Frère Achille Somers - Institution sainte

La petite histoire de l’Institution Sainte-Marie
L’Institution Sainte-Marie dans sa diversité a pris le relais des Congrégations, celles des Sœurs de l’Enfant Jésus et des Frères
Maristes ; La référence Mariste est restée présente à l’Institution Sainte- Marie où les Frères sont reconnus comme membres du
corps éducatif. Le caractère propre de cet établissement est un climat de liberté, de motivation et de participation, qui s’adapte
aux personnes et propose un chemin d’évangile par un chemin d’humanité.
« Je ne puis voir un enfant sans lui dire qu’il est aimé de Dieu »
C’était la passion de Marcellin Champagnat, fondateur des Frères Maristes.
Il a voulu qu’ils forment une communauté éducative avec les jeunes. Ce que Marcellin appelait l’esprit de famille caractérisé par des
relations simples, cordiales et fraternelles. Enseigner et éduquer en éveillant l’intelligence et le cœur, que les jeunes soient aimés,
accompagnés et pas seulement instruits et encadrés.
Dire à chaque enfant, à chaque jeune qu’il est unique,
c’est le lui montrer ! On m’a souvent demandé
pourquoi les Frères n’étaient pas Prêtres ? Il existe un
sacerdoce tout autre, celui d’aider un jeune à se construire, à devenir
ce qu’il est appelé à être. La vocation d’enseignant et d’éducateur est
essentielle dans le projet de Dieu.
C’est ce qu’avait compris, la Comtesse de la Grandville, qui, n’ayant pas
d’enfant se consacra corps et âme au développement de l’école pour
l’instruction et de l’éducation des jeunes des Weppes. Mais au-delà,
disposant de la fortune des La Grandville, elle fit de Beaucamps un centre
Mariste qui étendit ses ramifications dans toute la région, ainsi que dans
23 pays à travers le monde
« Comment cette œuvre a-t-elle survécue malgré les attaques répétées de l’Etat à partir de 1903 ; malgré les conséquences de l’exil et de
la sécularisation qui touchèrent les écoles et la vie religieuse ? D’où vient cette volonté de reconstruire une maison totalement anéantie
par la guerre en 1918 et de faire revivre un projet malgré l’hostilité des pouvoirs publics ?? » (Dimitri Saputa mémoire d’études
universitaires 2010)
La mission éducative guidée et nourrie par la force spirituelle venant des Fondateurs se poursuit aujourd’hui par une Institution où il
fait bon vivre, que de nombreux jeunes et anciens apprécient. Il est clair qu’au delà de la demande de réussite, bien des jeunes
fréquentant cette Institution ont de réelles attentes à la fois humaines et spirituelles.
Curieux village que Beaucamps-Ligny en terre des Weppes, où un important complexe scolaire de 2875 élèves est implanté, dont
l’origine remonte au milieu du XIXème siècle. Le choléra ravageait la population, la Châtelaine Marie Caroline de Beauffort, Comtesse de
la Grandville, appela à l'aide les Sœurs de l'Enfant Jésus fondées depuis peu à Lille par Mère Nathalie Doignies. Le fléau disparu, les
sœurs furent priées de rester et la Comtesse leur confia un hospice et une école pour les filles, leur assumant les ressources nécessaires.
La population rurale était très pauvre, avec des familles indigentes. Soucieuse de développer l'instruction primaire déficiente faite par le
clerc-sacristain, Madame de La Grandville fit rechercher une congrégation de Frères éducateurs, qui enseigneraient avec méthode.
C'est ainsi que trois Frères Maristes arrivèrent à Beaucamps le 18 octobre 1842. Ils venaient de Saint-Chamond dans la Loire où en 1817
Marcellin Champagnat, prêtre à La Valla (mont Pilat) avait réuni la première communauté.
Ce prêtre, rebuté dans son enfance par les méthodes brutales d'un instituteur, avait repris des
études primaires à 15 ans, non sans d’énormes difficultés, afin d’entrer au séminaire. Frappé par la
pauvreté et l'ignorance des jeunes ruraux, il réunit quelques jeunes paysans qu'il forma lui même.
Malgré les critiques et les obstacles cette communauté se développa, répondant à un besoin
d'époque. La pédagogie du fondateur privilégie l'attention à la personne, en partageant la vie des
enfants et des jeunes, il était très attentif aux plus démunis, jeunes ou âgés de son entourage.
Le Comte Henry de la Grandville, grand propriétaire terrien était fils unique. N’ayant pas
d’enfants, la Comtesse utilisant cette fortune avec l’accord de son beau-père et de son mari aida
plusieurs congrégations enseignantes, fit réparer des églises, fit construire l’actuelle maison des
œuvres (la MAL) à Lille prévue pour être un patronage de jeunes gens.
Les enfants de Beaucamps et de Ligny furent instruits gratuitement, ainsi que les indigents des environs. Pour subvenir aux frais, le Comte fit
don d'une ferme. En plus de l'école du village, cette Dame voulut un pensionnat d’études primaires, en ce temps là peu d’élèves allaient au
brevet.
La maison Provinciale / maison de formation et centre administratif
La comtesse fit construire une grande maison, afin d'y former des jeunes frères et d’ouvrir d’autres écoles. Ainsi Beaucamps devint un
centre Mariste régional. Les frères dirigèrent des écoles à Loos, Haubourdin, Santes, Wavrin, Seclin Annoeullin, Lille, Roncq, Halluin,
Quesnoy… Soit en 1900 : 65 écoles dans plusieurs départements au nord de Paris et 15 en Belgique avec plus de 600 Frères. (Environ 10
pensionnats ayant des classes gratuites pour les pauvres).
Un centre qui étendit ses ramifications dans les Iles Britaniques, en Belgique, au Danemarck, au Brésil-sud, en Allemagne et par voie
de filiation en Australie, en Nouvelle Zélande et en Afrique du sud par des Frères formés à Beaucamps. L’Institution des Frères Maristes
de Beaucamps constitue l’une des œuvres fondatrices de la Congrégation, symbole de l’expansion missionnaire hors de France. (Dimitri
Saputa -mémoire d’études universitaire 2010 ) .
« Cette maison fut l’un des berceaux de la Congrégation, ce lieu revêt une grande importance pour nous tous »
(témoignage récent
d’un Frère venu d’Ecosse).
Les Frères furent chassés en 1903, malgré une forte opposition de la population ; une quarantaine de frères âgés ou malades garderont
la maison faisant face aux attaques juridiques de l’Etat et soutenant les religieux sécularisés qui, avec bien des difficultés, maintinrent
certaines écoles. Réquisitionnée comme hôpital, la maison fut entièrement détruite par l’occupant en 1918.
La Congrégation perdit son droit de propriété en 1903. Les supérieurs sollicitèrent les héritiers de la
Grandville, le bien leur revenait par testament. C’est la famille de la Comtesse qui créa une société
propriétaire, en laissant la jouissance aux Frères Maristes. L’administration Provinciale trouva refuge près
de Tournai, pour revenir à Beaucamps-Ligny en 1946.
Le pensionnat Sainte Marie
Dès 1920, les Supérieurs Maristes contactèrent les héritiers, afin qu’ils fassent valoir leurs droits à recevoir les dommages de guerre. En
1923 trois frères reviennent sur le site et la reconstruction démarra en 1924 pour s’achever en 1928. Le pensionnat des Sœurs de l’Enfant
Jésus reconstruit, accueillit 150 pensionnaires. Celui des Frères comptait 300 pensionnaires ainsi qu’un juvénat pour des aspirants
maristes. Le pensionnat était beaucoup plus qu’un internat ; c’était une maison d’éducation dans la ligne voulue par la Concile de
Trente, avec ses rythmes, ses fêtes, une vie de famille. A l’époque s’y retrouvaient surtout des fils de fermiers et de commerçants.
Pourquoi un pensionnat ?
La dénomination collège était réservée aux clercs et aux études classiques, c’était le niveau d’excellence avant 1950. Les Frères Maristes
eurent des pensionnats qui préparaient aux diplômes d’agriculture, de commerce, d’industries avec ateliers de formation pratique
pour des jeunes moins doués c’était un peu l’enseignement technique avant le temps !
Une autre raison de l’existence des pensionnats fut la nécessité d’aider financièrement la Province pour la formation des aspirants, le
soin des malades etc…
Les Frères âgés prenaient leur retraite dans les pensionnats où ils rendaient service : Les rémunérations des Frères sécularisés par les
paroisses étaient faibles avant la loi de 1959 qui ouvrit davantage l’enseignement catholique aux enseignants non religieux. Cette loi
permit le développement de l’enseignement secondaire libre, en le rendant accessible à un grand nombre de jeunes.
L’Institution Sainte Marie ……trois établissements en un seule Institution !
Vers 1954 des parents organisèrent un transport scolaire. D’année en année les circuits de bus s’ajoutèrent.
En 1967 un premier bâtiment fut construit pour le lycée. Les 2 pensionnats fusionnèrent en 1974 et en 1978 la direction de chaque unité
devint autonome.
En 40 ans L’institution Sainte-Marie passera de 550 à 2.500 élèves / (2850 aujourd’hui); l’internat disparaîtra progressivement.
L’Institution se verra dotée d’outils et surtout de méthodes pédagogiques nouvelles en avance sur les réformes officielles. La
prolongation des études et l’augmentation de la population dans les villages des Weppes ont amené l’Institution à s’agrandir, à
s’adapter. Les jeunes accueillis à l’Institution Sainte-Marie viennent de plus de 70 à 80 communes des alentours.
Le projet éducatif très tôt élaboré s’est modifié en tenant compte de cette situation évolutive. L’animation pastorale créée dès 1971 se
poursuit aujourd’hui par des propositions adaptées à chaque niveau. La diminution des religieux a fait place à des équipes éducatives
qui s’efforcent d’avancer en s’inspirant de l’esprit des origines.
Pour le regard extérieur cette grande unité éducative en rase campagne fait parfois ombrage. Est-ce un lieu élitiste ? La seule exigence
est celle du travail et les responsables se sont efforcés d’accueillir le mieux possible tous ceux qui se présentent. Selon un témoignage
récent, l’esprit spécifique qui le caractérise c’est la qualité de la relation humaine, une vraie pastorale vivante, une proximité des
personnes dans un cadre familial.
Frère Achille Somers – janvier 2014