaissances et de pratiques dans
un environnement cohérent, qui les aide
à construire leur personnalité. Mais cette
orientation n’est positive que si l’élève réflé-
L’avis
de l’
Parents d’élèves
de l’Apel, nous
pensons que
l’alternance est une voie
d’excellence. De la 3e à
l’enseignement supérieur, ces
formations sont souvent des gages
d’une bonne insertion
professionnelle et sociale pour nos
enfants. Alterner des périodes en
entreprise et en milieu scolaire
permettra aux jeunes de mieux
s’adapter aux constantes évolutions
chit plus en termes d’activités qu’en centres
d’intérêt (j’aime/je n’aime pas). Ce qui est
important, c’est de pouvoir découvrir des
métiers, lors de stages effectués pendant la
scolarité ou de rencontres avec des professionnels, ou encore à l’occasion de discussions avec ses parents ou d’autres adultes
de son entourage. C’est un dialogue qui peut
commencer tôt et qui aidera le jeune à se
projeter dans l’avenir le plus concrètement
possible. La finalité, c’est de quitter peu à
peu ses rêves d’enfant et de trouver le point
de rencontre entre ce que l’on est et ce que
l’on va faire..w
du monde
professionnel et à
anticiper les
éventuelles
changements de
secteurs. Ainsi, la
formation tout au
long de la vie
deviendra pour eux une évidence.
Cédrick Reynaud, membre du Bureau
national de l’Apel en charge du réseau
École et monde professionnel (EMP).
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Mon enfant a été
orienté vers un bac
pro qui ne correspond
pas à son choix.
Doit-il renoncer à son
projet ? La réponse de Ferroudja Kaci,
conseillère au Cidj (Centre de
documentation et d’information
jeunesse)
w
L’orientation vers la voie professionnelle ne doit surtout pas être subie mais
bien préparée en amont, afin d’éviter la décision de dernier moment et le risque d’aller
là où il reste des places. Ainsi, il est utile de
faire le point avec son enfant avant la fin du
premier trimestre de la classe de 3e, surtout
si son dossier est fragile. Anticiper et l’aider
à découvrir les métiers, puis les filières et
enfin les débouchés. S’intéresser à la voie
professionnelle pour que cette orientation
soit un vrai choix. Si néanmoins, le jeune est
orienté vers une voie qu’il n’a pas choisie, il
existe en seconde pro des passerelles qui
permettent de changer de domaine avant
de choisir, l’année suivante, une spécialité
qui l’engagera davantage.
Adresses utiles
w wwww.cidj.com
w www.apprentis-auteuil.org
w
Que met-on derrière le mot
ouvrier ? Les voies professionnelles mènent à des métiers qualifiés, avec de réelles
opportunités d’évolution. On
peut ainsi, après un bac pro et
un BTS, accéder assez rapidement à des fonctions de technicien. Elles mènent aussi à
de nombreux métiers manuels
qui ont évolué sur l’échelle de
la valorisation sociale et des
Un jeune qui ne passe pas par la
voie générale n’a aucune chance de
faire des études longues !
La réponse de Jean-Marc Petit et Ferroudja Kaci
revenus. De l’ouvrier à l’artisan d’art, il n’y a qu’un pas et
dans le mot artisanat, nous
retrouvons le mot “artiste”,
qui est porteur de reconnaissance personnelle. Un jeune,
simplement titulaire d’un bac
général, qui ne poursuit pas
ses études, aura moins d’autonomie professionnelle qu’un
jeune diplômé de l’enseignement professionnel.
w
Le bac d’enseignement général n’est pas la garantie absolue
de pouvoir faire des études longues et le taux d’échec en première année d’études supérieures est parfois important ! Rien ne
sert non plus d’étaler sur le papier ses études supérieures comme
des quartiers de noblesse, mieux vaut se demander : quelles
études pour quels métiers ? Dans la voie technologique et professionnelle, la poursuite d’études est non seulement possible, mais
vivement encouragée. Un jeune titulaire d’un CAP, qui passe ensuite son bac pro et poursuit en licence professionnelle a un profil
prometteur pour un employeur. Il est également recommandé de
poursuivre ses études après un bac techno : DUT, BTS et pourquoi
pas, par le jeu des passerelles, l’intégration dans une école de
commerce ou d’ingénieurs.
J’ai peur que ma fille n’ait pas fait le bon choix
et rate son orientation
La réponse d’Yves Mariani, directeur des Observatoires de l’Enseignement catholique
w
Parlons plutôt de choix progressifs
et successifs, que d’un seul choix.
L’orientation continue d’être vécue de façon
irréversible, ce qui est en décalage avec le
développement affectif d’un jeune de 14-15
ans. La troisième, c’est le début de 10 années
d’adolescence ! Et l’adolescence, c’est précisément le temps de l’indétermination. Dédramatisons au maximum ce premier choix,
et ne le transformons pas en verrou ! Laissons au jeune le temps de se découvrir, étape
par étape et de vivre une première réussite.
L’enseignement agricole, c’est
pour être agriculteur !
La réponse de Philippe Poussin, Secrétaire général du
Cneap (Conseil national de l’enseignement agricol privé).
w
40 % seulement des
élèves entrent dans
l’enseignement agricole pour
travailler dans la production
animale ou végétale ! Que font
les 60 % autres pour cent ? Des
études avec un fort ancrage
territorial, à l’intérieur de deux
autres familles de métiers :
la nature (aménagement du
paysage et horticulture), les
services aux personnes et
au territoire (ils représentent
la moitié des effectifs des
élèves). Les formations vont
de la 4e au BTS, en passant
par des CAPA et des bacs pros
agricoles. À noter également
le bac techno Stav et le bac
S agricole… 85 % des jeunes
qui sortent avec un diplôme
quel qu’il soit trouvent un
travail dans les 6 mois. Avis
à tous les jeunes citadins qui
aiment la nature, les activités
extérieures, la vie végétale et
animale !
Dans la majorité des cas, c’est ce que permet
l’enseignement professionnel qui accepte
les parcours en zig-zag, aide les élèves à développer leur curiosité et à reconstruire leur
estime de soi.
Dans notre famille, personne
n’a jamais suivi une voie
professionnelle !
La réponse de Christine Rossignol
w
Cette peur d’un déclassement social ressentie par
de nombreuses familles est indéniable. Elle est sans doute plus
forte vis-à-vis de la filière professionnelle que de la filière technologique. La question essentielle
est la suivante : vaut-il mieux rester le “nullos” de sa classe et privilégier l’entre soi ou explorer, en fin
de 3e, ses points forts et accepter
de découvrir un autre milieu.
Autre question indispensable :
est-ce que je connais suffisamment les différentes filières proposées ? La voie professionnelle
ou technologique, ce n’est pas
que l’industrie, qui représente
une minorité d’embauches, ce
sont aussi les métiers de bouche,
d’art, de service à la personne…
qui sont autant de voies d’excellence à condition que cela soit le
choix d’un jeune partagé par sa
famille et non pas le choix de la
famille partagé par le jeune.
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La formation en
alternance, c’est pro !
Découvrir avant de choisir
w
Saint-André, à Niort. Dans ce lycée polyvalent
de 1 200 élèves, les jeunes ont la possibilité de
découvrir dès la 4e toutes les formations d’enseignement
général, technologique et professionnel que propose
l’établissement. Une première étape qui peut être suivie
en 3e, pour les élèves qui le demandent, d’une ou de deux
journées d’immersion, sous forme d’un stage d’observation
dans la section de leur choix. « De la mi-janvier à la fin mars,
entre 30 et 50 jeunes assistent aux mêmes cours que les
lycéens. Ils comprennent ainsi mieux ce que l’on attend
d’eux et cela les aide à confirmer ou à infirmer leur choix. »
précise Cécile Dargelos, la directrice. En seconde, les élèves
peuvent également changer de voie. Ils sont chaque année
entre 5 et 10 élèves à saisir cette chance.
Compagnons du
Devoir et Tour de
France, section
charpente et
meunuiserie, site de
Gennevilliers (92).
Contrat d’apprentissage ou contrat de professionnalisation ? Gratuits et rémunérés, du
CAP au master, les deux dispositifs se distinguent par des temps de formation et des diplômes
différents. L’État lors de la journée de mobilisation pour l’apprentissage du 19 septembre dernier,
a annoncé sa détermination de développer cette voie de formation en France, afin de faciliter
l’insertion professionnelle des jeunes. Mode d’emploi.
S
i les périodes de formation en
milieu professionnel (PFMP) sont
de plus en plus nombreuses, l’alternance correspond essentiellement à deux types de dispositifs : l’apprentissage et les contrats de professionnalisation.
Les deux s’appuient sur un contrat de travail
qui implique une rémunération pour le jeune.
Dès lors, ils sont souvent perçus comme
identiques. Pourtant, ils présentent des différences importantes.
Distinguer apprentissage
et contrat de
professionnalisation
L’apprentissage est réservé aux 15-25
ans. Il relève de la formation initiale et doit
mener forcément à un diplôme ou titre
de l’Etat. Le temps en centre de formation par l’apprentissage (CFA) est normé
afin de pouvoir préparer sérieusement
les examens. Le temps en entreprise est
également considéré comme un temps de
formation, avec l’obligation de nommer un
tuteur qui sera en liaison avec l’équipe du
CFA pour assurer la bonne coordination des
activités.
Les contrats de professionnalisation relèvent, quant à eux, de la formation continue et peuvent préparer à un diplôme ou
à d’autres titres de qualification professionnelle reconnus par la profession. Les
temps en centre de formation sont moins
contraints et le ratio temps en centre de formation-temps en entreprise peut parfois se
révéler très court pour préparer un diplôme.
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Une formation gratuite et
rémunérée
Dans les deux cas, la formation est gratuite
pour le jeune. Pour l’apprentissage, elle est
payée par l’entreprise et le conseil régional ; pour la professionnalisation, par les
organismes de financement de la formation
continue. Mais les règles de rémunération
ne sont pas les mêmes. Elles dépendent de
l’âge, du niveau de diplôme préparé et de
l’avancement dans le cursus. Le jeune sera
mieux payé en fin de cursus qu’en début.
Les contrats de professionnalisation sont
souvent plus rémunérateurs, en raison d’un
temps plus important passé en entreprise.
Pour s’inscrire à une formation en alternance,
il faut s’adresser, soit à un centre de formation par l’apprentissage (CFA) ou un centre de
formation continue (CFC) qui oriente le jeune
vers un réseau d’entreprises, soit à des entreprises qui proposent ces types de contrat
et dirigent le jeune vers les CFA ou CFC avec
lesquels ils travaillent.
Des formations exigeantes
Il ne faut jamais oublier que ces cursus sont
fondés sur des contrats de travail et sont donc
exigeants en terme d’implication du jeune qui
devra gérer des semaines de 35 heures (temps
en formation et en entreprise) et intégrer les
codes du monde du travail. C’est pourquoi il
convient d’être vigilant sur quelques points :
- l’aide effective apportée au jeune par le
centre de formation dans la recherche de l’entreprise d’accueil ;
- l’accompagnement dans sa gestion du
temps ;
- la qualité de l’organisation de la formation et
des formateurs, indispensable à une bonne
préparation du diplôme ;
- les solutions proposées par la structure d’accueil en cas d’échec afin de permettre l’émergence d’un nouveau projet ;
- les possibilités offertes pour la poursuite
des études, l’alternance ne doit pas fonctionner comme une voie de garage.
Une aide à l’embauche
D’une manière générale, les centres de formation de l’enseignement catholique sont reliés
à des lycées, ce qui constitue une garantie de
sérieux et de savoir-faire en matière de préparation aux diplômes, d’accompagnement
éducatif et de proposition des poursuites
d’études (exemple de bac pro vers le BTS) .
Ces établissements offrent souvent des parcours mixtes où le jeune commence sa formation par la voie scolaire pour se préparer
à l’alternance. Ces dispositifs facilitent également le retour dans un cursus classique pour
les jeunes qui changent d’avis en cours de
contrat. Contrat d’apprentissage ou contrat
de professionnalisation, ce qui est certain,
c’est que l’alternance facilite à tous les niveaux l’insertion professionnelle en offrant
aux jeunes l’expérience en entreprise de plus
en plus souvent exigée dès l’embauche par
Jean-Marc Petit
les employeurs. w
En charge des questions d’orientation et de
formation professionnelle au SGEC (Secrétariat
général de l’Enseignement catholique),
délégué général Rénasup (Réseau national
d’enseignement supérieur privé).
En savoir plus
Pour en savoir plus sur les
propositions d’alternance au sein
de l’enseignement catholique :
www.renapec.fr/ ou de manière
plus large vosdroits.servicepublic.fr/particuliers/N11240.xhtml
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Des élèves dans
le vif du sujet
Formations en
peinture, carrosserie,
et mécanique : des
formations complètes
pour faire face au
marché.
Reportages dans l’unité de formation par apprentissage de l’Institut Nicolas-Barré,
à Armentières (59), axée sur l’automobile, et au lycée parisien L’initiative, spécialisé dans les arts
appliqués. Des filières de passionnés où les jeunes se prennent au jeu.
À l’Institut Nicolas-Barré, une cabine de luxe pour les
peintures automobiles
À
Armentières, dans le Nord, l’Institut Nicolas-Barré (ex-Saint
Louis) propose, parmi d’autres
cursus, une unité de formation
par l’apprentissage (UFA) à dominante automobile. Bientôt refait à neuf, l’établissement, qui vient de fusionner avec un lycée
professionnel de la ville, accueille en cette
rentrée 730 jeunes : 280 de plus que l’an
dernier ! « On a dû réorganiser un espace de
7 000 m2, rénover nos locaux et construire un
nouveau bâtiment », explique Jean-François
Desbonnet, directeur général de Nicolas-Barré, qui voit dans ce virage « un projet d’avenir ». « Cela crée une dynamique, car il faut
se battre pour valoriser nos filières auprès
des familles. » L’UFA compte 140 apprentis.
Malgré la crise et une baisse des effectifs
d’environ 10 %, l’automobile reste une filière
attirante, notamment pour les garçons, ici en
écrasante majorité.
Partout, les perceuses crissent et les coups
de marteau résonnent : tout doit être fini
avant l’inauguration, le 14 novembre. Dans
le nouvel atelier carrosserie de 1 500 m2, ces
bruits rivalisent avec les couinements des
ponceuses des CAP peinture, qui réparent
des portières, des pare-chocs ou des boucliers. « Une belle peinture, c’est 80 % de
préparation », indique Freddy Rabaey, leur
formateur. Jordan, 18 ans, vient de reboucher une fissure au mastic : « Il faut nettoyer
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tout de suite parce qu’après cela durcit »,
explique-t-il. « Un carrossier doit être minutieux, car les moindres ondulations se voient
sous la peinture. » Peu investi au collège, ce
passionné d’automobile confie s’être mis au
travail en bac pro mécanique, quand il a pu
faire « ce qui lui plaisait ».
Voir plus loin que le CAP
Pour cette première séance, les apprentis
n’ont pas apporté les gants et masques qui
les protègent contre les émanations et les
produits, toxiques à la longue. « C’est le démarrage », lâche, indulgent, leur formateur.
Toute l’année, ils alterneront sept jours à
l’institut, puis quinze en entreprise et ne
prendront que cinq semaines de congés.
« Quand on aime ce qu’on fait, on peut y
passer du temps », estime Benjamin, 20 ans.
Entre deux ponçages, les jeunes parlent des
cas pointus rencontrés au garage, d’une nouvelle Clio rouge, ardue à peindre, de voitures
et de moteurs, un inépuisable sujet d’intérêt.
Tous ont hâte de voir la fin des travaux pour
accéder à la nouvelle cabine de peinture vitrée. Divisée par un volet métallique, elle
pourra accueillir deux véhicules ou un seul
très volumineux. « C’est le top », se réjouit
Freddy Rabaey. « Avec ce nouvel atelier, on
est en phase avec les entreprises. »
Taux d’embauches
de 75 à 80 %
Le secteur automobile a en effet fait un bond
en avant. « Depuis dix ans, on assiste à une
révolution technologique », confirme Mic-
kaël Vermeulen, formateur en maintenance
des véhicules automobiles. Or, l’institut doit
rester dans la course. Idem pour les apprentis. « Vu les compétences exigées dans les garages, il faut voir plus loin que le CAP », juge
Passerelles vers
l’entreprise
L’Institut Nicolas-Barré
propose des formations
en lycée professionnel, en
apprentissage et en contrat de
professionnalisation. « Cela facilite
les passerelles », note JeanFrançois Desbonnet. Un jeune qui
a fait son CAP en alternance et ne
trouve pas de patron pour le bac
pro peut franchir cette étape au
lycée, et vice-versa.
Freddy Rabaey. Un constat partagé par JeanFrançois Desbonnet, pour qui ce diplôme ne
constitue pas un « niveau d’insertion ». En
revanche, les bacs pro ou les certificats de
qualification professionnelle (CQP) en contrat
pro affichent des taux d’embauche respectifs
de 75 et de 80 %.
Du coup, les jeunes suivent souvent un cursus au long cours : CAP + bac pro + CQP, par
exemple. Certains se forment à la mécanique
et à la carrosserie, car, dans les petites structures, il faut être polyvalent. L’institut s’efforce de les accompagner. « On joue les médiateurs, en calmant le jeu si une entreprise
se montre abusive ou si un jeune décide du
jour au lendemain de rompre son contrat »,
précise Christophe Meersman, directeur
adjoint, en charge de l’alternance. Selon lui,
« l’apprentissage convient aux profils un peu
matures, avec un projet bien ficelé ».
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Décrocher un
stage : le coup
de pouce...
Ambience
studieuse et
concentration
sont de rigueur
dans l’atelier de
céramique au
lycée L’initiative,
à Paris
digital
À l’heure du tout numérique, trouver un stage ou une
entreprise pour un contrat en alternance passe aussi
par l’utilisation des réseaux sociaux professionnels.
Voici les bons réflexes à avoir
et les pièges à éviter.
Au lycée L’initiative, création de logos et de céramiques
D
ans le XIXe arrondissement de
Paris, le lycée professionnel
L’initiative (650 élèves) propose
plusieurs formations en arts appliqués : notamment un CAP en décoration en
céramique, et la suite logique, le brevet des
métiers d’art (BMA), ainsi que des bacs pro
artisanat et métiers d’art (AMA) en marchandisage ou en communication visuelle. Cette
année, l’établissement a reçu environ 200
candidatures pour 90 places en AMA. D’où
une petite sélection. « Nous n’exigeons pas la
performance, mais il faut que nous sentions
une motivation, un potentiel à développer »,
expose Nathalie Brassart, la chef d’établissement.
Dès la deuxième année de bac pro communication visuelle, les élèves ont accès à quatre
salles de cours réunies sur un même palier, où
ils circulent à leur guise « comme en agence »,
commente leur professeure Fabienne Platel.
Ce matin, au cours du “brief”, elle a demandé
aux élèves d’élaborer la communication
(logo, pubs…) d’un concept store vendant des
cookies à base de criquets.
Les jeunes débutent la création du logo “en
traditionnel”. En clair, ils crayonnent leurs
idées sur un simple bloc. Les enseignants
tiennent à cette étape à l’ancienne qui permet
d’aller plus vite, et d’y voir clair. « Après, on
choisit le dessin qu’on préfère et on le retravaille sur l’ordinateur avec le logiciel Illustrator », explique Jérôme, 18 ans. Au cours de leur
formation, les élèves effectueront vingt-deux
semaines de stage dans des imprimeries, des
services de communication ou des agences,
souvent en région parisienne.
Un travail artisanal
valorisant
Dans l’atelier céramique, l’ambiance est cosy.
Mélange de terre et d’humidité, une odeur
onctueuse saisit les narines. Sur fond de musique classique, la classe de BMA dessine
des formes elliptiques. « Nous abordons un
sujet autour des épidémies », annonce Christelle Barberena, leur professeure. Ce chemin
d’étape réparti sur une dizaine de séances
aboutira à la fabrication d’un soliflore marqué
d’empreintes d’inspiration bactériologique.
Car, oui, vu de près, un virus peut se révéler
beau, comme l’attestent les recherches iconographiques menées par les élèves.
Tout près, un autre groupe surveille anxieusement le plâtre. Cynthia le remue pour faire
remonter les bulles à la surface. Il suffit d’une
« et la pièce explose dans le four, provoquant
des dommages collatéraux, explique l’enseignante. On est au cœur de la matière ». « Cela
me plaît », témoigne Ambre, 17 ans, en première année de BMA. « J’adore manipuler la
terre. » En difficulté au collège, cette jeune fille
s’est inscrite en CAP, après être tombée amoureuse des créations émaillées montrées lors
des journées portes ouvertes. « Ici, je me sens
à ma place », confie-t-elle.
Que faire après quatre ans de céramique ?
Les plus déterminés ouvrent leur atelier. L’an
dernier, la manufacture nationale de Sèvres
proposait, fait rare, sept postes, et a embau-
Famille & éducation no 504 • novembre - décembre 2014
ché autant d’élèves de L’initiative, une source
de fierté pour l’école. « Nos élèves trouvent
du travail mais pas forcément dans la céramique », concède Christelle Barberena. Selon
elle, le travail artisanal appris quatre ans durant, en CAP, puis en BMA, fait d’humilité, d’esprit d’équipe et d’assiduité booste les élèves,
y compris ceux qui ont connu l’échec scolaire
au collège. Eux comme d’autres auront appris au cours de leur formation deux notions
importantes aux yeux de Nathalie Brassart :
« prendre plaisir à ce qu’ils font et comprendre
que la réussite passe par le travail. » w
Noémi Constans
Des études à
poursuivre
Proposée à L’initiative, la Manaa
(mise à niveau en arts appliqués)
s’adresse aux jeunes venus de la
voie professionnelle. Elle compte
cette année 50 % d’élèves issus de
l’établissement. Elle les prépare aux
concours des écoles des beaux-arts,
d’arts appliqués, aux sélections des
BTS. « Nous leur faisons travailler
l’aspect conceptuel, car il s’agit de
jeunes qui créent de façon intuitive,
sans toujours savoir expliciter leur
démarche artistique », explique
Jean-Philippe Lanot, le directeur des
études. « À la fin de l’année, tous nos
élèves sont “casés” dans une école,
souvent en province. »
Les réseaux sociaux
professionnels sont-ils
indispensables ?
Les deux principaux sont LinkedIn et Viadeo.
Linkedin regroupe plutôt des profils cadres et
des multinationales ou entreprises de plus de
100 salariés. Viadeo est un réseau plus présent
en France, qui rassemble des profils plus variés
et une palette plus large d’entreprises (PME, artisanat) et de secteurs. À eux deux, ils constituent
une base de données très importante. Comme
l’explique Éric Andrade, conférencier en éducation numérique et formateur en réseaux sociaux
professionnels : « C’est devenu une compétence
que d’être capable d’utiliser les réseaux sociaux
professionnels pour son projet d’orientation et
son insertion dans le monde du travail. Pour de
nombreux métiers, il peut même paraître suspect aux recruteurs de ne pas y être. »
À quoi servent-ils ?
• Trouver le bon contact
Pour les étudiants, ils permettent de trouver,
via le carnet d’adresses et les contacts, la
personne qui pourra éclairer leur parcours.
Par exemple, si Damien envisage de faire un
bac pro technicien en installation des systèmes énergétiques et climatiques, en étant
inscrit sur un réseau social, il pourra se rendre
compte que l’oncle d’un de ses amis travaille
dans ce secteur... Et échanger avec lui pour
voir si c’est vraiment le métier qui lui convient.
• Avoir de bonnes
recommandations
Sur son profil, il est possible d’ajouter les
recommandations d’anciens employeurs,
responsables de stage, de formation, etc. Un
plus non négligeable pour valoriser une candidature.
• S’informer sur une entreprise
Montrer lors d’un entretien que vous
connaissez l’entreprise est essentiel. Pour
obtenir des informations, rien de tel que d’en
parler directement avec des salariés. Là encore, vos contacts pourront être utiles. Par
ailleurs, les entreprises postent, elles aussi,
sur les réseaux des informations orientées
“employeur”.
• Actualiser ses connaissances
Sur les réseaux sociaux, les professionnels se
regroupent et communiquent sur l’actualité de
leur secteur. Rejoindre leurs groupes permet,
par exemple, de bien préparer un entretien. À
noter que les écoles, universités, etc., sont,
elles aussi, présentes.
• Créer son réseau
Un réseau social professionnel commence à
porter ses fruits à partir de 300 contacts. Ayez
toujours en tête de rester en relation avec les personnes que vous rencontrez dans vos différents
stages ou vos professeurs. Envoyez un message
personnaliséenprécisantlecontextedanslequel
vous vous êtes rencontrés. Les messages automatiques des réseaux sociaux professionnels
sont rarement ouverts... w
Claire Alméras, en collaboration
avec Éric andrade, conférencier en
éducation numérique et formateur en réseaux
sociaux professionnels
Comment ne pas se “griller”
• Choisir sa photo avec le code
vestimentaire qui correspond au poste
visé.
vous risquez d’être découvert par un
recruteur qui aura contacté un ancien
élève, par exemple.
• Veiller à la présentation écrite
avec un ton très professionnel et une
orthographe impeccable !
• Remercier la personne qui vous a
mis en contact avec un professionnel.
Elle s’engage en vous recommandant
et appréciera de savoir comment s’est
déroulé votre entretien. Et sera d’autant
plus encline à vous rendre de nouveau
service.
• Ne pas mentir. Votre profil Facebook
ne doit pas contredire les infos postées
sur un réseau social professionnel. Si
vous enjolivez la réalité sur votre CV,
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Voies et passerelles : y voir
31
plus clair
schéma réalisé avec le
Classe
de 3e
La voie
professionnelle
permet une
insertion
professionnelle
rapide et aussi la
poursuite
d’études.
Avec un CAP,
il est possible
de continuer
à se former notamment
en 1ère pro ou en 1ère
techno à condition
d’avoir un excellent
dossier.
vers un CAP
2nde générale et
technologique
vers un bac pro
dans l’une des
16 spécialités
1e année
2e année
La voie générale
et technologique
permet
la poursuite
d’études
professionnalisantes
ou non.
Voie générale et
technologique
Voie professionnelle
1e année
il est possible de
poursuivre des études
professionnalisantes après un
CAP, en préparant notamment :
- une mention complémentaire
(mc), en 1 an, pour acquérir une
spécialité ;
- un brevet professionnel (BP),
en 2 ans, pour approfondir la
maîtrise d’un métier et acquérir
la connaissance nécessaire
à la création
d’entreprise.
• 3e classique
• 3e DP3
• 3e pré pro
vers une 1re
technologique
1re générale (séries es, s, l)
ou technologique ( séries
stmg, STI2D, STD2A, STL, ST2S,
STAV, TMD, hôtellerie)
2e année
Vie
active
Poursuite
d’études
(BP, MC, BMT,
BMA, CSA, BT)*
3e année
terminale générale ou
technologique selon la
série choisie en 1re.
diplôme Bac
professionnel
bac général ou
technologique.
3e DP3 : option facultative de
découverte professionnelle de
3 heures hébdomadaires.
3e prépa pro : module de
découverte professionnelle de
6 heures hédbomadaires.
BMA : brevet des métiers d’art.
BMT : brevet technique des
métiers.
BP : brevet professionnel.
BT : brevet de technicien.
CAP : certificat d’aptitudes
professionnelles.
CSA : certificat de
spécialisation agricole.
Mc: mention complémentaire.
Série Es : économique et
sociale.
série L : littéraire.
série S : scientifique.
Série ST2DA : sciences et
technologies du design et des
arts appliqués.
Série ST2S : sciences et
technologies de la santé et du
social.
Série STAV : sciences et
technologies de l’agronomie et
du vivant.
Série STI2D : sciences et
technologies de l’industrie et
du développement.
Série STL : sciences et
technologies de laboratoire.
Série sTMG : sciences et
technologies du management
et de la gestion.
Série TMD : technologies de
la musique et de la danse.
Enseignement catholique
En bac pro artisanat et métiers d’art en marchandisage visuel les jeunes se préparent aux
métiers d’étalagistes ou de présentateurs visuel (aménagement de vitrines, rayons ou
boutiques de grandes ou petites enseignes).
Participer à une équipe de pilotage, une
chance pour nos enfants et pour nous, parents !
Composée du chef d’établissement,
d’enseignants, de personnels
d’éducation, de représentants de
parents via l’Apel et le BDI Orientation,
chaque chef d’établissement fait
vivre l’équipe de pilotage dans son
établissement. Quel rôle pour les
parents ?
w Participer à l’accompagnement à
l’orientation, selon une démarche qui
évite la répétition mais qui se veut au
Famille & éducation no 504 • novembre - décembre 2014
contraire, chaque année, progressive
et construite.
w Etre des personnes ressources
pour les jeunes, être impliqué selon
ses compétences (venir présenter
son métier, par exemple).
w Faire équipe avec les autres
acteurs de l’école sur un sujet
concret.
www.orientation.enseignementcatholique.fr
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