8 mémoire LE PATRIOTE RÉSISTANT N° 884 - mars 2014 Une carrière de flic nazi (1933-1944) De la lutte acharnée contre les groupes antifascistes allemands à la direction du Sipo-Sd à Vichy, Hugo Geissler eut d’innombrables crimes sur la conscience. C ’est une carrière impressionnante que celle d’Hugo Geissler, né à Strasbourg en 1908, en Alsace alle mande donc, et retourné avec sa famille en Allemagne (expulsés ? on ne sait) en 1919 après la défaite. Deux conséquences de ces données : il parle français, et il déteste la France. C’est important pour la suite… et fin. Scolarité normale, apprentissage de métallurgiste, chômeur comme une grande partie des Allemands au début des années 30, il n’attend pas un mois après la prise du pouvoir par Hitler pour adhérer à la SA, et le 1er mai 1933 au parti nazi. Les SA le versent aussitôt au « Service d’information SA », une sorte de police parallèle, où ses « résultats » seront si brillants qu’il sera bientôt admis dans la p olice d’Etat où il fera une carrière appréciée, avec comme spécialisation la lutte contre toutes les formes d’antifascisme. La « police d’Etat », en l’occurrence, c’est la Gestapo (GEheime STAatsPOlizei), Police secrète d’Etat, dont l’appellation ne sera unifiée qu’en 1936. Les SA, comme police auxiliaire, agissent en brutes sanguinaires, c’est bien connu. À Dresde, en Saxe, où va longtemps sévir Geissler, on a créé dès le 8 mars 1933 un KZ (camp de concentration) dans le château de Hohnstein. En novembre, on en était à 2 500 internés, et jusqu’à août 1934, 5 600 malheureux y passeront plus ou moins longtemps, dont plus de 100 femmes et 400 enfants. Dès le 10 mars 1933, un centre de loisirs des « Amis de la nature », une association plutôt à gauche, devenait un second KZ, où brutalités et tortures étaient naturellement aussi à l’ordre du jour. Un Commissaire du Reich (préfiguration des Gauleiter) pour la Saxe avait été nommé par Hitler le 8 mars. Il décida aussitôt, sur la base d’une ordonnance du président du Reich, l’interdiction et la dissolution de 24 organisations communistes ou proches de ce parti, mesures bientôt appliquées également aux organisations de la social-démocratie et aux syndicats. Les mouvements ainsi visés étaient plus ou moins importants, en grande partie groupusculaires. Des techniques d’infiltration redoutables Hugo Geissler, se sentant une vocation impérative de policier, disposait d’un facteur supplémentaire de succès : il n’avait jamais milité dans aucun groupe politique avant d’entrer dans la police et n’était donc abso lument pas connu dans les milieux qu’il voulait combattre. Cela lui permettra, comme on va le voir, des techniques d’infil tration d’une redoutable efficacité. Le Parti des travailleurs socialistes (SAP), dissident du SPD et proche des communistes, avait tenu congrès les 11 et 12 mars 1933 à Dresde. Après cette date, les arrestations débutèrent, en Saxe d’abord, puis à Berlin, et on sait aujourd’hui que Geissler s’était introduit dans les milieux SAP, et avait étudié l’organisation de ce groupement, jusqu’à permettre l’arrestation des six dirigeants berlinois, puis des six dirigeants nationaux de ce parti, donnant l’impression de l’avoir détruit complètement, et obtenant des compliments enthousiastes de la Gestapo b erlinoise. Les contacts de Geissler avec la SAP n’étaient pas exclusifs ! Il avait aussi fait connaissance de militants de l’Union de la Jeunesse socialiste (SJV), et ce sont des membres des deux formations hugo geisler (à droite) sévit en allemagne mais également en tchécoslovaquie et en france. il fut abattu qui furent condamnés par des maquisards à murat (Cantal) le 12 juin 1944. le 4 novembre 1933 par le Tribunal spécial pour la Saxe : 91 accusés, 89 condamnés, dont Une chasse brutale 11 femmes. Huit des condamnés avaient aux sociaux-démocrates Infatigable, Geissler, après ces premiers moins de 18 ans, ce qui était caractéristique pour les militants des groupes de succès, se consacra au Parti social-démogauche, les responsables pensant que crate (SPD). C’est en octobre 1934 qu’il les jeunes, comme les femmes, passe- contacta un certain Walter Schraps, connu raient plus facilement inaperçus. Mais le pour militer dans ce parti. Il n’eut aucun mal manque de formation à la clandestinité à se faire passer pour « marxiste convainet parfois de maturité entraîna souvent cu » et eut bientôt droit à des confidences, des catastrophes. par exemple sur les contacts du SPD avec des membres de la police et du parti nazi qui avertissaient, le cas échéant, de menaces précises. Par Schraps, il obtint le contact avec un autre militant, Horst Patzig. On connaît les détails de cette conversation de seulement deux heures, dans laquelle il apprit une masse de faits sur l’organisation à Dresde, mais aussi par exemple dans la ville industrielle de Zwickau, et ailleurs en Saxe. Geissler poursuivit le contact avec Patzig, qu’il rencontra 17 fois avant de l’arrêter le 14 février 1935. A cette occa sion, il fit preuve une fois de plus d’une effroyable brutalité (lui et quelques collègues furent l’objet en 1935 d’une enquête pour mauvais traitements datant de 1933), en le battant de telle sorte qu’il le laissa avec six dents de la mâchoire supérieure cassées, et un morceau de langue coupée. Des arrestations suivirent, une vingtaine de responsables SPD dans les jours suivants, et au total, jusqu’en mai, 77 membres du SPD de Dresde. Entre temps, à partir de mars, suivirent encore la découverte et la liquidation de groupes du SAP à Dresde, Leipzig et Chemnitz. Passons sur quelques autres hauts faits de Geissler pour évoquer une affaire qui fit grand bruit aussi à l’étranger. Les clandestins avaient fini par charger ce « cama rade », propriétaire d’une moto, de faire la liaison avec les centres de résistance réfu giés à Prague qui, entre autres, imprimaient toutes sortes de journaux, tracts et autre matériel de propagande antinazie. Le transfert en Allemagne de ces documents nécessitait des rencontres à la frontière. Le 4 juillet 1935, le groupe comprenant Geissler retrouva à cette fin dans une clairière quelques émigrés, armés. Le transfert des documents de propagande se fit normalement, mais le hasard révéla la présence de policiers allemands planqués dans les buissons, et une fusillade éclata aussitôt. Bilan : trois morts côté émigrés et Geissler à l’origine de centaines d’arrestations Une autre branche clandestine à laquelle s’attaqua Geissler était la « Défense rouge » (Rote Wehr, RW), ainsi que l’association Rot Sport. Cette dernière fut liquidée par un procès (octobre 1933-janvier 1934) contre 63 personnes, condamnées, selon Geissler, « principalement » grâce à son activité. La lutte contre la Rote Wehr fut moins facile, mais finalement aussi efficace. Ce groupement, voué à la préparation militaire et à la recherche d’armes, était apparemment noyauté, avant de l’être par la police, par des éléments plus ou moins criminels. Des 23 accusés lors du procès d’octobre 1934 devant le Tribunal du peuple, le féroce Volksgerichtshof (VGH), 18 avaient déjà été condamnés, en général pour des actes de droit commun… Il n’en reste pas moins que Geissler était à l’origine des arrestations, en partie grâce à l’aide d’un de ses mouchards, ancien communiste passé à la SA. Bien entendu, Geissler n’était pas seul à sévir, mais il savait « participer » diaboliquement, contribuant par exemple à l’impression de tracts concernant les élections de novembre 1933, et les faisant répandre par un ballon. Des centaines d’arrestations de membres de la RW eurent lieu durant l’été 1933, dans lesquelles il n’apparaît pas. Mais on le retrouve dans au moins un autre procès contre trois dirigeants et 16 membres de la Rote Wehr qui eut lieu en septembre 1934. Geisssler et deux autres policiers, se présentant comme communistes, étaient entrés en contact avec ce groupe, en vue de l’« organisation d’un soulèvement armé ». Mieux : lorsque deux responsables de la RW avaient accompli une mission en Tchécoslovaquie (où s’étaient réfugiés de nombreux militants de diverses organisations de gauche) en octobre 1933, ils étaient accompagnés de deux « militants », en fait des policiers, dont l’un était Geissler. Le prétexte était de rapporter en Allemagne des tracts et des publications antinazies. Geissler rapporta aussi une lettre, rédigée par un des dirigeants présents, adressée à la direction des Emissions internationales de la Radio de Moscou, et signée de tous les militants présents. Il était censé poster ce message, mais l’ajouta bien entendu au dossier qu’il était en train de constituer. mémoire LE PATRIOTE RÉSISTANT N° 884 - mars 2014 de nombreux blessés de part et d’autre. De plus un des suspects avait réussi à s’enfuir. Informé, Himmler décida de se venger de l’échec en ordonnant la mise en « détention de protection » (Schutzhaft) de 200 à 300 communistes habitant le long de la frontière tchèque. En fait ce sont plus de 700 personnes qui furent ainsi arrêtées, et pas seulement à la frontière. L’envoi de matériel d’information et de propagande politique des pays voisins de l’Allemagne nazie a longtemps constitué une des activités clandestines principales. La Gestapo voyait dans la destruction de ces filières une de ses tâches principales. L’habileté de Geissler le protégea longtemps. Pourtant son existence avait été signalée dès avril 1935 à l’étranger, non pas nommément, mais sur la base d’observations précises, en tant que policier infiltré. Même une réunion avec des dirigeants du SPD en juillet 1935 n’avait pas réussi à semer le doute, un prolétaire plus crédible ayant ce jour-là été substitué à Geissler, que personne ne connaissait. C’est seulement à la fin de cette année 1935 qu’on finit par admettre, dans les milieux clandestins, avoir été berné par un flic. Les quantités de journaux, comme L’Action socialiste, introduits mensuellement à environ 2 000 exemplaires, par exemple, comme des masses de tracts, étaient transportées par des voies diverses, chemin de fer, véhicules variés, et même colis lâchés au fil de rivières frontalières, etc. Mais peu à peu la Gestapo parvint à bloquer toutes les possibilités. Bientôt Prague fut abandonnée pour la France ou les pays scandinaves. Poursuivons rapidement la suite des « exploits » de Geissler. La destruction d’un des points de passage transfrontaliers de sociaux-démocrates était un succès, mais le parti, on le sait maintenant, en avait créé une douzaine au total tout autour du pays. C’est ainsi qu’un second de ces « secrétariats frontaliers » à la frontière tchèque fut victime de Geissler. Son enquête, débutée en octobre 1935, mena à l’arrestation d’une cinquantaine de personnes, dont un certain nombre furent condamnées à de lourdes peines par le VGH en février 1937. En 1936 et 1937, Geissler s’« intéressa » aussi aux syndicalistes, puis à partir de 1937 aux trotskystes. Pourtant son aura s’était ternie peu à peu, car il lui devenait moins facile de se faire passer pour ce qu’il n’était pas. Une observation au passage : il semble qu’au fil des ans, les tortures durant les interrogatoires aient été accompagnées plus souvent, sinon remplacées, par un chantage à l’arrestation (ou pire) des familles. Quant à l’emploi d’agents doubles dans les milieux d’émigrés de Prague, il devint peu à peu inefficace à partir de 1935, et surtout 1937 où Geissler vit arrêter et en partie lourdement condamner cinq de ses hommes. Mais c’est seulement après l’occupation de Prague en mars 1939 que la Gestapo pourra se convaincre de ses illusions. La police tchèque était très au courant de l’activité de nombre de ses agents, et en particulier un certain Hugo Zappe, responsable à Berlin de l’Office de contrôle des Allemands des Sudètes, était un espion tchèque depuis février 1931. Elle subit durant des semaines les traitements inhumains des hommes de Geissler… Geissler réussit un exploit supplémentaire en avril 1935, lorsqu’il parvint à arrêter une « instructrice » de l’Union de la Jeunesse communiste allemande (KJVD), Hélène Fischer. Comme souvent, les aveux de militants arrêtés entraînèrent l’arrestation de cette résistante. Geissler lui ayant été présenté comme « camarade » par le « mouton », elle s’entretint d’abord assez longuement avec lui, avant qu’il sorte sa carte de police. Extrêmement courageuse, elle supporta durant des semaines les conditions et les traitements inhumains infligés par l’équipe policière. Sa résistance finit par user les gestapistes de Dresde, qui l’envoyèrent à Leipzig, où elle constata l’emploi de méthodes policières très différentes. Là, ce n’était pas la terreur que les interrogateurs faisaient jouer, mais la psychologie. On lui présenta des masses de documents, d’aveux divers, de preuves de ce que savait la police. Les interrogatoires lui donnèrent d’ailleurs l’occasion de constater à quel point les organisations politiques réfugiées à Prague étaient infiltrées par la police (3). L’instruction de son cas la mena devant le Tribunal du Peuple, qui la condamna à la détention renforcée (Zuchthaus) à perpétuité, première femme à recevoir une telle peine devant ce tribunal nazi. Nommé à Vichy en septembre 1940 Geissler, qui venait justement de suivre des cours à l’Ecole des chefs SS à Berlin, fit p artie d’un « Groupe d’intervention » qui entra à Prague en mars 1939. En Tchéquie occupée, sa tâche ne changea guère, puisqu’il devait toujours arrêter des antifascistes, ici non plus allemands, mais étrangers, et des juifs. Jusque-là, dans la SS comme dans l’administration, il avait progressé, mais sans doute atteint ses limites. Devenir occupant le relance : dès le 3 avril 1939, 62 émigrés étaient déjà expédiés de Prague à Dresde et, le 14 avril, les « marxistes et communistes » arrêtés étaient au nombre de 466. Geissler fut nommé chef de la Gestapo à Kolin, à 100 km de Prague et, sans doute en septembre 1940, après l’effond rement de la France, il est nommé auprès du gouvernement Pétain. En effet, un responsable de la Gestapo avec lesquels Geissler avait commencé sa carrière, Karl Boemelburg, avait été nommé chef de la Gestapo à Paris début juillet. Boemelburg avait séjourné longtemps en France et parlait parfaitement notre langue. Geissler, on l’a vu, parlait également français. C’est pourquoi on le choisit pour diriger la « Délégation allemande de police à Vichy », l’Office principal de la Sûreté du Reich (RSHA) étant ainsi représenté a uprès de Pétain bien avant les autres grands organismes nazis, Affaires étrangères (automne 1941, un représentant de l’ambassade de Paris), ou Wehrmacht (février 1943). Un accord avait été passé à cette fin entre le chef du RSHA, Heydrich (qui le qualifiait luimême d’« inofficiel et illégal »), et le ministère de l’intérieur de Pétain Durant les deux premières années, jusqu’à novembre 1942 et l’occupation du sud de la France par les nazis, le service de Geissler se composa de seulement trois ou quatre personnes. Le RSHA avait établi des listes de « personnes ayant eu des activités communistes ou marxistes » et réfugiées en France. Elles devaient être livrées « sur simple demande » (1), et c’est en pratique la police française qui se chargeait de les arrêter. Ce fut le cas pour des industriels, comme Thyssen (qui avait pourtant soutenu Hitler), pour des responsables de la social-démocratie, comme Breitscheid ou Hilferding, livrés à la Gestapo en février 1941, comme pour de très nombreuses victimes, antifascistes ou juifs. Bientôt, le gouvernement de Vichy fit ouvrir à Castres un camp destiné à recevoir les personnes à livrer aux autorités nazies. En 1942, Hitler nomma le 9 mars un Commandant supérieur de la Police et des SS (HSSPF), Carl Oberg, et l’ambassade, craignant d’être court-circuitée, passa un accord avec Bousquet et Geissler pour que des policiers nazis participent aux interrogatoires comme aux arrestations d’étrangers (agents a nglais, par exemple) menés par la police française, et ce sur tout le territoire de la zone dite « libre ». Geissler fait même surveiller Pétain L’occupation de l’ensemble de cette zone à la suite du débarquement américain en Afrique du Nord, le 11 novembre 1942, valut à Geissler de devenir un des cinq « Commandants de la Sécurité » (KdS) de l’ex-zone libre. Dès lors, il va agir en potentat, il occupera un hôtel et cinq ou six immeubles à proximité immédiate de la résidence de Pétain, et la population saura vite que s’y trouve la Gestapo avec des locaux d’emprisonnement et d’interrogatoire. La construction d’un hideux mur de béton par mesure de sécurité excite la nervosité des habitants. De plus, Geissler dépasse ses compétences, informe ses supérieurs sur des données de politique intérieure française, alors que c’est le rôle de l’ambassade, et celle-ci proteste. Geissler pourtant prend peu à peu une réelle envergure : il dispose peu à peu de 70 ou 80 policiers, sans compter un nombreux personnel de chauffeurs, secrétaires, interprètes et autres. En janvier 1944, il crée une brigade d’agents « français » sous les ordres d’un ancien policier, Joany Batissier, dont les 22 membres sont en partie sarrois, luxembourgeois ou alsaciens, parlent donc allemand, et ont pris des pseudonymes germaniques. Ils arrêtent et pillent à qui mieux mieux. L’un d’eux, Georges Mathieu, étudiant alsacien, résistant « retourné », se vantait d’avoir procédé à plus de 200 arrestations durant les 240 jours de son activité… On doit aussi tenir compte d’une cinquantaine d’indicateurs réguliers, dont une vingtaine de femmes. Depuis 1943, Geissler avait de plus l’aide constante et empressée du Service 9 d’ordre légionnaire (SOL) et de la Milice. Il est impossible de relater le détail des méfaits accomplis par les sbires de Geissler. Rien que les six premiers mois de 1944 voient, en dehors d’innombrables actions ne touchant que quelques victimes, des arrestations de 24, 59, 40, 13, 120, 47, 53, 106 personnes, avec un nombre de morts considérable. En résumé, l’action de Geissler, depuis Vichy, a porté sur tous les domaines possibles. Il a contribué autant qu’il le pouvait à la déportation des juifs de la zone sud, lutté contre l’Organisation de Résistance de l’armée (ORA), avant même la liquidation de l’« armée d’armistice » suivant l’occupation du sud, arrêté des politiciens et des militaires français, recherché des dépôts d’armes, a lutté contre les résistants des maquis et les parachutages, et les réseaux de renseignements, avec leur radios. Il a également fait surveiller Pétain lui-même, dont les nazis ont craint un moment qu’il ne cherche à passer en Suisse ou en Afrique du Nord (2). Le 12 juin 1944 fut le dernier jour de la carrière d’Hugo Geissler. Ce lundi, il partit avec environ 80 hommes de Saint-Flour pour une intervention à Murat, à 25 km. En route, il fit fusiller quatre otages, et à Murat il arrêta une douzaine de personnes, dont le maire et deux femmes dont les maris n’avaient pas été découverts. Mais un groupe de maquisards de Condat, à 40 km, avertis par une postière de Murat, 45 hommes dans trois camions et trois voitures, foncèrent vers Murat. Postés à des points stratégiques, ils attendirent la sortie de Geissler de la mairie et ouvrirent le feu. Une balle dans la tête tua immédiatement le chef. En tout dix SS et six miliciens français furent tués, et les maquisards se replièrent sans dommages. Les nazis laissèrent passer 12 jours, pensant que si des habitants de Murat avaient fui, ils allaient revenir. Le 24 juin, 104 hommes furent en effet arrêtés et déportés à Neuengamme, dont seuls 31 survécurent. Cette action fut exécutée par une unité de la Wehrmacht composée de Tatares de la Volga, 10 maisons furent incendiées mais, contrairement aux instructions, la ville ne fut pas rasée. Ainsi finit la carrière efficace du flic nazi Hugo Geissler, représentant exemplaire des instruments du régime hitlérien. Jean-Luc Bellanger (1) Voir dans ce contexte l’article du PR de février 1999 sur l’Américain Varian Fry. (2) La Gestapo avait « acheté » un serveur employé à la table de Pétain, qui écoutait et rapportait fidèlement toutes les conversations intéressantes. (3) C’est seulement beaucoup plus tard qu’on découvrira par exemple qu’un concierge de l’Organisation d’aide aux réfugiés à Prague, en mesure de contrôler toutes les allées et venues, était un informateur de la Gestapo. n Siegfried Grundmann et Eugène Martres : Hugo Geissler – vom Dresdner SA-Mann zum Kommandeur der Sicherheitspolizei und des SD in Vichy (Hugo Geissler, de SA à Dresde à commandant de la Police de sécurité et du SD à Vichy), (479 pages), Editions Nora, Berlin, 2012 (non traduit).
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