Lasers pour usinage par Gilles BRASSART Ingénieur de l’École supérieure d’optique Président-directeur général de BM Industries 1. 1.1 1.2 Paramètres et considérations thermiques........................................ Paramètres d’influence ............................................................................... Considérations thermiques......................................................................... 2. 2.1 Procédés thermiques .............................................................................. Découpe par laser........................................................................................ 2.1.1 Étude paramétrique............................................................................ 2.1.2 Rôle du gaz d’assistance .................................................................... 2.1.3 Vitesses de coupe ............................................................................... Perçage par laser ......................................................................................... 2.2.1 Étude paramétrique............................................................................ 2.2.2 Rôle de la forme temporelle de l’impulsion ..................................... 2.2.3 Application numérique....................................................................... Soudage par laser........................................................................................ 2.3.1 Soudage par laser CO2 ...................................................................... 2.3.2 Soudage par laser Nd:YAG ................................................................ 2.3.3 Application numérique....................................................................... Traitements superficiels par laser .............................................................. 2.4.1 Durcissement superficiel.................................................................... 2.4.2 Fusion superficielle............................................................................. 2.4.3 Création d’alliages .............................................................................. 2.4.4 Obtention de structures microcristallisées....................................... — — — — — — — — — — — — — — — — — — 3 3 3 4 4 4 4 5 5 5 6 6 6 7 7 7 7 8 3. 3.1 3.2 3.3 Procédés athermiques ............................................................................ Thermoélasticité .......................................................................................... Photoablation............................................................................................... Choc-laser..................................................................................................... — — — — 8 8 9 9 4. 4.1 Procédés spécifiques .............................................................................. Marquage de câbles aéronautiques........................................................... 4.1.1 Pigments employés ............................................................................ 4.1.2 Mécanisme de coloration des pigments sous flux laser ................. 4.1.3 Évaluation du contraste du marquage par laser.............................. 4.1.4 Influence des paramètres du laser sur le contraste......................... 4.1.5 Avantages du procédé de marquage par laser ................................ Fabrication d’objets en trois dimensions .................................................. 4.2.1 Différents procédés ............................................................................ 4.2.2 Exemple d’application........................................................................ — — — — — — — — — — 10 10 10 10 10 11 11 11 11 12 Références bibliographiques ......................................................................... — 12 2.2 2.3 2.4 E 4 220 9 - 1996 4.2 E 4 220 - 2 — 2 — 2 ’interaction entre le champ électromagnétique intense et la matière a suscité un vif intérêt scientifique dès la mise en œuvre du premier émetteur laser réalisé par Maiman en juillet 1960. Les procédés d’usinage et de transformation des matériaux par laser sont classés selon l’éclairement reçu et la durée de l’interaction : — les procédés thermiques tels que la découpe, le perçage, le soudage et les traitements superficiels s’effectuent sous des éclairements compris entre 10 3 et 10 8 W/cm2 durant des durées d’interaction comprises entre 10 –8 s et quelques secondes ; L Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Électronique E 4 220 − 1 LASERS POUR USINAGE _________________________________________________________________________________________________________________ — les procédés athermiques tels que la thermoélasticité, la photoablation et le choc-laser s’effectuent sous des éclairements compris entre 10 6 et 1012 W/cm2 durant des durées d’interaction comprises entre 10 –10 et 10 –7 s. D’autres procédés spécifiques qui font intervenir des réactions chimiques, tels que notamment le marquage par photoréduction ou la fabrication d’objets en trois dimensions, s’exécutent comme les procédés thermiques et athermiques pour des fluences comprises entre 1 mJ/cm2 et 10 6 J/cm2. Les procédés décrits dans cet article représentent l’économie principale des applications industrielles du laser. Bien que cette revue des procédés ne soit pas exhaustive, elle représente, d’une part, les procédés reconnus comme suffisamment fiables pour être industrialisés et, d’autre part, les procédés récents reconnus comme industrialisables. 1. Paramètres et considérations thermiques 1.1 Paramètres d’influence Les paramètres qui interviennent dans les procédés thermiques ou athermiques induits par un faisceau laser sur un matériau sont les suivants : — paramètres du laser : • la longueur d’onde : λ (nm) • la puissance moyenne (flux) : F (W) α (mrad) • la divergence du faisceau : • l’énergie par tir : (J) • la durée de l’impulsion : τ (s) • le diamètre du faisceau : D (cm) — paramètres de confinement du laser : • la focale de la lentille : f (cm) • le diamètre du faisceau sur la face d’entrée de la lentille : Dop (cm) • l’éclairement sur la cible : E (W/cm2) — paramètres du matériau : • le coefficient de réflexion (sans dimension) de la surface à la longueur d’onde λ : • la masse volumique de la matière : ρ (g/cm3) • la conductivité thermique : K (W · cm–1 · K–1) • la capacité thermique massique à pression constante : C (J · g–1 · K–1) (J/g) • l’enthalpie de fusion : Lf • l’enthalpie de vaporisation : Lv (J/g). Le coefficient de réflexion d’un matériau dépend de l’état de la surface, de la température et de la présence éventuelle d’oxydes ou de dépôts. Le coefficient d’absorption est défini par la différence (1 – ). Les matériaux métalliques ont un comportement complexe sous le flux intense d’un laser. La plupart d’entre eux ont une faible absorption de l’énergie infrarouge pour des éclairements faibles. Il est courant de constater des coefficients d’absorption de 0,5 % à 10 %. Lorsque l’éclairement atteint quelque 10 6 W/cm2, le coefficient d’absorption peut atteindre 90 %. Les matériaux non métalliques absorbent beaucoup plus l’énergie infrarouge. Il est courant de constater des coefficients d’absorption de 90 %. Cette valeur dépend peu de l’éclairement. 1.2 Considérations thermiques Un matériau subit des transformations physiques lorsque l’interaction avec le faisceau laser est intense. Prenons le cas d’une pièce de cuivre pur chauffée à flux constant, sans perte, à pression constante et de masse unitaire. Le diagramme temps-température est présenté sur la figure 1. Les états thermodynamiques observés sont les suivants. ■ Pour la phase solide (du point A au point B) La pression P est constante, le volume V de la pièce de cuivre augmente d’une valeur dV, conformément à sa propre loi de dilatation thermique, l’énergie thermique ∆ th accumulée au sein de la matière durant la variation de température depuis la température ambiante Ta jusqu’à la température de fusion Tf , varie selon l’expression : ∆ th = q ( A → B ) – PdV où q (A → B) est la quantité de chaleur nette reçue. Le terme q ( A → B ) = ∆ th + PdV est appelé enthalpie, désignée par ∆H (A → B). Dans les procédés par laser, le terme P dV est négligeable ; il s’ensuit que : q ( A → B ) = ∆H ( A → B ) = ∆ th = C ( T f – T a ) ■ Pour la phase de transformation de l’état solide à l’état liquide (du point B au point C) La pression P est toujours constante, le volume V de la pièce de cuivre augmente, mais comme précédemment la quantité de chaleur nette reçue est telle que : q (B → C) = ∆H (B → C) = L f où L f est l’enthalpie de fusion du cuivre. ■ Pour la phase liquide (du point C au point D) La pression P reste constante, le volume V continue d’augmenter. La quantité de chaleur nette reçue depuis la température de fusion Tf jusqu’à la température Tv varie selon l’expression : q (C → D) = ∆H (C → D) = C (Tv – Tf) ■ Pour la phase de transformation de l’état liquide à l’état de vapeur (du point D au point E) : La réaction est identique à la transformation solide-liquide et la quantité de chaleur nette reçue est telle que : q (D → E) = ∆H (D → E) = L v où L v est l’enthalpie de vaporisation du cuivre. E 4 220 − 2 Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Électronique ________________________________________________________________________________________________________________ Lorsque la pièce de cuivre passe du point A au point E sous l’action du laser, l’énergie totale q (A → E) emmagasinée par unité de masse est : q (A → E) = C (Tv – Ta ) + L f + L v La chaleur spécifique C à pression constante varie avec la température selon la formule C = a + 2bT – cT 2 où a, b et c sont des coefficients empiriques constants (K. Kelley – Bureau des Mines – Bulletin 584). Dans les évaluations pratiques, la chaleur spécifique sera considérée comme constante. Le tableau 1 donne les principaux paramètres de quelques matériaux. (0) Tableau 1 – Caractéristiques thermiques de quelques corps purs Aluminium Argent......... Béryllium .... Chrome Cuivre ......... Étain............ Fer............... Molybdène Nickel ......... Or ............... Palladium .. Platine........ Silicium ..... Tantale....... Tungstène . Zinc ............ Tf Tv (oC) (oC) 660 961 1 277 1 875 1 083 232 1 533 2 610 1 453 1 063 1 552 1 769 1 410 2 996 3 410 420 2 467 2 212 2 970 2 665 2 595 2 270 2 750 4 612 2 730 2 807 3 140 3 827 2 355 5 425 5 660 906 C (J · g–1 · K–1) (g/cm3) 0,900 0,234 1,883 0,460 0,385 0,226 0,460 0,276 0,439 0,130 0,243 0,130 0,678 0,142 0,138 0,385 2,70 10,49 1,85 7,19 8,96 5,76 7,87 10,20 8,90 19,32 12,02 21,45 2,33 16,60 19,30 7,13 LASERS POUR USINAGE 2. Procédés thermiques Ils sont ainsi nommés, car ils mettent en œuvre une forte énergie lumineuse à dissiper dans la matière. Les lasers utilisés sont le laser à dioxyde de carbone (CO2) et le laser à solide constitué d’une matrice cristalline (Y3 Al5O12) dopée par l’ion néodyme (Nd 3+), désigné par Nd:YAG. Le procédé le plus couramment utilisé dans l’industrie est la découpe par laser. Le perçage et le soudage arrivent en second rang. Les traitements superficiels sont plus spécifiques, mais offrent un potentiel important (figure 2). 2.1 Découpe par laser Hf Hvf (J/g) (J/g) 395 10 530 104,6 2 330 1 088 402 6 541 213 4 796 60,7 2 390 274 7 114 292 5 122 309 6 449 67,4 1 870 162 3 500 112,6 2 620 1 808 10 610 155 4 185 184 4 813 100,9 1 781 Ce procédé résulte de l’association d’une source laser de puissance élevée, d’un système assurant le transport du faisceau par rapport à la pièce et de l’assistance gazeuse au voisinage du point d’interaction. L’éclairement énergétique nécessaire est compris entre 109 et 1011 W/m2 pour atteindre la fusion locale du matériau. Parmi les nombreuses sources utilisées dans les applications industrielles, le laser à dioxyde de carbone en régime continu est le plus utilisé pour la découpe par laser. La longueur d’onde de l’émission lumineuse est de 10,6 µm. 2.1.1 Étude paramétrique La qualité du trait de découpe dépend de nombreux paramètres et notamment, des caractéristiques du faisceau laser : flux (ou puissance) F, polarisation du champ électromagnétique de la lumière, distribution spatiale énergétique du faisceau ; de la nature du matériau : épaisseur e, masse volumique ρ, température de fusion Tf , capacité thermique C ; des caractéristiques du gaz d’assistance : pression, débit et température ; de la vitesse v du déplacement du faisceau sur la pièce et de la largeur du trait de découpe. La conception de la tête de focalisation (figure 3) reste un facteur de qualité important, principalement la longueur de la focale de l’optique de concentration, la forme de l’extrémité de la buse, la distance entre la pièce et la buse, et la position du plan de focalisation dans l’épaisseur de la pièce. Figure 1 – Diagramme temps-température d’échauffement d’une pièce Figure 2 – Procédés thermiques Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Électronique E 4 220 − 3 LASERS POUR USINAGE _________________________________________________________________________________________________________________ 2.1.3 Vitesses de coupe Le tableau 2 présente des indications sur les vitesses de coupe pour différents matériaux. (0) Tableau 2 – Vitesse de découpe par laser Matériau Épaisseur (mm) L’interdépendance de ces paramètres et la complexité des phénomènes rendent difficile la modélisation de la coupe. Néanmoins, en première approximation la proportionnalité entre le flux (puissance) F du laser et la vitesse de découpe v s’expriment de la façon suivante : v = kF ( e ρ CT f ) où k est un coefficient sans unité qui prend en compte l’absorption du matériau, la rugosité de la surface et la nature du gaz d’assistance. Le modèle correspondant défini par Querry [1], correspond à l’expression empirique suivante : v = 7,43 e–1,06 F 0,63 où v est exprimée en m/min, e en mm et F en kW pour une focale de 18 cm, une pression de l’oxygène d’assistance de 1,2 bar et un débit de 1,8 m3/h. Ce modèle est applicable pour des épaisseurs comprises entre 1 et 50 mm et des puissances comprises entre 0,25 et 15 kW. Pour des épaisseurs inférieures à 6 mm, Miyazaki [2] propose pour les mêmes aciers une expression légèrement différente, qui, dans les mêmes unités, est : v = 3,5 e–0,56 F 0,5 2.1.2 Rôle du gaz d’assistance Le gaz permet d’améliorer notablement la qualité de la découpe quel que soit le matériau. Pour les matériaux non métalliques, les gaz inertes, tels que l’azote, l’argon ou l’hélium, ou l’air comprimé conviennent parfaitement. Par contre, pour les matériaux métalliques, l’oxygène est couramment utilisé. On retrouve ainsi une découpe par oxydécoupage : le laser entretient la réaction exothermique d’oxydation du métal par le jet d’oxygène. Un excès de gaz ou une vitesse trop faible peuvent conduire à des traits de découpe imparfaits. Les pressions d’injection de gaz sont comprises entre 1 et 5 bar et les débits entre 1 et 4 m3/h. L’éjection du bain liquide dans les découpes de métaux dépend plus de la vitesse du gaz que de sa pression dans la zone de découpe. Pour des économies de gaz, la distance de la buse à la pièce doit être supérieure au quart du diamètre de l’extrémité de la buse. Dans ces conditions, les découpes laser satisfont au compromis vitesse de découpe, économie des gaz, qualité et stabilité du processus. E 4 220 − 4 Puissance du laser (kW) PVC........................... 0,30 3 0,1 Mylar ........................ 0,02 1 200 0,3 Téflon ....................... 0,04 15 0,38 0,001 600 0,4 Papier ....................... Figure 3 – Tête de focalisation d’un laser de découpe Vitesse de découpe (m/min) Bois .......................... 25,0 1,5 8 Fibres de verre ........ 12,5 4,5 20 Acier doux ............... 3,0 0,5 0,5 Acier inoxydable ..... 3,0 5,0 1 Acier rapide ............. 5,5 0,6 0,5 Aluminium............... 12,5 2,3 15 Titane ....................... 19,5 2,5 10 2.2 Perçage par laser Le perçage par laser est une technique qui utilise généralement une source laser à solide, couramment le laser Nd:YAG. La longueur d’onde émission est 1 064 nm. Le laser est couplé, par fibre optique ou par miroirs, à une machine multiaxes (de 3 à 6 degrés de liberté) qui permet de déplacer dans l’espace de perçage une pièce de formes géométriques plus ou moins complexes. Le laser fonctionne en régime impulsionnel. Selon la nature des matériaux et les épaisseurs à percer, il sera nécessaire d’effectuer un ou plusieurs tirs pour déboucher le trou. L’un des avantages du procédé consiste à percer sous des incidences quelconques, jusqu’à 70 ou 80 degrés. La qualité d’usinage dépend fortement des conditions de travail et particulièrement de l’ouverture de la lentille de focalisation et des gaz d’assistance. 2.2.1 Étude paramétrique L’énergie minimale d’une impulsion laser capable de percer un trou de diamètre d sur une épaisseur e en un seul tir s’écrit : π 1 = ----- --------------- ρ d 2e [ C ( T v – T a ) + L f + L v ] 4 1– où la valeur de la capacité thermique C correspond à une valeur moyenne dans la gamme de températures comprises entre la température ambiante Ta et la température de vaporisation Tv . La valeur du coefficient de réflexion à la longueur d’émission est difficile à évaluer sous un angle d’incidence donné. Cette valeur dépend essentiellement de la rugosité de la surface et des changements de phase de la matière sous rayonnement intense. Seules les mesures expérimentales à température ambiante fournissent des valeurs majorées du coefficient de réflexion moyen ; en effet, les matériaux en fusion présentent couramment des absorptions dans le proche infrarouge supérieures à celles des surfaces solides correspondantes. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Électronique ________________________________________________________________________________________________________________ La durée t v nécessaire pour vaporiser le matériau en surface est [3] : π 1 t v = ----- ----------------2- ρ KC ( T v – T a ) 2 /E 2 4 1– où E est l’éclairement sur la pièce tel que : E = 4 Fc /(πd 2) avec Fc puissance crête ( F c = / τ ) . La vitesse de propagation de l’interface liquide-vapeur dans le matériau s’écrit [3] : v i = ( 1 – )E/ ρ [ C ( T v – T a ) + L v ] Le temps de perçage t p d’un trou de diamètre d et d’épaisseur e est donc : t p = tv + (e/vi) Si la durée τ de l’impulsion est inférieure à t p , le trou ne débouchera pas. Si τ est nettement plus grand que tp , le procédé ne sera pas optimisé. Par ailleurs, la valeur de la diffusivité thermique δ caractérise l’aptitude du matériau à favoriser l’opération de perçage ou de soudage par laser. En effet, la constante de diffusion thermique t du matériau sur l’épaisseur e est définie par : t = e 2/4 δ = e 2ρC/4K Si t est faible, la diffusivité est grande et la pièce se prête mal au perçage. Cela est d’autant plus vrai si t < t p . Les conditions idéales de perçage sont telles que : tp τ < t 2.2.2 Rôle de la forme temporelle de l’impulsion Il paraît intéressant de proposer une variante à l’hypothèse d’une distribution temporelle uniforme de l’impulsion laser. Cette variante consiste à sculpter une forme temporelle particulière. Ainsi, dans un premier temps assez bref, la puissance crête est suffisante pour vaporiser rapidement la surface du matériau et ainsi abaisser le coefficient de réflexion. Dans un second temps, l’énergie lumineuse est apportée sous une puissance crête moins élevée, mais durant un temps compatible avec l’épaisseur à percer. 2.2.3 Application numérique Il s’agit de percer un alliage de cobalt-nickel dont les caractéristiques sont les suivantes : LASERS POUR USINAGE Le trou recherché a un diamètre d = 0,5 mm et une épaisseur e de 1 mm. Les caractéristiques de l’impulsion lumineuse sont alors, pour une évaluation de de 10 % : = 16,7 J Fc = 20 kW pour τ = 808 µs Fc = 30 kW pour τ = 539 µs Fc = 40 kW pour τ = 405 µs La constance de diffusion thermique t sur 1 mm est de 423 ms pour les valeurs moyennes de C et K respectivement égales à 0,69 J · g–1 · K–1 et à 0,37 W · m–1 · K–1. Il reste à noter que la qualité du faisceau laser et l’apport du gaz d’assistance sont les paramètres essentiels pour fabriquer des trous calibrés, cylindriques ou avec une conicité réduite. Il est nécessaire notamment de s’assurer que la zone de focalisation possède un diamètre inférieur au diamètre du trou recherché et que la répartition spatiale de part et d’autre de cette zone ne varie pas sensiblement de diamètre sur 1,2 à 1,5 fois l’épaisseur à percer, sans quoi le trou peut être évasé. 2.3 Soudage par laser Le soudage par laser complète efficacement d’autres techniques telles que le soudage électrique, le soudage à l’arc ou au faisceau d’électrons. L’avantage essentiel du laser dans le procédé de soudage est d’apporter localement un flux intense et contrôlé. Cela permet de souder des matériaux très différents thermiquement ou de réaliser des joints de soudure sur des surfaces gauches et complexes. Le soudage laser se réalise soit avec un laser à dioxyde de carbone CO2 en régime continu, soit avec un laser à solide Nd:YAG en régime continu ou impulsionnel. Une soudure réalisée par laser se traduit par une fusion localisée, caractérisée par trois zones (figure 4) : — la zone fondue par l’apport énergétique de la source ; — la zone thermiquement affectée, échauffée par conduction au sein de laquelle des transformations métalliques se produisent ; — la zone de liaison, interface entre les zones précédentes, qui est le siège de diffusion. Pour une épaisseur soudée donnée, les volumes de métal fondu et thermiquement affecté décroissent lorsque la densité de puissance augmente. Le laser reste donc l’outil adapté pour le soudage, car il limite l’échauffement, induit de faibles contraintes résiduelles et des déformations limitées. ρ = 9 g/cm3 Tf = 1 425 oC Tv = 3 185 oC L f = 255 J/g L v = 5 918 J/g C = 0,42 + 1,68 × 10– 4 T (en J · g–1 · K–1) K = 11,5 + 1,60 × 10–2 T (en W · m–1 · K–1) où la température T est exprimée en degrés Celsius. Figure 4 – Zones d’une soudure par laser Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Électronique E 4 220 − 5 LASERS POUR USINAGE _________________________________________________________________________________________________________________ 2.3.1 Soudage par laser CO2 Pour des niveaux de puissance laser inférieurs au kilowatt, les profondeurs de pénétration sont relativement faibles ; ainsi pour un acier commun, la profondeur de pénétration de la zone soudée est de 0,15 mm pour une vitesse de déplacement de 10 m/min et un laser de 400 W. Les pénétrations plus profondes sont atteintes avec des lasers multikilowatts comme le présente la figure 5. Dans ces situations, la soudure présente instantanément dans le bain du métal en fusion une dépression nommée keyholing en anglais, dans laquelle l’énergie lumineuse pénètre [4]. Cette dépression disparaît après le passage du faisceau laser et laisse un joint de soudure semblable à celui obtenu avec un faisceau d’électrons. Les aciers inoxydables donnent d’excellents résultats. En effet, la faible conductivité thermique de ces alliages permet d’obtenir des cordons plus fins et plus pénétrants qu’avec les aciers au carbone. Les alliages base nickel se soudent également de façon satisfaisante. Quelques problèmes de fissuration peuvent apparaître. Les alliages spécifiques de tantale, titane et zirconium donnent de bons résultats, si le bain de fusion est correctement protégé de toute pollution gazeuse. Les alliages d’aluminium sont difficiles à souder et se fissurent assez vite. Les alliages de cuivre se soudent mieux au laser Nd:YAG qu’au laser CO2 . Figure 5 – Pénétration en soudage par laser CO2 2.3.2 Soudage par laser Nd:YAG Pour définir correctement les paramètres du laser impulsionnel, il est utile de connaître le modèle thermique proposé par Cohen et Epperson [5]. Il s’agit d’une résolution particulière de l’équation de la chaleur dont les résultats sont présentés dans la figure 6. L’utilisation de cette figure permet : — après évaluation des nombres sans dimension Y et T tels que : Y = L f /C Tf et T = 40 Tv /Tf — de trouver, à partir des valeurs de Y et de T, les valeurs des paramètres t n et D sachant qu’ils expriment les relations suivantes : t n = t v /t f et D = 8,33 ρ L f p /Et f où t v est le temps nécessaire pour atteindre l’état de vaporisation et t f est le temps nécessaire pour atteindre l’état de fusion à la surface du matériau et tel que : 2 t f = π ρ C T f K ⁄ ( 2 E )2 et où p est la profondeur de fusion recherchée. En combinant les équations qui expriment D et t f , l’expression de l’éclairement E est la suivante : 2 E = π C T f K D ⁄ ( 33,32 L f p ) La durée de l’émission laser est limitée à t v . Si le diamètre du spot laser focalisé est D spot , l’énergie laser par tir est définie par : 2 = E t v ( π D spot ⁄ 4 ) Figure 6 – Abaque de détermination d’un laser Nd:YAG de soudage 2.3.3 Application numérique Il s’agit, à partir d’une bande d’acier de 0,15 mm d’épaisseur de former un tube. Les deux extrémités de la bande se recouvrent et un laser Nd:YAG fait des points de soudure sur le recouvrement. Les propriétés de l’acier sont fixées par les paramètres suivants : — température de fusion Tf = 1 539 oC — température de vaporisation Tv = 2 750 oC ρ = 7,87 g/cm3 — masse volumique — enthalpie de fusion L f = 272 J/g — capacité thermique massique C = 0,460 J · g–1 · K–1 — conductivité thermique K = 0,753 W · cm–1 · K–1 — coefficient de réflexion = 0,5 à 1 064 nm Le faisceau laser est concentré dans un diamètre de 1 mm et les pertes optiques associées à la gestion de ce faisceau sont de 20 %. Les valeurs des nombres Y et T sont : Y = 0,38 et T = 71,5 E 4 220 − 6 Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Électronique ________________________________________________________________________________________________________________ LASERS POUR USINAGE Les courbes de la figure 7 permettent de trouver les valeurs de t n et D : t n = 3 et D = 4 La profondeur p de fusion recherchée est égale à deux fois l’épaisseur de la bande métallique, soit 0,03 cm. L’éclairement E a la valeur suivante : 2 E = π C T f K D /3,32 L f p = 37 913 W/cm 2 La section du faisceau dans le plan de soudure est de 0,007 8 cm2 ; les valeurs de t f et de t v sont : t f = 3,5 ms et t v = 10,5 ms Les principaux paramètres du laser sont l’énergie par tir et la durée τ de l’émission, tels que : τ = t v = 10,5 ms 0,007 8 E τ = ------------------------------- = 7,8 J 0,8 ( 1 – ) Figure 7 – Durcissement superficiel d’un acier 35CD4 Il reste à vérifier que l’énergie évaluée par la formule : ρ V (C ∆T + L f) = ------------------------------------------0,8 ( 1 – ) où V représente le volume de métal fondu, reste du même ordre de grandeur que l’évaluation faite précédemment. Les valeurs intermédiaires sont les suivantes : V = 2,36 · 10–4 cm3 ∆T = Tf – Ta = 1 519 oC où Ta = 20 oC La valeur de l’énergie par tir est de 4,5 J, qui ne représente que 58 % de l’énergie calculée précédemment, mais ne prend pas en compte les pertes thermiques par diffusion thermique. 2.4 Traitements superficiels par laser L’intérêt industriel pour les traitements de surfaces par faisceau laser est réel depuis l’avènement des lasers CO2 multikilowatts. Suivant le temps d’interaction entre le champ électromagnétique du laser et la matière et les puissances lumineuses mises en œuvre, le classement des traitements superficiels [6] est le suivant : — le durcissement superficiel est obtenu pour des éclairements compris entre 103 et 104 W/cm2 et des durées d’interaction comprises entre 10–2 s et quelques secondes ; — la fusion superficielle et la création d’alliages pour des éclairements compris entre 104 et 106 W/cm2 et des durées d’interaction comprises entre 10–3 et 10–1 s ; — le glaçage et la réalisation de structures superficielles microcristallisées pour des éclairements compris entre 106 et 108 W/cm2 et des durées d’interaction comprises entre 10–6 et 10–3 s. Pour assurer un bon couplage entre le laser et la matière, il convient de déposer sur la surface du matériau un absorbant tel que la poudre de graphite. 2.4.1 Durcissement superficiel Pour des aciers de construction et les aciers à outils, les meilleures conditions de durcissement se situent entre l’état de fusion superficielle et l’insuffisance d’épaisseur durcie et dépendent essentiellement de la trempabilité de l’acier. Dans le diagramme densité d’énergie-vitesse de défilement, les points qui limitent les conditions optimales pour les aciers cités sont les suivants : 6 000 J/cm2 pour 18 cm/min 2 800 J/cm2 pour 60 cm/min Les profils de dureté obtenus pour un acier 35CD4 revenu à 400 oC par un faisceau laser de 1,75 kW présentent tous une allure caractéristique (figure 7). Le plateau de haute dureté est suivi d’une chute brutale à la limite du cordon traité puis d’un creux dans le cas de matériau préalablement trempé ou revenu et d’un plat qui indique la valeur de la dureté initiale. La vitesse de défilement, comprise entre 0,4 cm/s et 0,85 cm/s, influe essentiellement sur la profondeur du traitement [7]. Il est à noter que les forts gradients thermiques observés dans la couche traitée induisent un champ de contraintes résiduelles important dans le matériau [8]. 2.4.2 Fusion superficielle Il s’agit d’un type de traitement intéressant pour des matériaux pour lesquels une remise en solution et un refroidissement rapide bouleversent la structure superficielle. Le traitement s’effectue sous des densités d’énergie comprises entre 5 000 et 10 000 J/cm2. La zone durcie par une fusion rapide a des compositions diverses selon la nature du matériau et les duretés couramment obtenues seront de 900 et 1 000 HV/0,2 pour un acier rapide du type Z85WDV 6.5.2. 2.4.3 Création d’alliages Le laser permet de réaliser des alliages par métallurgie superficielle. Ces alliages sont créés, soit par apport de poudre métallique, soit par fusion d’un dépôt préexistant dont on calcule l’épaisseur de façon à avoir, par un effet de dilution dans le matériau, les teneurs désirées dans l’alliage. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Électronique E 4 220 − 7 LASERS POUR USINAGE _________________________________________________________________________________________________________________ Ainsi, un dépôt préalable de chrome électrolytique d’épaisseur comprise entre 60 et 140 µm est appliqué sur un acier de type 42CD4. Le laser utilisé a une puissance voisine de 5 kW et la vitesse de défilement est de 70 cm/min. La teneur en chrome dans l’alliage de surface varie entre 14 % et 25 % selon l’épaisseur initiale du dépôt. La dureté moyenne est d’environ 650 HV/0,2 sur près d’un millimètre d’épaisseur et la structure de l’alliage est très fine et suffisamment homogène pour assurer une bonne résistance à l’usure. 2.4.4 Obtention de structures microcristallisées Des essais ont été réalisés à partir de structures superficiellement enrichies en bore et passées très rapidement à l’état liquide. Les densités d’énergie sont comprises entre 1 000 et 6 000 J/cm 2 pour des vitesses de défilement de 5 à 250 cm/s. La composition de la surface obtenue sur l’acier 32NCDV12 est homogène et contient une forte teneur en bore, proche de celle de l’eutectique Fe–B. Par ailleurs, l’énergie lumineuse absorbée n’est pas suffisante pour modifier l’état physique de la matière. Le coefficient d’absorption du matériau à la longueur d’onde λ du laser est défini par [9] : = [ 16π ⁄ ( K C µ 0 µ r λ ) ] 0,5 où µ0 et µr sont respectivement la perméabilité du vide et la perméabilité relative du matériau. La puissance Pabs absorbée par la matière fait apparaître un coefficient z 0 représentatif de la profondeur de pénétration de l’onde lumineuse. La relation entre Pabs et z 0 est la suivante : P abs ( z ) = ( τ )exp ( – z ⁄ z 0 ) où z 0 = [λ /(π K C µ 0 µ r )]0,5. Le coefficient d’absorption est ainsi relié simplement à la profondeur z 0 : = 4π ( z 0 ⁄ λ ) 3. Procédés athermiques En dehors du procédé de choc-laser qui n’est pas encore couramment intégré dans l’industrie, l’étude des procédés athermiques montrent que les éclairements utilisés sont rarement supérieurs à quelques GW/cm2. Les durées des impulsions sont de 5 à 100 ns et les énergies lumineuses sont de quelques centaines de millijoules à quelques dizaines de joules. L’intensité des champs électromagnétiques conduit au phénomène de vaporisation et quelquefois à la création de plasmas superficiels relativement chauds. Les procédés athermiques se différencient les uns des autres par l’éclairement utilisé (figure 8). 3.1 Thermoélasticité L’éclairement lumineux déposé sur le matériau est généralement inférieur à 10 MW/cm2. L’énergie de l’impulsion laser est en tout ou partie absorbée par la matière et provoque un échauffement local. La relaxation thermique de la zone chauffée crée des ondes acoustiques dans le matériau. Il est rare d’observer dans ces conditions une quelconque modification à la surface des matériaux. Ainsi pour l’aluminium, le coefficient est de 6 % à la longueur d’onde de 1 064 nm du laser Nd:YAG. La profondeur de pénétration de l’onde est alors de 5 nm et le pourcentage de la puissance absorbée à 1/e, c’est-à-dire sur 5 nm, est de 3,8 % soit environ 63 % de la puissance absorbée par tout le matériau. En régime thermoélastique, la puissance absorbée est totalement convertie en énergie mécanique qui se dissipe dans le matériau sous forme d’ondes sonores longitudinales et transversales. La principale application du régime de thermoélasticité est l’inspection ultrasonore par voie optique. L’émission lumineuse engendre des ondes ultrasonores (figure 9) dans un matériau métallique ou composite, une détection optique par hétérodynage placée du côté de l’émission ou derrière l’échantillon permet d’analyser les échos sonores produits par un défaut situé au sein de la matière. Les mesures se font sans contact et assurent un contrôle non destructif particulièrement performant. Une des applications concerne la détection d’anisotropie dans les tôles. La mesure de la vitesse de ces ondes de surface dans deux directions perpendiculaires (sens de laminage et sens travers) permet de mesurer l’anisotropie des tôles due au laminage. Cette mesure de vitesse a été réalisée avec des traducteurs piézoélectriques par contact. Une détection par sonde hétérodyne permettrait une mesure en ligne dès la sortie des tôles du laminoir [9]. Figure 9 – Inspection ultrasonore Figure 8 – Procédés athermiques E 4 220 − 8 Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Électronique ________________________________________________________________________________________________________________ Une seconde application potentiellement intéressante concerne la détection de défauts dans les rails d’une voie de chemin de fer. La génération d’ondes sonores de volume par laser et la réception par sonde hétérodyne peuvent permettre de concevoir un matériel embarquable. 3.2 Photoablation L’éclairement lumineux déposé sur le matériau est compris entre 10 et 100 MW/cm2. La puissance crête de l’impulsion crée une vaporisation en surface qui débute après un temps t v dont l’expression analytique est : 2 π ρ C K ( Tv – Ta ) t v = ----- -------------------------------------------2 4 (E ) Dès lors où le mécanisme de vaporisation est installé, la vitesse de vaporisation atteint rapidement une valeur vc constante telle que [11] : ( E/ ρ ) v c = -----------------------------------------L v + C ( Tv – Ta ) L’éjection des produits vaporisés engendre une pression locale Pr normale à la surface dont la forme analytique est la suivante : ( E ) 2 P r = Ev c /L v = -------------------------------------------------------ρ L v L v + C ( T v – T a ) Il faut noter qu’en régime de photoablation, le coefficient d’absorption est plus élevé qu’en régime thermoélastique. La présence d’une interface liquide élève l’absorption, qui peut atteindre 80 ou 90 %. La vaporisation, d’après l’expression de t v , n’a lieu que pour des éclairements absorbés supérieurs à la valeur ( E ) min telle que : ( E ) min = π ρ C K ( T v – T a )2 ⁄ 4τ 0,5 Si le produit ⋅ E est très largement supérieur à ( ⋅ E ) min , la vaporisation s’accompagne rapidement d’une ionisation et le régime de choc-laser se substitue rapidement au régime de photoablation. La pression Pr calculée en régime permanent de vaporisation est en réalité inférieure à la pression réelle subie par le matériau en régime d’ablation. En effet, l’éjection de la matière se fait souvent en phase d’interface liquide et cela accroît considérablement la contrainte normale à la surface. En général, la vaporisation ne s’arrête pas immédiatement lorsque l’impulsion lumineuse cesse, mais elle se prolonge jusqu’à ce que la température du matériau redescende au-dessous de Tv . Aux forts éclairements, le régime de vaporisation peut durer plusieurs microsecondes. Les ondes ultrasonores générées en régime de photoablation ont des indicatrices différentes de celles fabriquées par le régime thermoélastique. L’analyse de ces indicatrices permet de distinguer les deux régimes. Les applications du régime de photoablation sont très nombreuses [12]. Le nettoyage reste une des applications industrielles les plus avancées et répond à des besoins très différents, notamment dans la restauration de monuments historiques, le nettoyage de façade d’habitation et de moules industriels. Dans le domaine nucléaire, le laser permet d’obtenir des degrés de décontamination de surfaces non négligeables. Pour qu’un nettoyage par laser soit efficace, il est nécessaire que l’éclairement minimal utile à la vaporisation du dépôt à éliminer soit beaucoup plus faible que l’éclairement minimal relatif au support. Dans ces conditions, le laser opère en régime de photoablation pour LASERS POUR USINAGE le dépôt et n’engendre qu’un régime thermoélastique sur le support. Si l’énergie véhiculée par une impulsion est suffisante pour vaporiser l’épaisseur du dépôt, le procédé sera optimisé ; sinon plusieurs tirs seront nécessaires. Le marquage est également une des grandes applications industrielles. Le laser est couplé à un déflecteur galvanométrique piloté par un micro-ordinateur. Selon la nature des matériaux et la profondeur de la gravure visée, l’impression laser sera plus ou moins énergétique. L’ordre de grandeur de l’énergie nécessaire à prélever une épaisseur e de métal est associé à la formule suivante : = e s ρ C ( Tv – Ta ) + Lv avec s surface de métal à enlever. Les lasers pour le marquage sur les boîtiers métalliques, les céramiques et les pièces de verre ou composites nécessitent des cadences de tir élevées. Le laser Nd:YAG qui émet dans la longueur d’onde fondamentale à 1 064 nm ou dans une de ses longueurs d’onde harmoniques, notamment à 532 nm ou 355 nm, fonctionne à la cadence de 1 à 5 kHz et délivre des énergies de quelques millijoules dans des durées d’impulsions de 80 à 120 ns. Des marquages profonds nécessitent parfois des lasers de perçage ou de soudage. Certains matériaux sont marqués avec des lasers CO2 de moyenne puissance. La photoablation par laser permet d’exécuter des dépôts de films minces supraconducteurs à haute température, d’assurer des prélèvements contrôlés dans des tissus biologiques, de réaliser des désorptions de surfaces ou de permettre, en physique fondamentale, d’analyser par exemple les plasmas de surface. 3.3 Choc-laser Ces procédés supposent des éclairements lumineux supérieurs en moyenne à 100 MW/cm2. Dans ces conditions, le champ électromagnétique est suffisamment intense, non seulement pour vaporiser les particules de la surface, mais également pour ioniser ses mêmes particules et générer un plasma à la surface du matériau. Lorsque ce plasma se détend, il transmet une quantité de mouvement suffisante pour créer une onde de choc dans le matériau. Pour augmenter l’efficacité de la compression induite par l’onde de choc, il est intéressant de déposer une structure de confinement peu absorbante à la lumière laser. Le plasma s’établit à l’interface et l’efficacité du choc est largement augmentée. En cas de choc-laser libre, c’est-à-dire sans confinement, le matériau se vaporise en arrière d’un front d’érosion thermique dès que la température de vaporisation Tv est atteinte. L’évacuation de l’énergie absorbée à la surface du solide ne se fait plus par conduction thermique à l’intérieur du solide, mais par les électrons de la vapeur qui emportent l’énergie latente. La vapeur est en équilibre thermique avec la surface du solide et sa pression est égale à la pression de vapeur saturante correspondant à la température de surface, qui continue de croître. C’est au voisinage de la surface où la densité et la température sont maximales que s’initie le claquage de la vapeur. Celle-ci devient opaque au rayonnement laser. Il se forme alors un front d’ionisation qui tend à remonter vers le laser. La pression d’ablation Pabl (en kbar) en géométrie plane et à la surface critique s’exprime par [13] : –1 ⁄ 8 P abl = 2,4 E 0,75 λ –0,25 τ –1 ⁄ 8 Z –9 ⁄ 16 M 7 ⁄ 16 C o où l’éclairement E est exprimé en GW/cm2, la longueur d’onde λ en µm, la durée τ en ns. Z désigne le degré de l’ionisation, M la masse atomique du matériau, Co le logarithme de Coulomb d’écrantage électrique du plasma : Co est pris égal à 1/6. Pabl dépend essentiellement de E et peu de λ , τ et Z. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Électronique E 4 220 − 9 LASERS POUR USINAGE _________________________________________________________________________________________________________________ En cas de choc-laser confiné, la pression d’ablation peut aussi être évaluée. Une modélisation admet que le matériau et la structure de confinement ont la même densité et la même impédance acoustique. Cette hypothèse est bien représentative de la plupart des cas expérimentés. Si l’on admet que les solides dans lesquels se propagent les ondes de choc sont considérés comme des gaz parfaits, la pression d’ablation en régime confiné s’exprime, pendant l’émission laser, par [14] : Pabl.conf = 17,5 (a E )2/3 ρ1/3 où a est la part du laser qui ne sert pas à ioniser le plasma. E est exprimé en GW/cm2 et ρ en g/cm3. Couramment a est compris entre 0,1 et 0,5 et le rapport Pabl.conf /Pabl est compris entre 1 et 4. Pour l’aluminium (ρ = 2,7 g/cm3), les pressions exercées dans le matériau sont, pour a = 0,3, les suivantes : (0) E ...............(GW/cm2) 1 10 100 P ......................(kbar) 10 150 200 On comprend que, sous de telles pressions, la matière se tasse superficiellement et l’on constate généralement une augmentation notable des propriétés mécaniques de la surface. Les applications du régime de choc-laser sont peut industrialisées. L’avenir du choc-laser est malgré tout prometteur puisque, par rapport à son concurrent, le grenaillage, il conserve l’état de surface et contraint la matière sur une profondeur plus importante. Des applications plus avancées techniquement restent à la limite des régimes de photoablation et du choc-laser. Il s’agit essentiellement des préparations de surface avant collage ou traitements de surface conventionnels. 4. Procédés spécifiques Les procédés qui utilisent le laser sont nombreux et correspondent parfois à des applications confidentielles ou spécifiques. Le marquage de câbles aéronautiques tend, pour des raisons de sécurité à se substituer à toute autre technique d’identification. La fabrication d’objets en trois dimensions se révèle être une méthode tout à fait originale pour faire rapidement des prototypes de pièces de série. Cette technologie demande à s’affirmer avant que le procédé de fabrication ne soit réellement industrialisable. Les deux procédés décrits dans ce paragraphe représentent des techniques nouvelles qui mettent en jeu un apport calorifique local pour déclencher des réactions chimiques particulières. 4.1 Marquage de câbles aéronautiques Le marquage de câbles électriques utilisé en aéronautique consiste à identifier chaque câble par un code numérique ou alphanumérique composé de 10 à 20 caractères et placé tous les 50 ou 60 centimètres. Un appareil de type Airbus utilise de 300 à 500 km de câbles pour transmettre l’ensemble des commandes et des contrôles des multiples organes de l’avion. Le marquage doit impérativement éviter la création de microfissures locales qui constituent une des causes essentielles des défauts d’isolement électrique entre deux câbles d’un même toron. Les défauts d’isolement sont à l’origine d’arcs électriques et peuvent provoquer des incendies. Comparé à la méthode d’impression à chaud qui tend à blesser le diélectrique des câbles, le marquage par laser reste le procédé le moins agressif dont l’utilisation se généralise pour les avions et hélicoptères civils et militaires. E 4 220 − 10 4.1.1 Pigments employés L’âme électrique du câble est enveloppée dans un diélectrique, constitué souvent de kapton. Le vernis qui enveloppe le diélectrique est un polymère fluoré de type PTFE ou FEP. Différents pigments blancs ou colorés sont incorporés au polymère. Ces derniers sont susceptibles de changer de couleur sous l’action d’une impulsion lumineuse. Les pigments susceptibles de changer de coloration par effet laser offrent une palette de couleurs assez large : TiO2 , Nb2 , O5 et Sb2O3 sont des pigments blancs ; WO3 , MoO3 et CdS sont des pigments jaunes ; Cr2O3 et CuCO3 sont des pigments verts ; Cu2O et Fe2O3 sont des pigments rouges ; V2O5 est un pigment orangé. L’oxyde de titane TiO2 dans la variété rutile, une variété cristallographique de cet oxyde, est un pigment d’emploi universel qui présente toutes les qualités idéales pour l’identification des câbles aéronautiques ; en effet : — il ne modifie pas les caractéristiques du vernis et ne change pas de couleur lors de la cuisson de ce dernier ; — il change de couleur sous l’action d’un faisceau du laser Nd:YAG doublé ou triplé en fréquence ou éventuellement d’un faisceau de laser excimère ; — il ne modifie pas la permittivité de l’isolant, n’altère pas la tenue du câble aux attaques acides ou basiques et le marquage obtenu satisfait au cahier des charges des équipementiers. Par ailleurs, l’oxyde de titane a un excellent pouvoir couvrant, qui représente pour ce pigment blanc, la capacité de celui-ci à imposer sa couleur par rapport à celle d’une surface sur laquelle il est déposé de façon homogène. 4.1.2 Mécanisme de coloration des pigments sous flux laser Pour les pigments tels que TiO2 , Nb2O5 et WO3 , la différence d’énergie entre la bande de conduction et la bande de valence est inférieure à l’énergie du rayonnement laser ; ainsi l’énergie véhiculée par l’impulsion lumineuse peut être absorbée. Cette absorption conduit à une élévation de température locale et induit une perte d’oxygène. Il en résulte une formation d’éléments métalliques de degrés d’oxydation inférieurs tels que Ti 3+, Nb 4+ et W 5+ qui apparaissent sous forme de composés en microphases et qui créent le changement de coloration. Les ruptures de liaisons chimiques que le procédé crée, nécessitent un apport calorifique important que le seul effet photochimique ne suffirait à produire [15]. Le comportement de pigments tels que Cu2O et Sb2O3 est différent. La coloration s’accompagne d’une oxydation locale. Pour CuCO3 , l’absorption des photons assure la formation de l’oxyde CuO par perte du groupement CO2 . D’une façon générale, l’étape primordiale du marquage laser sur les câbles aéronautiques est l’absorption de l’énergie lumineuse par le pigment. Les pigments qui ne peuvent pas absorber la lumière, compte tenu de leur configuration électronique, ne pourront pas être marqués par laser. 4.1.3 Évaluation du contraste du marquage par laser On désigne par L et L’ les luminances respectives du câble avant et après marquage par laser. Ces luminances (exprimées en Cd/m2) sont mesurées à l’aide d’un photomètre dans les conditions d’illumination telles que l’éclairage ambiant ne fausse pas les mesures. Le contraste c, exprimé en pour-cent est donné par la relation : c = 100 (L – L’)/L Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Électronique ________________________________________________________________________________________________________________ Le tableau 3 donne les valeurs des contrastes observés avec certains pigments et fournit une indication sur les couleurs avant et après marquage par laser. (0) Tableau 3 – Marquage de câbles par laser Nature du pigment Coloration pigment après marquage Contraste (%) TiO2 blanc bleu-noir Nb2O5 blanc bleu-noir 69 CdS jaune grise 66 70 CuCO3 vert noire 42 Cu2O rouge noire 29 Cr2O3 vert grise 22 WO3 jaune noire 10 4.1.4 Influence des paramètres du laser sur le contraste Pour un vernis FEP chargé à 4 % de rutile, qui est la concentration optimale en oxyde de titane, le contraste augmente linéairement avec la densité d’énergie exprimée en mJ/mm2 fournie par une impulsion lumineuse de 10 ns de durée à une longueur d’onde de 355 nm. À partir de 20 mJ/mm2, le contraste augmente peu. Au-delà de 40 mJ/mm2, le vernis polymère commence à se détériorer. À 50 mJ/mm2, le vernis éclate et laisse apparaître le kapton. Pour une même concentration de rutile dans le même vernis, les valeurs du contraste sont très différentes selon la longueur d’onde utilisée. On obtient un constraste optimal de 71 % à 355 nm, alors qu’il n’est que de 50 % à 532 nm. Par ailleurs, le contraste varie peu avec la densité d’énergie à 532 nm. On recherchera avant tout une longueur d’onde fortement absorbée par le pigment pour disposer de seuils de densité d’énergie les plus faibles possible. Le kapton a un coefficient d’absorption très élevé aux longueurs d’onde utilisées, alors que le vernis absorbe peu les différentes lumières. Les pigments forment donc un écran protecteur pour le kapton en absorbant la lumière laser sur des épaisseurs extrêmement minces. 4.1.5 Avantages du procédé de marquage par laser Il est avant tout non agressif et présente une stabilité photochimique remarquable dans une gamme de température de quelques centaines de degrés. Le procédé s’effectue sans contact et l’impression s’effectue sans arrêter la progression du câble. La réalisation du code d’identification se réalise par la technique du pochoir. Elle consiste à projeter sur le câble l’image d’un écran constitué de caractères mobiles découpés dans des minces rubans métalliques. Ces rubans se déplacent les uns par rapport aux autres pour fabriquer le code recherché. L’impulsion lumineuse éclaire l’écran par transmission et les différents caractères sont imprimés sur la longueur du câble. L’interaction lumineuse dure une dizaine de nanosecondes. L’équipement industriel de marquage fonctionne en FAO (Fabrication assistée par ordinateur) et permet des vitesses de défilement comprises entre 30 et 100 cm/s. LASERS POUR USINAGE 4.2 Fabrication d’objets en trois dimensions La photoablation assistée par laser permet de réaliser des objets de dimensions moyennes de quelques dizaines de centimètres cube, de formes complexes en trois dimensions. Cette technique, nommée photosculpture induite par laser, permet aisément de réaliser des modèles de pièces préliminaires. La photosculpture utilise des matériaux organiques, notamment des monomères ou des oligomères et l’opération de photopolymérisation s’effectue en concept FAO. L’ordinateur dispose, en mémoire, de fichiers de points qui caractérisent le volume à réaliser et commande la déflexion d’un ou de deux faisceaux lasers pour exécuter la photoablation. 4.2.1 Différents procédés D’une façon générale, la transformation à l’état solide de monomères, notamment les acrylates, consiste à générer localement des radicaux libres susceptibles d’amorcer les réactions de polymérisation. Cela peut s’envisager par l’absorption locale de deux photons ou plus simplement par l’absorption locale d’un photon. ■ Procédé biphotonique Pour des éclairements importants, compris entre 1 et 100 MW/cm2, les espèces d’un milieu peuvent absorber l’énergie de deux photons et passer de l’état fondamental à un état excité alors que, sous un éclairement moins intense, le milieu reste transparent au faisceau lumineux incident. L’absorption biphotonique permet ainsi, de créer localement des espèces instables susceptibles d’engager la polymérisation locale. Il convient pratiquement de faire converger, en un même point de l’espace, deux faisceaux lumineux orthogonaux provenant d’un même laser. L’éclairement local résultant est suffisant pour provoquer la réaction de polymérisation, alors que les deux faisceaux isolés dans le monomère liquide sont transmis sans perte. Des problèmes pratiques déterminants, tels que la difficulté de déplacer rapidement deux faisceaux lasers et de les focaliser en un même point à l’intérieur d’une cuve cubique de 20 cm d’arête, et la nécessité d’obtenir des éclairements élevés pour amorcer la polymérisation, ont rejeté le procédé biphotonique au profit du procédé monophotonique moins élaboré mais de mise en œuvre plus simple. ■ Procédé monophotonique Il met en œuvre l’absorption de la lumière en surface du liquide monomère qui suit la loi exponentielle de Beer-Lambert. Pour obtenir un modèle à trois dimensions, il faut donc superposer des couches de matériaux monomères ou oligomères transparents au laser et adjoindre des amorceurs de polymérisation qui absorbent la lumière. Lorsqu’une couche a été polymérisée à la surface, par le balayage d’un faisceau laser selon deux dimensions et suivant la section exacte de l’objet à réaliser, on ajoute une petite épaisseur de matériau et on réitère l’opération de balayage. La polymérisation se fait toujours en surface et cela facilite grandement les échanges thermiques. Par analogie aux pixels, l’objet à réaliser est obtenu par la juxtaposition de volumes élémentaires, appelés voxels. La densité du polymère solide est naturellement plus grande que le monomère de base et engendre un retrait important que les systèmes industriels de photosculpture par laser doivent prendre en compte pour la réalisation de pièces de grandes dimensions. Toute reproduction sans autorisation du Centre français d’exploitation du droit de copie est strictement interdite. © Techniques de l’Ingénieur, traité Électronique E 4 220 − 11 LASERS POUR USINAGE _________________________________________________________________________________________________________________ 4.2.2 Exemple d’application Nous admettons que les modèles à réaliser sont inscrits dans un cube de coté L et que la précision recherchée est ∆L. Il y a donc au plus (∆L /∆)3 voxels à polymériser. Le temps nécessaire pour fabriquer un objet, dépend : — du temps t 1 nécessaire à l’ordinateur pour décomposer l’objet en tranches et faire les corrections nécessaires pour tenir compte du retrait ; — du temps t 2 nécessaire pour déposer une nouvelle couche de monomère ; — du temps t 3 nécessaire à la polymérisation d’une couche pour réaliser un périmètre ou une surface. Si τ est le temps nécessaire à la réalisation d’un voxel, t 3 = 4τ (L/∆L ) pour la polymérisation d’un périmètre et t 3 = τ (L/∆L )2 pour la polymérisation d’une surface. Les temps t1 et t 2 sont souvent négligeables devant t 3 . Si τ = 10–3 s et ∆L = 0,1 mm, la réalisation d’un cylindre de section carrée de côté L = 100 mm et de hauteur L = 100 mm nécessitera 1,1 h et la réalisation d’un cube de côté L = 100 mm nécessitera 278 h. Bien qu’il reste probablement à découvrir des solutions innovantes et rapides pour promouvoir le procédé de photosculpture induite par laser, chercheurs et industriels sont d’ores et déjà convaincus de l’intérêt de la méthode. Le temps t s’exprime par : t = t1 + t 2 (L/∆L ) + t 3 (L/∆L ) Références bibliographiques [1] [2] [3] [4] [5] [6] QUERRY (M.). – Découpe par laser in : Lasers de puissance, A. Niku-Lari. Revue pratique des métallurgistes. Machining data handbook, vol. 2 Metcut Research Associates Inc. Cincinnati (1980). 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