DOSSIER 21 Enseignement professionnel, filières technologiques Des jeunes bien dans leur peau Avec le service ICF (Information et conseil aux familles) de l’Apel nationale. Photos du dossier : Léa Crespi tous nos remerciements aux Compagnons du Devoir et du Tour de France / Section Charpente et Menuiserie / Site de Gennevilliers, à l’Institut Nicolas-Barré, à Armentières (59), et au lycée L’initiative, à Paris (75). Famille & éducation no 504 • novembre - décembre 2014 22 DOSSIER 23 Combattre Je ne souhaite pas que mon fils soit ouvrier toute sa vie ! les idées reçues La réponse de Jean-Marc Petit, en charge de l’orientation et de la formation professionnelle, au Sgec, délégué général Rénasup (Réseau national d’enseignement supérieur privé). Les voies professionnelles et technologiques n’ont pas en France la réputation qu’elles méritent. Réponses de spécialistes qui tordent le cou à certaines idées fausses. Propos recueillis par Sylvie Bocquet La voie professionnelle ou technologique, c’est une voie de garage ! La réponse de Christine Rossignol, responsable du pôle scolarité aux Apprentis d’Auteuil. w Il y a moins de chômage dans certaines sections professionnelles comme le bâtiment, par exemple, que dans certaines filières générales. Et les élèves des voies technologiques et professionnelles ont des atouts que leurs camarades des voies générales n’ont pas : une bonne connaissance du milieu de l’entreprise (l’opportunité de faire des stages, des enseignants qui sont euxmêmes des professionnels, un vocabulaire adapté), une plus grande maturité, l’acquisition de connaissances et de pratiques dans un environnement cohérent, qui les aide à construire leur personnalité. Mais cette orientation n’est positive que si l’élève réflé- L’avis de l’ Parents d’élèves de l’Apel, nous pensons que l’alternance est une voie d’excellence. De la 3e à l’enseignement supérieur, ces formations sont souvent des gages d’une bonne insertion professionnelle et sociale pour nos enfants. Alterner des périodes en entreprise et en milieu scolaire permettra aux jeunes de mieux s’adapter aux constantes évolutions chit plus en termes d’activités qu’en centres d’intérêt (j’aime/je n’aime pas). Ce qui est important, c’est de pouvoir découvrir des métiers, lors de stages effectués pendant la scolarité ou de rencontres avec des professionnels, ou encore à l’occasion de discussions avec ses parents ou d’autres adultes de son entourage. C’est un dialogue qui peut commencer tôt et qui aidera le jeune à se projeter dans l’avenir le plus concrètement possible. La finalité, c’est de quitter peu à peu ses rêves d’enfant et de trouver le point de rencontre entre ce que l’on est et ce que l’on va faire..w du monde professionnel et à anticiper les éventuelles changements de secteurs. Ainsi, la formation tout au long de la vie deviendra pour eux une évidence. Cédrick Reynaud, membre du Bureau national de l’Apel en charge du réseau École et monde professionnel (EMP). Famille & éducation no 504 • novembre - décembre 2014 Mon enfant a été orienté vers un bac pro qui ne correspond pas à son choix. Doit-il renoncer à son projet ? La réponse de Ferroudja Kaci, conseillère au Cidj (Centre de documentation et d’information jeunesse) w L’orientation vers la voie professionnelle ne doit surtout pas être subie mais bien préparée en amont, afin d’éviter la décision de dernier moment et le risque d’aller là où il reste des places. Ainsi, il est utile de faire le point avec son enfant avant la fin du premier trimestre de la classe de 3e, surtout si son dossier est fragile. Anticiper et l’aider à découvrir les métiers, puis les filières et enfin les débouchés. S’intéresser à la voie professionnelle pour que cette orientation soit un vrai choix. Si néanmoins, le jeune est orienté vers une voie qu’il n’a pas choisie, il existe en seconde pro des passerelles qui permettent de changer de domaine avant de choisir, l’année suivante, une spécialité qui l’engagera davantage. Adresses utiles w wwww.cidj.com w www.apprentis-auteuil.org w Que met-on derrière le mot ouvrier ? Les voies professionnelles mènent à des métiers qualifiés, avec de réelles opportunités d’évolution. On peut ainsi, après un bac pro et un BTS, accéder assez rapidement à des fonctions de technicien. Elles mènent aussi à de nombreux métiers manuels qui ont évolué sur l’échelle de la valorisation sociale et des Un jeune qui ne passe pas par la voie générale n’a aucune chance de faire des études longues ! La réponse de Jean-Marc Petit et Ferroudja Kaci revenus. De l’ouvrier à l’artisan d’art, il n’y a qu’un pas et dans le mot artisanat, nous retrouvons le mot “artiste”, qui est porteur de reconnaissance personnelle. Un jeune, simplement titulaire d’un bac général, qui ne poursuit pas ses études, aura moins d’autonomie professionnelle qu’un jeune diplômé de l’enseignement professionnel. w Le bac d’enseignement général n’est pas la garantie absolue de pouvoir faire des études longues et le taux d’échec en première année d’études supérieures est parfois important ! Rien ne sert non plus d’étaler sur le papier ses études supérieures comme des quartiers de noblesse, mieux vaut se demander : quelles études pour quels métiers ? Dans la voie technologique et professionnelle, la poursuite d’études est non seulement possible, mais vivement encouragée. Un jeune titulaire d’un CAP, qui passe ensuite son bac pro et poursuit en licence professionnelle a un profil prometteur pour un employeur. Il est également recommandé de poursuivre ses études après un bac techno : DUT, BTS et pourquoi pas, par le jeu des passerelles, l’intégration dans une école de commerce ou d’ingénieurs. J’ai peur que ma fille n’ait pas fait le bon choix et rate son orientation La réponse d’Yves Mariani, directeur des Observatoires de l’Enseignement catholique w Parlons plutôt de choix progressifs et successifs, que d’un seul choix. L’orientation continue d’être vécue de façon irréversible, ce qui est en décalage avec le développement affectif d’un jeune de 14-15 ans. La troisième, c’est le début de 10 années d’adolescence ! Et l’adolescence, c’est précisément le temps de l’indétermination. Dédramatisons au maximum ce premier choix, et ne le transformons pas en verrou ! Laissons au jeune le temps de se découvrir, étape par étape et de vivre une première réussite. L’enseignement agricole, c’est pour être agriculteur ! La réponse de Philippe Poussin, Secrétaire général du Cneap (Conseil national de l’enseignement agricol privé). w 40 % seulement des élèves entrent dans l’enseignement agricole pour travailler dans la production animale ou végétale ! Que font les 60 % autres pour cent ? Des études avec un fort ancrage territorial, à l’intérieur de deux autres familles de métiers : la nature (aménagement du paysage et horticulture), les services aux personnes et au territoire (ils représentent la moitié des effectifs des élèves). Les formations vont de la 4e au BTS, en passant par des CAPA et des bacs pros agricoles. À noter également le bac techno Stav et le bac S agricole… 85 % des jeunes qui sortent avec un diplôme quel qu’il soit trouvent un travail dans les 6 mois. Avis à tous les jeunes citadins qui aiment la nature, les activités extérieures, la vie végétale et animale ! Dans la majorité des cas, c’est ce que permet l’enseignement professionnel qui accepte les parcours en zig-zag, aide les élèves à développer leur curiosité et à reconstruire leur estime de soi. Dans notre famille, personne n’a jamais suivi une voie professionnelle ! La réponse de Christine Rossignol w Cette peur d’un déclassement social ressentie par de nombreuses familles est indéniable. Elle est sans doute plus forte vis-à-vis de la filière professionnelle que de la filière technologique. La question essentielle est la suivante : vaut-il mieux rester le “nullos” de sa classe et privilégier l’entre soi ou explorer, en fin de 3e, ses points forts et accepter de découvrir un autre milieu. Autre question indispensable : est-ce que je connais suffisamment les différentes filières proposées ? La voie professionnelle ou technologique, ce n’est pas que l’industrie, qui représente une minorité d’embauches, ce sont aussi les métiers de bouche, d’art, de service à la personne… qui sont autant de voies d’excellence à condition que cela soit le choix d’un jeune partagé par sa famille et non pas le choix de la famille partagé par le jeune. Famille & éducation no 504 • novembre - décembre 2014 24 DOSSIER 25 La formation en alternance, c’est pro ! Découvrir avant de choisir w Saint-André, à Niort. Dans ce lycée polyvalent de 1 200 élèves, les jeunes ont la possibilité de découvrir dès la 4e toutes les formations d’enseignement général, technologique et professionnel que propose l’établissement. Une première étape qui peut être suivie en 3e, pour les élèves qui le demandent, d’une ou de deux journées d’immersion, sous forme d’un stage d’observation dans la section de leur choix. « De la mi-janvier à la fin mars, entre 30 et 50 jeunes assistent aux mêmes cours que les lycéens. Ils comprennent ainsi mieux ce que l’on attend d’eux et cela les aide à confirmer ou à infirmer leur choix. » précise Cécile Dargelos, la directrice. En seconde, les élèves peuvent également changer de voie. Ils sont chaque année entre 5 et 10 élèves à saisir cette chance. Compagnons du Devoir et Tour de France, section charpente et meunuiserie, site de Gennevilliers (92). Contrat d’apprentissage ou contrat de professionnalisation ? Gratuits et rémunérés, du CAP au master, les deux dispositifs se distinguent par des temps de formation et des diplômes différents. L’État lors de la journée de mobilisation pour l’apprentissage du 19 septembre dernier, a annoncé sa détermination de développer cette voie de formation en France, afin de faciliter l’insertion professionnelle des jeunes. Mode d’emploi. S i les périodes de formation en milieu professionnel (PFMP) sont de plus en plus nombreuses, l’alternance correspond essentiellement à deux types de dispositifs : l’apprentissage et les contrats de professionnalisation. Les deux s’appuient sur un contrat de travail qui implique une rémunération pour le jeune. Dès lors, ils sont souvent perçus comme identiques. Pourtant, ils présentent des différences importantes. Distinguer apprentissage et contrat de professionnalisation L’apprentissage est réservé aux 15-25 ans. Il relève de la formation initiale et doit mener forcément à un diplôme ou titre de l’Etat. Le temps en centre de formation par l’apprentissage (CFA) est normé afin de pouvoir préparer sérieusement les examens. Le temps en entreprise est également considéré comme un temps de formation, avec l’obligation de nommer un tuteur qui sera en liaison avec l’équipe du CFA pour assurer la bonne coordination des activités. Les contrats de professionnalisation relèvent, quant à eux, de la formation continue et peuvent préparer à un diplôme ou à d’autres titres de qualification professionnelle reconnus par la profession. Les temps en centre de formation sont moins contraints et le ratio temps en centre de formation-temps en entreprise peut parfois se révéler très court pour préparer un diplôme. Famille & éducation no 504 • novembre - décembre 2014 Une formation gratuite et rémunérée Dans les deux cas, la formation est gratuite pour le jeune. Pour l’apprentissage, elle est payée par l’entreprise et le conseil régional ; pour la professionnalisation, par les organismes de financement de la formation continue. Mais les règles de rémunération ne sont pas les mêmes. Elles dépendent de l’âge, du niveau de diplôme préparé et de l’avancement dans le cursus. Le jeune sera mieux payé en fin de cursus qu’en début. Les contrats de professionnalisation sont souvent plus rémunérateurs, en raison d’un temps plus important passé en entreprise. Pour s’inscrire à une formation en alternance, il faut s’adresser, soit à un centre de formation par l’apprentissage (CFA) ou un centre de formation continue (CFC) qui oriente le jeune vers un réseau d’entreprises, soit à des entreprises qui proposent ces types de contrat et dirigent le jeune vers les CFA ou CFC avec lesquels ils travaillent. Des formations exigeantes Il ne faut jamais oublier que ces cursus sont fondés sur des contrats de travail et sont donc exigeants en terme d’implication du jeune qui devra gérer des semaines de 35 heures (temps en formation et en entreprise) et intégrer les codes du monde du travail. C’est pourquoi il convient d’être vigilant sur quelques points : - l’aide effective apportée au jeune par le centre de formation dans la recherche de l’entreprise d’accueil ; - l’accompagnement dans sa gestion du temps ; - la qualité de l’organisation de la formation et des formateurs, indispensable à une bonne préparation du diplôme ; - les solutions proposées par la structure d’accueil en cas d’échec afin de permettre l’émergence d’un nouveau projet ; - les possibilités offertes pour la poursuite des études, l’alternance ne doit pas fonctionner comme une voie de garage. Une aide à l’embauche D’une manière générale, les centres de formation de l’enseignement catholique sont reliés à des lycées, ce qui constitue une garantie de sérieux et de savoir-faire en matière de préparation aux diplômes, d’accompagnement éducatif et de proposition des poursuites d’études (exemple de bac pro vers le BTS) . Ces établissements offrent souvent des parcours mixtes où le jeune commence sa formation par la voie scolaire pour se préparer à l’alternance. Ces dispositifs facilitent également le retour dans un cursus classique pour les jeunes qui changent d’avis en cours de contrat. Contrat d’apprentissage ou contrat de professionnalisation, ce qui est certain, c’est que l’alternance facilite à tous les niveaux l’insertion professionnelle en offrant aux jeunes l’expérience en entreprise de plus en plus souvent exigée dès l’embauche par Jean-Marc Petit les employeurs. w En charge des questions d’orientation et de formation professionnelle au SGEC (Secrétariat général de l’Enseignement catholique), délégué général Rénasup (Réseau national d’enseignement supérieur privé). En savoir plus Pour en savoir plus sur les propositions d’alternance au sein de l’enseignement catholique : www.renapec.fr/ ou de manière plus large vosdroits.servicepublic.fr/particuliers/N11240.xhtml Famille & éducation no 504 • novembre - décembre 2014 26 DOSSIER 27 Des élèves dans le vif du sujet Formations en peinture, carrosserie, et mécanique : des formations complètes pour faire face au marché. Reportages dans l’unité de formation par apprentissage de l’Institut Nicolas-Barré, à Armentières (59), axée sur l’automobile, et au lycée parisien L’initiative, spécialisé dans les arts appliqués. Des filières de passionnés où les jeunes se prennent au jeu. À l’Institut Nicolas-Barré, une cabine de luxe pour les peintures automobiles À Armentières, dans le Nord, l’Institut Nicolas-Barré (ex-Saint Louis) propose, parmi d’autres cursus, une unité de formation par l’apprentissage (UFA) à dominante automobile. Bientôt refait à neuf, l’établissement, qui vient de fusionner avec un lycée professionnel de la ville, accueille en cette rentrée 730 jeunes : 280 de plus que l’an dernier ! « On a dû réorganiser un espace de 7 000 m2, rénover nos locaux et construire un nouveau bâtiment », explique Jean-François Desbonnet, directeur général de Nicolas-Barré, qui voit dans ce virage « un projet d’avenir ». « Cela crée une dynamique, car il faut se battre pour valoriser nos filières auprès des familles. » L’UFA compte 140 apprentis. Malgré la crise et une baisse des effectifs d’environ 10 %, l’automobile reste une filière attirante, notamment pour les garçons, ici en écrasante majorité. Partout, les perceuses crissent et les coups de marteau résonnent : tout doit être fini avant l’inauguration, le 14 novembre. Dans le nouvel atelier carrosserie de 1 500 m2, ces bruits rivalisent avec les couinements des ponceuses des CAP peinture, qui réparent des portières, des pare-chocs ou des boucliers. « Une belle peinture, c’est 80 % de préparation », indique Freddy Rabaey, leur formateur. Jordan, 18 ans, vient de reboucher une fissure au mastic : « Il faut nettoyer Famille & éducation no 504 • novembre - décembre 2014 tout de suite parce qu’après cela durcit », explique-t-il. « Un carrossier doit être minutieux, car les moindres ondulations se voient sous la peinture. » Peu investi au collège, ce passionné d’automobile confie s’être mis au travail en bac pro mécanique, quand il a pu faire « ce qui lui plaisait ». Voir plus loin que le CAP Pour cette première séance, les apprentis n’ont pas apporté les gants et masques qui les protègent contre les émanations et les produits, toxiques à la longue. « C’est le démarrage », lâche, indulgent, leur formateur. Toute l’année, ils alterneront sept jours à l’institut, puis quinze en entreprise et ne prendront que cinq semaines de congés. « Quand on aime ce qu’on fait, on peut y passer du temps », estime Benjamin, 20 ans. Entre deux ponçages, les jeunes parlent des cas pointus rencontrés au garage, d’une nouvelle Clio rouge, ardue à peindre, de voitures et de moteurs, un inépuisable sujet d’intérêt. Tous ont hâte de voir la fin des travaux pour accéder à la nouvelle cabine de peinture vitrée. Divisée par un volet métallique, elle pourra accueillir deux véhicules ou un seul très volumineux. « C’est le top », se réjouit Freddy Rabaey. « Avec ce nouvel atelier, on est en phase avec les entreprises. » Taux d’embauches de 75 à 80 % Le secteur automobile a en effet fait un bond en avant. « Depuis dix ans, on assiste à une révolution technologique », confirme Mic- kaël Vermeulen, formateur en maintenance des véhicules automobiles. Or, l’institut doit rester dans la course. Idem pour les apprentis. « Vu les compétences exigées dans les garages, il faut voir plus loin que le CAP », juge Passerelles vers l’entreprise L’Institut Nicolas-Barré propose des formations en lycée professionnel, en apprentissage et en contrat de professionnalisation. « Cela facilite les passerelles », note JeanFrançois Desbonnet. Un jeune qui a fait son CAP en alternance et ne trouve pas de patron pour le bac pro peut franchir cette étape au lycée, et vice-versa. Freddy Rabaey. Un constat partagé par JeanFrançois Desbonnet, pour qui ce diplôme ne constitue pas un « niveau d’insertion ». En revanche, les bacs pro ou les certificats de qualification professionnelle (CQP) en contrat pro affichent des taux d’embauche respectifs de 75 et de 80 %. Du coup, les jeunes suivent souvent un cursus au long cours : CAP + bac pro + CQP, par exemple. Certains se forment à la mécanique et à la carrosserie, car, dans les petites structures, il faut être polyvalent. L’institut s’efforce de les accompagner. « On joue les médiateurs, en calmant le jeu si une entreprise se montre abusive ou si un jeune décide du jour au lendemain de rompre son contrat », précise Christophe Meersman, directeur adjoint, en charge de l’alternance. Selon lui, « l’apprentissage convient aux profils un peu matures, avec un projet bien ficelé ». Famille & éducation no 504 • novembre - décembre 2014 ➜ 28 DOSSIER 29 Décrocher un stage : le coup de pouce... Ambience studieuse et concentration sont de rigueur dans l’atelier de céramique au lycée L’initiative, à Paris digital À l’heure du tout numérique, trouver un stage ou une entreprise pour un contrat en alternance passe aussi par l’utilisation des réseaux sociaux professionnels. Voici les bons réflexes à avoir et les pièges à éviter. Au lycée L’initiative, création de logos et de céramiques D ans le XIXe arrondissement de Paris, le lycée professionnel L’initiative (650 élèves) propose plusieurs formations en arts appliqués : notamment un CAP en décoration en céramique, et la suite logique, le brevet des métiers d’art (BMA), ainsi que des bacs pro artisanat et métiers d’art (AMA) en marchandisage ou en communication visuelle. Cette année, l’établissement a reçu environ 200 candidatures pour 90 places en AMA. D’où une petite sélection. « Nous n’exigeons pas la performance, mais il faut que nous sentions une motivation, un potentiel à développer », expose Nathalie Brassart, la chef d’établissement. Dès la deuxième année de bac pro communication visuelle, les élèves ont accès à quatre salles de cours réunies sur un même palier, où ils circulent à leur guise « comme en agence », commente leur professeure Fabienne Platel. Ce matin, au cours du “brief”, elle a demandé aux élèves d’élaborer la communication (logo, pubs…) d’un concept store vendant des cookies à base de criquets. Les jeunes débutent la création du logo “en traditionnel”. En clair, ils crayonnent leurs idées sur un simple bloc. Les enseignants tiennent à cette étape à l’ancienne qui permet d’aller plus vite, et d’y voir clair. « Après, on choisit le dessin qu’on préfère et on le retravaille sur l’ordinateur avec le logiciel Illustrator », explique Jérôme, 18 ans. Au cours de leur formation, les élèves effectueront vingt-deux semaines de stage dans des imprimeries, des services de communication ou des agences, souvent en région parisienne. Un travail artisanal valorisant Dans l’atelier céramique, l’ambiance est cosy. Mélange de terre et d’humidité, une odeur onctueuse saisit les narines. Sur fond de musique classique, la classe de BMA dessine des formes elliptiques. « Nous abordons un sujet autour des épidémies », annonce Christelle Barberena, leur professeure. Ce chemin d’étape réparti sur une dizaine de séances aboutira à la fabrication d’un soliflore marqué d’empreintes d’inspiration bactériologique. Car, oui, vu de près, un virus peut se révéler beau, comme l’attestent les recherches iconographiques menées par les élèves. Tout près, un autre groupe surveille anxieusement le plâtre. Cynthia le remue pour faire remonter les bulles à la surface. Il suffit d’une « et la pièce explose dans le four, provoquant des dommages collatéraux, explique l’enseignante. On est au cœur de la matière ». « Cela me plaît », témoigne Ambre, 17 ans, en première année de BMA. « J’adore manipuler la terre. » En difficulté au collège, cette jeune fille s’est inscrite en CAP, après être tombée amoureuse des créations émaillées montrées lors des journées portes ouvertes. « Ici, je me sens à ma place », confie-t-elle. Que faire après quatre ans de céramique ? Les plus déterminés ouvrent leur atelier. L’an dernier, la manufacture nationale de Sèvres proposait, fait rare, sept postes, et a embau- Famille & éducation no 504 • novembre - décembre 2014 ché autant d’élèves de L’initiative, une source de fierté pour l’école. « Nos élèves trouvent du travail mais pas forcément dans la céramique », concède Christelle Barberena. Selon elle, le travail artisanal appris quatre ans durant, en CAP, puis en BMA, fait d’humilité, d’esprit d’équipe et d’assiduité booste les élèves, y compris ceux qui ont connu l’échec scolaire au collège. Eux comme d’autres auront appris au cours de leur formation deux notions importantes aux yeux de Nathalie Brassart : « prendre plaisir à ce qu’ils font et comprendre que la réussite passe par le travail. » w Noémi Constans Des études à poursuivre Proposée à L’initiative, la Manaa (mise à niveau en arts appliqués) s’adresse aux jeunes venus de la voie professionnelle. Elle compte cette année 50 % d’élèves issus de l’établissement. Elle les prépare aux concours des écoles des beaux-arts, d’arts appliqués, aux sélections des BTS. « Nous leur faisons travailler l’aspect conceptuel, car il s’agit de jeunes qui créent de façon intuitive, sans toujours savoir expliciter leur démarche artistique », explique Jean-Philippe Lanot, le directeur des études. « À la fin de l’année, tous nos élèves sont “casés” dans une école, souvent en province. » Les réseaux sociaux professionnels sont-ils indispensables ? Les deux principaux sont LinkedIn et Viadeo. Linkedin regroupe plutôt des profils cadres et des multinationales ou entreprises de plus de 100 salariés. Viadeo est un réseau plus présent en France, qui rassemble des profils plus variés et une palette plus large d’entreprises (PME, artisanat) et de secteurs. À eux deux, ils constituent une base de données très importante. Comme l’explique Éric Andrade, conférencier en éducation numérique et formateur en réseaux sociaux professionnels : « C’est devenu une compétence que d’être capable d’utiliser les réseaux sociaux professionnels pour son projet d’orientation et son insertion dans le monde du travail. Pour de nombreux métiers, il peut même paraître suspect aux recruteurs de ne pas y être. » À quoi servent-ils ? • Trouver le bon contact Pour les étudiants, ils permettent de trouver, via le carnet d’adresses et les contacts, la personne qui pourra éclairer leur parcours. Par exemple, si Damien envisage de faire un bac pro technicien en installation des systèmes énergétiques et climatiques, en étant inscrit sur un réseau social, il pourra se rendre compte que l’oncle d’un de ses amis travaille dans ce secteur... Et échanger avec lui pour voir si c’est vraiment le métier qui lui convient. • Avoir de bonnes recommandations Sur son profil, il est possible d’ajouter les recommandations d’anciens employeurs, responsables de stage, de formation, etc. Un plus non négligeable pour valoriser une candidature. • S’informer sur une entreprise Montrer lors d’un entretien que vous connaissez l’entreprise est essentiel. Pour obtenir des informations, rien de tel que d’en parler directement avec des salariés. Là encore, vos contacts pourront être utiles. Par ailleurs, les entreprises postent, elles aussi, sur les réseaux des informations orientées “employeur”. • Actualiser ses connaissances Sur les réseaux sociaux, les professionnels se regroupent et communiquent sur l’actualité de leur secteur. Rejoindre leurs groupes permet, par exemple, de bien préparer un entretien. À noter que les écoles, universités, etc., sont, elles aussi, présentes. • Créer son réseau Un réseau social professionnel commence à porter ses fruits à partir de 300 contacts. Ayez toujours en tête de rester en relation avec les personnes que vous rencontrez dans vos différents stages ou vos professeurs. Envoyez un message personnaliséenprécisantlecontextedanslequel vous vous êtes rencontrés. Les messages automatiques des réseaux sociaux professionnels sont rarement ouverts... w Claire Alméras, en collaboration avec Éric andrade, conférencier en éducation numérique et formateur en réseaux sociaux professionnels Comment ne pas se “griller” • Choisir sa photo avec le code vestimentaire qui correspond au poste visé. vous risquez d’être découvert par un recruteur qui aura contacté un ancien élève, par exemple. • Veiller à la présentation écrite avec un ton très professionnel et une orthographe impeccable ! • Remercier la personne qui vous a mis en contact avec un professionnel. Elle s’engage en vous recommandant et appréciera de savoir comment s’est déroulé votre entretien. Et sera d’autant plus encline à vous rendre de nouveau service. • Ne pas mentir. Votre profil Facebook ne doit pas contredire les infos postées sur un réseau social professionnel. Si vous enjolivez la réalité sur votre CV, Famille & éducation no 504 • novembre - décembre 2014 30 DOSSIER Voies et passerelles : y voir 31 plus clair schéma réalisé avec le Classe de 3e La voie professionnelle permet une insertion professionnelle rapide et aussi la poursuite d’études. Avec un CAP, il est possible de continuer à se former notamment en 1ère pro ou en 1ère techno à condition d’avoir un excellent dossier. vers un CAP 2nde générale et technologique vers un bac pro dans l’une des 16 spécialités 1e année 2e année La voie générale et technologique permet la poursuite d’études professionnalisantes ou non. Voie générale et technologique Voie professionnelle 1e année il est possible de poursuivre des études professionnalisantes après un CAP, en préparant notamment : - une mention complémentaire (mc), en 1 an, pour acquérir une spécialité ; - un brevet professionnel (BP), en 2 ans, pour approfondir la maîtrise d’un métier et acquérir la connaissance nécessaire à la création d’entreprise. • 3e classique • 3e DP3 • 3e pré pro vers une 1re technologique 1re générale (séries es, s, l) ou technologique ( séries stmg, STI2D, STD2A, STL, ST2S, STAV, TMD, hôtellerie) 2e année Vie active Poursuite d’études (BP, MC, BMT, BMA, CSA, BT)* 3e année terminale générale ou technologique selon la série choisie en 1re. diplôme Bac professionnel bac général ou technologique. 3e DP3 : option facultative de découverte professionnelle de 3 heures hébdomadaires. 3e prépa pro : module de découverte professionnelle de 6 heures hédbomadaires. BMA : brevet des métiers d’art. BMT : brevet technique des métiers. BP : brevet professionnel. BT : brevet de technicien. CAP : certificat d’aptitudes professionnelles. CSA : certificat de spécialisation agricole. Mc: mention complémentaire. Série Es : économique et sociale. série L : littéraire. série S : scientifique. Série ST2DA : sciences et technologies du design et des arts appliqués. Série ST2S : sciences et technologies de la santé et du social. Série STAV : sciences et technologies de l’agronomie et du vivant. Série STI2D : sciences et technologies de l’industrie et du développement. Série STL : sciences et technologies de laboratoire. Série sTMG : sciences et technologies du management et de la gestion. Série TMD : technologies de la musique et de la danse. Enseignement catholique En bac pro artisanat et métiers d’art en marchandisage visuel les jeunes se préparent aux métiers d’étalagistes ou de présentateurs visuel (aménagement de vitrines, rayons ou boutiques de grandes ou petites enseignes). Participer à une équipe de pilotage, une chance pour nos enfants et pour nous, parents ! Composée du chef d’établissement, d’enseignants, de personnels d’éducation, de représentants de parents via l’Apel et le BDI Orientation, chaque chef d’établissement fait vivre l’équipe de pilotage dans son établissement. Quel rôle pour les parents ? w Participer à l’accompagnement à l’orientation, selon une démarche qui évite la répétition mais qui se veut au Famille & éducation no 504 • novembre - décembre 2014 contraire, chaque année, progressive et construite. w Etre des personnes ressources pour les jeunes, être impliqué selon ses compétences (venir présenter son métier, par exemple). w Faire équipe avec les autres acteurs de l’école sur un sujet concret. www.orientation.enseignementcatholique.fr Famille & éducation no 504 • novembre - décembre 2014
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