La gestion des approvisionnements en avenir certain

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Chap. 4 : La prévision des approvisionnements et des stocks (1re partie)
1re partie : Gestion des approvisionnements en univers certain (le modèle de Wilson)
L’approvisionnement est l’acquisition des matières premières et des composants nécessaires
à la production (ou l’achat de marchandises pour une entreprise commerciale).
La prévision des approvisionnements pose essentiellement deux problèmes à résoudre :
-
Quand doit-on commander (à quel rythme / cadence) ?
Combien doit-on commander (et donc stocker) ?
I- Les classifications des approvisionnements
Lorsque le nombre de références (matières, fournitures, marchandises…) est très élevé, les
approvisionnements sont classés par groupes qui feront l’objet d’une gestion (prévision et
contrôle) plus ou moins rigoureuse.
Il existe deux méthodes (classiques) qui permettent de classer les approvisionnements (ou
références).
A) La méthode 20-80 (La loi des 20-80)
En règle générale, on constate qu’environ 20 % des références utilisées par une entreprise
représentent environ 80 % de la consommation totale (ou des achats ou du CA) de
l’entreprise (et donc que 80 % des références ne représentent que 20 % de la
consommation !).
Le premier groupe de référence (le groupe 20-80) fera l’objet d’une gestion plus approfondie
que le second groupe.
Cf. Fiche conseil p.101 (et exercices pour la mise en œuvre de la méthode).
B) La méthode A B C
La méthode consiste également à sélectionner les références en fonction de l’importance de la
consommation mais elle répartit les références en trois groupes au lieu de deux :
Groupe A : 5 à 10 % des références qui représentent 60 à 70 % des consommations.
Groupe B : 25 à 30 % des références pour 25 à 30 % des consommations
Groupe C : 60 à 70 % des références pour 5 à 10 % des consommations
La gestion des approvisionnements est très rigoureuse (précise) pour les références du groupe
A, plus souple pour celles du groupe B et empirique pour celles du groupe C !
Cf. Fiche conseil p.102 (et exercices pour la mise en œuvre de la méthode).
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II- Le modèle de Wilson
Le modèle de Wilson est un modèle mathématique qui permet de déterminer la cadence
d’approvisionnement optimale i.e. le nombre annuel de commandes qui minimise le coût
total de gestion des stocks.
Cf. Exemple : La prévision des approvisionnements (modèle de Wilson)
A) Les coûts de gestion d’un stock
Le coût total de gestion d’un stock est composé de deux éléments :
- Le coût de passation des commandes ;
- Le coût de possession du stock.
1) Le coût de passation des commandes
Il regroupe l’ensemble des charges du service des achats i.e. les charges liées au lancement
et au suivi des commandes (essentiellement des charges de personnel, des fournitures de
bureau et des services extérieurs : frais de télécommunication).
Le coût de passation des commandes est considéré comme proportionnel au nombre de
commandes :
En posant :
a : Le coût de passation d’une commande
N : Le nombre annuel de commandes (la cadence d’approvisionnement)
Coût (annuel) de passation des commandes = a × N
Dans le modèle de Wilson, « a » est connu (par exemple, à l’aide de statistiques) et « N » est
la variable à déterminer (cadence optimale).
Exemple :
Coût de passation des commandes = 60 × N
NB : Plus N augmente plus le coût est élevé !
2) Le coût de possession du stock
Il est constitué, pour l’essentiel, de deux éléments :
-
le coût du stockage (service magasin) : loyer des entrepôts, charges de personnel
(réception, gardiennage…) et des services extérieurs (transports, assurance…).
-
Le coût financier des capitaux immobilisés dans les stocks : il représente le coût des
ressources nécessaires pour financer les stocks (taux d’intérêt d’un emprunt par
exemple) ou, si le financement est réalisé à l’aide de ressources propres, le gain dont
l’entreprise se prive en immobilisant des capitaux dans les stocks au lieu de les placer
sur un marché financier (coût d’opportunité i.e. un manque à gagner).
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Le coût de possession du stock est supposé proportionnel à la valeur du stock et au temps : il
est exprimé par un taux annuel appliqué à la valeur du stock moyen.
En posant :
C:
p:
N:
Q:
t:
SM :
La consommation annuelle d’une matière (en quantités)
Le coût (prix) d’achat unitaire de la matière
Le nombre annuel de commandes (cadence d’approvisionnement)
La quantité achetée à chaque commande
Le taux annuel de possession du stock (en pourcentage)
Le stock moyen en quantités (niveau moyen annuel)
(t est assimilable à un taux d’intérêt : de même qu’emprunter E pendant un an au taux de i%
coûte i % × E ; détenir un stock (moyen) S pendant un an coûte t % × S. Dans ce modèle t est
supposé connu…)
Coût (annuel) de possession du stock = t × SM × p
Expression du stock moyen :
Stock moyen (en quantités) =
Si + Sf Q + 0 C/N
C
=
=
=
2
2
2
2.N
(En valeur : × par p !)
Stock
(en quantités)
Ex. : si C = 4 000 (supposée régulière)
si N = 4 commandes (12/4 = 3 mois :
une cde tous les 3 mois)
=> Q = C/N = 1 000
=> Stock moyen = (C/N)/2 = 500
Q = C/N
Sm = C/2N
Temps
Q = C/N représente la quantité de chaque commande, donc le stock en début de période (on
suppose que la consommation est régulière et que les commandes sont livrées au moment où
le stock devient nul).
Coût (annuel) de possession du stock = t × SM × p = t ×
Q
C×p
×p = t×
2
2× N
Dans le modèle, C, p et t sont connus.
Exemple :
Coût de possession du stock = 9 % ×
2 400 × 20 2160
=
2.N
N
NB : Plus N augmente, plus le coût est faible (le stock moyen diminue).
Remarque : L’expression du SM annuel = Q / 2 n’est valable que si les quantités commandées
sont constantes en revanche l’expression du SM = C/2N est également valable pour des
quantités commandées variables : le SM annuel étant alors égal à la moyenne des N stocks
moyens de chaque période de réapprovisionnement :
SM annuel = 1/N × (Q1/2 + Q2/2 + …+ QN/2) = 1/N × (
Q1 + Q 2 + ... + Q N
) = 1/N × (C/2) = C/2N
2
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B) La cadence optimale d’approvisionnement (nombre annuel de commandes)
Le modèle de Wilson permet de déterminer le nombre annuel de commandes N qui minimise
le coût total de gestion du stock :
Coût total de gestion (CT) = coût de passation des commandes + coût de possession du stock
CT = f(N) = a.N + (t.
C.p
t.C.p 1
) = a.N + (
).
2.N
2
N
On démontre que cette fonction est décroissante puis croissante et qu’elle passe par un
minimum lorsque sa dérivée s’annule :
f' (N) = a + (
t.C.p
1
) (− 2 ) = 0
2.
N
1
1
1
(Application de la formule : (k. ) ' = k.( ) ' = k. (- 2 ) )
x
x
x
Cadence optimale :
t.C.p
2.a
N* =
Exemple :
Cadence optimale N* =
9 % × 2 400 × 20
= 6 commandes par an.
2 × 60
Représentation graphique :
2500
2000
Coûts
1500
Coût total de gestion du stock = 60.N + 2 160 / N = 720
1000
Coût de passation des commandes = 60.N = 60 × 6 = 360
720
500
360
Coût de possession du stock = 2 160 / N = 2 160 / 6 = 360
0
0
2
4
6
8
10
12
14
Cadence (N)
Autre méthode (plus simple) pour retrouver la cadence optimale :
Le coût total est minimal lorsque le coût de passation est égal au coût de possession :
a.N* = (t.
C.p
)
2.N*
N* =
t.C.p
2.a
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Exemple :
60 N =
2 160
N
N2 =
2 160
= 36
60
N=6
Cf. Fiche conseil p.105 (Idem cours mais « u » = prix unitaire au lieu de « p »)
Cf. Utilisation du solveur d’Excel pour déterminer N (p. 106)
Il reste à déterminer les quantités à commander et les dates précises de commandes.
III- La budgétisation des approvisionnements (par application du modèle de Wilson)
Un budget des approvisionnements doit faire apparaître pour chaque mois : les commandes,
les entrées en stock (livraisons), les sorties de stock (consommations) et le niveau du stock.
Le budget peut être présenté en quantité ou en valeur (quantités × coût préétabli).
Le budget est établi à l’aide des éléments suivants :
-
Le rythme des consommations (régulier ou irrégulier). (Il dépend de la production
donc des ventes).
-
La cadence d’approvisionnement (déterminée par le modèle de Wilson).
-
Le délai de livraison (ou d’approvisionnement).
-
Le niveau du stock de sécurité : niveau minimal du stock qui permet de faire face à
une accélération du rythme de consommation ou à un retard de livraison (Cf.
exemple : Stock de sécurité exprimé en mois = le niveau du stock ne doit pas
descendre au dessous d’un mois de consommation d’avance = marge de sécurité).
A) Budgétisation dans le cas d’une consommation régulière
1) La quantité optimale d’approvisionnement (quantité ou lot économique)
Si la consommation est régulière (i.e. la consommation par période est constante), la quantité
à commander est constante et peut également être déterminée par le modèle de Wilson :
En posant :
Q : Quantité à commander (à chaque commande) => Q =
C
N
1re cas : Si N* est connu (Cf. I- B)
Quantité optimale (« lot économique ») = Q* =
C
N*
N=
C
Q
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Exemple :
N* = 6 => Q*= 2 400 / 6 = 400 unités par commande
2e cas : N n’est pas connu
La quantité optimale à commander est la quantité qui minimise le coût total de gestion du
stock :
- Coût de passation des commandes = a × N = a ×
C
Q
Q× p
(calcul direct sans passer par N !)
2
Q×p
- Coût de possession du stock = t ×
2
Stock moyen (en valeur) =
A l’optimum les coûts sont égaux (ou dérivée du coût total égale à 0) :
a.
Exemple :
C
Q * .p
=
t.
Q*
2
Q* =
2.a.C
t.p
2 × 60 × 2 400
= 400 unités à chaque commande
9 % × 20
C
Et on en déduit
N* = * = 2 400 / 400 = 6
Q
Q* =
Conclusion : Lorsque la consommation est régulière, les quantités commandées sont
constantes (Q* = C/N* = 400 unités par commande) et les commandes sont lancées à des
intervalles de temps réguliers i.e. la période de réapprovisionnement est également constante
(p* = 12 / N* = 2 mois : une commande tous les deux mois).
2) Présentation du budget des approvisionnements
Exemple :
Consommation mensuelle = 2 400 /12 = 200 unités
Stock de sécurité = 1 mois d’avance = 200 unités
Principe :
Le stock en début de mois (stock final du mois précédent) doit permettre :
-
de faire face à la consommation du mois (200),
et de constituer en fin de mois un stock de sécurité (200).
A défaut, une livraison (de 400) doit être prévue en cours de mois.
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Il suffit de déterminer la date de la première livraison (pour en déduire tout le reste) :
Si aucune livraison en janvier : Stock final = 350 – 200 = 150 < Stock de sécurité (ou encore :
Stock initial janvier = 350 < 200 (conso) + 200 (ss)) première livraison en janvier donc
première commande en décembre de l’année précédente (pour tenir compte du délai de
livraison) ; puis une commande et une livraison tous les deux mois de 400 unités.
Remarque 1 : Calcul des dates « exactes » de livraisons et donc de commandes.
Pour simplifier les dates de commandes et de livraisons peuvent être ramenées au début du
mois. (S’il n’y avait pas de stock initial ce serait d’ailleurs le cas : commandes et livraison en
début de mois ; mais sans stock initial l’entreprise ne pourrait pas constituer un stock de
sécurité le mois suivant la livraison…il doit être au minimum de 200…).
Les livraisons doivent être effectuées au moment où le stock atteint le niveau du stock de
sécurité (200).
150
50
Stock initial :
350
200
Temps :
0
d / 30 = 150 / 200
d = 0,75 × 30 = 22,5 jours.
d
150 (moins un mois de conso = 200)
30 jours
C1 : 22 déc et L1 : 22 jan
C2 : 22 fev et L2 : 22 mars….
On constate que les dates de livraisons et de commandes sont en réalité plutôt à la fin du mois
(le stock initial étant presque de 2 mois).
Remarque 2 : La notion de stock critique
Le stock critique (ou stock d’alarme ou d’alerte) est le niveau du stock qui déclenche une
commande.
Il doit permettre de faire face à la consommation pendant le délai de livraison (sans toucher au
stock de sécurité) :
Stock critique = consommation pendant le délai de livraison (1 mois) + Stock de sécurité
= 200 (consommation mensuelle) + 200 = 400 unités
Dès que le stock descend à 400, il faut lancer une commande (qui sera livrée dans 1 mois).
Stock
600
Q = 400
400
Stock critique (400)
200
Stock de sécurité (200)
22/01
22/02
22/03
Temps
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B) Budgétisation dans le cas d’une consommation irrégulière
Il existe deux méthodes de budgétisation qui permettent de tenir compte du rythme de
consommation et pour lesquelles le modèle de Wilson reste applicable :
En effet, on peut faire correspondre à une cadence optimale (N*= 6) :
- Soit des quantités à commander constantes (Q*= C / N* = 400) mais avec des périodes de
réapprovisionnement variables (p* ≠ Cte) pour tenir compte du rythme de consommation (6
commandes mais pas nécessairement une tous les deux mois).
- Soit des périodes de réapprovisionnement constantes (p* = 12 / N* = 2 ; i.e. une commande
tous les deux mois) mais avec des quantités à commander variables (Q* ≠ Cte) pour tenir
compte du rythme de consommation (pas nécessairement 400 à chaque commande).
1) La budgétisation par quantités constantes (et périodes variables) (Méthode comptable)
Le principe est le même que précédemment mais sachant que la consommation et donc le
stock de sécurité (un mois de consommation d’avance) sont variables.
Principe :
Le stock en début de mois (stock final du mois précédent) doit permettre :
-
de faire face à la consommation du mois (variable),
-
et de constituer en fin de mois un stock de sécurité (variable mais égal à la
consommation du mois suivant).
A défaut, une livraison (de 400) doit être prévue en cours de mois.
Stock début janvier : 350 suffisant pour la consommation du mois (200) et le stock de sécurité
(150) pas de livraison en janvier.
Stock début février : 150 suffisant pour la consommation du mois (150) mais pas pour le
stock de sécurité
Première livraison en février, donc commande en janvier (pour tenir
compte du délai de livraison).
Et ainsi de suite…
Remarque : Calcul des dates « exactes » de livraisons et donc de commandes.
Pour simplifier les dates de commande et de livraison peuvent être avancées en début de mois.
Les dates exactes sont obtenues en considérant que les livraisons doivent être effectuées au
moment où le stock atteint le niveau du stock de sécurité (égal à la consommation du mois
suivant).
(NB : Comme les dates de commandes, le niveau du stock critique est variable d’une période
de réapprovisionnement à une autre.)
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Calcul des dates exactes :
Stock fin décembre (début janvier) : 350
Stock fin janvier (sans livraison) : 150 (350 – conso de janvier 200)
Stock de sécurité (conso de février) : 150
Donc stock fin janvier = 150 = exactement le SS
L1 (1re livraison) : 1er février et C1 (1re commande) : 1er janvier.
Stock fin février (début mars) : 400
Stock fin mars (sans livraison) : 150 (400 – conso de mars 250)
Stock sécurité : 250 (conso d’avril)
150
250
100
150 (moins un mois de conso = 250)
Stock :
400
Temps :
0
d / 30 = 150 / 250
d = 0,6 × 30 = 18 jours.
d
30 jours
L2 : 18 mars (C2 : 18 février)
Stock fin avril (début mai) : 300
Stock fin mai (sans livraison) : 100 (300 – conso de mai 200)
Stock sécurité : 200 (conso de juin)
100
100
Stock :
300
200
100 (moins un mois de conso = 200)
Temps :
0
d
30 jours
d / 30 = 100 / 200
d = 0,5 × 30 = 15 jours.
L3 : 15 mai (C3 : 15 avril)…
Remarque : Il existe également une méthode graphique qui permet de déterminer les dates
exactes des commandes et des livraisons…
2) Budgétisation par périodes constantes (et quantités variables) (Méthode comptable)
Dans l’exemple : N* = 6, donc une livraison tous les deux mois (12/N)
Le principe des cas précédents reste valable : le stock initial doit être suffisant pour la
consommation du mois en cours et pour constituer le stock de sécurité (sinon livraison) mais
si une livraison est nécessaire elle doit également être suffisante pour la consommation et le
stock de sécurité du mois suivant (puisqu’il n’y a qu’une livraison tous les deux mois).
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Stock début janvier : 350 suffisant pour la consommation du mois (200) et le stock de sécurité
(150) pas de livraison en janvier. (Idem cas précédent).
Stock début février : 150 suffisant pour la consommation du mois (150) mais pas pour le
stock de sécurité
Première livraison en février, donc commande en janvier (pour tenir
compte du délai de livraison) (Idem cas précédent).
Quantité à commander : dans la mesure où le stock initial (150) = consommation du mois, il
faut prévoir le stock de sécurité de fin février (= consommation de mars = 250) et stock de
sécurité de fin mars (= consommation d’avril = 250) soit 500.
En définitive : Quantité à commander = la consommation des deux mois suivants !
(Le modèle fonctionne car le stock initial (350) était déjà égal à la consommation des deux
mois suivants : 200 + 150.)
NB : Dernière livraison : Quantité à commander = 350 en faisant l’hypothèse que les
consommations de janvier et février N+1 sont identiques à celles de l’année N (200 + 150).
Remarque : Calcul des dates « exactes » de livraisons et donc de commandes.
Il suffit de déterminer la date de la première livraison (qui doit être effectuée au moment où le
stock atteint le niveau du stock de sécurité) :
Fin janvier : Stock = 350 – 200 = 150 = exactement le SS (1mois)
1re commande = 1er janvier
1re livraison = 1er février
C2 = 1er février ; L2 = 1er avril (car une livraison tous les deux mois)…
Remarque : Une méthode graphique permet également de déterminer les quantités à
commander (les périodes étant constantes) et donc d’élaborer le budget (alternative à la
méthode comptable).
Cf. Applications :
Cas Bary p.109
Cas Belin p.110
Cas Detrium p.111
Cas BRD p.112
Cas Mimoune p.113
Cas Mina p.114
Cas Berlusco p.115
Cas Martin p.117