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Droit international prive
Introduction :
Il ‘agit de la branche du droit qui appréhende les situations privées internationales, c'est-àdire les situations de droit privé qui présentent un élément d’extranéité.
Ainsi, lorsqu’une situation de droit privé est interne, elle relève du droit civil, commercial
ou autre. Lorsqu’elle présente des liens avec plus d’un système juridique, elle relève du droit
international privé.
I - Les caractères du droit international privé
A) Le caractère privatiste
Il constitue le prolongement des autres branches du droit privé adapté aux situations
internationales. Au XIXème, LAURENT avait qualifié cette discipline de « droit civil international ».
Cette expression obsolète reste en grande partie vraie.
Pour autant, certaines parties du droit international privé touchent au droit public. Tel est le
cas du droit de la nationalité, de la condition des étrangers.
B) Le caractère international
Le droit international privé est international par son objet (règlementation des situations
internationales). En revanche, il reste, en grande partie, national par ses sources. En effet, il existe
autant de droits internationaux privés que d’Etats. D’un pays à l’autre, les solutions à un même
problème varient.
C’est donc la discipline qui va nous permettre de savoir quelle juridiction est compétente et
quelle loi est applicable. La réponse à ces questions n’est pas la même selon les pays.
De ce point de vue, le droit international privé se distingue radicalement du droit
international public qui, lui, est doublement international : par son objet et par ses sources. De plus,
l’effectivité du droit international public est limitée (accord des deux parties nécessaire).
II – L’objet du droit international privé
A) Les conflits de lois
La technique des conflits de lois est la discipline qui permet d’identifier, dans chaque
situation internationale, quelle est la loi compétente.
Les règles de conflit de lois sont le pendant, dans l’espace, des règles de conflit de loi dans
le temps (lois transitoires).
Les règles de conflit de lois sont dites indirectes : cela signifie qu’elles ne tranchent pas
directement le litige, elles se bornent à préciser quelle loi, quel droit national va s’appliquer.
Les règles de conflit de lois sont, en principe, bilatérales : elles peuvent donner compétence
aussi bien à la loi française qu’à la loi étrangère.
Enfin, les règles de conflit de lois sont neutres : elles ne privilégient pas, à priori, la loi
française.
B) Les conflits de juridictions
La technique des conflits de juridictions a pour objet de déterminer, dans chaque situation,
quel est l’Etat dont les Tribunaux sont compétents.
La règle des conflits de juridictions est, elle aussi, indirecte.
En revanche, la règle de conflit de juridictions, en droit commun, est, en principe,
unilatérale : elle se limite à préciser dans quels cas le Tribunaux français sont compétents. Mais elle
ne peut décider de la compétence d’un Tribunal étranger. Cependant, la règle de conflit de
juridictions peut présenter un caractère bilatéral lorsqu’elle provient non pas d’une source nationale
mais d’une source internationale, et notamment un règlement de l’UE. Même dans ce cas, elle ne
saurait toutefois imposer une quelconque compétence au Tribunal d’un Etat tiers.
C) La nationalité
La nationalité constitue un lien d’allégeance avec un Etat, c’est du droit public. Cependant,
la nationalité fait partie de l’état des personnes, tout comme le nom ou la filiation. En France, les
questions de nationalité relèvent du TGI, donc de l’ordre judiciaire.
D) La condition des étrangers
Il s’agit des questions d’entrée, de résidence et sortie des étrangers en France. La politique
migratoire et également concernée. Cette branche est très largement sous l’influence du droit de
l’UE.
III – Les sources du droit international privé
A) Les sources internes
1) La Constitution
En France, la Constitution n’est pas une source primordiale du droit international privé. En
Allemagne, c’est une source importante, de même en Italie. Quelques références dans la
jurisprudence constitutionnelle (CC, 2007, Droit au regroupement familial).
2) La loi
En droit comparé, la loi est souvent la source essentielle. Dans certains pays, il y a un droit
international privé codifié (Suisse, Allemagne, Italie, Espagne…).
En droit français, la loi est rare dans ce domaine. Le droit international privé (conflit de
coutumes en 1804) était inconnue à Portalis donc ils n’en ont pas parlé dans le Code civil.
Le Code civil contient peu de dispositions sur le sujet :
- Article 3 : seul texte général sur les conflits de lois.
- Article 11 : condition des étrangers
- Articles 14 et 15 : conflits de juridictions. Il n’y a pas grand-chose
mais privilège de juridiction à raison de la nationalité.
- Article 47 : effet, en France, des actes d’état civil établis à l’étranger.
- Articles 146-1 et 170 : mariage des Français à l’étranger. Règle
particulière : « le Français doit être présent le jour de son mariage ».
- Article 309 : divorce.
- Articles 311-14 et suivants : filiation.
- Article 370-3 : adoption. Règle générale.
- Article 517-7-1 : partenariats enregistrés (PACS…).
- Article 999 : forme du testament rédigé par un Français à l’étranger.
- Article 2221 : prescription des obligations
- Article 2417 : forme de l’hypothèque.
3) La jurisprudence
C’est la source interne principale du droit international privé français.
4) La doctrine
En droit interne, la doctrine est une source éminemment secondaire.
A l’inverse, en droit international privé, la doctrine est une source non négligeable.
B) Les sources internationales
1) Les sources écrites
Les Etats adoptent, parfois, des règles communes par le biais de traités. Par ailleurs, à
l’heure actuelle, au sein de l’UE, le droit international privé est en voie d’unification ainsi que le
prévoit l’article 81 du TFUE et ce par le biais de règlement de l’Union. Cette unification a commencé
et elle est déjà bien avancée. A terme, d’ici 10 ans, tout le droit international privé sera unifié à
l’échelle de l’UE.
a) Les sources du droit international général
La profusion des traités :
Certains traités traitent de la nationalité. Souvent, ce sont des traités conclus par les Etats
suite à un processus de décolonisation. Il peut exister des situations où la loi française dit que la
personne n’est pas française mais la loi algérienne dit que celle-ci n’est pas algérienne : apatride.
D’autres traités abordent la condition des étrangers. Historiquement, ce sont les traités les
plus anciens. Leurs ancêtres sont des traités de l’antiquité grecque appelés traités d’isopolitie.
Des traités énoncent des règles de conflit de juridictions.
Certains traités concernent les conflits de loi. Beaucoup d’entre eux sont des conventions
dites de La Haye préparés au sein de la Conférence de La Haye :
- Convention de La Haye de 1971 : convention sur la loi applicable aux
accidents de la circulation.
- Convention de 1978 : sur la loi applicable aux régimes matrimoniaux.
- Convention de 1973 : sur la loi applicable aux obligations
alimentaires.
- Convention de 1980 : sur l’enlèvement d’enfants.
L’unification mondiale reste largement utopique.
Certains traités ont pour but de faire adopter des règles communes de droit substantiel
(élaboration de règles de fond communes) :
- Convention de Varsovie de 1929 : sur le transport aérien et la
responsabilité du transporteur aérien.
- Convention de Paris de 1983 : sur la propriété intellectuelle.
Certains traités exercent une influence sur le droit international privé en raison de leur
prééminence générale bien qu’ils ne le concernent pas directement. Exemple de la Convention
européenne des Droits de l’Homme : il arrive que la jurisprudence de la CEDH ait de l’influence sur le
droit international privé.
Le régime des traités :
Les traités s’imposent en vertu de l’article 55 de la Constitution. L’Etat français est
responsable du fait de ses lois contraires à un traité (CE, 8 février 2007, GARDEDIEU).
L’interprétation du traité relève de l’office du Juge sans qu’il soit nécessaire de solliciter
l’interprétation du gouvernement.
b) Les sources écrites du droit international régional
Au sein de l’UE, le droit international privé est en voie d’unification complète. A terme, il
existera un seul droit international privé en Europe.
Cette unification s’opère par l’action de l’Union habilitée en cela par l’article 81 du TFUE.
Pour que l’UE unifie le droit international privé, il faut une compétence. Lorsqu’un texte habilite l’UE,
c’est une base juridique. Sur cette base juridique, l’Union a déjà unifié, en partie, le droit
international privé des Etats. Cette unification se fait, pour l’essentiel, par le biais de règlements de
l’UE :
- Règlement Rome I de 2008 : sur la loi applicable aux contrats.
- Règlement Rome II de 2007 : sur la loi applicable à la responsabilité
extracontractuelle (responsabilité civile).
- Règlement Rome III de 2010 : sur le divorce. Il n’est pas encore en
vigueur avant 2012.
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Règlement Bruxelles I de 2000 : sur les conflits de juridictions en
matière civile et commerciale.
Règlement Bruxelles II bis de 2001 : sur les conflits de juridiction en
matière de désunion.
Règlement dit « insolvabilité » de 2000 : sur les procédures
collectives (faillites)
Règlement dit « obligations alimentaires » de 2008
Règlement « obtention de preuves » de 2001 : institue une
coopération judiciaire pour pouvoir collecter une preuve auprès d’un
Juge étranger.
Règlement dit « titre exécutoire de règlement » de 2004 : permet de
transformer une créance en titre exécutoire.
Règlement « injonction de payer » de 2006 : procédure pour
demander au débiteur de s’acquitter de la somme.
Règlement « petits litiges » de 2007 : permet de régler des litiges
portant sur une somme inférieure à 2000€.
Règlement « signification » de 2000 : procédures de signification.
Sont en préparation les règlements Rome IV et Rome V sur les successions et les régimes
matrimoniaux.
2) Les sources non-écrites
a) La Lex Mercatoria
GOLDMAN. C’est l’ensemble des usages du commerce international. Elle joue un rôle
essentiel dans les procédures d’arbitrage. Arbitrage très développé en matière international car
procédure secrète, rapidité (statut dans les 6 mois), expertise (peut choisir un arbitre spécialiste en la
matière). Mais inconvénient : l’arbitrage est cher.
L’arbitrage peut permettre à l’arbitre de statuer de deux façons :
- En droit : applique le droit applicable
- En amiable compositeur : il est autorisé alors à statuer en équité et
donc s’affranchir des règles de droit. Il applique donc les usages du
droit commercial international  la Lex Mercatoria.
b) La jurisprudence des juridictions internationales
Il y a certains arrêts des juridictions internationales qui ont une influence :
- CIJ, 1955, Nottebohm : énonce un principe de rattachement de
l’individu à la nationalité la plus effective.
- CEDH, 2007, Wagner : reconnaissance d’une adoption prononcée à
l’étranger. Concerne les conflits de juridictions. Une luxembourgeoise
avait obtenu une adoption au Pérou et demandait à son pays de
reconnaitre la décision. Luxembourg refuse et la CEDH condamne la
Cour dans ce cas précis.
c) Les divers droits uniformes
Ce sont les droits créés artificiellement et à titre privé pour s’appliquer de façon supplétive
à la demande des parties à un contrat international et ce devant un arbitre ou, plus rarement, devant
un Juge si le droit international privé du pays de ce dernier l’autorise. Ce qui n’est pas le cas dans
l’UE :
- Les principes UNIDROIT : Code artificiel appliqué dans les procédures
arbitrales si les parties le veulent.
- Les Principes du droit européen des contrats : Code de contrats
facultatifs pouvant s’appliquer si les parties le veulent. Ce sont des
juristes européens qui ont pris dans les différents droits.
- Le Cadre commun de référence : en cours d’élaboration. C’est le
futur droit uniforme de l’UE elle-même.
Actuellement, dans l’UE, il n’est pas possible d’invoquer et d’appliquer ce principes devant
un Juge.
Partie 1 :
Les conflits de lois
Titre 1er : Théorie générale des conflits de lois
Chapitre 1 :
La structure des règles de conflit de lois
La règle de conflit de lois est la norme qui identifie quelle loi, indigène ou étrangère, doit
s’appliquer à l’exclusion de l’autre. De ce point de vue, le terme conflit de lois est excessif. Il s’agit
d’une sélection de la loi compétente.
Section 1 : La survenance du conflit
I – Les lois en conflit
Le conflit ne concerne traditionnellement que les lois de droit privé car le Juge administratif
ne peut, en principe, appliquer que le droit public de son pays. En revanche, peut se poser la
question du champ d’application dans l’espace d’une règle de droit public. Un crime commis à
l’étranger par un Français et répréhensible en France, en revanche, un délit commis à l’étranger par
un Français est répréhensible sous réserve que les mêmes faits le soient également dans le pays de
leur commission (article 113-6 du Code pénal).
En droit public, il y a coïncidence du Juge et de la loi compétente. Il y a unité de la
compétence juridictionnelle et législative. En droit international privé, on dit qu’il y a Gleichauf.
II – L’extranéité du conflit
A) Le conflit international
Hypothèse qui oppose la loi d’un Etat à celle d’un autre Etat. En droit international privé
français, il est possible, selon la jurisprudence, et pour le Juge, d’appliquer la loi d’un Etat que la
France ne reconnait pas officiellement à condition qu’elle soit effectivement en vigueur et appliquée
dans le pays considéré.
Historiquement, la question s’est posée pour l’URSS et, aujourd’hui, elle pourrait se poser
pour quelques pays comme la République de Chypre Nord et les territoires russes (Transnitrie,
l’Abkhazie ou l’Ossétie du Sud). Ces pays n’existent pas pour la France.
En droit européen, la solution pourrait être différente en matière de conflit de lois si l’on
transposait la solution retenue par la Cour de Justice en matière de conflits de juridictions : Cour de
Justice, 2009, Apostolidès : étant donné que le Juge de l’Union a refusé de reconnaitre que la
décision de droit turc n’est pas applicable, on peut imaginer que la solution soit appliquée aux
conflits de lois.
B) Le conflit interne
Il se produit à l’intérieur d’un même Etat lorsque le droit privé de ce dernier n’est pas
unifié. La France est un Etat unitaire donc pas d’autonomie régionale. La plupart des autre Etats de
l’UE ne sont pas conçus de cette façon. Cela entraine des différences sur certaines questions d’une
région à l’autre ou d’une province à l’autre.
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Tel est le cas, en 1er lieu, dans les Etats fédéraux : on parle alors de
conflits interétatiques ou d’un conflit inter provincial ou encore inter
régional. Aux USA, le droit privé varie d’un Etat à l’autre. Lorsque le
Juge français applique le droit d’un Etat fédéral, il doit déterminer
quel est le droit fédéré compétent en vertu des règles de ce pays
(conflit de lois dans le conflit de lois).
Dans les Etats qui admettent des conflits inter personnels : conflits
plus rares. Tel est le cas par exemple au Liban ou en Israël où le statut
personnel et familial relève des autorités religieuses et dépend de la
confession religieuse de la personne. Cela signifie que dans ces Etatslà, l’état civil, l’état des personnes sont définis par les autorités
religieuses. En France, la personnalité des lois a disparu, par contre, à
titre exceptionnel, ce conflit peut survenir dans un contexte post
colonial (Nouvelle Calédonie et la Polynésie).
Section 2 : Les méthodes de règlement du conflit
I – La méthode principale : la règle de conflit
La règle de conflit est, en principe, bilatérale en ce sens qu’elle précise laquelle de la loi
française ou de la loi étrangère est compétente. Elle comprend 3 éléments :
- La catégorie de rattachement : type de problème posé
- Le facteur de localisation : l’élément de fait déterminant qui justifie la
compétence de la loi du pays dans lequel il est situé.
- La loi applicable (Lex causae)
Par exemple la capacité relève d’une catégorie appelée statut personnel. Dans cette
catégorie, le facteur de localisation est généralement la nationalité de l’intéressé. La loi applicable est
donc la loi nationale.
Autre exemple : la possession d’un bien meuble relève d’une autre catégorie appelée statut
réel. Dans cette catégorie, le facteur de localisation est le lieu de situation du bien. En conséquence, la
loi applicable est donc la loi du pays où le bien est situé (la Lex rei sitae).
La règle de conflit n’est cependant pas toujours bilatérale. Il existe en effet des règles de
conflit de loi unilatérales. Ces règles se bornent à préciser dans quels cas la loi française est
compétente et dans quels cas elle ne l’est pas.
Tel est le cas de la règle de conflit en matière de divorce énoncée par l’article 309 du Code
civil. Ce texte dispose « le divorce et la séparation de corps sont régis par le droit français :
- Lorsque l’un et l’autre époux ont la nationalité française
- Lorsque les époux ont l’un et l’autre leur domicile sur le territoire
français ».
Si on n’est dans aucun des cas prévus, le droit français ne s’applique pas. Mais le texte ne
donne pas la solution. Les règles de conflit unilatérales présentent des inconvénients. En effet, si la
loi française est compétente (lex fori), il n’y a pas de problème. Mais, si la lex fori n’est pas
compétente, on ne sait pas quelle loi étrangère doit être appliquée. Dans ce cas, il faut alors
rechercher quelle loi parmi celles en présence se déclare compétente elle-même pour régler les
litiges. S’il y en a une, c’est elle qui s’applique. S’il y en a plusieurs, il faut alors choisir laquelle va
s’appliquer. Et s’il n’y en a aucune, la règle est appliquée : la lex fori à titre subsidiaire.
Exemple : un allemand avec une grecque. L’Allemand est domicilié à Londres et la Grecque en Italie.
On identifie les pays en présence. On regarde chacun des droits si un se déclare compétent. Si
plusieurs se déclarent compétent, le Juge va décider que telle loi est celle qui a le plus de légitimité. Si
aucune ne se déclare compétente, il applique le droit français à titre subsidiaire.
En raison de leurs inconvénients, les règles de conflit unilatérales sont généralement
proscrites. La jurisprudence s’efforce même, lorsqu’elle le peut, de bilatéraliser les règles
unilatérales.
CA de Paris, 1814, Busqueta : la CA de Paris a eu à appliquer l’article 3 alinéa 3 du Code civil : « les
lois concernant l’état et la capacité des personnes régissent les français même résidant en pays
étranger ». La loi régissant la nationalité est la loi nationale : bilatéralisation d’un conflit de lois
unilatéral.
II – Les méthodes accessoires
A) Les règles matérielles du droit international privé
Ce sont des règles de droit substantiel spécialement faites pour les situations
internationales qui donnent directement la solution au litige sur un point précis. Lorsqu’il existe une
règles matérielle sur un point précis, il est inutile, sur ce point précis, de consulter la loi applicable en
général. Seule la règle matérielle s’applique. En revanche, pour toutes les autres questions que le
litige soulève, il faut en revenir à la loi désignée par la règle de conflit.
Même si l’objet de ces règles est international, leur source ne l’est pas nécessairement. Elle
peut provenir d’un traité, de la loi ou de la jurisprudence.
Sont par exemple des règles matérielles :
- Le principe de licéité de la clause compromissoire stipulée dans un
contrat international conclu avec une personne publique : Ccass,
1966, Galakis. La clause compromissoire est la clause par laquelle les
parties s’engagent à avoir recours à l’arbitrage s’il y a un litige.
L’arbitrage, pour les personnes publiques, est interdit car
incompatible avec la règle de transparence des fonds publics. En
matière internationale, l’arbitrage est légal car garantie une certaine
neutralité de la procédure car risque de partialité du Juge national.
- Le principe de licéité de la clause d’indexation du prix sur la valeur de
l’or ou d’une devise étrangère : Ccass, 1955, Messageries maritimes :
dans un contrat interne, cette clause est illégale, nulle pour des
raisons politiques car valeur fiduciaire de la monnaie. En droit
international, la règle est contraire à celle énoncée par la Cour de
cassation car différentes monnaies et taux de change variant.
- Article 146-1 du Code civil : impose la présence du Français à son
mariage à l’étranger. Quelle que soit la pays où le mariage est
pratiqué, la règle s’appliquera.
- Le principe de validité formelle du contrat de vente international de
marchandise : principe posé par la Convention de Vienne de 1980
dans son article 11.
Les règles matérielles sont rares.
B) Les lois de police et de sûreté (lois d’application immédiate)
Le concept de loi de police est issu de l’article 3 alinéa 1 du Code civil : « les lois de police et
de sûreté oblige tous ceux qui habitent le territoire ».
1) L’émergence de la notion
En 1804, l’expression visait le droit public et le droit pénal. A la fin du XIXème, le texte
visait, selon la jurisprudence, la responsabilité civile. C’est à partir du XXème que la notion acquiert
son sens actuel avec les travaux d’un auteur grec, FRANCESCAKIS, consacrés par la jurisprudence.
Selon cette interprétation, il s’agit des règles, issues du droit interne, particulièrement
impératives, qui s’appliquent en conséquence même lorsque le litige est régi, par ailleurs, par une loi
étrangère. Autrement dit, même si le litige est régi par un droit étranger en général, s’il existe sur un
point précis une loi de police, seule cette dernière s’appliquera. En revanche, pour les autres
questions, il faut en revenir à la loi étrangère applicable.
Sont des lois de police, selon la jurisprudence française :
- Les règles sur l’assistance éducative et l’éducation des mineurs
- Les règles d’hygiène et de sécurité dans les conditions de travail
-
-
Le règle relatives à l’instauration d’un comité d’entreprise : CE, 1973,
Compagnie générale des wagons-lits
Les règles françaises concernant la responsabilité pour injure ou
diffamation par voie de presse : dispositions de la loi de 1881 sur la
presse.
Les règles de la loi du 31 décembre 1975 sur la sous-traitance relative
à l’action directe du sous-traitant contre le maître de l’ouvrage si
l’immeuble concerné par les travaux est situé en France. Ch. Mixte,
2007, Agintis.
2) La singularité de la notion
Les lois de police sont très différentes des règles de conflit de lois à trois égards :
- Avec la règle de conflit, un choix est opéré entre la loi française et la
loi étrangère : pas de choix avec la loi de police, application
automatique.
- Avec le règle de conflit, on part d’un rapport de droit que l’on classe
dans une catégorie et on localise ce rapport pour en déduire la loi
applicable : avec la loi de police, on constate seulement son existence
et on procède à son application.
- La règle de conflit est généralement bilatérale : la loi de police est,
par nature, unilatérale.
3) La consécration de la notion
Les lois de police sont reconnues en droit français depuis l’arrêt compagnie générale des
wagons-lits.
La définition qu’en donne FRANCESCAKIS a été reprise mot pour mot par la CJCE dans CJCE,
1999, Arblade. Les lois de police y sont définies comme « les règles dont l’observation est jugée
nécessaire à la sauvegarde de l’équilibre social, économique et politique du pays ».
4) La complexité de la notion
La plupart des règles impératives du droit interne ne sont pas, en droit international privé,
des lois de police. La qualification de loi de police est une question de droit relevant du contrôle de la
Cour de cassation.
La question peut par ailleurs de poser du sort des lois de police étrangères. L’article 7 de la
Convention de Rome permet cette application en matière de contrats. Cette possibilité reste
largement théorique.
Enfin, la théorie des lois de police entretient des rapports étroits avec le droit de l’UE. En
effet, une loi de transposition d’une directive de l’UE peut être une loi de police. C’est ce qui découle
de CJCE, 2000, Ingmar.
L’application d’une loi de police ne doit pas aboutir à une violation du droit de l’UE. Ceci
découle de CJCE, 1999, Arblade.
C) Le droit uniforme
Il s’agit du droit artificiel spécialement créé pour les contrats internationaux et qui
s’applique à certaines conditions si les parties le souhaitent. Dans ce cas, le litige est directement
résolu par ce droit.
Pour l’instant, en dehors du domaine particulier de l’arbitrage international, cette méthode
n’existe pas en droit européen. En effet, le règlement Rome I sur la loi applicable aux contrats ne
permet l’application d’un droit artificiel que dans le respect du droit national applicable. Sur ce point,
une réforme est prévue.
D) La Proper Law
Il s’agit d’une méthode anglo-saxonne qui consiste à rejeter les règles abstraites de conflit
de lois et à reconnaitre aux Juges le pouvoir de rechercher lui-même, selon son propre bon sens,
quelle est la loi la plus appropriée pour résoudre le litige. Le Juge recherche alors la loi qui
correspond au centre de gravité du litige (pays principal auquel se rattache le litige par exemple).
Cette méthode s’est considérablement développée aux US, notamment sous l’influence de
MORRIS et CAVERS. Cette méthode est parfaitement illustrée par :
Cour Suprême de l’Etat de New York, 1959, Babcock c/ Jackson : deux new yorkais partent faire une
promenade en voiture au Canada. Arrivés dans l’Ontario, ils ont un accident et la voiture heurte un
arbre. Ils rentrent à New York et le passager fait un procès au conducteur pour lui demander la
réparation des dommages subis. Le Juge américain va résonner selon cette méthode. En principe, on
applique la loi du lieu du délit. Le Juge constate que le conducteur et le passager sont new yorkais, la
voiture est immatriculée à New York et les compagnies d’assurances sont new-yorkaises. Le Juge
applique donc le droit new-yorkais.
L’avantage de cette méthode réside dans sa flexibilité. Son inconvénient réside dans son
imprévisibilité. Cette méthode n’est pas retenue en France, ni en Europe à proprement parler. Mais
elle exerce une certaine influence à travers le rattachement de certaines situations particulières à la
loi du pays avec lequel elle présente leurs liens les plus étroits (principe de proximité). ON retrouve
cela dans le règlement Rome I sur les contrats et Rome II sur les délits.
E) La méthode de la reconnaissance
Il s’agit d’une technique qui repose sur la reconnaissance, dans l’ordre juridique du for, d’un
titre ou d’un droit régulièrement acquis à l’étranger, indépendamment de la loi applicable en vertu
de la règle de conflit (obtention d’un diplôme par exemple). Cette méthode repose soit sur la
confiance mutuelle, soit sur le respect des droits acquis (vested rights), soit sur la libre circulation. La
reconnaissance est en effet de principe, sauf atteinte exceptionnelle à l’ordre public du for.
Issus du fédéralisme américain (article 4 Constitution US), cette méthode trouve un appui
certain dans le droit de l’UE (lequel énonce un principe de reconnaissance mutuelle depuis 1979,
Cassis de Dijon) et un appui possible dans le ConvEDH. Elle reste une méthode d’exception limitée à
la reconnaissance des droits et non à leur création.
En application de cette méthode,
- la Cour de Justice a jugé qu’un enfant allemand né au Danemark et
enregistré en premier lieu à l’état civil danois sous un nom composé
pouvait exiger de l’état civil allemand, saisi en second lieu, qu’il
reconnaisse et transcrive ce nom composé bien que la loi allemande
applicable ne connaisse pas les noms composés : CJCE, 2008,
Grunkin.
- La CEDH a, quant à elle, condamné, sur la base d’un raisonnement
similaire, le Luxembourg pour violation de l’article 8 de la ConvEDH
pour ne pas avoir reconnu la validité d’une adoption simple par une
luxembourgeoise célibataire d’un enfant péruvien prononcée au
Pérou et ce bien que la loi luxembourgeoise applicable en vertu de la
règle en prononçait la nullité : CEDH, 2007, Wagner c/ Luxembourg.
- En revanche, la CA de Paris avait, quant à elle, jugé que l’acte de
naissance d’un enfant né en Californie de parents français mais porté
par une mère de substitution conformément à la loi américaine
pouvait être reconnu en France. Mais la Cour de cassation a cassé
cette décision et a jugé qu’un tel acte ne devait pas être reconnu en
France au motif que la maternité de substitution est contraire à
l’ordre public français : Civ. 1ère, 2011, n°0966486. La CEDH a été
saisie par le couple.
- Enfin, la CJUE a admis, quant à elle, qu’un Etat membre pouvait
refusé de donner effet à une décision de Justice obtenue dans un
autre Etat membre et attribuant à un de ses ressortissants une
particule de noblesse adjointe à son patronyme : CJUE, 2010, Sayn
Wittgenstein.
Chapitre 2 :
Le contenu des règles de conflit de lois
Section 1 : La formation historique des règles de conflit de
lois
En droit romain, les conflits de lois n’étaient pas un concept juridique développé. Les
citoyens romains relevaient du droit romain et les non citoyens relevaient du droit pérégrin. Après la
chute de l’Empire romain d’Occident et à l’époque féodale, le système de la personnalité des lois
s’est rapidement révélé impraticable. C’est alors la territorialité qui a prévalu.
I – L’école de Bologne du XIIIème siècle
C’est elle qui a inventé la technique des conflits de lois. A cette époque, l’Italie était divisée
en de nombreuses Cités-Etats indépendantes et le commerce entre les Cités était florissant. D’où le
développement des conflits de lois. Ainsi, BALDUINI distingue :
- Les règles de procédure : oridnatoria litis
- Les règles de fond : decisorai litis. Pour celles-ci seulement, BALDUINI
admet la possibilité d’appliquer une loi étrangère.
Il propose les rattachements suivants :
- Pour le statut réel : (droit des biens) il propose la compétence de la
loi du lieu de situation de la chose (lex rei sitae)
- Pour les contrats : lex loci actus : loi du lieu de conclusion du contrat.
- Pour les délits : il propose la compétence de la lex loci delicti : loi du
lieu du délit.
- Pour le statut personnel : il propose la compétence de la loi du
domicile d’origine de la personne. A l’époque le concept de
nationalité n’existe pas encore.
Par ailleurs, BARTOL, au XIVème, propose un système de classement des lois en fonction de
l’incipit du texte (premiers mots de la loi).
II – L’école française du XVIème
A) Charles DUMOULIN
Il est connu pour sa résolution du conflit de lois en matière contractuelle et son invention
de la loi d’autonomie en vertu de laquelle les parties choisissent librement la loi compétente. En
1525, il est consulté sur la loi applicable au patrimoine des époux DU GANAY, patrimoine qui était
éparpillé dans plusieurs provinces françaises et qu’ils voulaient réunir sous l’empire d’une même loi.
Selon DUMOULIN,
- le régime matrimonial est toujours un contrat puisque le régime est
choisi par les époux.
- Ce contrat est régi par la loi du lieu de sa conclusion. Or, les parties
choisissent le lieu de conclusion.
- Par conséquent, la loi applicable au régime matrimonial est la loi
choisie par les parties. C’est le principe d’autonomie.
B) D’Argentré
C’est un magistrat breton. La Bretagne a été rattachée à la France en 1532. D’Argentré ne
veut pas voir la Bretagne rattachée à la France. Ses travaux ont donc pour but de justifier
l’application la plus fréquente possible de la coutume bretonne. Ainsi, il énonce la maxime : « en
principe, les coutumes sont réelles ». C’est donc un auteur territorialiste : dans le doute, on applique
la loi réelle (loi du lieu de situation de l’objet concerné). Les successions sont régies par le lieu de
situation de l’héritage. Les régimes matrimoniaux sont régis par le lieu de situation du patrimoine.
Il admet l’application de la loi étrangère à titre exceptionnel pour le statut personnel des
étrangers (non bretons).
III – L’école hollandaise du XVIIème
Paul et Jean VOET sont deux auteurs flamands qui ont énoncé une théorie de la courtoisie
internationale ou théorie dite de la comitas gentium. Pour cette théorie, la loi étrangère peut être
appliquée par un Tribunal national par courtoisie envers l’Etat étranger. Mais, cette courtoisie doit
être réciproque.
IV – L’universalisme du XIXème
C’est un courant qui propose des solutions valables pour tous les délits.
A) SAVIGNY
C’est l’auteur d’un traité de droit romain de 1849 qui aborde les questions de droit
international privé. Il veut montrer que tous les pays d’Europe ont, en réalité, la même origine, la
même culture. Ainsi, il considère qu’il y a, en Europe, une communauté de droits qui amène une
tolérance à l’application de la loi étrangère. D’après lui, il faut : « pour chaque rapport de droit
rechercher la meilleure localisation ».
B) MANCINI
Il s’agit d’un auteur dont les travaux sont antérieurs à l’unification de l’Italie. Cet auteur
énonce le principe des nationalités selon lequel chaque Nation doit avoir un Etat. Il construit un
système personnaliste selon lequel il faut appliquer au plus possible la loi de la nationalité de la
personne. Par exception, il admet parfois l’application de la loi réelle (lex rei sitae) en matière de
propriété.
V – Le particularisme du XXème
Ce courant est représenté par Etienne BARTIN. Il s’agit d’un courant anti universaliste selon
lequel le droit international privé n’est que « l’ombre projetée en droit international du droit
interne ». Comme chaque pays a son propre droit interne, variable et différent, il ne peut y avoir de
solution universellement reconnue.
« Le droit international privé et soumis à la malédiction de Babel » : la Genèse raconte que
les Hommes ont construit une tour pour démontrer leur puissance, tellement haute que les Hommes
espéraient atteindre le ciel. Dieu a châtié l’orgueil des Hommes en détruisant la tour et prononce en
plus une malédiction : plus jamais les Hommes ne pourront s’unir, ils se diviseront toujours, ne
parleront plus jamais la même langue. Pour BARTIN, il ne peut pas y avoir de droit international
uniforme car malédiction de Babel. BARTIN est très nationaliste.
Ce courant s’inscrit dans la tradition nationaliste du début du XXème.
VI – L’européanisme du XXIème
Il s’agit d’une tendance majoritaire aujourd’hui qui considère que l’unification du droit
international privé (règles de conflit de lois et règles de conflits de juridictions) est techniquement
possible au sein de l’UE et qu’elle constituerait un très grand progrès. Cette unification trouve sa
base dans l’ex article 65 du TCE, l’actuel article 81 du TFUE. Le but est de faire un seul droit
international privé en Europe.
La jurisprudence de la CJUE est manifestement réceptive aux idées de ce courant, ainsi
qu’en témoigne l’arrêt CJUE, 2011, Koelzch : La CJUE fait référence à « l’œuvre d’unification du droit
international privé » de l’article 81.
Les européanistes sont nombreux mais ils n’ont pas tous les mêmes projets. Il y a un projet
intégrationniste, un projet fédéraliste et un projet sui generis.
Ce courant est contesté par un courant néo nationaliste, plus minoritaire et essentiellement
français.
Section 2 : Les règles de conflit de lois contemporaines
I – Les situations visées à l’article 3 du Code civil
-
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-
En matière de responsabilité civile, la jurisprudence a bi latéralisé
l’article 3 alinéa 1er en désignant pour compétente la loi du lieu de
survenance du délit (lex loci delicti). Aujourd’hui, la règle, en droit
international privé français, est posée par le règlement Rome II.
En matière de statut réel, la jurisprudence a tiré de l’alinéa 2 une
règle bilatérale désignant la loi du lieu de situation du bien (lex rei
sitae)
Pour les navires et les aéronefs : on applique la loi du pavillon. Les
navires et les aéronefs sont enregistrés dans un Etat et c’est la loi de
l’Etat d’enregistrement qui s’applique.
En matière de statut personnel : la Cour de cassation a bi latéralisé
l’article 3 alinéa 3 dans l’arrêt Busqueta (1814) en le soumettant à la
loi nationale de la personne.
II – Les situations non visées par l’article 3 du Code civil
-
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Les questions de procédure sont régies par la loi du Tribunal saisi (lex
fori). Théoriquement, d’une façon générale, il n’y a pas de conflit de
lois en matière de procédure.
Les contrats sont en principe régis au fond par la loi choisie par les
parties (principe d’autonomie). La règle est posée, aujourd’hui, par le
règlement Rome I.
Les conditions de formes des actes juridiques en général sont régies
par la loi du lieu de conclusion de l’action (lex loci actus). C’est le
locus regit actum : le lieur régit l’acte.
Les successions : elles sont régies :
 en matière mobilière, par la loi du dernier
domicile du défunt. CCass, 1ère civ, 2010.
 en matière immobilière : lieu de situation de
l’immeuble. CCass, 1ère civ, 2009.
Il y a donc deux règles en matière de successions. S’il y a plusieurs
immeubles, chacun va faire l’objet de procédures séparées. Pour les
biens meubles, question de la réserve héréditaire (ce dont on ne peut
priver les enfants : on ne peut pas déshériter complètement les
enfants). Des droits étrangers ne la connaissent pas : on considère
chaque bien comme une succession à part.
Les régimes matrimoniaux sont régis, en principe, par la loi choisie
par les époux. Cela découle de la Convention de La Haye, 1978.
Les sociétés sont, en principe, régies dans leur fonctionnement
interne par la loi du pays de leur constitution. CJCE, 2003, Inspire Art.
Les procédures de faillites sont régies par la loi du pays de leur
ouverture. On précise lex fori concursus.
Chapitre 3 :
Les complications des règles de conflit de lois
Section 1 : Le conflit de conflit de lois dans l’espace
Chaque pays ayant son propre système de droit international privé, les solutions diffèrent
d’un Etat à l’autre. Ces différences peuvent provoquer des interférences avec le droit international
privé français.
I – Le conflit de qualifications
A) La survenance du conflit
En général, on classe le problème posé dans une catégorie de rattachement, puis on
recherche le facteur de localisation dont on tire la loi applicable.
La première opération, appelée qualification, est souvent facile à effectuer.
- La capacité à mariage relève du statut personnel.
- Les obligations du vendeur relèvent du contrat.
Parfois, la qualification est plus délicate :
- La capacité à contracter : cela peut être des contrats mais également
du statut personnel.
- Le transfert de propriété de la chose vendue : c’est une chose
vendue, donc cédée par contrat. Mais c’est également une propriété.
Le plus souvent, la solution peut être trouvée dans les conceptions du système juridique
français :
-
La capacité à contracter : relève du statut personnel et donc la loi
nationale.
Le transfert de propriété de la chose vendue : relève des contrats.
Enfin, il peut arriver que le système étranger interfère dans cette situation : c’est le conflit
de qualifications.
1) L’analyse de cas
Testament du hollandais :
Le Code civil néerlandais interdit à un hollandais de rédiger un testament olographe (ce
testament doit être daté, signé et écrit de la main du testateur), même à l’étranger et ce à peine de
nullité. En France, c’est licite.
Un hollandais rédige un testament olographe en France. Ultérieurement, la validité de ce
testament est contestée.
Dans quelle catégorie la question de la validité de ce testament doit être classée ?
- Selon le droit français : la question de la validité du testament
olographe est qualifiée de question de validité de forme. Elle relève
donc de la catégorie des conditions de forme. Elle est donc régie par
la loi du lieu de sa conclusion (lex loci actus). On applique donc le
droit français : testament valable.
- Selon le droit néerlandais : l’interdiction du testament olographe est
une règle d’incapacité. Cette règle relève donc du statut personnel
du rédacteur. La loi applicable est donc la loi nationale : non validité
du testament.
Par conséquent, si l’on suit la qualification donnée par le droit français (qualification lege
fori), le résultat diffère de celui auquel on parvient si l’on suit la qualification donnée par le système
étranger (qualification lege causae).
Le contrat anglais prescrit :
Un contrat est conclu entre un Français et un Anglais. Les contractants le soumettent à la loi
anglaise. Une action est introduite en France. Question de savoir si une des obligations est prescrite
ou non ?
- En droit français : la prescription d’une obligation contractuelle est
considérée comme une question de fond de l’obligation. Elle relève
donc de la catégorie des contrats. La loi applicable est la choisie par
les parties, donc la loi anglaise.
- En droit anglais : la question de la prescription est considérée comme
une question de procédure. La prescription éteint le droit d’agir en
Justice donc on arrête la procédure donc pas idiot. En conséquence,
la loi applicable est la lex fori donc si procès a lieu en France : la loi
française est applicable.
Le mariage du grec orthodoxe :
Un Grec épouse en France une Française en la forme civile exclusivement. La femme
demande une pension alimentaire. Pour ne pas payer la pension, il oppose la nullité du mariage pour
défaut de célébration religieuse. En effet, la loi grecque impose, à peine de nullité, une célébration
orthodoxe du mariage même si le mariage est célébré à l’étranger (règle disparue en 1983).
Le mariage est-il valable ou nul à défaut de célébration religieuse ?
- On peut qualifier le problème de question de fond : elle relèvera du
statut personnel. La loi applicable est alors la loi de la nationalité de
la personne et donc la loi grecque. Dans ce cas, le Grec gagne.
- On peut qualifier la question de pure forme : dans ce cas, la question
relève des conditions de forme. Loi applicable est donc la loi du lieu
de conclusion (lex loci celbrationis). Loi française applicable
donc dans ce cas. Le Grec va donc devoir payer.
En droit français, on considère que la question du caractère civil ou religieux de la
célébration est une condition de forme. En revanche, en droit grec, la célébration religieuse est
qualifiée de condition de fond du mariage.
2) Synthèse
Il y a conflit de qualifications lorsque la qualification normalement retenue par le système
du for est différente de celle retenue par le système étranger. Le conflit de qualifications constitue
une divergence entre le système français et le système étranger sur la catégorie de rattachement
appropriée.
Le conflit a un enjeu important, selon que l’on retient la qualification du for (qualification
lege fori) ou celle du système étranger (qualification lege causae), la solution du conflit de lois varie.
En faveur de la qualification lege fori :
- La règle de conflit émane du for : il est donc préférable de
l’interpréter selon les conditions du for. Argument de la cohérence.
- La règle de conflit précise les cas dans lesquels le système du for
accepte de donner effets à une loi étrangère : or, cette concession à
la loi étrangère n’est que pure courtoisie internationale. C’est donc
au for, auteur de la concession, de préciser son étendue.
- Par hypothèse, nul ne sait encore, au moment de la qualification, si la
loi étrangère peut être ou non compétente : il ne peut donc lui être
donné aucun effets à ce stade. Ce serait, sinon, la supposer
compétente. Qualifier selon la loi étrangère, c’est mettre la charrue
avant les bœufs.
En faveur de la qualification lege causae :
Il n’est pas cohérent d’adopter une qualification différente de celle de la loi étrangère si
finalement, on aboutit à la compétence de cette loi étrangère car la qualification du système
étranger est indissociable de la loi étrangère (argument de l’indivisibilité).
A partir de la fin du XIXème, la doctrine se penche sur le problème. Majoritairement, elle se
prononce en faveur de la qualification lege fori. Un auteur, RABEL, avait, lui, proposé un système de
qualification universel, fondé sur le droit comparé. Cette idée est aujourd’hui considérée comme
illusoire.
B) La résolution du conflit
Découvert par BARTIN, le problème du conflit de qualifications n’a trouvé une solution
claire et définitive qu’avec l’arrêt Ccass, 1955, Caraslanis : dans cette décision, la Cour de cassation
se prononce de façon solennelle en faveur de la qualification lege fori. Ce principe comporte un
certain nombre d’atténuation mais pas, à proprement parler, d’exceptions.
1) Le principe de la qualification lege fori
La Cour de cassation affirme dans l’arrêt Caraslanis : « la question de savoir si un élément
de la célébration du mariage appartient à la catégorie des règles de forme ou à celle des règles de
fond devait être tranchée par les Juges français, suivant les conceptions du droit français selon
lesquelles le caractère religieux ou laïc du mariage est une condition de forme ».
C’est un arrêt de 1955. Depuis, il y a eu peu d’arrêt. La solution a été réaffirmée dans Civ.
ère
1 , 2010 : lorsque se pose un problème, on le qualifiera toujours avec la conception française. Dans
l’affaire du Grec orthodoxe, la loi française était donc bien compétente et le mariage était donc
valable. Ce principe résout tous les conflits de qualifications.
- Concernant le testament du hollandais, le caractère valable ou non
du testament olographe relève des conditions de formes, donc il est
régi par la loi française et l’acte est donc valable.
- Concernant la prescription de l’obligation contractuelle : issue d’un
contrat régi par le droit anglais, le problème relève de la catégorie
des contrats. La loi applicable est donc la loi anglaise.
Cette solution est quasi-universelle. Presque tous les systèmes du monde l’ont adopté.
2) Des atténuations à la qualification lege fori
a) La qualification par référence à un traité
Lorsqu’il existe un traité sur le règlement des conflits de lois, les Tribunaux d’un Etat partie
au traité doivent se référer à lui et non à la lex fori. Une Convention franco néerlandaise du 5 octobre
1961 sur le testament précise que la validité du testament olographe relève de la catégorie des
conditions de forme.
La solution est exactement la même si la qualification est donnée par un acte dérivé de
l’Union ou par la Cour de Justice statuant à titre préjudiciel.
b) La qualification d’une institution étrangère inconnue de la lex fori
Lorsque le Juge du for est confronté à une institution inconnue de sa loi, il doit, au
préalable, l’étudier dans son contexte. C'est à dire se documenter sur le droit étranger afin de se
familiariser avec elle pour pouvoir la qualifier correctement. Cette qualification d’une demande en
Justice « exotique » est toujours une qualification lege fori.
BATIFFOL distingue deux phases dans cette opération :
- Une phase d’analyse : le droit étranger n’intervient que dans cette
phase.
- Une phase de classement
Pour MELCHIOR, il s’agit de « placer l’étoffer juridique étrangère dans les tiroirs de la lex
fori ».
Pour RAAPE : « l’Etat étranger caractérise ses règles, l’Etat du for les classe ».
CA d’Alger, 1889, Bartholo : un maltais décède laissant son épouse. Sa succession se compose
principalement d’immeubles situés en Algérie française. La veuve demande une part des biens du
défunt en invoquant une institution du droit maltais inconnue en droit français (la quarte du conjoint
pauvre). Pour déterminer la loi applicable à cette demande en la classant lege fori dans une catégorie
de rattachement, encore faut-il en comprendre le sens. Il faut donc,
- dans un premier temps, se documenter sur le droit maltais pour
comprendre l’objet de la demande. En droit maltais, le conjoint
survivant avait, à l’époque, droit à ¼ des biens du conjoint décédé
lorsqu’il devait faire face à des difficultés matérielles graves (Code
Rohan applicable à Malte jusqu’en 1962). La règle était énoncée dans
un chapitre du Code intitulé « du mariage et de la société
conjugale », c’est la base d’analyse.
- Dans un second temps : qualification de la demande, c'est-à-dire la
classer dans une catégorie de rattachement française. C’est la phase
de classement. La CA d’Alger a opté pour la qualification de régime
matrimonial. Elle a donc appliqué la loi du premier domicile conjugal
(loi applicable à défaut de choix par les époux), c'est à dire, en
l’espèce, la loi maltaise. Cette qualification est toujours une
qualification lege fori.
Ce problème se pose régulièrement en France lorsqu’une partie invoque des droits tirés
d’un Trust. Selon le cas et le contexte, la jurisprudence classe dans différentes catégories de tels
droits.
c) La qualification en sous-ordre
Une fois la règle de conflit de lois appliquée, la loi compétente est connue. Son application
n’est plus un problème de conflit de lois. Autrement dit, si un problème de qualification des faits se
pose à ce stade, ce sera un problème de qualification interne (comme en droit civil) que l’on résout
avec la seule loi compétente. Cette qualification-là est appelée qualification en sous-ordre.
La qualification en sous-ordre est la qualification du droit étranger car on applique le droit
étranger. Par exemple, si le droit français est compétent et que le défendeur invoque l’article 2276 du
Code civil (« en fait de meuble, la possession vaut titre »), il peut être nécessaire de vérifier le
caractère mobilier du bien concerné. De même, si le droit anglai est applicable et que le défendeur
oppose la nullité du contrat pour absence de consideration (équivalent anglais de la cause), il faut
qualifier la contrepartie donnée par le cocontractant de consideration ou non.
II – Le renvoi
A) La notion de renvoi
1) Analyse de cas
a) L’affaire Forgo (1878)
Forgo était un enfant naturel de nationalité bavaroise qui avait immigré très jeune en
France où il était toujours demeuré. Il y décède en laissant une importante fortune mobilière. Des
parents collatéraux de sa mère naturelle, tous bavarois, prétendent à sa succession. L’Etat français
également. En droit français, à l’époque, les collatéraux ordinaires d’un enfant naturel ne pouvaient
hériter de lui. En conséquence, la succession était vacante et revenait donc à l’Etat. En droit bavarois,
à l’époque, les collatéraux d’un enfant naturel pouvaient lui succéder.
Les Juges devaient donc déterminer la loi applicable à la succession. Il s’agit d’une
succession mobilière donc on applique la loi du dernier domicile du défunt. Or, à l’époque, le droit
français n’autorisait un étranger à fixer son domicile en France qu’avec l’accord du gouvernement.
Forgo n’avait jamais sollicité cette autorisation donc, à proprement parler, son domicile de droit se
trouvait en Bavière. Cependant, la règle de conflit de lois bavaroise soumettait, quant à elle, les
successions mobilières à la loi du dernier domicile du défunt, fût-ce un dernier domicile de fait. Selon
la règle de conflit de lois bavaroise, il fallait appliquer la loi française.
Les Juges du fond ont eu à se demander s’il fallait tenir compte de cette règle de conflit de
lois bavaroise. Ils ont estimé que oui. Ils ont considéré que « certes, dans un premier temps, la règle
de conflit de lois française désignait la loi interne bavaroise mais que, dans un second temps, la règle
de conflit de lois bavaroise renvoyait à la loi interne française de sorte que le droit français était bien
compétent ».
b) L’affaire Birchall (1939)
Il s’agissait d’un cas de divorce de deux époux anglais ayant leur domicile en France. En
matière de divorce, la loi applicable était, à l’époque, si elle existe, la loi de la nationalité commune
des époux. Loi anglaise applicable ici donc. Mais, dans cette matière, la règle de conflit de lois
anglaise donnait compétence à la loi du pays du domicile commun des époux, c'est à dire la loi
française ici.
Les Juges ont considérés que, certes, dans un premier temps, la règle de conflit de lois
française désignait la loi interne anglaise mais que, cependant, dans un second temps, la règle de
conflit de lois anglaise renvoyait à la loi interne française de sorte que le droit français était
compétent.
2) Synthèse
Il y a un renvoi lorsque la règle de conflit du for désigne pour compétente la loi interne
étrangère mais que la règle de conflit étrangère désigne une autre loi. Si cette autre loi est la loi
interne du for (lex fori), on dit qu’il y a renvoi au premier degré.
Il arrive, plus rarement, que la règle de conflit de lois étrangère désigne une 3ème loi. On dit
alors qu’il y a renvoi au 2nd degré :
1960, Patino : deux époux boliviens se sont mariés en Espagne et étaient domiciliés en France où une
demande en divorce fut introduite. En principe, on appliquait la loi de la nationalité commune (loi
bolivienne ici). Or, la règle de conflit de lois bolivienne donnait compétence à la loi du lieu de
célébration du mariage.
Pour qu’un renvoie soit concevable, il faut que 3 conditions préalables soient remplies :
- Un conflit de lois : le renvoi n’existe pas en matière de conflit de
juridictions.
- Une divergence sur le facteur de localisation entre la règle de conflit
du for et la règle de conflit étrangère : c’est ce qui marque la
différence avec le conflit de qualifications.
- Cette divergence doit aboutir à un conflit négatif : chaque règle de
conflit doit désigner une autre loi interne que la sienne.
B) La valeur du renvoi
1) La critique du renvoi
Tout d’abord, le renvoi est complexe. Sans lui la solution est plus simple (argument de la
simplicité).
Ensuite, on ne voit pas pourquoi il serait nécessaire de tenir compte de ce que dit la règle
de conflit de lois étrangère. A quoi servent les règles de conflit de lois du for si, en définitive, ce sont
les règles de conflit de lois étrangères qui donneront la loi applicable ? (argument de l’abdication).
Même en admettant qu’il y ait une raison d’appliquer le renvoi, pourquoi s’arrêter à la loi
désignée par la règle de conflit étrangère et ne pas continuer à faire jouer sans fin le renvoi ?
(argument du cercle vicieux).
Le renvoi n’est prévu par aucun texte et, notamment pas par l’article 3 du Code civil
(argument légaliste).
2) L’apologie du renvoi
Le renvoi permet de respecter le droit étranger dans son ensemble. Il n’est pas satisfai)sant
d’appliquer un droit étranger alors que ce dernier ne se déclare pas lui-même compétent (argument
d’indivisibilité).
Ensuite, le prétendu cercle vicieux n’existe pas. Il suffit d’arrêter le raisonnement dès que
l’on arrive à la compétence d’un droit interne dont on a déjà consulté la règle de conflit de loi
correspondante (argument de la coordination des systèmes).
Enfin, le renvoi permet très souvent d’arriver à une harmonie internationale des solutions
car il permet, très souvent, au Juge français de statuer comme l’aurait fait le Juge étranger s’il avait
été saisi (argument de l’harmonie internationale des solutions).
C) La place du renvoi en droit positif
En droit comparé, tous les pays n’admettent pas le renvoi, tous les pays n’admettent pas le
renvoi. Par exemple, l’Italie et le Pays-Bas l’excluent. A l’inverse, l’Allemagne, l’Angleterre, les USA
l’admettent le plus souvent.
En droit français, le renvoi est, en principe, admis sauf exceptions particulières.
1) Le renvoi en droit commun français
Le principe général est celui de l’admission. Le jeu du renvoi doit être poursuivi tant qu’il
n’aboutit pas à la compétence d’une loi interne dont la règle de conflit de lois a déjà été consultée.
La jurisprudence a fait jouer le renvoi
- en matière de successions mobilières depuis l’arrêt Forgo (1878 et
1882),
- en matière de statut personnel : incapacité (Civ. 1ère, 2005), divorce
(Birchall, 1939)
- en matière de successions immobilières : depuis civ. 1ère, 2000,
Moussard. Le même cas s’est reproduit dans civ. 1ère, 2010.
- En matière de sociétés : CA de Paris, 1965, banque ottomane.
Aujourd’hui en matière de sociétés, la loi applicable est celle du lieu
d’immatriculation de la société pour l’UE.
Par exception, le renvoi est exclu pour certaines catégories de rattachement. C’est le cas
pour :
-
-
Les régimes matrimoniaux : Ccasss, 1969, Lardans : la solution
s’explique par le fait que les époux sont libres de choisir la loi
compétente et que leur choix porte psychologiquement sur la loi
interne d’un pays de sorte que, si on fait jouer le renvoi, ils
pourraient se trouver obligés dans des termes qu’ils n’ont pas voulu.
Les contrats : pas de renvois sauf cas très particuliers. Posé par
Convention de Rome et le Règlement Rome I.
Les conditions de forme des actes juridiques : le renvoi est exclu sauf
dans le cas très exceptionnel où il permet de désigner une loi interne
qui valide l’acte si la loi interne applicable à défaut de renvoi l’aurait
annulé : 1982, Zagha (renvoi validant).
2) Le renvoi en droit conventionnel
La plupart des Conventions de La Haye conclues après 1950 excluent le renvoi.
3) Le renvoi en droit de l’UE
La plupart des règlements de l’Union concernant le droit international privé excluent le jeu
du renvoi. C’est le cas du Règlement Rome II sur les délits, du Règlement Rome I et du Règlement
Rome III sur le divorce.
Toutefois, certains instruments de l’UE pourraient admettre le renvoi à certaines
conditions.
Section 2 : Le conflit de conflit de lois dans le temps
3 hypothèses :
-
-
-
La règle de conflit de lois dans l’espace peut tout d’abord être
modifiée : pour résoudre le conflit entre l’ancienne et la nouvelle
règle, NIEDNER avait plaidé, au XIXème, pour l’application immédiate
de la règle de conflit de lois nouvelle au motif qu’il s’agirait d’une
règle de droit public. Ce raisonnement est aujourd’hui rejeté.
Aujourd’hui, la jurisprudence considère que les questions
d’application dans le temps des règles de conflit de lois doivent être
résolues de la même façon qu’en droit interne. Le principe est celui
de l’application du droit transitoire interne du for : Ccass, 1982, Ortiz.
Autre arrêt : Civ. 1ère, 1996.
L’élément de rattachement peut être déplacé ou modifié : conflit
mobile (BARTIN). Le facteur de localisation ne change pas en droit
mais il se déplace en fait. L’individu change de nationalité ou en
matière de statut réel, le bien est déplacé d’un pays à l’autre. En
matière de successions immobilières, le territoire du situs (lieu de
situation du bien) est le théâtre d’un changement de souveraineté.
Dans cette situation, le conflit est résolu par l’application du droit
transitoire du for. En conséquence, la situation nouvelle sera régie
par la loi du pays de situation actuelle du facteur de localisation :
Ccass, 1969, Diac. Autre arrêt : Civ. 1ère, 2010. Le plus souvent, les
situations anciennes seront examinées au regard de la loi du pays de
situation ancienne du facteur de localisation.
La loi étrangère compétente est, elle-même, modifiée : il s’agit de
l’hypothèse dans laquelle le droit étranger compétent en vertu de la
règle de conflit de lois mais ce dernier a changé depuis les faits.
Autrement dit, il s’agit d’un problème de droit transitoire interne au
sein du droit étranger. Pour résoudre ce problème, la jurisprudence
retient l’application du droit transitoire interne étranger : Ccass.,
1987, Lepperd. Solution réaffirmée dans Civ. 1ère, 2008.
Chapitre 4 :
L’autorité des règles de conflit de lois
Section 1 : L’autorité de la règle de conflit pour le Juge
Il s’agit de la question de savoir si l’application d’office par le Juge de la règle de conflit de
lois, lorsqu’elle désigne un droit étranger, est facultative, impérative ou prohibée. Cette question ne
se pose pas lorsque la règle de conflit de lois donne compétence à la loi française car, dans ce cas, le
Juge est toujours tenu d’appliquer le droit français.
Si la règle de conflit de lois désigne un droit étranger et qu’aucune des parties ne réclame
l’application de ce droit étranger. Est-ce que le Juge doit appliquer de lui-même le droit étranger ?
Est-ce qu’il pourrait le faire ? Est-ce qu’il lui est interdit de le faire ?
Deux situations doivent être préalablement distinguées :
- Un des plaideurs au moins invoque la compétence de la loi
étrangère : dans ce cas, le Juge est tenu d’appliquer cette loi si elle
est compétente. Le Juge ne peut opposer un refus.
- Aucun des plaideurs n’invoque la compétence de la loi
étrangère alors qu’elle est effectivement compétente : c’est ici que le
problème se pose. Sur cette question, la jurisprudence a
considérablement évolué.
I – L’évolution de la jurisprudence
A) La jurisprudence BISBAL (1959)
Il s’agissait d’un divorce, en France, de deux Espagnols. Dans l’Espagne franquiste, le divorce
n’existait pas. Les deux époux invoquaient les dispositions du droit français. Mais, en France, que
divorce pour faute à l’époque. A l’époque, la loi applicable au divorce était la loi de la nationalité
commune des époux donc la loi espagnole. Aucun des deux époux n’avait invoqué la compétence du
droit étranger donc ne demandait l’application de ce droit. La Cour d’appel a appliqué le droit
français et prononcé le divorce. Le mari forme un pourvoi en cassation lorsqu’il découvre le montant
de la prestation compensatoire. Dans ce pourvoi, il soutient que la CA aurait dû appliquer d’office la
loi espagnole compétente.
La Cour de cassation a rejeté le pourvoi au motif que « les règles françaises de conflit de
lois, en tant du moins qu’elles prescrivent l’application d’une loi étrangère, n’ont pas un caractère
d’ordre public. En ce sens, il appartient aux parties d’en réclamer l’application ».
Le Juge n’a donc pas à appliquer d’office le droit étranger si les parties ne l’invoquent pas.
Ccass., 1960, Compagnie algérienne de crédit et de banque : La Cour de cassation a précisé que le
Juge avait la faculté d’appliquer d’office la loi étrangère compétente.
Ccass., 1961, Bertoncili : La Cour de cassation a parachevé sa jurisprudence en précisant qu’une
partie ne pouvait invoquer elle-même la compétence de la loi étrangère pour la première fois devant
la Cour de cassation.
La jurisprudence BRISBAL a suscité de nombreuses critiques tirées principalement de son
caractère nationaliste.
B) La jurisprudence Rebouh et la jurisprudence Schule (1988)
La Cour de cassation a abandonné la jurisprudence Brisbal en 1988 en se fondant sur
l’article 12 du CPC qui dispose : « le Juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui
sont applicables ».
Dans ces arrêts, la Cour de cassation décide que le Juge a l’obligation d’appliquer la loi
étrangère compétente, au besoin d’office.
Dans l’affaire Rebouh, il s’agissait d’une mère algérienne qui agissait en recherche de
paternité naturelle contre le père présumé de l’enfant. La règle de conflit de lois désignait la loi de la
nationalité de la mère dans cette matière, donc loi algérienne. Seulement, en droit algérien, la
filiation naturelle n’existe pas. La Cour de cassation rejette la décision d’affiliation en disant qu’il faut
appliquer la loi algérienne.
Dans l’affaire Schule, il s’agissait d’une succession mobilière régie par la loi suisse, loi du
dernier domicile du défunt. Les Juges avaient appliqué le droit français. L’héritier forme un pourvoi. La
Cour de cassation casse la décision prise sur le fondement de la loi française.
C) La jurisprudence Coveco (1990)
La Cour de cassation a modifié une 2nde fois la solution. Dans cette jurisprudence, la Cour de
cassation est venue restreindre les cas dans lesquels le Juge avait l’obligation d’appliquer d’office la
loi étrangère. Désormais, cette obligation n’était maintenue que dans deux cas :
- Lorsque la règle de conflit de lois est issue d’une Convention
internationale signée et ratifiée par la France
- Lorsque, quelle que soit la source de la règle de conflit, la matière qui
forme l’objet du litige est indisponible au sens du droit français
II – L’état actuel de la jurisprudence
Il résulte pour l’essentiel de Ccass., 1999, Mutuelles du Mans. Dans cet arrêt, la Cour de
cassation abandonne toute distinction fondée sur l’origine conventionnelle ou non de la règle de
conflit. Elle continue de distinguer entre les catégories disponibles et indisponibles.
Pour les catégories indisponibles, l’application d’office est obligatoire. Pour la Cour de
cassation, sont des catégories indisponibles :
-
-
Le statut personnel : Tel est le cas, par exemple,
 des incapacités : Civ. 1ère, 2007.
 Sur le divorce : Civ. 1ère, 2008
 Question de la nullité du mariage : Civ. 1ère, 2011
Les successions semblent être une catégorie indisponible (Civ. 1ère,
2006).
A l’inverse, les contrats, les régimes matrimoniaux, les délits (toutes les obligations extra
contractuelles) sont des catégories disponibles.
Cela étant, l’obligation pour le Juge de soulever d’office la compétence de la loi étrangère
n’existe en tant que telle que si le dossier de la procédure fait ressortir des éléments d’extranéité. Le
caractère international du litige ne se présume pas : Civ. 1ère, 1999, Belaïd.
Par ailleurs, même si le dossier fait apparaitre des éléments d’extranéité, le Juge peut
statuer par application de la loi française s’il démontre et motive cette décision sur le fait que la loi
étrangère (lex causae) et la lex fori aboutissent in concreto au même résultat du fait de leur
équivalence. Si sa motivation n’est pas suffisante, la décision sera cassée.
- Civ. 1ère, 1999, Cie Royale belge : dans cet arrêt, la Cour de cassation
a admis l’équivalence de la loi française et belge en matière de
responsabilité du fait des animaux.
- Civ. 1ère, 2001 : la Cour de cassation a constaté l’équivalence de la loi
française et de la loi espagnole en matière de responsabilité civile des
notaires.
- Civ. 1ère, 2005 : la Cour de cassation a constaté l’équivalence de la loi
française et de la loi allemande en matière de curatelle.
Lorsque le Juge procède à l’application d’office de la loi étrangère, il doit, en toutes
hypothèses, respecter le principe du contradictoire et notamment permettre aux parties de discuter
de façon égale des solutions prescrites par la loi étrangère.
Section 2 : L’autorité de la règle de conflit de lois pour les
parties
Dans les matières disponibles, la Cour de cassation autorise les parties à s’entendre sur la
loi applicable, fût-ce par dérogation en vertu de la règle de conflit de lois. L’accord par lequel le
parties s’entendent sur la compétence de la loi française, voire sur celle d’une loi étrangère, est
appelé accord procédural. La validité de cet accord est clairement admise depuis Ccass., 1997,
Hannover International. L’accord peut être fait de façon explicite ou implicite.
La prestation compensatoire peut faire l’objet d’un accord. Cela signifie que cette matière
est disponible : Civ. 1ère, 2009, Ilouane.
L’accord procédural n’est pas admis en matière indisponible.
Chapitre 5 :
La mise en œuvre des règles de conflit de lois
Section 1 : L’application de la loi étrangère
Classiquement, il a longtemps été considéré que la loi étrangère avait la valeur d’un simple
fait devant le Juge français et non celle d’une règle de droit. Cette conception procédait d’une vision
nationaliste des relations internationales. Conclusion du conseiller DENIS : « j’aime mieux la loi
française que la loi étrangère ».
Aujourd’hui, cette conception est complètement dépassée mais elle a laissé une trace
terminologique. En effet, on parle de preuve de la loi étrangère or c’est un fait que l’on doit prouver,
pas le droit.
I – La charge de la preuve de la loi étrangère
Lorsque la lex fori est compétente, la question de la recherche de son contenu ne se pose
pas (jura novit curia = la Cour connait le droit).
Lorsque la loi étrangère est compétente, la question de son contenu se pose car le Juge du
for n’est pas censé connaitre toutes les lois du monde. La maxime « nul n’est censé ignorer la loi » ne
s‘applique pas à la loi étrangère.
Lorsque la loi étrangère est appliquée d’office par le Juge (dans les matières indisponibles),
le Juge procède lui-même à la recherche et à l’établissement de son contenu : Civ. 1ère., 1997, Driss
Abou.
En revanche, lorsque la loi étrangère est appliquée à la demande d’une des parties au
moins, le problème se pose de savoir qui du demandeur, du défendeur ou du Juge doit supporter la
charge de la preuve.
A) L’évolution de la jurisprudence
1) La jurisprudence Latour (1948) et Thinet (1984)
La Cour de cassation a jugé que la charge de la preuve pesait sur celui dont la prétention
était soumise à la loi étrangère. Ce n’est pas nécessairement le demandeur, ni nécessairement le
défendeur, ni même nécessairement celui qui invoque la compétence de la loi étrangère.
Il était question d’un accident de la circulation en Espagne à l’époque de la Guerre civile et
qui avait fait des victimes françaises. Les héritiers des victimes françaises avaient assignés l’auteur de
l’accident devant le Tribunal français en invoquant 1384 alinéa 1er du Code civil. Le défendeur avait
alors opposé la compétence de la loi étrangère en tant que lex loci delicti, laquelle, à l’époque, ne
comportait pas de régime de responsabilité du fait de choses.
La Cour de cassation a estimé que c’était le demandeur qui formulait une prétention
(obtenir réparation du dommage causé par un délit), prétention régie par la loi espagnole, de sorte
qu’il lui incombait à lui d’établir le contenu. Cette solution était très satisfaisante mais son
application n’était pas toujours facile.
2) La jurisprudence Amerford (1993)
La Cour de cassation décida que la charge de la preuve de la loi étrangère pesait sur celui
qui invoquait la compétence de la loi étrangère.
B) L’état actuel de la jurisprudence
Il résulte des deux arrêts Aubin et Itraco (2005). Selon la Cour de cassation : « il incombe au
Juge français qui reconnait applicable un droit étranger d’en rechercher, soit d’office, soit à la
demande d’une partie qui l’invoque, la teneur, avec le concours des parties et personnellement s’il y a
lieu, et de donner à la question litigieuse une solution conforme au droit positif étranger ». La charge
de la preuve père désormais sur le Tribunal dans tous les cas, soit que la loi étrangère soit appliquée
à la demande des parties, soit qu’elle le soit d’office par le Juge dans une matière indisponible.
Le Juge peut requérir la participation des parties.
II – Les modes de preuves de la loi étrangère
A) La loi étrangère devant les Juges du fond
La preuve du contenu de la loi étrangère est libre. La plupart du temps, les parties font
appel à un consultant étranger pour obtenir un exposé du droit étranger. Cette consultation, ce
document est appelé un « certificat de coutume » en droit international privé. Ce certificat est
généralement établi par des avocats, des autorités publiques ou académiques. Sa force probante est
laissée à l’appréciation des Juges du fond.
Exceptionnellement, si le contenu de la loi étrangère ne peut être établi en raison d’une
impossibilité matérielle, le Juge applique par défaut la loi française. On parle alors de vocation
subsidiaire de la lex fori. Cette vocation subsidiaire joue indépendamment du caractère disponible ou
non de l’objet du litige. Cela concerne les hypothèses d’une loi qu’il est manifestement impossible
d’aller rechercher ou alors c’est un droit étranger ancien qu’il est très difficile de rechercher.
B) La loi étrangère devant la Cour de cassation
La Cour de cassation ne contrôle pas l’interprétation que font les Juges français du fond de
la loi étrangère. La Cour de cassation n’est pas le « vengeur des lois étrangères ». Il n’y a quasiment
pas d’office pour la Cour de cassation.
Deux raisons :
- La Cour de cassation est déjà chargée pour ne pas dire surchargée
- La Cour de cassation n’a aucune autorité pour fixer l’interprétation
de la loi d’un Etat étranger.
Cependant, la Cour de cassation contrôle l’existence et le sérieux de la motivation de la
décision rendue au fond par application de la loi étrangère. Ce qui signifie qu’en l’absence de
motivations suffisantes, la décision peut être cassée.
Enfin, la Cour de cassation contrôle l’absence de dénaturation de la loi étrangère : Ccass,
1961, Montefiore.
- L’interprétation suppose un texte obscur ou un texte non clair.
- La dénaturation : c’est quand le texte est clair et précis mais que le
Juge du fond viole ce texte clair. Civ. 1ère., octobre 2008 et Civ. 1ère,
décembre 2008.
Le régime de la loi étrangère devant la Cour de cassation est étendu à celui du droit
coutumier Kanak : Civ. 1ère, 1er décembre 2010.
Section 2 : L’éviction de la loi étrangère
I – L’ordre public international
A) La notion d’ordre public international
1) Définition
L’ordre public international est le mécanisme d’éviction de la loi étrangère normalement
compétente lorsque cette dernière contient des dispositions dont l’application concrète est jugée
inadmissible par le Tribunal saisi. Dans ce cas, on écarte la loi en question et on applique la loi
française compétente.
L’ordre public empêche l’application de la loi étrangère désignée par la règle de conflit
chaque fois que cette application serait très choquante, c'est à dire contraire aux conceptions
fondamentales du for.
Sont ainsi contraire à l’ordre public international français :
- La loi étrangère qui formule un empêchement à mariage ou une
incapacité successorale fondée sur la race ou la religion. En droit
iranien, il est interdit d’héritier d’un iranien si on n’est pas musulman.
- La loi étrangère de nationalisation qui n’octroi aucune indemnité.
- La loi étrangère qui autorise la polygamie ou la répudiation, par le
mari, de la femme lorsque les époux résident en France : Civ. 1ère,
2009.
- La loi étrangère qui ne permet d’octroyer des subsides à un enfant
naturel.
- La loi étrangère qui n’octroie pas d’indemnités à l’époux à qui le
divorce est imposé.
- La loi étrangère qui prévoit que la mère devra assurer seule
l’entretien de l’enfant lorsque les parents résident en France et que
l’enfant à la nationalité française : Civ. 1ère, 2009.
- La loi étrangère qui prévoit des dommages et intérêts punitifs et dont
le montant est exorbitant.
2) Distinctions
a) Ordre public international et ordre public interne
Les deux sont d’origine nationale mais l’un est plus tolérant que l’autre. Tout ce qui est
d’ordre public interne n’est pas nécessairement d’ordre public international. En revanche, tout ce qui
est d’ordre public international est aussi d’ordre public interne.
De ce point de vue, l’ordre public international est international par son objet mais pas par
sa source.
b) Ordre public international et lois de police
L’ordre public justifie l’éviction de la loi étrangère en raison du caractère choquant que
revêtirait son application. La loi de police, elle, exclue ab initio (dès l’origine) la possibilité même
d’appliquer sur le point qu’elle concerne la loi étrangère. L’ordre public intervient en aval de la règle
de conflit, la loi de police intervient en amont. Si le litige relève d’une loi de police, il n’est pas
nécessaire de consulter la règle de conflit alors qu’avec l’ordre public international, on « donne une
chance à la loi étrangère ».
Dans la jurisprudence, il arrive que, dans les arrêts de la Chambre social, il y ait une
confusion entre les deux.
B) Les effets de l’ordre public international
1) L’effet plein
Lorsque l’ordre public intervient, le Juge écarte la loi étrangère et lui substitue la lex fori. Il
n’écarte pas toute la loi étrangère mais seulement la disposition choquante.
2) L’effet atténué
On parle d’effet atténué de l’ordre public pour désigner la tendance de la jurisprudence à
faire preuve de tolérance à l’égard des effets d’un droit régulièrement acquis à l’étranger. Dans cette
hypothèse, l’éviction de la loi étrangère sera moins fréquente. Plus la situation va être proche du for,
plus l’ordre public est exigeant, et inversement : c’est ce qu’on appelle l’Inlandsbeziehung.
Le critère de l’effet atténué de l’ordre public c’est l’effet de l’institution, pas l’institution
elle-même.
C) Le contrôle de la Cour de Justice
Lorsque la situation de fait entre dans le champ d’application du droit de l’Union, la CJUE
peut, lorsqu’elle est saisie, contrôler l’exercice que fait le Juge d’un Etat membre de l’exception
d’ordre public international. La Cour considère en effet que le recours à l’ordre public ne peut avoir
pour effet d’entraver la libre circulation, sauf si une telle entrave est à la fois légitime et
proportionnée : CJCE, 1978, Koestler.
II – La fraude à la loi
Les règles de conflit de lois ont une structure abstraite et rigide. Elles peuvent donc,
théoriquement, être manipulées. La théorie de la fraude à la loi protège la règle de conflit contre
d’éventuelles manipulations.
Il y a fraude à la loi chaque fois que les parties ont volontairement modifiés le rapport de
droit dans le seul but de le soustraire à la loi normalement compétente. C’est la définition donnée
par la Cour de cassation dans Ccass, 1983, Lafarge.
A) Les éléments constitutifs de la fraude
1) L’élément matériel
Il s’agit de la modification artificielle du rapport de droit, soit par action sur le facteur de
localisation, soit par action sur la catégorie de rattachement.
a) La fraude par action sur le facteur de localisation
Ccass, 1878, Bauffremont : la princesse de Bauffremont, de nationalité française, était mariée au
prince de Bauffremont mais séparée de corps. Le divorce n’existe pas en France. Profitant de cette
séparation, elle installe son domicile dans le duché de Saxe-Altenburg et elle obtient la nationalité de
cet Etat. Or, en droit de cet Etat, les catholiques séparés de corps sont considérés comme divorcés.
Invoquant sa nouvelle loi nationale, elle épouse à Berlin son amant roumain le prince Bibesco. Le
prince de Bauffremont intente une procédure en France contre la princesse lorsqu’il entend qu’elle
veut revenir en France. La Cour de cassation donna tort à la princesse, en considérant qu’elle avait
manipulé la règle de conflit de lois en changeant de nationalité à dessein.
Aujourd’hui, dans ce type de situation, l’exception de fraude serait inutile car le droit
français autorise le divorce et aujourd’hui, l’acquisition d’une nationalité étrangère ne fait pas perdre
la nationalité française.
b) La fraude par action sur la catégorie de rattachement
Ccass, 1985, Caron : un père de famille domicilié aux Iles Vierges voulait léguer la totalité de sa
fortune à sa secrétaire, ce qui revenait à déshériter ses enfants. La loi des Iles Vierges tolère
l’exhérédation (fait de déshériter ses enfants). Mais la loi française l’interdit. Or, la succession de cet
individu comportait un immeuble situé en France, relevant donc de la lex rei sitae. Il avait apporté
l’immeuble au capital d’une société dont il détenait la très grosse majorité des parts. Sa succession se
composait désormais de parts sociales qui sont des biens meubles dont la dévolution est régie par la
loi du dernier domicile du défunt.
La Cour de cassation a considéré que cette « ameublissement » constituait une
manipulation frauduleuse de la règle de conflit.
La fraude peut aussi résulter aussi d’une internationalisation artificielle du rapport de droit,
notamment en matière de contrats.
2) L’élément intentionnel
Il réside dans l’animus fraudis. Cet élément est présent lorsque l’élément matériel ne
s’explique que par le seul souci d’écarter la loi normalement compétente.
C’est la présence de l’élément intentionnel qui permet de distinguer la fraude du conflit
mobile.
B) La sanction de la fraude
L’acte frauduleux est inopposable, c'est à dire qu’il n’est pas frappé de nullité car les
Tribunaux français sont le plus souvent sans pouvoir sur sa validité. En conséquence, le Juge applique
la loi normalement compétente, c'est à dire celle que le fraudeur s’est efforcé d’écarter. VIDAL : « la
fraude a pour sanction sa propre inefficacité ».
Il est admis aujourd’hui que la fraude à la loi étrangère doit être sanctionnée au même titre
que la fraude à la loi française.
Enfin, la théorie de la fraude à la loi offre une justification à certaines dispositions du droit
international privé de l’Union qui réserve l’application du droit de l’Union, primaire ou dérivé,
nonobstant le choix par les parties de la loi d’un pays tiers (article 3-4 du Règlement Rome I).
Titre 2 : Les solutions particulières aux
conflits de lois
Chapitre 1 :
Le statut personnel
Section 1 : L’unité du statut personnel
I – La compétence générale de la loi nationale
A) Les raisons de la compétence
Le principe de la compétence de la loi nationale a été posé dès 1814 dans l’arrêt Busquetta.
Il n’a jamais été remis en cause. Ce principe se justifie par le sérieux et la stabilité de la nationalité
jugée plus forte que le domicile, moins instable.
Aujourd’hui, certains auteurs plaident pour l’abandon du rattachement à la loi nationale et
pour l’adoption d’un rattachement à la loi de la résidence de la personne. Selon eux, en effet, le
rattachement à la loi nationale constituerait une discrimination fondée sur la nationalité et donc
prohibée par l’article 18 du TFUE.
Actuellement, la CJUE n’a jamais jugé le rattachement à la loi nationale contraire au traité.
De surcroit, plusieurs Règlements de l’Union énoncent des rattachements à la loi nationale.
B) Les implications de la compétence
1) L’unicité de personne
Lorsqu’un individu a plusieurs nationalités, deux situations doivent être distinguées :
- L’une des nationalités en présence est la nationalité française : dans
ce cas, la loi nationale est la loi française car la nationalité française
prime sur la nationalité étrangère. La solution est posée par : Ccass,
1968, Kasapyan. Si la situation de fait entre dans le champ
d’application du droit de l’UE et que la liberté de circulation est en
cause : la CJUE considère qu’un individu qui possède la nationalité de
deux Etats membres doit pouvoir choisir laquelle de ces deux
nationalités il entend faire valoir.
 CJCE, 2003, Garcia Avello : un enfant était belgoespagnol. En Belgique, l’enfant porte un seul
patronyme (nom du père). Mais, en Espagne, les
personnes portent un nom composé en principe.
Les parents voulaient que l’enfant ait le même
nom dans les deux pays. Saisine des Tribunaux
belges pour changement de nom patronymique.
Mais régit par la loi nationale or il est Belge pour
la Belgique donc application loi belge. La CJCE dit
que le refus crée une entrave potentielle à sa libre
circulation de travailleur indépendant.
La solution est la même lorsque l’individu entre, de par sa situation,
dans le champ d’application matériel d’un Règlement de l’Union.
 CJUE, 2009, Hadadi
- Les nationalités en présence sont toutes étrangères : la loi applicable
est la loi de la nationalité la plus effective. L’effectivité étant
souverainement appréciée par les Juges du fond : Ccass, 1974,
Martinelli. La jurisprudence Garcia Avello trouve là encore à
s’appliquer le cas échéant.
2) La pluralité de personnes
Lorsque plusieurs personnes sont concernées par une même question de statut personnel,
la compétence de la loi nationale ne pose pas de difficultés si ces personnes ont toutes la même
nationalité. La loi applicable est alors la loi de la nationalité commune des intéressés.
Lorsque les personnes n’ont pas toutes la même nationalité, trois solutions sont
théoriquement envisageables :
- Application de toutes les lois nationales en présence à toutes les
personnes concernées : c’est ce qu’on appelle l’application
cumulative. Système le plus restrictif.
- Application à chaque personne de sa propre loi nationale :
application distributive. Système le moins restrictif.
- Application à chaque personne de l’une ou l’autre des lois en
présence : en recherchant au plus possible la validité des actes
concernés. C’est l’application alternative.
Le droit positif ne retient pas, de façon générale, une seule de ces solutions. Selon les
circonstances ou le type de problème considéré, la solution retenue varie.
II – La compétence subsidiaire de la loi du domicile
Lorsqu’un individu ne possède aucune nationalité, soit qu’il n’en ait jamais eu, soit qu’il ait
perdu sa nationalité d’origine sans en acquérir une autre, son statut personnel est régi par la loi du
pays de son domicile : dicté par Convention de New York de 1954 sur le statut des apatrides.
Lorsqu’un individu est persécuté dans son pays d’origine et qu’il a obtenu le statut de
réfugié dans un autre pays, son statut personnel est lui aussi régit par la loi de son domicile : découle
de la Convention de Genève de 1951 sur le statut des réfugiés politiques.
Section 2 : Les composantes du statut personnel
I – L’individu
A) L’état des personnes
Constitue la terre d’élection de la loi nationale. C’est dans ce domaine que le lien avec l’Etat
de la nationalité est le plus fort. Ainsi, l’état civil est tenu par les services de l’état civil du pays de la
personne considérée. Les règles qui gouvernent la tenue des registres de l’état civil sont des règles
territoriales impératives. Autrement dit, ce sont des lois de police.
Indépendamment de la tenue des registres, la loi nationale est compétente, sauf
contrariété à l’ordre public et notamment à la ConvEDH, pour préciser les conditions d’un
changement de sexe de la personne.
CA Paris, 1994 : CA de Paris a jugé contraire à l’ordre public international la loi argentine qui
interdisait le changement de sexe.
Le nom de la personne est lui aussi régit par la loi nationale. Celle-ci détermine son
attribution, sa transmission ou sa modification. Les droits de la personnalité sont également régis,
pour ce qui est de leur existence, par la loi nationale. Cependant, les atteintes qui y sont portée sont
généralement réparées par des actions en responsabilité délictuelle et régie à ce titre par la lex loci
delicti.
B) La capacité
1) Le droit commun
La loi nationale régit les incapacités d’exercice en général : Civ. 1ère, 1990.
La loi nationale régit aussi les incapacités générales de jouissance : Ccass, 1957, Sylvia.
En revanche, les incapacités spéciales de jouissance (incapacité de recevoir à titre gratuit du
médecin ayant soigné le défunt au cœur de sa dernière maladie) sont régies par la loi applicable à la
catégorie de rattachement englobant la règle qui les énonce.
2) Les régimes spéciaux
Les régimes spéciaux de protection des incapables sont, en principe, régis par la loi
nationale : Civ. 1ère, 2010. Toutefois, il peut s’avérer nécessaire d’appliquer la lex fori à un incapable
étranger résidant en France en cas d’urgence. Dans ce cas, la lex fori intervient en tant que loi de
police.
S’agissant de la protection des mineurs en particulier, les solutions découlent, en principe,
de la Convention de La Haye de 1961. Cette Convention s’applique à tous les mineurs qui résident
habituellement en France, même s’ils sont originaires d’un pays non contractant. La minorité étant
appréciée au regard de la loi nationale et de la loi de la résidence habituelle (application cumulative).
Cette Convention énonce trois règles fondamentales :
- La loi normalement compétente au régime de protection est celle de
la résidence habituelle du mineur
- Les rapports d’autorité de plein droit (autorité parentale des pères et
mères) sont régis par la loi nationale
- La lex fori est applicable en cas d’urgence.
Dans tous les cas, la loi applicable à la capacité à contracter est celle qui régit la capacité en
général.
II – Le couple
A) Le couple marié
1) La formation du mariage
a) Les conditions de fond
Les conditions de fond sont régies par la loi nationale des époux. Elles comprennent :
- Les questions de parenté
- Les questions de majorité
- Les questions de capacité
- Les questions de bigamie
- Les questions de consentement
- Les questions d’autorisation préalable
 La loi applicable aux conditions de fond définie les sanctions qui s’imposent en cas de
violation de celle-ci et notamment le régime de la nullité y compris la question de la putativité et ce,
depuis l’arrêt de la Cour de cassation, Moreau de 1956 (Application dans un arrêt du 16 Juillet
1998).
Mariage putatif : Mariage nul sur le plan juridique mais dont l’un ou les deux ont cru qu’il
était valable.
 Ex : L’officier d’état civil qui a célébré le mariage n’était pas
compétent.
Conséquence : Le mariage reste nul mais la nullité n’a pas d’effet rétroactif.
Lorsque les époux sont de nationalité différente, la jurisprudence distingue les
empêchements unilatéraux et les empêchements bilatéraux.
- Empêchements unilatéraux (question d’âge, de capacité et de
consentement), la jurisprudence procède à une application
distributive des lois en présence. Autrement dit, le mariage est
valable au fond si chaque époux rempli les conditions de sa propre loi
-
nationale sans qu’il soit nécessaire qu’il remplisse les conditions de la
loi nationale posée par son conjoint.
 Ex : Mariage franco-anglais : Le français doit
respecter le droit français et l’anglaise le droit
anglais.
 Ex : Civ. 1ère, 9 Juillet 2008
Empêchements bilatéraux (question de parenté, d’alliance et de
bigamie), la jurisprudence procède à une application cumulative des
lois nationales en présence : Civ. 1ère, 24 Septembre 2002.
 Ex : Saoudien étant marié à une Saoudienne en
Arabie-Saoudite et veut se marier en France avec
une Française musulmane. Le mariage est célébré
mais est-il valable au fond ? La bigamie est en jeu ici
et c’est un empêchement bilatéral : Lui doit
respecter le droit saoudien et français or, en
l’espèce il ne respecte pas le droit français : Le
mariage est nul. La bigamie sera alors neutralisée
en droit français et le parquet peut agir (infraction
pénale)
En toute hypothèse, la ou les lois applicables doivent être conformes à l’ordre public
international français.
Pour l’instant, la jurisprudence française n’a pas eu à connaitre de la conformité à l’ordre
public international de la loi étrangère autorisant le mariage homosexuel puisqu’elle a seulement
exclue une telle union en droit interne : Civ. 1ère, Mars 2007
Réflexion sur le mariage homosexuel :
France et Espagne : Deux espagnols viennent en France et se maris
Peuvent-ils demander à l’officier d’état civil français de célébrer le mariage ?
Imaginons qu’ils se sont mariés à l’ambassade (mariage consulaire) et un en France agit
contre l’autre en contribution aux charges du mariage et l’autre se défend en disant qu’il n’y a pas
mariage car mariage homosexuel.
Le mariage est-il valable ?
C’est un problème de mariage donc de statut personnel ; problème de fond donc la loi
applicable est la loi de nationalité des intéressés : Loi espagnole.
La loi espagnole doit être conforme à l’ordre public international français.
Argument de l’époux demandant une contribution :
- 1° argument : Le mariage homosexuel n’est pas choquant
- 2° argument : OP atténué, on ne veut pas reconnaitre la validité du
mariage mais on veut lui donner un effet : Le mariage doit être
célébré en Espagne
- 3° argument : Plaider la libre circulation des personnes et le droit
européen : les époux doivent travailler en France. Possibilité
d’entraver à la liberté de circulation si légitime et proportionné :
 Utile : Peu d’Etats reconnaisse le mariage
 Proportionné : On leur laisse la possibilité de
conclure un PACS
Le prof aurait tendance à penser que la Cour de cassation jugerait cela
contraire à l’ordre public international français.
Si le Juge français dit que c’est contraire à l’ordre public international français.
- 4° possibilité : Attaquer la France ou l’UE à la CEDH en tant que
décision constitutive d’une atteinte à la ConvEDH.
b) Les conditions de forme
Il s’agit de la nature de la célébration, le déroulement de la célébration, la publicité,
la signature des époux et des témoins.
De façon générale, les conditions de forme sont régies par les règles du lieu de la
célébration du mariage : locus regit actu : La loi compétente est alors la lex loci celebrationis.
C’est la lex loci celebrationis qui définit les sanctions de sa violation y compris le régime de
la nullité.
Le mariage célébré en France :
Il doit respecter les règles de forme de la loi française ce qui signifie que la célébration civile
est impérative et la célébration religieuse n’étant que facultative, postérieure à la célébration civile
et sans effet en droit français.
Par exception à la forme française imposée, des époux étrangers peuvent se marier devant
les autorités consulaires ou diplomatiques étrangères de leur nationalité commune si la loi de leur
nationalité commune le permet (§561 de l’instruction générale de l’état civil).  Devant le consulat
ou l’ambassade.
Deux étrangers n’ayant pas la même nationalité peuvent-ils se marier dans l’une de leurs
deux ambassades ? Ce mariage en France ne sera pas valide en la forme.
Le mariage célébré à l’étranger :
Ce mariage est valable en la forme s’il respecte la loi du lieu de célébration (Article 170 du
Code Civil)  Le mariage peut être célébré en la forme religieuse exclusive si la loi locale le permet.
 Ex : En Grèce on peut célébrer un mariage seulement à l’Eglise
orthodoxe.
Ce mariage peut également être entériné « by cohabitation and reputation » comme
dans l’ancien droit américain. Il s’agit du mariage purement consensuel.
 Ex : Un français résidant avec une étrangère et qui est réputé
être marié avec elle.
En tout état de cause, sauf le mariage consensuel, les bans doivent être publiés
(Article 63 Code Civil). La présence du ou de la française à la célébration est obligatoire (Article 146-1
Code Civil).
Par ailleurs, les mariages contractés à l’étranger entre Français ou avec un Français ne
peuvent produire ultérieurement leurs effets en France qu’après avoir été transcrit au registre de
l’état civil (Réforme d’une loi de 2006 introduisant l’article 175-5 et 175-8 Code Civil).
Par exception, le mariage de deux Français peut être célébré à l’étranger en la forme
française par les autorités diplomatique ou consulaire (Article 48 Code Civil).
En revanche, un mariage mixte ne peut être célébré en cette forme que s’il s’agit du
mariage d’un Français (pas d’une Française) avec une ressortissante d’un pays prévus dans une liste
dressée par un décret de 1939.
Obsolescence de la législation française.
2) Les effets du mariage
a) Les effets personnels du mariage
Les effets personnels du mariage (Devoir de fidélité et Effet du mariage sur le nom de la
femme mariée) sont régis par la loi de la nationalité commune des époux. A défaut de la nationalité
commune, la jurisprudence applique la loi du domicile commun des époux (C.Cass., 1963,
Chemouni).
NB : En droit international privé il y a domicile commun lorsque les époux sont l’un et
l’autre domicilié dans le même pays, ça ne veut pas dire qu’ils ont le même domicile conjugal. En
l’absence de domicile commun, la jurisprudence opte pour la compétence de la lex fori au titre de sa
vocation subsidiaire.
b) Les effets patrimoniaux
Le régime primaire est, dans la jurisprudence française, d’application territoriale. En effet,
la Cour de cassation a érigé les articles 212 et suivant du Code Civil au rang de lois de police. En
conséquence, ces textes s’appliquent en tout état de cause dès l’instant que les époux résident en
France (C.Cass, 1987, Cressot).
S’agissant de la contribution aux charges du mariage, le règlement 4-2009 de l’UE sur les
obligations alimentaires entré en vigueur le 18 Juin 2011 désigne, en matière d’obligations
alimentaires, la loi de résidence habituelle du créancier d’aliment pour compétente.
Par exception, la lex fori est compétente si le tribunal saisi est celui de la résidence
habituelle du débiteur, la loi de la résidence habituelle du créancier pouvant s’appliquer à titre
subsidiaire si la lex fori ne prévoit pas d’obligation alimentaire entre le demandeur et le défendeur.
Enfin, en l’absence d’obligations alimentaires reconnues par la loi applicable, la loi de la
nationalité commune du créancier et du débiteur peut toujours s’appliquer à titre subsidiaire.
La jurisprudence Cressot peut, en partie, continuer à recevoir application si elle ne
contrevient pas à la logique du règlement. A défaut, elle devrait s’effacer devant ce dernier.
Le régime matrimonial est quant à lui régit par la loi choisie par les époux (Arrêt Zelcer
1935) : C’est le principe d’autonomie qui joue. A défaut de choix, il est en principe régit par la loi du
1er domicile matrimonial (1° Civ. Cass 14 Novembre 2006). Pour les époux mariés après le 1er
Septembre 1992, les solutions découlent de la Convention de la Haye de 1978.
La Convention de la Haye prévoit l’application de la loi choisie par les époux mais le choix
est limité à une option entre :
- La loi nationale d’un époux
- La loi de la résidence habituelle d’un époux
- La loi de leur 1ère résidence matrimoniale
A défaut de choix, est compétente la loi de la 1ère résidence matrimoniale (pour les époux
mariés avant 1992 c’est le 1er domicile et ici la 1ère résidence). Les régimes matrimoniaux
constituent une catégorie de rattachement distinct du statut personnel.
c) La dissolution du mariage
Le droit positif actuellement en vigueur :
Le Code Civil énonce une règle de conflit unilatérale (précisant dans quel cas le droit
français est compétent) applicable aux actions intentées dans le passé et dans le présent avant le 21
Juin 2012.
Aux termes de l’article 309 du Code Civil le divorce est régit ainsi dans 3 cas :
- Lorsque les deux époux sont français
- Lorsque les deux époux sont domiciliés en France
- Lorsqu’aucune autre loi étrangère ne se déclare compétente
 Explication 3° cas : Si l’un des époux est étranger et
n’a pas de domicile en France, le juge a l’obligation
de rechercher parmi toutes les lois en présence
laquelle se déclare compétente en vertu de son
propre droit international privé et d’appliquer cette
loi (1° Civ. Cass 4 Juin 2009 Büld). Dès lors, si
plusieurs lois étrangères se déclarent compétentes,
il faut appliquer celle qui présente ces liens les plus
étroits avec le litige (influence du système de la
proper law).
A défaut de loi étrangère se trouvant compétente, la loi française s’applique de manière
subsidiaire.
Le droit prochainement en vigueur :
Les actions intentées à partir du 21 Juin 2012 relèveront du Règlement Rome III 1259-2010.
Ce règlement Rome III unifie les règles de conflits de lois des Etats membres participant à la
procédure de coopération renforcée qui l’a engendré dont la France.
Coopération renforcée :
Les règlements de l’UE (Rome I sur les contrats, Rome II sur les délits) ont été pris sur la
base soit de l’article 65 du TCE soit sur la base de l’article 81 du TFUE.
L’article 81 du TFUE donne compétence à l’UE pour unifier les règles de conflit des Etats
membres : Certains ne souhaitent pas que cela se fasse à la règle de la majorité.
Dans le Traité de Lisbonne on a adopté le système de la majorité qualifié sauf pour les
aspects touchant au droit de la famille.
S’agissant du divorce, il faut alors l’unanimité mais il n’y en a pas.
Certains Etats ont alors décidé de ne pas attendre que tout le monde soit d’accord mais ont
décidé de créer une zone d’Etats pionniers  Procédure de la coopération renforcée.
Ce règlement énonce des règles bilatérales et exclu le renvoi. Il introduit la professio juris
(choix limité à plusieurs possibilités énoncés dans une liste) en reconnaissant une option aux époux
en instance de divorce.
Ceux-ci, en vertu de l’article 5 du Règlement, peuvent opter à leur convenance pour
l’application de l’une des 4 lois prévues :
- Choisir la loi de leur résidence habituelle commune
- Choisir la loi de leur dernière résidence habituelle commune en date
si l’un deux y réside encore
- Choisir la loi nationale de l’un d’entre eux
- Choisir la lex fori
En l’absence de choix, le règlement prévoit l’application par défaut :
- Application de la loi de la résidence habituelle commune des époux si
elle existe
- Si elle n’existe pas, application de la loi de la dernière résidence
habituelle commune en date si un des époux y réside encore et si la
séparation de fait ne remonte pas à plus d’1 an
- A défaut s'applique la loi de la nationalité commune des époux
- A défaut, application de la lex fori
B) Le couple non marié
1) Le concubinage
Le concubinage est essentiellement appréhendé à travers sa rupture abusive généralement
qualifiée, en droit international privé, de délit civil.
Napoléon 1804 : « Les concubins se moquent de la loi, la loi se moque des concubins. »
Aujourd’hui il y a une réglementation du concubinage dans la jurisprudence fondée sur sa
rupture abusive. En droit international privé la rupture abusive est qualifiée de conflit délictuel.
Les partenariats enregistrés font l’objet, depuis la loi du 22 Mai 2009, d’une règle de conflit
de lois propre. L’article 515-7-1 du Code Civil soumet les partenariats enregistrés à la compétence de
la loi de l’Etat dans lequel ils ont été enregistrés.
III - L’enfant
A) La filiation par le sang
Les règles de conflit sont énoncées par les articles 311-14 et suivants du Code Civil.
1) L’établissement de la filiation
La filiation est en principe régie par la loi personnelle de la mère au jour de la naissance de
l’enfant. Lorsque la mère n’est pas connue en fait, s’applique la loi personnelle de l’enfant.
Précision :
- Lorsque la mère n’est pas connue en fait et non en droit
-
Principe de rattachement à la loi personnelle.
NB : La loi personnelle est la loi nationale de la personne ou à défaut de nationalité la loi du
domicile de la personne.
Par exception, les règles françaises sur la possession d’état s’applique si l’enfant et
son père résident sur le territoire français ou encore si l’enfant et sa mère réside sur le territoire
français.
Le Code Civil ajoute 2 règles à finalité matérielle à ce dispositif :
- La reconnaissance d’un enfant est valable si elle satisfait soit aux
conditions de la loi personnelle de son auteur soit à celle de la loi
personnelle de l’enfant.
- L’action aux fins de subsides est régie au choix de l’enfant soit par la
loi de sa résidence habituelle soit par la loi de la résidence habituelle
de l’auteur.
Sur ces deux points, et sur ces deux points seulement, le renvoi est exclu en raison de la
finalité matérielle de la règle de conflit.
2) Les effets de la filiation
La loi applicable à l’établissement de la filiation régit les effets de celle-ci autres que
ceux afférant aux obligations alimentaires.
Ces derniers relèvent du Règlement 4-2009 : Loi de la résidence habituelle du créancier
d’aliment (enfant) sauf application de la lex fori si le Tribunal saisi est celui de la résidence habituelle
du débiteur.
B) La filiation par adoption
La règle de conflit est énoncée à l’article 370-3 Code Civil et il faut distinguer les conditions
et les effets.
1) Les conditions de l’adoption
Les conditions de l’adoption sont soumises à la loi nationale de l’adoption. En cas
d’adoption par deux époux, l’adoption est régie par la loi applicable aux effets de leur union.
L’adoption est impossible si la loi personnelle de l’enfant ne connait pas l’institution sauf s’il est né et
réside habituellement en France.
On ne peut pas adopter un enfant s’il est de nationalité d’un pays qui ne pratique pas
l’adoption afin d’éviter le trafic d’enfant.
Les droits d’inspiration musulmane ne connaissent pas l’adoption, le recueil légal qu’ils
prévoient « la Kafala » n’est pas applicable à l’adoption. En enfant recueilli par Kafala ne peut être
adopté en France si sa loi nationale ignore l’adoption.
Civ. 1ère, 15 Décembre 2010 : Cette décision expose la position de la Cour de cassation sur cette
question d’autant qu’il y a eu beaucoup de variations lorsque la question s’est posée devant les
diverses juridictions du fond.
Le droit algérien, tunisien etc. n’interdit pas l’adoption mais parle de Kafala : Doit-on
considérer la pratique de la Kafala comme une interdiction à l’adoption ?
La Cour de cassation considère que la Kafala n’est pas une adoption et dans les pays où l’on
reconnait la Kafala et non l’adoption il n’est pas possible d’adopter sauf s’il est né et réside
habituellement en France.
 Le consentement de l’enfant est apprécier per se, en lui-même, indépendamment de toute
loi et de façon souveraine par le juge.
2) Les effets
Les effets de l’adoption prononcée en France sont ceux de la loi française. Il y a donc
scission des conditions et des effets de l’adoption qui peuvent être régis par des lois différentes.
Chapitre 2 :
Les obligations
Section 1 : Les obligations contractuelles
Sous-section 1 : Convention de Rome de 1980
I – Le domaine de la Convention
Concernant le champ d’application matériel, la Convention s’applique au règlement des
conflits de lois en matière d’obligations contractuelles. Le texte ne définit pas la notion d’obligations
contractuelles mais on peut penser que la jurisprudence de la Cour de Justice afférent au Règlement
Bruxelles 1 est ici transposable.
Concernant le champ d’application dans l’espace, la Convention de Rome a un caractère
universel (article 2 de la Convention). Cela signifie qu’elle s‘applique quels que soient les pays en
présence, fussent-ils non européens.
Concernant le champ d’application dans le temps, la Convention s’applique aux contrats
conclus entre le 1er avril 1991 et le 17 décembre 2009.
II – Le contenu la Convention
A) La détermination de la loi applicable aux contrats (lex contractus)
1) Les solutions générales
a) La loi applicable au fond
Loi applicable en présence d’une clause d’electio juris :
La Convention donne, en principe, compétence à la loi choisie par les parties (article 3).
C’est donc le principe d’autonomie. La loi choisie régit le contrat en tant que loi et non en tant que
stipulation contractuelle, elle reste supérieure au contrat, à la volonté des parties. Cette autonomie
n’est admise que si le contrat présente un caractère réellement international (article 3-3).
La loi choisie ne doit pas nécessairement présenter une proximité particulière avec le
contrat : les parties peuvent choisir n’importe quelle loi. Deux types de situations où les parties
choisissent une loi « exotique » :
- Dans un souci de neutralité : ne pas avantager une partie par rapport
à la difficulté : « égalité dans la difficulté ».
- L’excellence du droit choisi : choisir le droit le plus intéressant, en
raison de l’excellence du droit. Le droit anglais est excellent en
matière maritime.
Tout au plus, cette loi doit être actuellement en vigueur ce qui exclut le contrat sans loi. 7en
revanche, le choix par les parties doit être exprès ou résulté de façon certaine des circonstances de la
cause : un certain nombre de référence implicites ne laissant pas de place au doute.
La Convention autorise, par ailleurs, le dépeçage du contrat, c'est à dire la soumission de
différentes parties du contrat à des lois différentes.
Loi applicable en l’absence d’election juris :
- Le principe de proximité : en l’absence de choix, la Convention pose
le principe selon lequel le contrat est régi par la loi avec laquelle il
présente ses liens les plus étroits.
-
-
La présomption générale : la Convention énonce une présomption
selon laquelle le contrat est réputé présenté ses liens les plus étroits
avec la loi du pays de la résidence habituelle du débiteur de la
prestation caractéristique au moment de la conclusion du contrat
(lieu de l’administration centrale si le débiteur est une société). Dans
un contrat, la plupart du temps, on peut qualifier l’obligation. La
prestation caractéristique est la prestation qui révèle la nature
juridique et socio-économique du contrat. Il s’agit, dans la plupart
des cas, de la prestation pour laquelle le paiement est dû. Dans
certains cas, la détermination de la prestation caractéristique se
révèle délicate.
 La Cour de cassation a considéré que dans un
contrat
de
distribution,
la
prestation
caractéristique réside dans la fourniture du
produit par le concédant de l’exclusivité (Civ. 1ère,
2007).
 De la même façon, dans le contrat de
cautionnement, la prestation caractéristique
réside dans l’obligation de la caution (Ch. Com.,
2011).
La clause d’exception : la présomption générale n’est pas
irréfragable. Lorsque la prestation caractéristique ne peut être
déterminée (en matière d’échange), le Juge peut soumettre le
contrat à la loi avec laquelle il présente, selon sa propre appréciation,
ses liens les plus étroits. La solution est la même lorsque la
présomption générale aboutit à un résultat qui n’est pas satisfaisant.
Dans ce cas, le Juge qui met en œuvre la clause d’exception doit
motiver spécialement sa décision (Ch. Com., 2006, Westra). Cette
hypothèse est la plus rare.
b) La loi applicable à la forme
L’article 9 de la Convention énonce une règle de conflit à finalité matérielle emprunte
d’une favor validitatis (faveur à la validité). Ainsi, le contrat est régulier en la forme s’il satisfait soit
aux conditions de la loi du pays de sa conclusion, soit à celles de la loi applicable au fond.
Dans l’hypothèse d’un contrat à distance, la loi du lieu de l’acte (lex loci actus) doit
s’entendre de la loi de la résidence de l’une ou de l’autre partie.
La Convention réserve cependant, en matière immobilière, l’application des lois de police
du lieu de situation de l’immeuble. On ne peut pas ne pas respecter les règles de formes du lieu de
situation de l’immeuble.
2) Les solutions particulières
a) Contrat de consommation
L’article 5 de la Convention énonce un dispositif protecteur du consommateur. Ce dispositif
ne joue que si le contrat présente un certain nombre de points de contact avec le pays de la
résidence habituelle du consommateur. Ainsi, la protection ne joue que dans trois cas :
- Si le contrat a été conclu dans le pays de la résidence habituelle du
consommateur et s’il a été précédé d’une proposition ou d’une
publicité ou encore d’actes nécessaires à sa conclusion de la part du
professionnel : distinction entre consommateur actif (pas de
protection) et passif (protection).
- Si le professionnel a reçu la commande dans le pays de la résidence
habituelle du consommateur
- Si le contrat est un contrat de vente de marchandises et si le
consommateur a passé sa commande à l’étranger au cours d’un
voyage organisé par le vendeur : pour éviter les arnaques sur les
touristes en vacances.
Lorsque ce dispositif est applicable, le choix par les parties d’une loi ne peut avoir pour effet
de priver le consommateur du bénéfice des dispositions impératives de la loi de sa résidence
habituelle. En l’absence de choix, cette dernière loi s’applique (loi de la résidence habituelle du
consommateur).
Lorsque le dispositif protecteur n’est pas applicable, la restriction à l’autonomie ne joue pas
et la loi applicable, à défaut de choix, est déterminée par la mise en œuvre de la présomption
générale. Cependant, Ccass, 2006, Meyer Richt : la Cour de cassation a précisé que le consommateur
peut néanmoins trouver une protection par le biais des lois de police applicables au litige en général.
NB : les dispositions impératives, au sens de l’article 5, ne sont pas seulement les lois de police.
b) Contrat de travail
La Convention prévoit un rattachement spécial en l’absence de choix par les parties. En
vertu de l’article 6 de la Convention, la loi applicable est celle du lieu d’exécution habituelle du
travail, même en cas de simple détachement. Si le salarié n’accomplis pas habituellement son travail
dans le même pays, s’applique la loi du lieu de l’établissement d’embauche. Ce rattachement à la lex
loci laboris n’est pas d’une impérativité absolue car l’article 6 énonce in fine une clause d’exception
spéciale. Cette clause peut notamment être utilisée lorsque la lex loci laboris n’est pas assez
protectrice du salarié : Ch. Soc., 2005.
Ce rattachement à la lex loci laboris est maintenu en présence d’une clause d’electio juris.
Ce choix ne peut en effet priver le salarié du bénéfice des dispositions impératives de la loi qui aurait
été applicable à défaut de choix. C’est la Cour de cassation qui apprécie le caractère impératif ou non
des dispositions plus favorables de la loi qui aurait été applicable à défaut de choix. Sur ce terrain, la
Cour de cassation considère que la règle du droit espagnol selon laquelle un licenciement ne peut être
contesté en Justice que dans un délai de 20 jours doit recevoir application même si, à défaut de choix,
le droit français, qui prévoit un délai de 30 ans, aurait été applicable : Ch. Soc., 2010.
Par ailleurs, le choix par les parties d’une loi étrangère n’est pas opposable aux organismes
français d’assurance chômage et ne peut faire échec à leur recours subrogatoire lorsque le travail a
été effectué en France : Ch. Soc., 2010.
A ce dispositif protecteur s’ajoute celui énoncé par le droit dérivé de l’Union. La directive
de 1996 sur le détachement du salarié à l’étranger prévoit, par exemple, pour empêcher le dumping
social, l’application, au bénéfice du salarié, de certaines dispositions de la loi du lieu de détachement,
notamment en ce qui concerne le salaire minimum.
c) Le contrat de transport
Le choix par les parties de la loi compétente est libre. A défaut de choix, la loi de
l’établissement du transporteur ne s’applique que si elle coïncide soit :
- Avec la loi du lieu de chargement des marchandises
- Avec la loi du lieu de déchargement
- Avec la loi de l’établissement de l’expéditeur
A défaut de coïncidence, le Juge recherche la loi des liens les plus étroits.
B) Le domaine de la lex contractus
La loi applicable aux contrats a vocation à régir la formation, l’interprétation et les effets du
contrat. Elle régit également les conséquences de l’inexécution, l’évaluation du dommage, les modes
d’extinction des obligations, la prescription, la caducité ou la déchéance.
La validité du contrat est régie par la loi qui serait applicable à celui-ci s’il était valable.
C) L’éviction de la lex contractus
1) L’éviction a priori : les lois de police
L’article 7 de la Convention réserve, en toute hypothèse, l’application des lois de police du
for, voire de celle d’un pays étranger.
Constituent des lois de police :
-
Les règles sur l’action directe en paiement du sous-traitant contre le
maitre de l’ouvrage lorsque l’immeuble est situé en France.
La directive de 1986 sur l’agent commercial qui énonce un droit à
une indemnité de non-renouvellement constitue également une loi
de police applicable lorsque le salarié effectue son travail sur le
territoire de l’Union : CJUE, 2000, Ingmar.
2) L’éviction à posteriori : le rôle de l’ordre public international
La Convention autorise le for à écarter la lex contractus lorsqu’elle heurte de façon
manifeste son ordre public international, dans le respect toutefois des règles de liberté de circulation
et sous le contrôle de la Cour de Justice. En matière contractuelle, l’ordre public international est
rare.
Sous-section 2 : le Règlement Rome I de 2008
Ce Règlement s’applique à tous les contrats conclus après le 17 décembre 2009. Il reprend
pour l’essentiel les solutions de la Convention de Rome.
Ainsi, le principe d’autonomie est maintenu. Cependant, le Règlement précise que la loi
nationale de transposition d’une directive de l’UE s’applique en tout état de cause, nonobstant le
choix de la loi d’un pays tiers par les parties, si le contrat est exclusivement localisé sur le territoire
de l’Union.
Ensuite, en l’absence de choix par les parties, le rattachement du contrat à la loi des liens
les plus étroits, et plus précisément à la loi de la résidence habituelle du débiteur de la prestation
caractéristique, est maintenu mais seulement pour les contrats innomés. Ainsi, pour les contrats
nommés, c'est à dire explicitement envisagés par l’article 4, la solution du conflit de lois est
directement donnée par le Règlement lui-même. Mais les solutions envisagées sont les mêmes pour
les deux contrats principaux (la vente et la prestation de service).
En revanche, les solutions diffèrent, pour les contrats de distribution, des solutions
retenues par la Cour de cassation française. Le Règlement désigne, en la matière, la loi de la
résidence habituelle du distributeur. Par ailleurs, certaines solutions particulières sont simplifiées. Tel
est le cas en matière de consommation : le contrat est régit par la loi du pays de la résidence
habituelle du consommateur si et seulement si le professionnel exerce son activité dans ce pays ou
dirige celle-ci vers lui (article 6).
Enfin, le mécanisme des lois de police est révisé. Le recours aux lois de police étrangères
n’est plus possible que lorsque ces dernières sont celles du pays d’exécution du contrat et si ces
dernières rendent illégales sont exécution (article 9).
Section 2 : Les obligations extra contractuelles
Les conflits de lois sont régis en la matière par le Règlement Rome II de 2007. Ce
Règlement a un caractère universel comme le Règlement Rome I (on l’applique quels que soient les
pays en présence). Ce Règlement exclue par ailleurs le renvoi.
Le principe général est celui de la compétence de la loi du lieu de réalisation du dommage
(lex loci damni).
A côté de ce rattachement des règles propres à certains délits spéciaux sont énoncés :
- En matière de responsabilité du fait des produits : le Règlement
prescrit l’application de la loi du pays de la résidence habituelle de la
victime si le produit y est commercialisé. Sinon, s’applique la loi du
pays d’achat si le produit y est commercialisé d’une façon générale
ou, à défaut, la loi du pays de réalisation du dommage si le produit y
est commercialisé (article 5). A défaut, le Juge applique la loi des liens
les plus étroits. Enfin, la loi du pays de la résidence habituelle des
parties s’applique si l’une et l’autre partie résident dans le même
pays.
- En matière de concurrence déloyale : le Règlement donne
compétence à la loi du pays dont le marché est affecté par l’acte
déloyal en question. Si l’acte déloyal affecte le marché de plusieurs
-
-
pays, c’est la lex fori qui s’applique. En la matière, la compétence de
la loi du marché affecté est impérative (article 6) : il ne peut y être
dérogé.
En matière d’atteinte à l’environnement : le Règlement reconnait au
demandeur une option. Compétence de la loi du lieu de dommage.
Le demandeur peut également fonder son action sur la loi du lieu du
fait générateur (article 7).
En matière de grève : le Règlement donne compétence à la loi du lieu
du pays de la grève.
En matière de responsabilité précontractuelle : (culpa in
contrahendo) : le règlement donne compétence à la loi qui aurait été
applicable au contrat s’il avait été finalement conclu. Si cette loi ne
peut être déterminée, la loi du lieu de réalisation du dommage
s’applique. En toutes hypothèses, si les parties ont leur résidence
habituelle dans un même pays au moment de la survenance du
dommage, c’est la loi de ce pays qui s’applique (article 10). Enfin, le
Règlement reconnait aux parties la liberté de choisir la loi applicable
à leur litige par un accord d’electio juris, et ce par un accord
postérieur à la survenance du dommage. Un tel accord ne peut être
antérieur à la survenance du dommage que si les parties sont toutes
les deux professionnelles et si elles exercent toutes les deux une
activité commerciale (article 14). Enfin, le choix de la loi applicable ne
peut en aucun cas écarter les dispositions impératives du droit de
l’Union si le litige présente un lien exclusif avec le territoire de l’UE.
Chapitre 3 :
Le statut réel
Section 1 : Les biens ut singuli
I – L’acquisition du droit réel
La lex rei citae régit l’acquisition du droit réel en l’absence de contrat. Elle régit
l’occupation, la possession et l’accession : Civ. 1ère, 1974.
En présence d’un contrat transférant un droit réel, notamment la propriété, la loi applicable
à la transmission entre les parties est la lex contractus sauf cas particulier d’une loi de police sur la
question. En revanche, l’opposabilité aux tiers de cette transmission est régie par la lex rei citae :
Ccass, 1935, Kantoor de Mas.
Si le droit réel porte sur un bien meuble et que ce dernier vient à être déplacé, la loi
applicable à une revendication éventuelle sur celui-ci est la loi du lieu de situation actuelle du bien et
non celle du lieu de situation initial : Ccass, 1969, Sté DIAC. En conséquence, cette solution ouvre au
possesseur du bien situé en France la faculté d’invoquer l’article 2276 du Code civil : Civ. 1ère, 2010,
Arman c/ Ducasse.
Cette solution peut également avoir pour effet de porter atteinte à l’efficacité d’une sûreté
réelle sans dépossession lorsque le bien est déplacé par le débiteur dans un pays dont la législation
est plus favorable. C’est pourquoi une harmonisation optionnelle est aujourd’hui envisagée au sein
de l’UE, soit sur la base de l’article 114 du TFUE, soit sur la base de l’article 81 du TFUE.
II – L’exercice du droit réel
L’exercice du droit réel est régit par la lex rei citae qui gouverne le rang des privilèges, le
droit de suite ou le caractère aliénable de la chose.
Section 2 : Les biens in globo
La nationalisation d’un bien par un Etat étranger ne peut avoir d’effets que sur les biens
situés sur son territoire : 1979, SONATRACH. Par ailleurs, la nationalisation reste sans effets
lorsqu’elle heurte l’ordre public international, et notamment lorsque l’ex propriétaire n’a pas été
indemnisé.
Les faillites internationales sont régies par le Règlement de l’UE du 29 mai 2000 appelé
aussi Règlement insolvabilité. Ce règlement énonce un principe de rattachement général de la
faillite à la loi du pays d’ouverture de la procédure principale (lex fori concursus). Cette procédure
devant être déclenché dans l’Etat du centre des intérêts principaux du débiteur, nonobstant
l’existence de procédures secondaires locales. Le Règlement énonce aussi un principe de
reconnaissance de plein droit des décisions rendues par le Juge de la procédure principale.
Partie 2 :
Les conflits de juridictions
En droit commun, les règles de conflit de juridictions présentent un caractère unilatéral. Ce
qui signifie qu’elles se bornent à préciser si oui ou non les Tribunaux français sont compétents. La
règle française n’a en effet pas d’autorité à l’étranger. En conséquence, théoriquement, une situation
de dénis de Justice international peut exister. A titre exceptionnel, le Juge français peut se déclarer
compétent lorsqu’aucun autre Tribunal au monde ne peut connaitre du litige : Ch. Soc., 2005,
DEGBOE. La même solution vaut en cas d’urgence. Cela dit, cela reste très exceptionnel.
Au sein de l’UE, l’unification en cours du droit international privé a d’ores et déjà aboutit à
deux règlements sur les conflits de juridictions (Règlement Bruxelles I sur la matière civile et
commerciale et le Règlement Bruxelles II bis sur la matière familiale). Dès lors, lorsque la situation
entre dans le champ d’application de ces textes, le droit commun est écarté et seul s’applique les
règles bilatérales qu’ils énoncent pour autant qu’elles désignent les Tribunaux d’un Etat membre. En
revanche, si la situation n’entre pas dans leur champ d’application, les règles unilatérales du droit
commun s’appliquent.
Titre 1er : Les conflits de juridictions internes à
l’UE
Section 1 : La compétence des Tribunaux en matière civile et
commerciale
I – Le domaine du Règlement Bruxelles I
Rationae materiae, le Règlement s’applique à la matière civile et commerciale à l’exclusion
des faillites, de la sécurité sociale et de l’arbitrage.
Rationae loci, le Règlement s’applique dans trois cas :
- Lorsque le défendeur est domicilié dans un Etat membre : pour une
société, lieu du principal établissement.
- Lorsque le Règlement reconnait une compétence exclusive aux
Tribunaux d’un Etat : article 23 énonce une série de compétences
exclusives pour des matières précises.
- Le Règlement s’applique si une des parties est domiciliée sur le
territoire d’un Etat membre et si, par ailleurs, une clause attributive
de juridiction donne compétence aux Tribunaux d’un Etat membre
Hormis ces trois cas, le Règlement ne s’applique pas.
Lorsque le règlement est applicable, il exclut la mise en œuvre des règles nationales : La
règle européenne chasse la règle nationale. Ainsi dit, la jurisprudence de la CJUE a pu considérer que
le Juge anglais n’était plus autorisé, dans le domaine du Règlement Bruxelles I, à faire jouer
l’exception de forum non conveniens (CJUE, Owusu, 2005) parce que c’est une règle nationale.
Exception de forum non conveniens : Institution de pure Common Law consistant en un pouvoir
reconnu au Juge de refuser de statuer car la situation ne présente pas assez de lien avec le territoire
britannique.
La solution est la même s’agissant de l’anti-suit injonction (CJUE, Turner, 2004)
Anti-suit injonction : Injonction du juge aux parties de ne pas assigner à l’étranger.
Toutefois, la Cour de cassation considère que n’est pas contraire au droit de l’UE la
reconnaissance en France d’une décision anglaise prononçant une mareva injonction c'est à dire un
gel injonctif d’avoirs situés à l’étranger (C.Cass, 2004, Stolzenberg).
II - Le contenu du règlement Bruxelles 1
A) Les règles de compétence
1) La compétence au fond
a) La compétence de droit commun
En l’absence de clause attributive de juridiction, la compétence est normalement dévolue au
for (Tribunal) du domicile du défendeur : Actor sequitur forum rei (Article 2 Règlement)
b) Les compétences optionnelles
Il s’agit des compétences reconnues comme découlant d’un droit d’option offert au
demandeur. Elles s’ajoutent à la compétence de droit commun.
La matière contractuelle :
En cette matière, le demandeur peut opter pour un autre tribunal que celui du défendeur
et ce, en vertu de l’article 5-1 du Règlement. Au sens du règlement, la matière contractuelle est celle
qui implique un engagement librement assumé par une partie envers l’autre.
Exemple : Pour la Cour, l’action du sous-acquéreur contre le vendeur initial n’est pas contractuelle :
CJUE, 1992, Jacob Handte (En France, l’action en vice caché se transmet à raison de la chose mais
cette logique n’est pas retenue en droit européen).
- De même, l’action tendant à faire réparer le préjudice résultant de la
rupture des pourparlers n’est pas contractuelle : CJUE, Réunion
européenne, 2002 (Pas de différence avec le système français ou la
rupture des pourparlers est extracontractuel).
- De même, n’est pas contractuelle l’action intentée par une
association de consommateur pour faire supprimer des clauses
abusives des conditions générales de vente d’un professionnel (CJCE,
1er Octobre 2002).
En revanche, l’action paulienne est de nature contractuelle (CJCE, 1992, Reichert). Au lieu
de saisir les tribunaux du domicile du défendeur, le demandeur peut saisir le tribunal du lieu
d’exécution de l’obligation servant de base à la demande.
- Pour les contrats de vente, l’article 5 du Règlement prévoit que c’est
le lieu de livraison de la chose et en cas de livraison multiple, le lieu
de la livraison principale : CJUE, 2007, Color Drac
- Contrat de service : Lieu de fourniture des services.
Tels sont les deux contrats nommés expressément prévus par le règlement.
Pour les autres contrats, ceux qui sont innomés, il faut donc localiser l’exécution de
l’obligation litigieuse à partir des termes du contrat ou à défaut, par consultation de la loi applicable
au contrat : CJCE, 1976, Tessili
Il faut alors d’abord résoudre le conflit de lois avant de résoudre le conflit de juridictions.
 Exemple : S’agissant d’un contrat prévoyant la conception en
France de documents publicitaires destinés à être livrés en
Angleterre, la Cour de cassation a considéré que l’obligation
servant de base à la demande résidait dans la livraison de ceux-ci
et devait à ce titre être exécutée en Angleterre : Civ. 1ère, 27
Mars 2007.
L’option n’est pas ouverte au demandeur lorsque l’obligation litigieuse consiste en une
obligation de ne pas faire sans limitation géographique. Seule est maintenue la compétence du
domicile du défendeur : Arrêt de 2002, Besix
La matière délictuelle :
Le demandeur peut saisir le Tribunal du lieu où le fait dommageable s’est produit ou risque
de se produire. Il y a des actions réellement préventives en Europe pas seulement au provisoire
comme en France.
Ce tribunal doit s’entendre, en cas de délits complexes, comme étant aussi bien celui du
lieu du fait générateur que celui du lieu de réalisation du dommage : Arrêt de 1976, Mines de
Potasse d’Alsace.
En matière de délit de presse, la Cour de Justice laisse à la victime deux possibilités : (1995,
Fiona Shevill)
- Soit demander la réparation du dommage intégral devant le for du lieu
du fait générateur c'est à dire le for de publication.
- Soit demander la réparation d’un dommage local devant le for du lieu
de réalisation du dommage.
Pour ce qui concerne la vente de produits de contrefaçon sur internet, la jurisprudence de
la Cour de cassation retient au titre de l’article 5-3 la compétence des Tribunaux français si et
seulement si, quel que soit son lieu d’enregistrement ou d’exploitation, le site internet vise
spécifiquement le public français par exemple, par l’existence d’une rubrique en langue française ou
de conseils aux utilisateurs français : Civ. 1ère, 2009.
En revanche, si le site français ne vise pas activement le public français, les tribunaux
français ne sont pas compétents.
c) Les compétences spéciales
Le contrat de consommation :
Son régime particulier s’applique pour certains contrats conclus par une personne pour un
besoin étranger à son activité professionnelle. Il s’agit :
- La vente à tempérament d’objets mobiliers corporels
- Les opérations de crédits liés au même type de vente : liés à la vente
à tempérament d’objets mobiliers corporels.
- La fourniture de services
Dans tous les cas, la protection ne joue que si la conclusion du contrat a été précédée, dans
l’Etat du domicile du consommateur, d’une proposition et si le consommateur a accompli, dans cet
Etat, les actes nécessaires à la conclusion du contrat. Dans cette hypothèse, on vise le consommateur
passif. Le consommateur actif n’est pas protégé.
Dans ce domaine, l’article 16 du Règlement prévoit que le consommateur peut assigner le
professionnel devant les Tribunaux du domicile de ce dernier ou devant les Tribunaux du lieu
d’implantation de la succursale avec laquelle il a traité ou encore devant les Tribunaux de son propre
domicile. En revanche, le professionnel ne peut, quant à lui, assigner le consommateur que devant
les Tribunaux de l’Etat membre dans lequel il est domicilié.
Enfin, la prorogation volontaire de for (accord d’élection de for) n’est valable, en matière de
consommation, que si elle a été conclue postérieurement à la naissance du litige.
Le contrat de travail :
Les articles 19 et 20 du Règlement prévoient que le salarié ne peut être assigné que devant
les Tribunaux de son domicile. En revanche, le salarié dispose d’une option, il peut assigner
l’employeur :
- Soit devant les Tribunaux de l’établissement d’embauche
- Soit devant ceux du lieu d’exécution du travail
- Soit devant ceux de son propre domicile
La prorogation volontaire de for n’est valable, en la matière, que si elle ajoute une
compétence optionnelle supplémentaire, sauf par exception, si elle a été conclue postérieurement à
la naissance du différend.
d) La compétence volontaire
Le droit de l’Union admet la validité de la prorogation volontaire de for (article 23). Selon la
jurisprudence de la Cour de Justice, cet accord bénéficie d’une autonomie matérielle, ce qui signifie
que la nullité du contrat principal qui le renferme ne l’affecte pas par contagion et ne remet pas en
cause la compétence du Juge choisit : CJCE, 1997.
Le Règlement et la jurisprudence, nationale et européenne, soumettent la prorogation
volontaire de for à un certain nombre de conditions de fond et de forme
Conditions de fond :
-
La situation doit être réellement internationale au moment de la
conclusion de l’accord (jurisprudence de la Cour de cassation).
L’accord doit avoir fait l’objet d’un consentement mutuel
conformément à la lex contractus.
La clause doit désigner les Tribunaux d’un Etat membre. Sinon, le
Règlement ne s’applique pas.
Elle doit limiter son domaine à un rapport de droit déterminé.
La clause ne doit pas faire échec à une compétence exclusive.
Conditions de forme :
L’accord doit être formulé par écrit ou au terme d’un accord verbal confirmé
ultérieurement par écrit. La clause peut aussi être conclue conformément aux habitudes des parties
ou aux usages du commerce international.
Lorsque l’accord est valablement conclu, que les conditions sont remplies, le for élu est
compétent. Toutefois, sa compétence a deux limites :
- Si les parties comparaissent volontairement devant un Juge non élu
sans que personne n’invoque la violation de l’accord, ce Juge est
compétent.
- Si l’une des parties assigne l’autre devant un Juge non élu la décision
de ce dernier pourra être reconnue devant un autre Etat membre car
la violation de la prorogation de for n’est pas un motif de non
reconnaissance de la décision rendue.
e) Les compétences exclusives
L’article 22 du Règlement énonce une liste de compétences exclusives. Il ne peut être
dérogé par prorogation volontaire de for à une compétence exclusive et un Tribunal qui rendrait une
décision en violation d’une telle compétence enfreindrait le Règlement de sorte que cette décision
ne pourrait être reconnue dans les autres Etats membres.
Sont exclusivement compétents :
- Les Tribunaux du lieu de situation de l’immeuble en matière de droit
réel immobilier
- En matière de fonctionnement interne des sociétés : les Tribunaux du
lieu du siège social
-
En matière de brevets : les Tribunaux du lieu d’enregistrement du
brevet. Il s’agit du contentieux de l’antériorité et pas de la
contrefaçon.
2) La compétence au provisoire
L’article 31 du Règlement autorise au provisoire la saisine du Tribunal dont la loi interne
autorise la mesure provisoire ou conservatoire projetée. Ce Tribunal est appelé le forum arresti.
La règle ne joue pas en matière de référé provision. Celui-ci ne peut aboutir que si le
remboursement de la provision est garanti et si la provision ne porte que sur des avoirs (des actifs)
situés sur le territoire du Juge saisi : CJCE, 1998, Van Uden.
B) Les régimes de la compétence
Lorsque les parties saisissent non pas un mais plusieurs Tribunaux d’une même action au
fond (identité de parties et d’objet), on dit qu’il y a litispendance. Dans ce cas, le Juge saisit en second
doit surseoir à statuer jusqu’à ce que le Juge saisit en premier ait statué sur sa compétence à
condition qu’une partie soulève l’exception de litispendance. Si le 1er Juge se déclare compétent, le
2nd Juge doit se dessaisir. Si aucune partie ne soulève l’exception de litispendance devant le 2nd Juge,
ce dernier peut sursoir à statuer.
Lorsque les parties saisissent plusieurs Tribunaux de plusieurs actions aux fonds et que ces
actions présentent un rapport étroit, on dit qu’il y a connexité. Dans ce cas, une partie peut
demander au 2nd Juge de sursoir à statuer et ce dernier a la faculté de prononcer un sursis à statuer.
Section 2 : La compétence des Tribunaux en matière
familiale
I – Le domaine du Règlement Bruxelles II bis de 2003
Rationae materiae, le Règlement s’applique aux divorces, à la séparation de corps et à
l’annulation du mariage. Dans le langage unioniste, on parle de désunion. Le Règlement s’applique
aussi à l’exercice de l’autorité parentale et à la responsabilité parentale vis-à-vis de l’enfant. Il ne
s’applique pas à la filiation, à l’adoption, au nom, aux obligations alimentaires et à la succession. Ces
questions relèvent du droit international privé commun.
Rationae loci, le Règlement s’applique dès l’instant que l’un des chefs de compétence qu’il
énonce est situé sur le territoire de l’UE. A défaut, le droit commun s’applique.
II – Le contenu du Règlement
A) La désunion
Le Règlement énonce une liste de for compétents non hiérarchisée. Le demandeur choisit
le Tribunal compétent dans la liste :
- Les Tribunaux de la résidence habituelle des époux : hypothèse où les
époux habitent encore ensemble.
- Les Tribunaux de la dernière résidence habituelle des époux : si l’un
des deux y habite encore.
- Les Tribunaux de la résidence habituelle du défendeur
- Les Tribunaux de la résidence habituelle du demandeur en cas de
demandes conjointes ou, en toutes hypothèses, si le demandeur y
réside depuis un an ou depuis 6 mois s’il a la nationalité du pays de a
résidence.
- Les Tribunaux de la nationalité commune des époux
Cette liste non hiérarchisée introduit un risque de course au Juge. En effet, le Tribunal
figurant dans la liste et saisi en premier est en effet seul compétent. Le Juge saisit en 2nd devant se
dessaisir.
B) La responsabilité parentale
En principe, les Tribunaux compétents sont ceux du lieu de résidence habituelle de l’enfant
car il est souvent prévu par la loi de procédure d’auditionner l’enfant. Si le lieu de résidence ne peut
être établi, sont compétents les Tribunaux du lieu de présence de celui-ci. Règles découlent de
l’article 8 du Règlement pour la règle de principe et l’article 13 pour le cas particulier vu en 2nd.
Par exception, le Tribunal compétent pour statuer sur la séparation des parents est
également compétent pour statuer sur la responsabilité parentale si les époux sont d’accord pour
étendre la compétence du for de désunion et si l’un d’eux au moins exerce l’autorité parentale : cas
de prorogation de compétence.
Enfin, le for saisi peut, à la demande des parties, sursoir à statuer et demander au Juge d’un
autre Etat membre avec lequel l’enfant a un lien étroit, de statuer à sa place. Le Tribunal en question
n’est pas tenu d’accepter cette compétence. Il s’agit là d’une forme de forum non conveniens.
Chapitre 2 :
La reconnaissance des décisions
Les décisions rendues par les juridictions d’un Etat membre sous l’empire des Règlements
Bruxelles I et Bruxelles II bis bénéficient d’une reconnaissance de plein droit sur tout le territoire de
l’Union : article 33 Règlement Bruxelles I et article 21 Règlement Bruxelles II bis. Cette
reconnaissance ne connait que deux limites :
- L’éventuelle contrariété de la décision à l’ordre public international.
- L’éventuelle incompatibilité de la décision avec une décision
définitive antérieure rendue dans l’Etat où la reconnaissance est
demandée.
NB : concernant l’exécution forcée de la décision, le demandeur à l’exécution doit saisir l’autorité
compétente pour se faire délivrer l’exequatur sur requête unilatérale. La reconnaissance a pour but
de faire reconnaitre des effets de droit. En revanche, pour exécution forcée, il faut l’exequatur qui est
de droit (pas de contrôle).
Titre 2 :
Les conflits de juridictions externes à l’UE
Chapitre 1 :
La compétence de Tribunaux
Section 1 : Les règles de compétence
I – Compétence ordinaire
Les règles de compétence ordinaire sont déduites d’une transposition à l’ordre
international des règles de compétence internes énoncées par le CPC : Ccass, 1962, Scheffel. Par
exemple, en droit interne, le Tribunal compétent est en principe celui du domicile du défendeur. En
conséquence, les Tribunaux français sont compétents si le défendeur est domicilié en France.
II – La compétence volontaire
La Cour de cassation pose le principe de la validité des prorogations volontaires de for, et
donc notamment des clauses attributives de juridiction. Ce type d’accord est valable à condition que
le litige soit international et que l’accord ne fasse pas échec à une compétence impérative des
juridictions françaises : Ccass, 1985, Cie de signaux et d’entreprises électriques
III – La compétence extraordinaire
Les articles 14 et 15 du Code civil énoncent un privilège de juridiction au profit du
justiciable de nationalité française. Ainsi, l’article 14 offre au demandeur français la faculté de saisir
le Tribunal français en toute hypothèse et l’article 15 offre au demandeur étranger la faculté de saisir
les Tribunaux français d’une action contre un français. Interdit au sein de l’UE lorsque les Règlements
sont applicables. Cette compétence extraordinaire est reconnue dans l’ensemble des matières non
couvertes par une compétence impérative : Ccass, 1970, Weiss.
La compétence fondée sur les articles 14 et 15 est facultative pour les parties, les parties
peuvent donc y renoncer soit par avance, soit en début de procédure. Par ailleurs, cette compétence
est également subsidiaire, en ce sens que ces deux textes ne s’appliquent que si aucun autre chef de
compétence ordinaire n’est situé en France.
NB : à titre exceptionnel, les juridictions françaises peuvent se déclarer compétente sur le fondement
de l’urgence ou de la nécessité d’éviter un déni de Justice international.
Section 2 : Le régime de la compétence
En cas de litispendance ou de connexité, le Juge français a la faculté de sursoir à statuer si
un tribunal étranger avant lui du même litige ou d’un litige connexe : Ccass, 1974, Miniera di Fragne.
Chapitre 2 :
La reconnaissance des décisions
Important selon le prof !!!!
La reconnaissance en France d’une décision étrangère est soumise à trois conditions
définies par la jurisprudence Ccass, 2007, Cornelissen :
- La décision doit avoir été rendue par une juridiction étrangère
présentant un rattachement suffisant avec le litige : ce qu’on appelle
la compétence indirecte.
- La décision doit être conforme à l’ordre public international français :
de fond comme de forme (procédure).
- La décision doit être exempte de fraude à la loi
On considère que le Juge justifie d’une compétence indirecte si, d’une part il n’y avait pas,
en la matière, de compétence exclusive des tribunaux français et si, d’autre part, le litige se rattache
de façon caractérisée avec le pays du Juge saisi : Ccass, 1985, Simitch.
La compétence des Tribunaux français fondée sur le privilège de juridiction des articles 14
et 15 n’est pas considérée comme une compétence exclusive : Ccass, 2006, Prieur.
L’exécution forcée, en France, d’une décision étrangère suppose l’obtention préalable de
l’exequatur (autorisation d’utiliser la force). Cette autorisation de recourir à la force publique est
accordée aux mêmes conditions mais aux termes d’une requête déposée auprès du greffier en chef
du TGI du lieu de l’exécution.