Le Centre Régional de Toxicologie. H PROGRAMMÉ QUÉBÉCOIS DE MEDECINE'PRÉVENTIVE EN M I L I E U DE TOXICOLOGIE INDUSTRIELLE EXPOSITION TRAVAIL PROFESSIONNELLE AU M E R C U R E CE T R A V A I L A ÉTÉ RÉALISÉ GRÂCE À UNE SUBVENTION DU qv 293 P964 1977 MINISTÈRE " DES A F F A I R E S DU SOCIALES DU GOUVERNEMENT QUÉBEC 1 9 7 7 3 5567 0001 Le C e n t r e Hospitalier d e l'Université Laval — 2 7 0 5 , b o u l e v a r d Laurier, Q u é b e c , Q u e . G1V 4 G 2 SANTÉCOM Légende ) V de la première Représenté page: symboles successifs sous forme de croissant Symbole au XVe Symbole au XVIe jusqu'au Ha symbole siècle siècle donné ensuite Représentation XVe siècle. Schéma au XVIIe siècle.3 peu différent P 0 du mercure â la planète de Dalton, du mercure. 1808. Représentation de Berzelius, I8l43 (abréviation de hydrargyrum) devenue le symbole actuel. (Duval3 C.j 1968) k, nr -î^-Tt - riOlTt)U QUÉBÏC ftlSTÏÏU NVÎ^ • S.. , ^JMKLVL Albert J. Nantel, M.D., M.Sc., Directeur et Jean-Louis Benedetti, médecin toxicologue Avec la participation scientifique de Jean-Yves Savoie, Ph.D., Chirn. p., Chef du laboratoire et Jean-Philippe Weber, Ph.D., Chim. p Responsable, projet mercure iocembre 1 Nous remercions madame Corinne Bergeron pour la dactylographie du texte et tous les membres du Centre Regional de Toxicologie pour leur - Alain - Ronald Beaudet Technologiste Bérubé Chamberland - Mme Pierrette - Mme Liliane Corbeil Ferron Recherchiste Technologiste Bachelière en se. chimie Chim. p. - Mlle Ghislaine Harvey Chef Leblanc Secrétaire technicienne médicale Mlle Louise Phaneuf, inf. 1. Tech, en Mme Andrée Technologiste Mlle Lise Richard Rivard Mlle Sylvie Mme Denise Rodrigue Rousseau médicale Réceptionniste - Jean-Guy Cuillot, M.Se. Mlle Charlotte médical Technologiste médical - Robert Bourbonnais, M.Se. - Mme Evelyne collaboration: administration médicale Pip J ôrre en tech. médicale Technologiste Aide-féminin Mme Tat-Ha Schwarz , M.Se. Pharmacologue Louis Tessier, M.Se. Toxicologue médicale Table des manières Fage - I - INTRODUCTION 1 -II - DIFFERENTES FORMES, PROPRIETES PHYSICOCHIMIQUES ET USAGES DU MERCURE . . . . 4 A Différentes formes 1. 2. 3. B -III- 4 5 7 Propriétés physico-chimiques et usages du mercure 1. 2. C Formes naturelles Formes secondaires Formes particulières 7 Propriétés physiques Propriétés chimiques 8 10 Les différents composés minéraux . INDUSTRIES ET PROFESSIONS MANIPULANT DU MERCURE A 12 13 Extraction et raffinage du HgS ou cinabre. . 13 B Traitement des autres minerais . . 13 C Fabrication du chlore et de la soude caustique. 13 D Fabrication d'appareillages électriques E m Fabrication d'appareillages mécaniques 15 F Utilisai ions diverses. . . . . . . 15 G Autres professions exposées de façon plus ou moins sévère . . . . 17 1. 2. 3. 17 17 17 Les cabinets de dentistes. . . Dans les divers laboratoires . Personnel d'entretien 2. IV- ABSORPTION, DISTRIBUTION, SORT ET EXCRETION DU MERCURE 19 A . . . . . 19 Par Inhalation Par ingestion . . . . . . . . . Absorption cutanée 19 20 20 Absorption 1. 2. 3. B V- VI- Distribution et sort du mercure. . . 21 1. 2. 21 93 Dans le sang Dans les tissus RÉTENTION, ACCUMULATION ET PHYSIO PATHOLOGIE DU MERCURE 28 A Généralités 28 B Rétention et accumulation 1. Sels mercuriques 2. Mercure élémentaire 29 29 31 C Phys iopathologie du mercure 31 1. 2. 32 33 Le cerveau Le rein TABLEAUX CLINIQUES D'INTOXICATION. . . . A Intoxication aiguë et subaiguë par inhalation de vapeurs de mercure . . 1. 2. B 34 35 Dans la majorité des cas, l'atteinte pulmonaire donne le tableau clinique. . . . . . . 36 L'évolution est variable . . . . 36 Intoxication chronique par vapeurs mercurielles 37 1. 2. 3. 37 42 42 Le tableau clinique habituel . . L'évolution Le micrornercurialisme. . . . . . 3. C Les autres tableaux clinique ; de l'intoxication par le mercure . . . . 1. 2. 3. 4. -VIT- Intoxication aigu*} par les sels mercuriels 43 Pénétration sous-cutanée ou intramusculaire de mercure métallique 44 Pénétration intraveineuse ou intra-arterielle de mercure métallique 44 Phénomènes d'hypersensibilité au mercure et à ses sels . . . . . . 45 RELATION ENTRE LE NIVEAU D'EXPOSITION ET LES EFFETS DU MERCURE 46 A Problématique 46 B Surveillance environnementale -vssurveillance médicale et biologique . 47 Relation entre les signes cliniques et les taux dans l'air, dans le sang et dans l'urine . 49 C -VI il- 43 PARAMETRES DE SURVEILLANCE 55 A Médicaux 55 1. Le dossier médical 55 2. L'examen médical d'embauche . . . 55 3. Critères d'exclusion. . . . . . . 57 4. Examens médicaux périodiques. . . 57 B Dosages urinaires du mercure. . . . . 58 C Dosage sanguin de mercure 60 -IX- NORMES BIOLOGIQUES PROVISOIRES 62 A Dans l'urine 62 B Dans le sang 63 -X- FRÉQUENCE DES ANALYSES 65 -XI- RÔLE DE LA RECHERCHE 68 -XII- TRAITEMENT DE L'INTOXICATION MERCURIELLE 71 A Les agents chélateurs . . . . . . . . 71 B Intoxication aiguë 714 C Intoxication chronique 75 -XIII- BIBLIOGRAPHIE ABREGEE 76 A Volumes et monographies . . . . . . . 75 B Principales references bibliographiques 73 I INTRODUCTION Qui d'entre nous ne s'est pas amuse un jour à manipuler des gouttes de ce métal liquide et brillant qui semblait prendre plaisir à se briser en gouttelettes de plus en plus fines pour faire obstacle à nos efforts? Il semble difficile à imaginer que cette substance, d'apparence si inoffensive puisse devenir un poison violent et parfois même mortel pour l'homme. Et pourtant, ses propriétés sont connues depuis l'antiquité. Son nom de "vif argent" lui fut donné par Aris- tote vers l'année 350 A.C. Seul métal liquide a tempéra- ture ordinaire, il fut appelé "argent liquide" par Dioscorides en l'an 50 A.C. d 'hydrargyrum. Quant à Pline, il lui donna le nom latin De là nous vient le symbole Hg, consacré par Berzélius en 1814 (Hunter, D. , 19 7 5, dans The Diseases of Occupations ). Sa toxicité était suffisamment bien connue des romains pour que Justinien écrive à cette époque que de condamner un esclave à travailler dans les mines de mercure d'Almaden, en Espagne, équivalait à le condamner à mort. L'exploitation des mines d'idria, région qui appartenait à l'Italie, mais qui fut donnée à la Yougoslavie après la deuxième guerre mon aale, a entraîné l'apparition de cas d'intoxication chronique au mercure, clairement décrits par Giovanni Scopoli en 1761. Le même tableau clinique fut décrit en 192 3 par Alice Hamilton chez les mineurs de New Almaden en Californie. . . ./2 Dès 1713, Ramazzini avait très bien décrit les risques d'intoxication par le mercure qui menaçaient les orfèvres du moyen âge, de même que la fabrication d'amalgame d'or et de mercure pour plaquer les boutons de vêtements. Même les chirurgiens, qui appliquaient à mains nues Jes onguents mercuriels dans le traitement de la syphilis, risquai ent 1 ' intoxication. Kussmaul, en 1861, a très bien décrit les risques occupâtionnels des ouvriers qui travaillaient à la fabrication des miroirs qui, à l'époque, consistaient en une plaque de verre recouverte d'un amalgame d'êtain et de mercure. Le problème était tellement sévère que presque tous les adultes des villes de Ftirth et de Nuremberg, où l'on retrouvait de telles industries, étaient entièrement édentés suite à des stomatites mercurielles. L'utilisation du nitrate de mercure dans la fabrication du feutre par les chapeliers a provoqué de nombreux cas d'intoxication au cours des derniers siècles. C'est cependant l'apparition et le développement de l'énergie électrique dans la deuxième moitié du dix-neuvième siècLe qui a entraîné un accroissement marqué de la demande de mercure dans l'industrie. Ce n'est pas cet accroissement de l'usage industriel du mercure, ni le risque d'intoxication pour les ouvriers qui y travaillent qui ont le plus attiré l'attention du public en général et des scientifiques en particulier au cours des dernières décades, mais plutôt la découverte des effets néfastes sur l'environnement des dérivés mercuriels. Des acci- dents écologiques dramatiques survenus principalement au Japon (Minamata et Niigata) et en Irak ont polarisé l'opinion publique sur ce sujet. Ce n'est cependant pas cet aspect du problème que nous désirons étudier dans ce document mais celui, qui est quelque peu retombé dans l'ombre, des travailleurs qui sont encore exposés aux effets toxiques des vapeurs du mercure inorganique. Il existe d'ailleurs de très bonnes revues du problème du mercure dans l'environnement (Tsubaki, T., 1977, D'Itri, P.A., 1977, Charlebois, C.T., 1977, Environnement, 1974, OCDE, 1974, Hartung, D.R., 1974, IAEA, 1972, D'Itri, F.M., 1972, Friberg, L., 1972). Les risques d'intoxi- cations occupâtionnelles par les différents dérivés inorganiques ou organiques du mercure étant plus rares, mais quand même réels, nous allons y faire référence tout au long de cette monographie. II DIFFÉRENTES FORMES, PROPRIÉTE'S PHYSICOCHIMIQUES ET USAGES DU MERCURE. A Différentes formes. 1. Formes naturelles: Le mercure est l'une des composantes naturelles de la croûte terrestre. Dans le sol, on le trouve parfois à l'état natif sous forme de gouttelettes mais, le plus souvent, sous forme de minerai dont le plus abondant est le sulfure ( HgS ) ou cinabre. Les principales mines de ci- nabre se trouvent à Almaden, en Espagne, à Idria, en Yougoslavie et à New Almaden, en Californie. Il existe aussi, en proportion plus ou moins importantes, amalgamé à d'autres métaux, notamment l'or et 1'argent. Comme il a la propriété unique,pour un métal, de s'évaporer à la température ambiante, on le re- trouve répandu dans toute la biosphère. On évalue d'ailleurs à 15,000 tonnes métriques la quantité qui circule annuellement dans la biosphère (Ketchum, B.H., 1972). La concentra- tion du mercure dans l'air ambiant varie considérablement selon les endroits. Cependant, on peut retrouver des concen- trations allant jusqu'à 20 yg/M3 à la surface des dépôts miniers (U.S. Geological Survey, 1970). La concentration du 5. mercure dans l'eau varie aussi considérablement d'un endroit a l'autre, mais les facteurs de contamination humaine sont difficiles à séparer des facteurs naturels. La presque totalité du mercure utilisé commercialement provient de la transformation du cinabre ou de la récupération du métal déjà extrait. 2. Formes secondaires: a) Le mercure métal: Celui-ci provient du traitement des sels minéraux. En métallurgie du mercure, la principale opération consiste en un simple grillage du sulfure; soit dans l'air (Idria, Almaden) Hg S + 02 -> Hg + S02 soit dans la chaux (New Almaden) 4HgS + 4 CaO 4 Hg + 3 CaS + CaS04 Les vapeurs de mercure sont par la suite condensées, puis débarrassées de leurs impuretés (filtration sur toile, peau ou filtre ordinaire suivie de purification par distillation ou par voie humide). b) Les dérivés du mercure: Les principaux dérivés du mercure, ainsi que leurs utilisations, sont résumés dans le Tableau I. . . ./ 6 6. Sels mercureux Sels mercuriques Utilisât ions Oxydes . oxyde mercurique: HgO . a la concentration de 1%: onguent ophtalmique, antiseptique . Halogênures . Chlorure mercureux Hg 2 Cl2 = calomel (Solubilité : 2 mg/1 à 25° C.) . anciennement utilisé comme purgatif, vermifuge, antiseptique et antisyphilitique. . Chlorure mercurique . antiseptique très HgCl 2 = sublimé puissant; conserva(solubilité: 7U,2 g/1 tion des pièces anaà 25° C.) tomiques, insecticide, industrie des plast iques. . Chlorite mercureux: Hg z (C10 2 ) z . Chlorite mercurique , explosifs Hg(C10 2 ) 2 . Iodure mercureux Hg 2 1 2 . antisyphilitique . Iodure mercurique Hgl 2 j . préparations médicales diverses. Dérivés du soufre . Sulfure mercurique HgS . Sulfate mercureux Hp,2 SO„ . préparation industrielle du mercure;J i pigment pour peinture ! (vermillon) . piles à courant constant . Sulfate mercurique HgSOi* . catalyseur à CO . extraction industrielle de l'or et de l'argent des pyrites. Autres combinaisons . Nitrate mercureux: Hg z (N0 3 ) 2 • H 2 0 . utilisé auparavant dans la fabrication des chapeaux de feutre . Oxycyanure mercurique :HgO-Hg(CN 2 ) . Fulminate mercurique: Hg(CNQ) 2 Principaux sels merouriels . désinfection des instruments de chirurgie . explosifs et leurs utilisati Comme on pourra le constater, la plupart de ces sels mercuri els ne présentent qu'un intérêt historique, c'est pourquoi ils ne seront mentionnés que brièvement dans cette monographie . 3. Formes particulières: a) Onguent mercuriel: Le mercure peut se diviser par l'agi- tation en gouttelettes excessivement fines. gris terne. Il apparaît alors Cette division peut être facilitée par la tritura- tion avec des corps étrangers d'où l'obtention d'onguents mercuriels encore appelés onguents gris. b) Mercure colloïdal: Il s'agit d'une suspension obtenue en faisant jaillir un arc électrique dans l'eau entre du platine et du mercure, et qui peut être stabilisée par l'addition d'huiles (huiles mercurielles ) . B Propriétés physico-chimiques et usages du mercure. Les propriétés physico-chimiques du mercure on font un métal remarquable et expliquent tous les divers usages que l'on en fait ainsi que ses propriétés toxiques. «/B 1. Propriétés physiques: a) Mercure solide: Il se présente sous la forme d'un solide blanc, malléable, et possède un point de fusion à -38.87° C.; cette valeur correspond, en fait, a son peint de congélation. b) Mercure liquide: Le mercure est le seul métal qui se présente sous une forme liquide à température ordinaire. Il est alors très mobile et d'une couleur argentée, très brillante, ce qui lui a valu le surnom de "vif argent". Utilisation pratique dans la fabrication d'appareillage électrique (i.e., interrupteurs, thermostats) . De tous les liquides, c'est celui qui possède la densité la plus élevée (13.54 g/cm 3 à 20° C.). Utilisation pratique comme lest (i.e., en médecine, dans les tubes de Miller-Abbott) et comme agent permettant le flottement (i.e., les télescopes; la plupart des télescopes flottent sur un bain de mercure, ce qui facilite leur déplacement). Les phares tournants; les systèmes de lentilles de certaâ.is phares tournent plus aisément lorsqu'ils sont disposés sur un bain de mercure. Sa conduct i.vii~é électrique est très élevée. 9. Cette propriété associée à son point de fusion bas a permis son utilisation pour le procédé d'électrolyse du chlorure de sodium lors de la production de la soude caustique (hydroxyde de sodium) et de chlore. De là origine le terme, maintenant bien connu, d'usines de chlorealcalis . Sa conductivité thermique élevée a aussi permis son utilisation comme agent de transfert de la chaleur dans certains processus industriels. Le fait qu'il possède une courbe de dilatation régulière selon la température, une tension superficielle élevée et qu'il ne mouille pas le verre a permis son utilisation dans de nombreux appareils de mesure physique (i.e., les thermomètres et les autres instruments sensibles aux variations de température de même que les baromètres et divers manomètres). Sa tension de vapeur qui s'élève à mesure que la température augmente est d'une importance capitale, car elle détermine en partie sa toxicité. Cette tension de vapeur qui est de 0.000U90 mm à 10° C. est doublée à 20° C., puis se multiplie par un facteur six à 30° C. et un facteur douze à 40° C. (Goldwater, L.J., 1957). En pra- tique, ceci signifie qu'un volume de 1 M3, saturé par des vapeurs de mercure à température ambiante, contient environ 15 mg du métal et qu'à 40° C. la quantité de mercure dans l'air augmente à 68 mg/M 3 (la TLV en milieu industriel est de 0.05 mg/M 3 ). . . ./10 10 . Le mercure possédant un point d 'étuiïition (U>b.t>° c.), ses vapeurs ont parfois été utilisées à la place des vapeurs d'eau dans les machines et turbines à vapeur. Une des propriétés de la vapeur de mercure est de produire, sous l'influence d'une décharge électrique, des émissions caractéristiques, soit de raies visibles intenses (lumière vive bleuâtre) soit de raies dans l'ultraviolet. Cette propriété est mise à profit dans la fa- brication des lampes à vapeurs de mercure et de certaines lampes et tubes fluorescents. Dans ce dernier cas, une couche de phosphore sur la surface interne du verre transforme les radiations ultraviolettes en lumière visible. 2. Propriétés chimiques: Le mercure métal Hg° possède un nombre atomique de 80 et un poids atomique de 200.59. Il lournit : des ions mercureux : , ions mercuriques: . et. des + Hg -Hg + 2 + ou Hg2 „ ++ Hg correspondant respectivement à: des composés mercureux : et a des composés mercuriques: Hg2 X 2 (Hg 2 Cl 2 , Hg2 SOj» . . . ) Hg >'2 (HgS, HgCl 2 Il donne des dérivés organométalliques: . ..) R-Hg-R, très réactifs, et des dérivés mixtes: R-Hg-X, selon le procédé dit de mercur,i~ t ion. Le mercure s'oxyde lentement à l'air. .../13 11 11 est insoluble dans l'eau, les solvants habituels, et les alcalins. Il n'est pas -irta ;ué par les acides chlorhydrique et sulfurique dilués, mais se dissout dans l'acide nitrique dilué et chaud, et dans l'acide sulfurique concen ré . Une des particularités du nu rcure est cell'j de former, avec les autres métaux, des alj. lages -, spécifique ment a ppelés amalgames. Ces amalgames sont obtenus par dissolution des métaux (notamment l'or et l'argent) dans le mercure, parfois à la température ordinaire, ce qui en fait une utilisation de choix dans la récupération industrielle d'autres métaux, et surtout des métaux précieux. Cette propriété était ^ i à utilisée du temps des grecs et des romains. Ces amalgames se décomposent facilement sous l'influence de la chaleur, donnant du mercure et le métal cons 1i t uant. Ces amalgames, solid' 'ni liquides, ont d'au- tres applications, aussi variées que: obturations dentaites - piles électriques étamage des glaces . . ./I 1?. dorure - fabrication de mastic s meta 11i ques A noter que le mercure ne forme pas d'amalgame avec le platine et le fer, d'où l'utilisation de ce dernier comme contenant pour le mercure. C Les différents composés minéraux. Il existe de très nombreux sels inorganiques dont les propriétés physico-chimiques varient considerablemen L d'un sel à l'autre. qu'ils sont plus solubles. Ils sont d'autant plus toxiques Nous avons regroupé dans le Tableau I les sels mercureux et mercuriques les plus utilises, avec leurs principales utilisations. ./I 3 Ill INDUSTRIES ET PROFESSIONS MANIPULANT DU MERCURE. A Extraction et raffinage du HgS ou cinabre. Il n'existe pas de mine de cinabre au Québec. La seule mine canadienne se trouve à p inchi Lake en Colombie Britannique et son exploitation ne se fait que lorsque l'extraction est rentable, compte tenu de la demande du marché. B Traitement des autres minerais. Au Québec, les teneurs en mercure des minerais exploités sont faibles et le risque d'intoxication par le mercure s'efface devant les autres risques inhérents à la composition de chacun de ces minerais et à leur mode d'extraction et de raffinage. Il faut, cependant, mentionner que, selon les fluctuations du marché, les propriétaires de fours de grillage utilisent des proportions variables de minerai provenant de l'extérieur du Québec et contenant parfois de hautes teneurs en mercure. Ces fours de grillage n'étant pas prévus pour récupérer le mercure, les risques d'exposition des ouvriers de même ;e la contamination de 1 ' • • nvi ronncrnent exï stent. C Fabrication du chlore ei de la soude caustique . La fabrication industrielle du chlore et de la soude causrique est effectuée dans des cellules à anodes de graphite et à cathode de mercure, par electrolyse du chlorure de sodium selon la réaction: ? NaCl + 2HP, Cl2 + 2Na(Kg) 2 Na(lip> 2H 2 0 2NaOH + !io + Chaque cellule contient environ une tonne de mercure et il y a plu:, d'une dizaine de cellules, en général, par usine. .e risque [jour1 les travailleurs est évidemment celui d'un-.- surexposition aux vapeurs de mercure (Smith, R.G., 1970). il existait encoy- r' -rtritr.t, au chlore1 fit de soude caustique. j . >.•, ;4 u ' 11 • Celle de la compagnie Aluminium du Canada est maintenant fermée. Autres usines: - Domtar Pulp and ? a r. f- r Ltd. (Lebel-sur-Quévillcn) - Canadian Industries Ltd. (Shaw:nigan) - Standard Chemical Ltd. (Beauharnois) Fa bric at ion d ' appar<> i 1 1 age iues . Fabrication de lampe., *i incandescence, de tubes luminescents ou fluorescents, ex.- S y1va ni a E!e c t r ic (Drummondville) - Canadian Westinghouse (Troi s-Rivières) / 15 15. de lampes, tubes, et ampoules électriques, de lampes de radio, télévision et pour appareils de rayons X. Fabrication, entretien et réparation de redresseurs de courant et de lampes à vapeur de mercure. L'ex- position se fait surtout par inhalation, mais peut aussi se iaire par contact (Bidstrup, P.L., 19 51). E Fabrication d'appareillages mécaniques. Fabrication, entretien et réparation de ther- momètres ou d'autres instruments de laboratoire: ex.- Canadian Medical Instruments (Montréal) Bailey Meter Co. Ltd. (Pointe Claire) Foxboro Co. Ltd. (La Salle) L'exposition se fait par inhalation et contact (Danziger, S.J., 1973, Jenny, G., I960, Vroom, F.W., 1972). F Utilisations diverses. Fabrication de piles électriques et d'accumu- lateurs . ex.- Compagnie Cipel Carbone Co. Ltd. (Valleyfield) - Mallory Battery Co. Ltd. (Montréal) ./IS Recuperation du mercure des vi> ill es batteries . Distillation du mercure et sa récupérâtien des résidus industriels. ex.- Anachemia Chemicals Ltd. (Ville St-Pierre) MeArthur Chemical (Lachine) Certains autres travaux en!rainant t!/ori lu'"'1 :it uni !; i • ; i au r.eï run •. Il est cependant difficile d'éva- luer actuellement l'existence de ce risque dans le contexte québécois. D'autres types de manipulations n'existent p'Jus que sur une base artisanale: Dorure, argenture, étamage, bronzage et darnasquinage à l'aide de mercure ou de sels de mercure. Fabrication des composés et amalgames du mercure. Récupération de meraux amalgamés. Fabrication de couleurs et de colles contenant des composés de mercure. Préparation et c<... 1 i t i onnement de ] rodu i ' pharmaceut iques à base de mercure et ses composé:;. Fabrication de bijoux artificiels. Préparation de matières premières pour la chapellerie; travail du feutre obtenu par secrétage ; natural sat ion d'animaux au moyen de sels de mercure. 17 . G Autres professions exposées de façon plus ou moins sévère. 1. Les cabinets de dentistes: Les dentistes et leurs assistants sont exposés au mercure par contact cutané et par inhalation lors de la préparation et la manipulation d'amalgames dentaires. (Bat fir,tone, G.C., 1976 , Iyer, K., 1976 , Merfield, D.P., 1976 ). 2. Dans les divers laboratoires: Tout personnel qui effectue des travaux au moyen d'appareils ou d'instruments contenant du mercure s'expose à une contamination par les vapeurs de mercure s'il ne prend pas de précautions adéquates surtout lorsqu'il y a bris des appareils et dispersion du mercure sur un meuble ou sur le sol. ex.- Laboratoires scientifiques Laboratoires d'hôpitaux Laboratoires de police Laboratoires d'institutions d'enseignement Laboratoires improvisés dans des domiciles 3. Pfc.sonnel d'entretien: Dans les phares, notamment lors du nettoyage du système de lentilles. Dans les édifices. . . ./J8 ex.- Dans le seul îdifiee de 11Hyctro-Quobec, 2,000 tubes sont changés par année sur un total de 44,SO Chacun de ces tubes contient envi L'on 100 mg de mercure. (Rapport du S.P.E., 1973) 4 5 . IV ABSORPTION, DISTRIBUTION, SORT ET EXCRETION DU MERCURE » Le mercure n'est pas nécessaiic au métabolisme normal de l'homme. Il est donc considéré comme un élément non essentiel. A Absorption. 1. Par inhalation: La très grande volatilité du mercure, même à température ambiante, fait de cette voie la principale porte d'entrée du métal dans l'organisme. Les vapeurs de mercure n'étant que peu solubles dans l'eau, elles peuvent atteindre facilement les alvéoles pulmonaires. A ce niveau, le fait qu'elles soient non polaires et très facilement solubles dans les lipides favorise une absorption rapide dans la circulation pulmonaire. En fait, environ 80f; du total des vapeurs inhalées sera absorbé. Rappelons qu'un adulte normal respire environ 10 M3 d'air par jour. Par conséquent, si l'air am- biant contient 0.01 mgde mercure/M 3 , la personne exposée inhalera C . i r,g Hg par jour et, par conséquent, en absorbera 80" ou i!.(!>•: njr. Quant aux composés mercuriels inorganiques, ils, ne peuvent être absorbés par cette voie que s'ils sont sous forme de poussières ou d'aérosols. sorption de ces sels n'est pas connu. Le pourcentage d'abLes mêmes conditions . /20 20. prévalent pour les dérivés organiques du mercure. 2. Par ingestion: Sous sa forme élémentaire, le mercure n'est à peu près pas absorbé par voie digestive. L'inges- tion de mercure métallique ne pose donc pas de risques pour la santé. Les sels inorganiques du mercure sont, par ailleurs, absorbés dans des proportions variables suivant leur degré de solubilité et leur état d'ionisation. Cette absorption ne dépasse cependant pas 20% dans la plupart des cas. Les sels mercuriques sont fortement corrosifs pour les muqueuses digestives et la plus grande partie de ce qui est ingéré est évacué spontanément par les vomissements. La portion qui persiste dans l'estomac peut cependant être suffisante pour entraîner un tableau d'intoxication aiguë. Quant aux sels mercureux, ils sont moins solubles et leur absorption n'entraîne que rarement des problèmes d'intoxication . Les dérivés organiques du mercure et notamment les dérivés alkyls, pour leur part, sont presqu'entièrement absorbés lorr de leur passage dans le tube digestif. 3. Absorption cutanée: Bien que l'on sache que le mercure élé- mentaire puisse pénétrer dans l'organisme par voie cutanée, . . ./21 21 il est difficile d'évaluer le pourcentage de cette absorption. Les chirurgiens qui appliquaient jadis des pommades à bane de mercure pour le traitement de "lu syphilis souLfraient d'intoxications mercurielles (Ramazzini, B. , 1940). Plus tard, l'application d'onguents à base de sels mercuriel a entraîné des signes d'intoxication (Young, E., 1960). B' Distribution et sort du mercure. 1. Dans le sang: Une fois qu'il a pénétré dans le sang, le mercure élémentaire est rapidement oxydé en ions mercureux, puis en ions mercuriques, qui représente 3a forme potentiellement toxique. Cette oxydation se fait selon la réaction suivante : 2Hg° + Hg + - Hg + + 2Hg + + Cette réaction se produit surtout dans le sang et notamment dans les globules rouges, mais peut aussi survenir dans les tissus (Clarkson, T., 1972). Cependant, bien qu'elle soit rapide, cett réaction prend plusieurs minutes à se réaliser. C'est pour- quoi le mercure élémentaire persiste suffisamment longtemps dans la circulation pour atteindre tous les tissus et organes du corps. Comme cette forme est très fortement lipo- soluble, elle permet au mercure (Hg°) de pénétrer à travers la barrière hémo-encéphalique de même qu'à travers la barrière placentaire. Ce fait est très important surtout lors de l'ex- position chronique ou répétitive aux vapeurs de mercure (Magos, I,., 1967). La transformation d'ions mercuriques en me m u r e élémentaire ne se fait que sur une très petite échelle (Clarkson, T., 19 64). Quant aux sels mercureux, ils sont eux aussi transformés en ions mercuriques après leur absorption. Les ions mercuriques, peu importe leur provenance, vont alors se lier de façon réversible aux protéines plasmatiques ainsi qu'aux globules rouges, ce qui fait que seulement 1% du mercure inorganique existe sous forme libre (Berlin, M., 1963). Cette liaison se fait principalement par le biais des groupements thiols (SH) des protéines et des autres molécules. Après expedition aux vapeurs de mercure, le rapport mercure piasmatique/ mercure globulaire est de 1:1 alors que suite à l'ingestion de sels inorganiques par voie orale, ce rapport est de 2.5:1 (I.undgren, K.D., 1967). Dans le plasma, le mercure peut se trouver sous ]es trois formes suivantes (T.G.M.A., 1973): liaison forte avec une métalloprotéine piasmatique spécifique; liaison facilement dissociable avec des ^ protéines plasmatiques, telle l'albumine ; liaison avec des protéines de faible poids moléculaire et facilement diffusibles; C'est ce qu'on appelle la fraction piasmatique diffusible. . . . /23 25. C'est surtout parce que l'ion mercurique c:; I changeable, dam; ces deux dernières catégories de pro' ' ' ' '1 ' ' ' '1 r,r r|Ul ' "' ' ' ' ler ' et notamment le B.A.L., peuvent Permettant 1 ' é 1 irn inar ion du mercure minéral de I 'organ Lsme. 2. Dans les tissus; A partir du sang, le mercure va ensuite ; e distribuer i s, aux différents tissus et organes du corps. Comme nous l'avons mentionné précédemment, contrairement aux ions mercuriques, le mercure élémentaire pénèlr. rapidement au niveau du cerveau. pénétré d,in:, cet orfaiv vital U ' il 11 oG Une fois qu'il a t^on,^ transforme en puis mercuriques et se lie aux protéines. LORS mercureux La sortie du mer- cure, par la suite, se fera très lentement, et ceci explique le risque d'accumulation du toxique à ce niveau à la suite d'exposition chronique ou répétitive. Le même phénomène se produisant au niveau i'-î aeent a, on peut arriver de cette façon à une accumulation du rneretire au niveau du foetur . Pour ce qui est des ions mercuriques, la : on tissulaire se fera de façon différente dans les différents compartiments de l'organisme. . /24 24. Les compartiments impliques dans le transport du metal du sang aux tissus peuvent être résumés dans le tableau simplifié ci-dessous. (V | LUI - i ;u ! aires traction liée îux protéines intracellulaires "non di.ffusibles" fraction intraeellulaire "diffusible" Espaces tissulaires fraction liée aux protéines extracellulaires "non diffusibles" A Plasma fraction liée aux protéines plasmatiques "non diffusibles" fraction liquifraction :dienne intersti- ~ — piasmatique tielie (extra- X "diffusible" cellulaire) "diffusible" Globules "rouges fraction liée aux protéines globulaires "non diffusible; fraction intra— globulaire "diffusible" Modèle proposé pour l'échange du mercure entre le sang et les tissus (adapté de T.G.M.A.3 1973 et de Rothstein, 1973). ./ 25 25 . D'une façon générale, on peut dire que la distribution dans les organes se fait: dans les reins principalement. Aussi de fortes concentrations ont été retrouvées dans cet organe, quelle quo soit la voie d'introduction du métal; dans le foie, la rate, le cerveau et les autres organes (thyroïde, etc...) (Suzuki, T., 1966). Suite à l'administration d'une seule dose orale de mercure mercurique, il a été démontré que la i vie du mercure dans le sang est de 20 jours alors qu'elle eut de MO jours pour l'organisme entier (Hiettinen, K.J., 19 72 ) . Chez les mineurs ayant été exposés à de hautes concentrations de mercure pendant des années, et décédés plusieurs années après la cessation de l'exposition, on a trouvé de fortes concentrations en mercure dans le cerveau, nettement supérieures à celles des autres viscères, excepté le rein (Takahata, M., 1970, Watanabe, S., 1971). r Excrétion du mercure. L'excrérion du mercure inorganique se fait par deux voies principales: Par le tube digestif, dans les selles. Par le rein, dans l'urine. . /24 Les autres voies d'excrétion comme la sueur, l'air f-xp j ré, les ongles, les cheveux, le lait maternel, ne jouent qu'un rôle minime dans le p-ocessus d'élimination du mercure. La proportion de mercure qui sera excrétée dans les selles ou dans l'urine est fonction de la voie d'absorption et de la dose administrée. Cependant, à l'état d ' étj u L 1 i. Dre, ces deux voies d'excrétion semblent être à peu près d'égale importance. 1. Excrétion fécale: Cette voie est favorisée suite à une ingestion orale de se]3 de mercure, lorsque de fortes doses :,0nL a ',n,inhtrfl0S et " P^se initiale de l'élimination (Nordberg, G., et Skerfving, S., 1972). Il existe probable- ment un mécanisme de transport actif du mercure à travers la muqueuse du tube digestif, car ni la sécrétion salivaire, ni l'excrétion par la bile ne permettent d'expliquer la quantité de mcrvurc éliminé par cette voie. 2. Excrétion urinaire: Un simple mécanisme de filtration glomé- rulaire ne permettrait pas d'expliquer entièrement l'excré- tion rénale du mercure (Clarkson, T.W., 1972, Nordberd, G. 6 Skerfving, S., 1972). Il existerait, en plus, une sécré- tion active du mercure au niveau du tubule proximal du rein (Clarkson, T.W. E Magos, L., 1970). . . . /35 Ce mécanisme tubulaire aurait un rôle significatif dans l'excrétion rénale du mercure chez l'humain (Vostal, J. , 1972 ). Dans le rein, une part importante du mercure est présenté dans une fraction protéinique du poids moléculaire de 11 000 environ (Jacubowski, 1970) qui s'est avérée ôtre semblable à la métallothionéine l(r/o). (Wisniewska, J.H Ceci amène l'hypothèse d'un mode de transport et de détoxii ical ion du mercure par une liaison à une métallothionéine, c3e la même façon que pour' le cadmium (Friberg, 1 97 2 ) . Ces deux métallothionéines seraient par ailleurs de formation différente (Shaîkh, 1975). La capacité de fixation de la métalloprotéine dans le rein augmenterait avec une exposition répétée au mercure à cause de la stimulation de la biosynthèse de la protéine (Piotrowski, 1973). 11 semble, par ailleurs, probable que 10 murrure stimule la biosynthèse de la métallothionéine uniquement dans le rein, et non dans le foie, comme le fait le cadmium. . / 28 V RETENTION, ACCUMULATION ET PHYSIOPATHOLOGIE DU MERCURE. A Généralités et définitions (T.G.M.A., 1973) Dans l'organisme, l'état d'équilibre est atteint lorsque l'apport et l'élimination du mercure sont équivalents. C'"st ce qui se passe par exemple lors d'expositions répétées à de laibles doses de vapeurs mercurielles. Sous le nom de concentration critique cellulaire, on désigne le stade d'atteinte cellulaire, réalisé lorsque des changements fonctionnels indésirables, réversibles ou non, se produisent dans la cellule, lors de l'accumulation du métal. La concentration cellulaire suffisante pour causer la mort de la cellule est définie comme la concentration létale pour chaque cellule. La concentration critique d'un organe est déf inie comme la concentration moyenne dans cet organe, au momenl. où chacune des cellules atteint la concentration crit x ("j u e . Cette concentration critique d'un organe peut être considérablement plus grande ou plus petite que la concentration critique pour une cellule particulière. . . ./29 29 Le eoneept d'organe critique fait référence à l'organe particulier qui le premier atteint la concentration critique de métal. L'organe de l'accumulation ou de la rétention la plus grande n'est pas nécessairement l'organe critique. On exprime en général le taux d'élimination d'un métal par sa demi-vie biologique dans le corps entier, qui dorme une idée de la circulation du mercure. Mais il doit surtout être exprimé par la demi-vie dans les organes critiques, qui est importante pour l'accumulation et le risque d'intoxication lors d'expositions répétées. Devant le peu de données concernant la rétention et l'accumulation des sels mercureux, on étudiera surtout les sels mercuriques et le mercure élémentaire. B Rétention et accumulation. 1. Sels mercuriques: L< taux d'élimination du mercure est fonction des doses administrées, les fortes doses étant plus vite éliminées que les petites (Ulfarson, U., 1969). /3 71 . La demi-vie biologique dans le corps entier du mercure mercurique, après injection intraveineuse, suivrait trois courbes exponentielles avec, comme demi-vie respectives, selon l'animal d'expérience de 3 à 5 j pour la première courbe, de 25 à 40 j pour la deuxième, et de 90 à 100 pour la dernière (Berlin, M., 1966). La demi-vie biologique du corps humain ent Ici1 après absorption orale d'une seule dose de mercure inorganique serait de 30 à 60 j (Rahola, T., 1971) ou de M 2 jours ( M i e !" i i non , J . K . , 19 7 2 ). Lorsqu'on étudie la demi-vie biologique du mercure lié ou non avec des protéines sur deux groupes de personnes, les unes absorbant du nitrate mercurique en solution dans l'eau, les autres du nitrate mercurique lié à des protéines de foie de veau, on ne note pas de différence significative entre les résultats obtenus; ceci laisse à penser qu'un même processus de métabolisation a été utilisé (Rahola , T. , 1971) . Si on considère les organes critiques, on retrouve habituellement, après exposition aiguë ou chronique aux sels mercuriques, les concentrations les plus éLevées dans le rein; cependant certaines parties du cerveau atteignent des taux élevés. . . . / 49 31 Les données animales et les rares observations humaines paraissent confirmer l'existence d'un risque important d'accumulation de mercure dans le rein, en cas d'exposition prolongée aux sels mercuriques (Nordberg, G., 1969 ) . Il semble que le sang ne soit pas un bon témoin de cette accumulation rénale, ni d'ailleurs de l'accumulation dans les autres organes critiques (Nordberg, G., 1969 ) . 2. Mercure élémentaire: Comme nous l'avons vu précédemment, l'accumulation du mercure dans le cerveau est plus importante pour le mercure élémentaire que pour le mercure mercurique . Chez l'animal (rat) exposé à des vapeurs de mercure, il a été retrouvé, six mois après l'arrêt de l'exposition, 20% du mercure dans le cerveau et seulement 1,5% dans le rein (Gage, J.C., 1961). De plus, le mercure reste accumulé dans certaines parties du c-rveau plus longtemps que dans d'autres. C Physiopathologie du mercure. Le mercure interfère avec les processus biochimiques del'organisme de façon diffuse et non spécifique. . ../32 45. Il possède une grande affinité pour groupements thiols (SH) des molécules sur lesquels il se fixe de façon réversible. Le mercure est donc théoriquement capable d'inhiber tout système enzymatique contenant des groupements thiols libres. Cet effet peut se produire dans tous les tissus et dans tous les organes, mais sera locale en mercure. fonction de la concentration C'est pourquoi les notions de concentra- tions critiques et d'organes critiques sont si importantes (Clarkson, T.W., 1968). A très forte concentration, le mer- cure produit une précipitation des protéines. 1. Le cerveau : Il a été noté que de grandes différences de concentrations existaient dans les différentes régions du cerveau tant chez l'homme (Takahata, N., 1970, Watanabe, S., 1971) que chez l'animal (Berlin, M., 1969, Cassano, G.B., 1969, Nordberg, G., 1969). Une étude récente montre qu'après exposition à long terme aux vapeurs de mercure, on note deux f'oî.s plus de mercure dans le cervelet que dans le reste du cerveau (Guccione, P., 1975). Certains noyaux gris centraux captent aussi le mercure de façon privilégiée (Berlin, M., 1969). Ces facteurs peuvent nous aider à comprendre le tableau clinique qui peut survenir suite à une exposition chronique aux vapeurs de mercure. ./ 3 3 33. 2. Le rein : Les études expérimentales ont démontré que le mercure se concentrait principalement au niveau du cortex et de la zone sous-corticale du rein (Bergstrom, A., L9.S8). A ce niveau, il semble y avoir une localisation pré- férentiel! e par les cellules du tube contourné proximal. IMP contre, dans la portion droite de ce tube proximal, dans le tube distal et dans les anses de Heulé, on n'a retrouvé que de faibles concentrations de mercure 3 968). (Cafruny, E.J., Lors de l'intoxication aiguë, on note d'abord une nécrose du tubule proximal suivie d'une desquamation de l'épithélium tubulaire qui est évacué vers la portion plus distale des tubules. Cette phase est suivie d'une régénéra- tion cellulaire de la paroi des tubes proximaux à partir de Ln membrane basale. Cette nécrose des tubules proximaux, avec blocage par les débris cellulaires (cylindres) du nephron distal, conduit à l'insuffisance rénale aiguë et à 1 'anur.ie . Une calcification tardive du tissu nécrotique peut survenir dans certains cas, mais la récupération fonctionnelle survient dans la plupart des cas (Stejskal, J., 19bS). Le glomérule ne montre pas d'atteinte organique. Cependant, l'étude ré- .nte d'un cas d'intoxication aiguë par le mercure mercurique a permis de mettre en évidence une augmentation anormale et parallèle de l'albumine et des B? globulines urinaires durant les premiers jours de l'inI ox icat ion (Pesce, A.J., 1977 ). TABLEAUX CLINIQUES D'INTOXICATION. Jusqu'à il y a quelques années, on caractérisait trois formes d'intoxications mercurielles. L'intoxication aiguë: - thérapeutique : lavages urétraux ou vésicaux à 1'oxycyanure de mercure. - accidentelle : ingestion par méprise d'une solution de sublimé ou d'oxycyanure . - volontaire : par sublimé essentiellement. L'intoxication subaiguë médicamenteuse, c'est-àdire les incidents ou accidents provoqués par l'emploi de composes mercuriels dans un but thérapeutique (traitement de la syphilis par exemple). L'intoxication chronique professionnelle par inhalation de vapeurs de mercure. La disparition progressive de l'utilisation des composés mercuriels en thérapeutique, le désintérêt des candidats au suicide pour le sublimé, ont quelque peu modifié les tableaux classiques. L'intoxication aiguë ne se voit plus guère que lors d'une ingestion accidentelle de sels de mercure ou de l'inhalation en quelques heures de fortes concentrations de mercure en milieu industriel ou domestique. . . . /35 35. L'intoxication subaiguë ne représente plus que la forme atténuée de l'intoxication aiguë par vapeurs mercurie]les. Le tableau classique de l'intoxication chronique professionnelle a beaucoup changé, les conditions d'hygiène industrielle s'étant beaucoup améliorées depuis quelques décade s. Il est à noter que l'intoxication professionnelle par les dérivés organiques du mercure peut se produire, mais elle tend à se raréfier du fait de l'utilisation de moins en moins importante des dérivés organo-mercuriels dans l'industrie. Elle ne sera pas décrite ici. A Intoxications aiguë et subaiguë par inhalation de vapeurs de mercure. Rare, elle se produit en milieu professionnel lors d'un accident, ou le plus souvent lors de non respect des conseils de prévention, ou par ignorance du risque d ' exposit ion. On peut citer: incendii dans les usines d'extraction (Idria, 1803); la récupération du mercure à partir de batteries usagées; 36 . nettoyage intérieur au fond d'une cuve, où se trouvait du mercure, (Milne, J. , 1970 ) ; tentative de récupération du mercure échappé d'une machine à vapeur de mercure (Tennant, R., 1961); nettoyages des systèmes de lentilles de phares tournants; etc. 1. Dans la majorité des cas, l'atteinte pulmonaire donne le tableau clinique: Elle se caractérise par une infiltration diffuse, interstitielle des poumons. Cliniquement, elle provoque de la dyspnée, du tirage, de la cyanose et peut évoluer vers une détresse respiratoire franche. L'aus- cultation pulmonaire demeure normale, sauf lorsque le tableau évolue vers l'oedème pulmonaire aigu. Radiologique- ment, on note une accentuation de la trame pulmonaire diffuse et bilatérale. Par la suite, on peut noter un flocon- nement, notamment au niveau des bases pulmonaires. D'autres symptômes peuvent se rencontrer, isolément ou associés: sation de faiblesse, céphalées, douleurs lombaires, sen- notamment au niveau des membres infé- rieurs, douleurs abdominales, parfois nausées et vomissements. 2. L'évolution est variable: Si l'exposition cesse, la régression du tableau clinique se fait en quelques heures, dans la plupart .../37 37 des cas. Les cas les plus sévères peuvent évoluer vers une pneumopathie toxique. Des complications à type de pneumothorax épanchement pleural, un oedème aigu pulmonaire ne sont pas ra re s. L'atteinte rénale est rare, sauf s'il y a exposition prolongée ou répétitive. Intoxication chronique par vapeurs mercurielles. Elle survient presque exclusivement en milieu industriel ou professionnel. 1. Le tableau clinique habituel: Se caractérise par une atteinte poly- :;y:;témi(jue avec emphase sur les signes nerveux. s) atteinte neuro-psychiatrique: Les syndromes psychopathologiques dus à 1'intoxication mercurielle accompagnent ou précèdent généralement les phénomènes moteurs. neurasthénie mercurielle: Ce syndrome initial, qui peut durer des années est fréquemment caractérisé par de la neurasthénie avec fat igab.il ité, force musculaire diminuée, manque de gaieté, diminution de la libido, insomnies. . . ./3 Le passage peut se faire alors lentement vers une forme de modifications psychiques de l'intoxication chronique, dénommée éréthisme mercuriel et apparaissant, en même temps ou peu après le tremblement mercuriel (Gertsner, H,B., 1977). tremblement mercuriel: Il s'agit d'un tremblement intentionnel, plus marqué en fin de mouvement, influencé par les émotions, la fatigue, l'alcool, disparaissant durant le sommeil. Ce tremblement donne une modification assez caractéristique de l'écriture du sujet. (1 ) (.2) ,/D-LA* - fi' 'Z- CJJIOIAM/QJUZ Figure Ecriture de L.R. /7'ff Comparaison entre le 22/11/74 (1) et le 12/12/74 (2) ./ 39 Dans les cas les plus sévères, il peut entraîner une incapacité importante du sujet, et s'étendre à tout le corps, en produisant des troubles marqués de la démarche. Il peut disparaître, après l'arrêt de 1 ' exposition. Des études récentes semblent suggérer que le tremblement décroît de façon parallèle à la chute des taux sanguins, après arrêt de l'exposition (Wood, R.W. , 1973); et qu'une relation existe entre le contenu en mercure du système nerveux central et le tremblement (Fukuda, K., 19 71). éréthisme mercuriel: (éréthismus mercurialis, Kussmaul, A. 1861 ) Les troubles décrits sous le nom d'éréthisme mercuriel sont moins spécifiques de l'intoxication mercurielle, que les tremblements, mais se retrouvent à un degré variable dans presque tous les cas. Ils se caractérisent par de l'irritabilité des sautes d'humeur, des réactions dépressives, des difficultés de concentration, de troubles mnésiques, une perte de confiance en soi, de l'angoisse. autres manifestations plus rares: hyper ou hypoesthésie, hyperréflexie, céphalées. Outre le tremblement intentionnel, d'autres .. . AO symptômes cérébelleux peuvent se voir; dysmétrie avec diadococinésie, parfois nystagmus, troubles de la parole, lente, monotone, scandée (c'est ce qu'on appelle le psellisme mercuriel). Le tableau clinique peut d'ailleurs être confondu avec celui de la sclérose en plaque. Des signes extrapyramidaux comme faciès figé, rigidité musculaire, exagération du réflexe de posture peuvent aussi se voir. b) atteinte oro-pharyngée : Stomatite et gingivite: Elles débutent le plus souvent par une sensation de goût métallique. oedématiées, et douloureuses. Les gencives deviennent rouges Ce phénomène inflammatoire s'accompagne souvent de pyorrhée, surtout si l'hygiène buccale laisse à désirer. Par la suite, il y a déchaussement progressif des dents qui peuvent même tomber spontanément. I.er; nécroses maxillaires ne se voient plus. Salivation excessive: Le liséré mercuriel, signe de l'excrétion salivaire du mercure est de couleur noire, siégeant à l'implantation des dents, plus étendu que le liséré saturnin, il est rare. 41. Ces phénomènes régressent habituellement après arrêt de l'exposition. e) troubles gastro-intestinaux: On note principalement une perte d'ap- pétit;, qui peut s'accompagner ou non de perte de poids. Le patient peut aussi se plaindre de troubles digestifs vagues et non spécifiques (digestion difficile, vomissements, gas- trite. . . ) . Au point de vue intestinal, on parle d'entérocolite mercurielle, avec, en général, constipation, douleurs importantes, parfois entérocolite ulcéreuse (Aaron- son, R.M., 1973 ) . d) a11 einte rénale : Elle débute le plus souvent par l'appa- rition d'une protéinurie qui cesse le plus souvent spontané- ment avec l'arrêt de l'exposition. Certains auteurs pensent que cette protéinurie est l'expression d'une hypersensibilité ou d'une i diosyncrasie au merc nyi e. L'atteinte rénale peut cependant évoluer vers, un syndrome néphrotique (Gautier, M., 1968). .../42 71 . e) atteinte oculaire: Connue sous le nom de mercurialentis ou d'hydrargyrosis lentis, une coloration brun-grisâtre de la paroi antérieure de la cornée, observée avec une lampe à fente, peut se produire dans certains cas, après exposition de plusieurs années aux vapeurs de mercure (Atkinson, W. , 19 M 6 ) . Ce serait plus un symptôme de l'exposition professionnelle qu'un symptôme d'intoxication. 2. L'évolution : L'évolution de ces troubles est fonction de leur ancienneté: réversible si ceux-ci sont reconnus précocement et si le sujet est écarté de l'exposition ou ri sque. irréversible avec constitution de séquelles définitives si une évolution prolongée leur a laissé le temps de se développer. Exceptionnellement de nos jours, l'évolution se fait vers la cachexie mercurielle. 3. Le micromercurialisme I.M., 1969 ) : (Trachtenberg, Un syndrome asthéno-végétatif a été décrit par les auteurs des pays de l'est comme étant . . . / 49 43. imputable a une exposition de longue durée à des concentrations relativement faibles de mercure. Les résultats scientifiques de ces études ne sont pas encore disponibles à un degré suffisant pour que nous puissions nous prononcer sur1 leur validité. Cependant, d'autres études sur les ef~ lets neurologiques et du comportement ces ouvriers exposés aux vipeurs de mercure laissent présager qu'il pourrait fort bien exister des effets néfastes du mercure sur le système nerveux à des niveaux d'exposition considérés précédemment comme non dangereux (Chaffin, D.B., 1974). C Les autres tableaux cliniques de l'intoxication par le mercure. Ils se voient rarement dans le cadre d'une pathologie professionnelle. 1. Intoxication aiguë par les sels mercuriels: Elle peut se voir lors d'une ingestion accidentelle ou volontaire. a) Le tableau clinique immédiat est dominé par l'atteinte digestive: sensation de brûlure au niveau de la bouche, du pharynx et du tractus oesophago-gastrique, nausées, vomissements, diarrhée parfois sanglante, douleurs abdominales. S'il y a une absorption suffisante de mercure: albuminurie, hématurie, oligurie. ...744 4M b) Le pronostic est principalement dominé par l'atteinte rénale. Les cas les plus graves peuvent évoluer vers l'insuffisance rénale aiguë. Une insuffisance rénale résiduelle peut se voir dans les cas d'anurie prolongée par intoxication mercurielle (Legrain, M., 1968). Les décès, lorsqu'ils surviennent, sont généralement secondaires à un collapsus cardio-vasculaire. Les sténoses oesophagiennes cicatricielles sont rares. 2. Pénétration sous-cutanée ou intramusculaire de mercure métallique; Elle peut survenir lorsque le mercure métallique est manipulé au contact d'une plaie. Outre les manifestations locales: in- flammations, abcès (Arcadio, F., 1967), la pénétration souscutanée du mercure métallique peut entraîner une intoxication systémique (Maranzana, P., 1965) et même mortelle (Johnson, H.R.H.,1967). 3. Pénétration intra-veineuse ou intraartérielle de mercure métallique: Cette forme d'intoxication grave, ren- contrée autrefois lors d'un prélèvement artériel avec la ./45 45 . sonde de Cournand (Buxton, J.T., 1965) ou lors d'injec- tions volontaires, ne semble pas avoir été décrite en pathologie pro fessionnelle. 4. Phénomènes d'hypersensibilité au mercure et à ses sels: Les réactions cutanées au mercure (Miedler, L.J., 1968) et à ses sels peuvent aller de l'érythème léger au rash morbiliforme; des éruptions de type papulaire ou vésiculaire suivies de desquamation peuvent se rencontrer. Ces réactions cutanées peuvent être accompagnées de signes généraux (fièvre, prostration). Des réactions systémiques ont été décrites chez des personnes ayant subi des obturations dentaires (amalgames mercure-argent). Mentionnons simplement qu'une des manifestations les plus connues de cette hypersensibilité est décrite chez les enfants sous le nom d'acrodynie ("extré- mités douloureuses") (Duperrat, B., 1971). ./ 4 6 VII RELATION ENTRE LE NIVEAU D'EXPOSITION ET LES EFFETS DU MERCURE. A Problématique. Comme nous l'avons démontré dans les pages précédentes, la toxicité, pour l'homme, du mercure et de ses dérivés est relativement bien connue. Cette toxicité est suffisamment bien établie pour que notre première réaction, lorsque l'on envisage la mise sur pied d'un programme de surveillance des ouvriers exposés à ce toxique, devrait être de se demander si tous les efforts techniques ont été faits pour faire disparaître, sinon réduire à sa plus faible expression, le contact entre l'ouvrier et ce produit. Nous prenons trop souvent pour acquis la nécessité absolue d'utiI; ]iser tel ou tel produit chimique sans vraiment mettre dans l'autre plateau de la balance le risque pour la santé des travailleurs que son usage représente. On accepte trop fa- cilement la notion de risque sans se questionner sur "La détermination aussi précise que possible du risque causé par toute activité humaine, ou toute exposition à des produits chimiques, est bien distincte de la fixation d'un niveau de risque admissible" (Conseil des Sciences du Canada, 1977). De plus, les personnes les plus exposées sont le plus souvent les moins bien informées de la nature, . A7 du niveau et de la sévérité du risque. Les vapeurs de mer- cure représentent un bel exemple de cet état de fait. Le mercure peut exister, dans l'air ambiant, à des concentrations hautement toxiques sans qu'il ne puisse être détectable ni par l'oeil, ni par l'odorat. Il représente donc un ris- que quasi philosophique, sauf pour les gens bien informés. Ceci est très différent du mercaptan, par exemple, dont l'ode ur insupportable est vite décelée par qui que ce soit» De plus, les effets néfastes du mercure ne se font pas nécessairement sentir dans l'immédiat, sauf lors d'exposition massive, mais peuvent n'apparaître qu'après plusieurs mois ou même plusieurs années d'exposition. De là, l'importance primordiale des programmes de prévention, tant sur le plan de l'environnement que sur le plan biologique. B Surveillance environmentale -vssurveillance médicale et biologique. Bien que les vapeurs de mercure ne puissent pas être détectées directement par l'homme, il existe des appareils qui permettent d'en déterminer la présence dans l'air ambiant et de la quantifier. Il existe deux méthodes pour effectuer ces mesures: a) Méthodes directes; immédiates, s'effec- tuant sur les lieux de travail, et permettant à la fois la détection du toxique et sa concentration, avec le même appareil . 71 . b) Méthodes indirectes, plus longues, mais plus spécifiques, nécessitant le prélèvement d'air sur les lieux de travail et le dosage ultérieur dans un laboratoire . Théori quement, donc, nous n'aurions pas à envisager un programme de surveillance médicale et biologique des travailleurs, puisqu'il suffirait d'établir une norme valable pour l'air ambiant et de mesurer les taux de mercure dans l'air à suffisamment d'endroits dans l'usine et suffisamment souvent pour éviter que ces normes soient dépassées. !1 n'est pas nécessaire d'avoir été longtemps en con tact avec ce problème dans notre milieu pour réaliser l'utopie d'une telle hypothèse. Premièrement, il n'existe aucune unanimité entre les différents pays sur ce qui devrait être la norme : 0.10 mg/M 3 Symposium International de Stockholm en 1968 0.05 mg/M 3 Russie 0.01 mg/M 3 Allemagne 0.001 mg/M 3 0.05 mg/M 3 Angleterre Québec : : Deuxièmement, les déte 'ruinations des taux de mercure dans l'air ambiant en milieu de travail n'est pas fait sur une base régulière et surtout pas pour tous les postes de travail. Il existe même des industries pour lesquelles ces évaluations n'ont jamais été faites. . . . / 49 49 . Enfin, la très grande volatilité du mercure et sa forte densité (quelques gouttes répandues sur le plancher suffisent pour contaminer l'air au-dessus de la T h V) font en sorte que la contamination de l'air ambiant peut augmenter subitement et de façon imperceptible. C'est pourquoi nous devons envisager un programme de surveillance qui permette, autant que possible, de déceler les signes précoces de surexposition et même d'intoxication des travailleurs. Le problème qui se pose alors réside dans le choix des paramètres tant biologiques que médicaux qui vont le mieux nous permettre d'atteindre cet objectif. C Relation entre les signes cliniques et les taux dans l'air, dans le sang et dans 1'urine. Il existe beaucoup de controverse dans la r'ntuî'o litt scientifique sur la relation réelle entre ces divers facteurs chez les ouvriers exposés aux vapeurs de mercure. Plusieurs raisons permettent d'expliquer ces controverses. La plupart des études réalisées jusqu'à tout récemment utilisaient des approches épidémiologiques pour le moins discutables. Les populations étudiées n'étaient pas toujours comparables entre elles. Les méthodes d'analyse du mercure dans l'air comme dans les milieux biologiques sont variées. . . ./50 74. - Les techniques d'échantillonnage varient considérablement d'un auteur à l'autre. Le nombre de travailleurs étudié est, dans la plupart des cas, restreint et ne se prefe pas à une analyse statistique valable. Les symptômes recherchés sont, pour la plupart, subjectifs et l'appréciation de ces symptômes par les différents auteurs n'est pas la même. Par une analyse plus poussée de ces études, il est cependant possible d'en dégager des conclusions suffisamment précises pour nous permettre d'en arriver à des normes tout au moins préliminaires. Les premières études comprêhensives sur le sujet ont été celles de P.A. Neal et coll. en 1937, 1938 et 19m. Cette étude a d'ailleurs servi à l'établissement de la première norme dans l'air (M.A.C.) qui était alors de 0.10 mg/M 3 . Cette position de l'auteur se basait sur le fait que ce niveau devait éviter l'apparition de signes de mercurialisme chez les travailleurs. Cependant, lui-même rapportait des cas d'intoxication à des niveaux inférieurs à 0.10 mg/M 3 . (Friberg, T., 1972). Une autre étude (Bidstrup, P.L., 1951) portant sur 161 ouvriers travaillant à réparer des appareils . . ./50 de mesure de courant direct a permis d'identifier 27 cas de mercurialisme. Les concentrations de mercure dans l'air ambiant variaient entre 0.05 et 0.3 mg/M 3 . L'étude la plus complète, à date, est, sans contredit, celle de Smith (Smith, R.G., 1970). Cet auteur a étudié 642 travailleurs provenant de 21 usines de chlorealcalis des Etats-Unis et du Canada durant un an. Il a pro- cédé non seulement à des mesures dans l'air, mais aussi à des examens médicaux et à des dosages de mercure dans le saljig et l'urine. Ses conclusions sont les suivantes: Le niveau d'exposition se situait entre 0 et 0.27 mg/M 3 . 85% des travailleurs étaient exposés à des taux égaux ou inférieurs à 0.10 mg/M 3 . Toutes les comparaisons étaient fondées sur l'évidence de relations dose/réponse et des effets significatifs furent observés chez les ouvriers exposés à des taux moyens pondérés pour le temps d'exposition de plus de 0.10 mg/M 3 . Les principaux symptômes observés furent: la perte d'appétit, la perte de poids, les tremblements, l'insomnie et d'autres signes d'effets précoces sur le système nerveux. /52 52 Un seuil de toxicité clinique peut donc être établi selon cette étude à une concentration pondérée dans 1'air de 0.10 mg/M 3 . La relation entre les taux sanguins et urinaires de mercure et le niveau d'exposition est aussi fort contestée. Encore une fois, si l'on examine de façon cri- tique chacune des publications, ce désaccord semble s'atténuer considérablement. Il faut cependant constater certains faits : Ni les taux sanguins, ni les taux urinaires ne sont de bons indicateurs de la charge corporelle totale, notamment au niveau des organes critiques, c'est-à-dire le rein et le cerveau. Il existe des variations individuelles impor- tantes tant dans les taux sanguins qu'urinaires en fonction du temps. Les taux urinaires varient considérablement pour le même individu au cours de la journée. Lorsquel'on prend des moyennes de groupes et non d'individus, on trouve une corrélation significative entre les signes cliniques, le niveau d'exposition, les taux sanguins et les taux urinaires. (Friberg, L., 1972, Smith, R.G., 1970, Elkins, H.B., 1967, Gerstner, H.B., 1977). . . ./53 66 . D'après ces diverses études, une exposition de 40 heures par semaine à une concentration dans l'air de 0.10 mg/M 3 devrait entraîner un taux d'environ 200 yg/1 dans l'urine et de 60 yg/1 dans le sang. Il semble donc exister un facteur de 0.3 entre les taux sanguins observés (en yg/1) et les taux urinaires (Ug/1). (Friberg, L, 1972 , Benning, D. , 1958 ). Par ailleurs, des études plus récentes (Chaffin, D.B., 1974, Miller, J.M., 1975) ont permis de mettre en évidence des effets neurologiques objectifs proportionnels à la charge corporelle en mercure. Certains de ces effets se sont corrigés suite à l'arrêt de l'exposition (tremblements, changements à 1'électromyographie, rythmicité, épreuve doigt-nez, temps de réponse) alors que d'autres (dermographisme et fasciculation des paupières) ne se Sont pas corrigés malgré la normalisation des taux urinaires de mercure. Une autre étude (Lauwerys, R.R., 1973) a démontré la possibilité d'effets enzymatiques sur le niveau de galactosidose et de catalase plasmatiques de même qu'une diminution de l'activité des cholinestérases des globules rouges après exposition à une concentration de mercure dans 1'air ambiant de 0.05 mg/M 3 . On peut donc tirer la conclusion de toutes ces études qu'il existe un seuil d'exposition au-dessus duquel les risques d'intoxication sont évidents. Ce seuil . /67 73. correspondrait à une exposition pondérée de 0.10 mg/M 3 , ce qui entraînerait des taux urinaires de mercure de 200 yg/1 et des taux sanguins de 60 yg/1. Une norme de T L V à ce niveau n'offre donc aucune marge de sécurité. Une T L V de 0.05 mg/M 3 , telle qu'appliquée au Québec, n'offre donc qu'un facteur de 2 comme marge de sécurité. . / 74 VIII PARAMETRES DE SURVEILLANCE A Médicaux. 1. Le dossier médical: L'examen médical de toute personne, pré- tendant à un emploi dans une profession qui risque de l'exposer au mercure, devra être complet. Il faut insister sur le fait que cet examen d'embauche est capital, et qu'il doit être le début de la constitution d'un dossier médical suivi, et où figurent tous les renseignements 2. pertinents. L'examen medical d'embauche: Il a pour principal objectif: de s'assurer que l'emploi auquel est af- fecté le travailleur est compatible avec ses aptitudes physiques et mentales; de dépister les sujets susceptibles d'être particulièrement sensibles à l'exposition toxique. Il doit revêtir la forme d'un examen médical complet majeur. Il comprendra : a) tant sur les points Un questionnaire professionnel, insissuivants: . . ./56 exposition antérieure au mercure ou à d'autres métaux lourds; participation antérieure à un programme de surveillance médicale de l'intoxication par métaux lourds; intoxication antérieure aux métaux lourds; affections antérieures ou actuelles rénales, digestives, neuropsychiatriques, cutanées et gingivales. b) Un examen physique: Outre le protocole minimum d'examen, l'at- tention del'examinateur sera portée sur: l'examen buccal, à la recherche d'une gingivite, d'une stomatite, d'un liséré mercuriel; l'examen neuropsychiatrique à la recherche de troubles psychiques et d'un tremblement notamment. c) Des analyses de laboratoire: comprenant une analyse d'urines, à la recherche d'une protéinurie et cylindrurie (sédiment frais); un dosage de mercure dans le sang et dans les urines, destinés à être des taux de départ. . . . /35 74. 3. Critères d'exclusion: Au terme de cet examen médical d'embauche, le médecin doit pouvoir délivrer un certificat d'aptitude au travail. Ne seront pas aptes à exercer des fonctions qui risquent de les exposer au mercure ou à ses composés les personnes âgées de moins de 18 ans; les femmes enceintes ou qui allaitent; les personnes présentant une néphropathie une atteinte neurologique risquant d'être aggravée par le mercure une gingivite sévère 4. Examens médicaux périodiques: Sous le terme d'examen médical périodique, on entend tout examen médical de l'employé, pratiqué indépendamment des analyses biologiques périodiques. Cet examen, qui, comme dans toute profession, doit avoir lieu annuellement, a pour principal objectif de déceler une altération de santé du travailleur, que cette altération soit ou non le fait de son travail. Cet examen comprendra donc : une partie standard: protocole minimum d'examen ; . . ./57 58 . une partie spécifique: on y recherchera sur les signes précoces de mercurialisme. a) Subjectifs : Fatigabilité, diminution de la force muscu]aire, sentiments dépressifs, insomnies, diminution de 1 a libido. Irritabilité, difficulté de concentration, troubles mnésiques. Diminution de l'appétit, perte de poids, troubles digestifs. b) Objectifs: Gingivite, stomatite, liséré mercuriel Nystagmus, opacification de la cornée. Modification de la parole, troubles de la démarche, modification de l'épreuve doigt-nez, ataxie, tremblements. Modification de l'écriture. Capacité de dessiner une spirale. B Dosages urinaires du mercure. Toute la problématique concernant l'utilité du dosage urinaire du mercure comme moyen de prévention de . . ./50 59. l'intoxication Professionnelle par le mercure a été très bien élaborée par H.B. Elkins en 1967. Celui-ci relève les objections de plusieurs auteurs à établir une corrélation valable entre le niveau d'exposition au mercure et les taux • retrouvés dans l'urine (Moskowitz, S,, 1950, Friberg, L, 1 9 53 1964 > Gage, J.C., 1961, Jacobs, M.B., 1964, Goldwater, L.J., > Copplestone, J.F.. 196-7). Il reprend les données de 1? rapports d'intoxications professionnelles après 1945 concernant 112 cas de mercurialisme. L'analyse des taux de mer- cure urinaires observés dans ces cas dénote une corrélation évidente entre ces taux et les signes et symptômes d'intoxication. Il n'y a aucune discussion possible quant à la variabilité des taux de mercure observés au cours d'une journée chez un individu exposé aux vapeurs de mercure. Notre expérience est conforme à celles rapportées dans la littérature (Tableau 2). Cependant, nos résultats moyens pour un groupe de travailleurs ou pour un même travailleur, mais sur une période assez longue (Tableaux 3 et 4) sont aussi conformes avec ceux de d'autres auteurs -(Smith, R.G., 1970, Friberg, L., 1972, Joselow, M.M., 1967). Le problème, dans ce cas, est moins théorique que pratique. En effet, si l'on calcule 1'excrétion de mer- cure excrété par 24 heures, les variations s'atténuent considérablement. C'est pourquoi plusieurs tentatives de .../60 correction des taux urinaires de mercure par rapport à la densité ou à la concentration de créatinine ont été préconisées. Cependant, aucune de ces méthodes n'apparaît, pour l'instant, entièrement satisfaisante, mais du moins serventelles à atténuer les écarts (Figure 1). Il y a donc place pour une recherche précise dans ce domaine, car le dosage urinaire demeure l'essai biologique le plus simple à obtenir des travailleurs. Il est donc possible de suivre le niveau d'ex position des travailleurs au mercure à la condition de: a) Ne pas se fier à une valeur isolée, mais plutôt à des profils pour chaque travailleur. b) Suivre des moyennes de groupes pour chaque industrie en distinguant notamment les diverses zones de travail. c) D'établir un système de correction, le plus fiable possible, lorsqu'il s'agit d'un échantillon d'une miction simple. C Dosage sanguin de mercure. Une corrélation significative entre le niveau d'exposition et les taux sanguins de mercure a été établie ./61 CONCENTRATION ug/litre Patient: D.L. 1600- 10 20 50 30 60 70 80 HEURES Hg urinaire non corrigé * yg m e r c u r e / g créatinine O—— Hg yg/litre Figure 1 (yg/litre) (corr. pour densité) 3088 par plusieurs auteurs (Ladd, A.C., 1966, Joselow, M.M., 1968 et Smith, R.G., 1970). Les données sur ce sujet sont cependant beaucoup plus fragmentaires et plus difficiles à quantifier encore que les taux dans l'urine. Les lignes de démarcation entre les niveaux acceptables, les niveaux dangereux et les niveaux toxiques sont extrêmement flous. Tout ce que l'on peut dire pour l'instant, c'est que a) Un taux sanguin de 100 yg ou plus est définitivement dans une zone potentiellement toxique même si des ouvriers ont démontré des taux plus élevés sans présenter de symptômes. b) Un taux sanguin de 60 jjg/l semble corres pondre à une exposition de 0.10 mg/M 3 et à un taux urinaire de 200 pg/1. Ceci représenterait le seuil de toxicité. Il existe un besoin urgent de préciser, par des recherches adéquates, la corrélation entre ces différents facteurs d'exposition et les indices de surexposition ou d'intoxication. IX NORMES BIOLOGIQUES A PROVISOIRES. Dans l'urine. Considérant que des taux urinaires de 200 pg/1 et plus sont fréquemment associés à l'apparition de signes ou de symptômes d'intoxication par les vapeurs de mercure, nous suggérons que cette valeur soit acceptée pour le moment comme norme maximale. Toute élévation au-dessus de cette valeur devrait exiger un correctif immédiat, soit par modification des conditions de travail, soit par retrait automatique du travailleur. On doit cependant retenir la valeur relative d'une détermination unique de mercure dans l'urine d'une miction. Devant un dépassement de cette norme, on doit contrôler immédiatement par un autre échantillon et si celui-ci s'avère de nouveau élevé, par un échantillon sanguin. Pour l'instant, le Centre Régional de Toxicolopie corrige ses résultats en fonction d'une densité moyenne de 1.024 en acceptant un facteur de correction maximal de 2. La correction, en regard de la concentration de créâtinine, devra faire l'objet de recherches plus poussées. La T.L.V. actuelle étant de 0.05 m g / M 3 , un facteur de sécurité de 2 devrait aussi être appliqué à la norme maximale urinaire, ce qui signifie une concentration de 100 yg/1 pour la norme optimale. . /63 Nous réalisons l'empirisme d'un tel exercice, mais nous sommes d'avis qu'il s'agit là d'un minimum de sécurité, puisqu'un facteur de sécurité de deux représente ce qu'il y a de plus conservateur dans l'état actuel de nos connaissances. B Dans le sang. Pour les mêmes raisons que celles mentionnées pour l'urine, une norme maximale de 60 yg/1 est suggérée. Nous sommes conscients qu'il existe une zone grise entre 60 et 100 yg/1, mais trop de cas de mercurialisme ont été rapportés à des valeurs inférieures à 100 yg/1 pour que nous puissions accepter cette valeur comme norme maximale. Un facteur de sécurité de 2 doit ici aussi être appliqué pour atteindre la norme optimale provisoire, c'est-à-dire, 30 yg/1. ./64 X FREQUENCE DES ANALYSES, Comme pour tout programme de surveillance biolo- gique de travailleurs exposés à des toxiques, il n'est pas réaliste d'établir une fréquence fixe de prélèvements pour tous les travailleurs, dans tous les types d'exposition. La fré- quence des prélèvements doit tenir compte des facteurs suivant s : 1. Le type de manipulation et le poste de travail. En effet, certaines manipulations sont bien connues comme présentant un risque certain de surexposition aux vapeurs de mercure (i.e., employés affectés aux bains de mercure des usines de soude caustique). 2. Les taux de mercure retrouvés dans l'air am- biant du milieu de travail (i.e., des taux avoisinants la norme de T L V requièrent une surveillance étroite au niveau des travailleurs). 3. Les taux urinaires ou sanguins déterminés au moment du début du programme (i.e., des taux urinaires entre la norme optimale et la norme maximale exigent un contrôle stri.'t ) . U. Un procédé industriel susceptible d'entraîner des modifications de concentrations subites dans l'air. ./65 3092. 5. La durée d'exposition quotidienne ou hebdo- madaire des travailleurs. 6. L'existence ou non d'un système de rotation des travailleurs dans la zone exposée. Comme nous l'avons mentionné précédemment, l'examen de pré-embauche ou l'initiation d'un programme de surveillance doit comporter un dosage sanguin et urinaire de mercure. Ces valeurs de départ devraient servir de premier indice afin d'établir la fréquence des analyses futures. Il est évident que ceprotocole devra être revisé par la suite, compte tenu de la courbe des résultats dans les mois qui vont suivre. De plus, il faudra vérifier s'il y a concordance entre les taux urinaires et les taux sanguins retrouvés. A titre indicatif, nous préconisons le programme suivant : a) Les taux urinaires moyens des travailleurs des zones à risque se situent en deçà de 50 yg/1. b) 1°) Le procédé industriel utilisé est stable et bien connu; un contrôle bi-annuel est adéquat; 2°) Il y a risque de variations des taux de mercure dans l'air ambiant; contrôle aux trois mois. Les taux urinaires moyens se situent au-dessus de 50 yg/1; contrôle urinaire mensuel. bien définir les zones de travail. De là l'importance de 66 . c) Les taux urinaires d'un travailleur se situent entre 100 et 150 yg/1; contrôle urinaire mensuels et sanguins aux trois mois. d) Les taux urinaires d'un travailleur se situent au-dessus de 150 yg/1; contrôle urinaire et sanguin mensuels. e) Tous les travailleurs mobiles qui sont sujets à circuler dans des zones exposées: (i.e., entretiens ménagers, réparation d'appareils, etc.)contrôle urinaire mensuel. Il est évident que l'on doit user de discrétion dans l'application pratique de cette cédule. Par exemple, si la moyenne des travailleurs se situent en bas de 50 yg/1, mais qu'un travailleur ou certains travailleurs d'une zone donnée se situent à des niveaux plus élevés, on devra appliquer à ce ou ces travailleurs la cédule correspondante. Des taux urinaires fréquemment au-dessus de 2 0 0 yg/1 ou des taux sanguins fréquemment au-dessus de 60 yg/1 devraient inciter les responsables des conditions d'hygiène en milieu de travail à intervenir afin de préciser la cause de cet état de fait ei d'y apporter les correctifs qui s'imposent. Le but d'un programme de surveillance en médecine du travail et, particulièrement en toxicologie n'est pas de sécuriser les personnes impliquées industrielle, (travailleurs, ./67 67 . syndicat es, employeurs, hygiénistes, médecins, fonctionnaires, etc.), mais bien de prévenir les risques d'intoxications. 1, 'apparition répétitive de taux anormalement élevés doit signer l'échec des mesures réelles de prévention qui se situent non pas dans un laboratoire de toxicologie, ni dans un hôpital, mais bien dans le milieu de travail lui-même. ./68 68. XI ROLE DE LA RECHERCHE. Cette monographie a été rédigée à partir des données actuelles de la littérature scientifique et de notre expérience antérieure dans ce domaine. Il est facile de <>n:; I a t er loul au long de la lecture de ce document qu'il existait encore bien des points obscurs dans nos connaissances, tant en ce qui touche la toxicité chronique des vapeurs de mercure que dans les moyens qui sont actuellement à notre disposition pour éviter que de telles intoxications surviennent. L'acqui- sition de ces connaissances relève de la recherche appliquée, opérationnelle, clinique et fondamentale. Nous nous conten- terons, ici, de soulever un certain nombre de points qui exigent des réponses à plus ou moins brèves échéances si l'on veut qu'un tel programme de prévention puisse devenir vraiment efficace: 1. Relation réelle entre les taux sanguins et urinaires de mercure inorganique. 2. Facteurs qui influencent l'excrétion rénale du mercure inorganique, incluant ses cycles circadiens. 3. Définit"on des facteurs de corrections des dosages urinaires de mercure effectués sur une miction unique. Comme nous l'avons mentionné précédemment, aucune des méthodes préconisée jusqu'à maintenant n'est vraiment . . ./69 satisfaisante (i.e., densité, créatinine, etc.). Effets du mercure sur la fonction rénale pouvant modifier son excrétion. 5. Modifications biochimiques permettant de dé- celer précocement une atteinte rénale par le mercure inorganique . 6. Modifications biochimiques,et plus particu- lièrement enzymatiques, qui permettraient de définir un état d'imprégnation ou d'intoxication sub-clinique par le mercure. 7. Perturbations neuropsychiatriques qui signale- raient précocement une atteinte nerveuse causée par le mercure. 8. Signification de la protéinurie totale ou de microglobulines urinaires chez les ouvriers exposés au mercure . Comme on peut le constater, il y a encore beaucoup à découvrir, à préciser et à confirmer dans ce domaine. Il ne s'agit cependant pas là d'un projet Apollo, et chacune des questions que nous venons de poser peut trouver une réponse satisfaisante à plus ou moins long terme. . /70 XII TRAITEMENT DE L f INTOXICATION MERCURTELLE. A Les agents chêlateurs. 1, Le B.A.L. ou 2, 3, dimercaptopropanol dont .le nom origine des travaux britanniques visant à mettre au point un traitement effieaee contre les gaz de guerre (British Anti Lewisite) est efficace dans le traitement de plusieurs types d'intoxications aux métaux lourds (i.e., plomb, mercure, arsenic, etc.). Il possède deux groupements qui ont une forte affinité pour ses métaux. sulfydryls Il agit en fixant le mercure au niveau de ses groupes SH, rendant ainsi le mercure soluble et facilitant son excrétion dans l'urine CH. CH - CH 2 0H + SH Hg SH CH 2 - S CH - CH 2 0H S \ / Hg Cependant, l'administration du B.A.L. n'est pas sans risques. Les effets secondaires (larmoiement, salivation, sensation .../Il 71 . de brûlure dans la bouche et le visage, fièvre, hypertension, vomissements) ne sont pas rares. De plus, le médica- ment ne se donne que par voie intramusculaire et est vendu en solution dans l'huile d'arachide. Ce véhicule peut lui- même entraîner des phénomènes allergiques. 2. L'E.D.T.A. calcique ou Versénate d'E.D.T.A. est bien connu pour ses capacités de chélater le plomb et d'autres métaux. plus discuté. Son utilité dans le cas du mercure est Sa formule est la suivante: NaOOC - CH 2 CH 2 \ CH 2 / N . . COONa \ / . N | Ca H2c / \ 0 \ ^ c 0 ^ CH 2 0 / CH: / \ / c ^ ^ 0 La toxicité de ce médicament est relativement faible. ailleurs, il ne peut s'administrer que par voie Par intraveineuse, ia voie orale ayant été prouvée inefficace et même dangereuse. 3. La pénicillamine. Ce prod.it, dérivé de la pénicilline, a d'abord été util ise dans le but de chélater le cuivre lors de la maladie de Wilson. Il peut cependant chélater plusieurs métaux lourds, mais a des degrés variables. Il s'administre par voie . . . / 49 72 . orale et permet, par conséquent, un traitement en milieu externe. Des réactions allergiques croisées avec la pénicil- line surviennent cependant assez souvent et limite son emploi Sa formule chimique est : H3C — 5. CHA I c NH 2 I c — ! SH I H / C. 0 H La N-acétyl-d-l-pénicillamine. Ce produit, connu depuis environ vingt ans, et utilisé pour ses propriétés de chélation pour le mercure, n'est toujours pas disponible au Canada, même sur une base expérimentale. Sa formule est la suivante: 0 CH 3 NH - C - CH 3 I CH 3 — 6. c 0H I -— c I I SH H — c ^ L'acide méso-dimercaptosuccinique. (Friedheim, E. , 1976 ) Ce produit est le dernier-né dans l'arsenal thérapeutique des intoxications par les métaux lourds. Il n'a, jusqu'à maintenant, été étudié que chez l'animal. Compte tenu de la lourde bureaucratie dans ce domaine, nous ne sommes /73 73. pas près de le voir apparaître sur nos tablettes. B * Intoxication aiguë. L'utilité du B.A.L. dans le traitement de l'in- toxication aiguë par le mercure inorganique,ou ses dérivés, ne fait plus aucun doute maintenant (Glômme, J., 19 59; Armand, J., 1971; Hadengue, A., 1957; Petering, H.G., 1976; Gerstner, 11.B., 1977 ; Sanchez-Sicilia, L. , 1963 ). Le traitement doit être le plus précoce possible, si l'on veut éviter les lésions rénales. Les doses préconisées varient entre 2 et 5 mg/Kg de poids. Dans un cas d'intoxication sévère, on peut utiliser la cédule suivante: 1er jour : 2 - 3 mg/Kg aux 4 hrs I.M. 2e jour : 2 - 3 mg/Kg aux 6 hrs I.M. 3e jour : 2 - 3 mg/Kg aux 12 hrs I.M. 4e au 10e jour : 2 - 3 mg/Kg/jour. Un traitement de support doit, de plus, être appliqué selon le cas: a) Hémodialyse, si insuffisance rénale. b) Stéroïdes et inhalothérapie, si pneu- monite chimique. c) Anti-histaminiques, si dermite. ./74 74. d) Solutés I.V. et correction acido-basique, si état de choc. e) Stéroîdes ou inannitol, si hypertension intra-crânienne. C Intoxication chronique. Si le traitement de l'intoxication aiguë semble faire l'unanimité, il n'en va pas de même du traitement de l'intoxication chronique. Un seul médicament semble vraiment efficace selon plusieurs auteurs, c'est le N-acétyld-1-pénicillamine (Aposhian, H.V., 1959; Smith, A.D.M., 1961; Gledhi11, R.F., 1972; Aronow, R., 1976; Arena, J.M., 1971; Vostal, J.J., 1973; Kark, R.A.P., 1971). Quant aux autres chélateurs, la contradiction entre les différents auteurs est complète: Selon Lauwerys (Lauwerys, R. dans Les Intoxications Professionnelles, Duculot, p. 163, 1972), "Il n'existe pas de thérapeutique efficace de l'intoxication chronique. Le B A L actif dans les intoxications aiguës n'a pas d'effet dans les intoxications chroniques. contre, le ealcium-disodium-éthylédiamine Par tétra-acétate (CaNa2 EDTA) et la N-acétyl-d-l-pénicillamine pourraient être effectifs." ( l'arame shvara, V., 1967 ; Pilât, L. , 1960 ; Smith, A.D.M., 1961; Woodcock, S.M., 1958). . . ./75 Par ailleurs, Hadengue (Hadengue, A., 1957) trouve un effet bénifique du B A L, mais un effet d'aggravation à 1'EDTA dans un cas donné. De même, dans l'intoxi- cation expérimentale chez le rat, d'autres auteurs (Glômme, «I., 1 9 59 ) montre un avantage marqué "du B A L sur l'EDTA. Les auteurs plus récents (Petering, H.G., 1976; Gerstner, H.B., 1977) n'osent pas se prononcer pour l'un ou l'autre des traitements, mais favorisent nettement l'usage du N-acétyl-d-l-pénicillamine. Nous voyons donc là un nouveau champ qui s'ouvre à la recherche clinique, à la condition, bien sûr, que la possibilité eh soit donnée aux chercheurs. . /76 BIBLIOGRAPHIE ABREGEE A Volumes et monographies: CHARLEBOIS, C.T. Vue d'ensemble de la contamination par le mercure au Canada. Conseil des Sciences du Canada, 1977. D'ITRI, F.M. The Environmental Mercury Problem. C.R.C. Press, 19 7 2 D'ITRI, P.A. et D'ITRI, F.M. Mercury Contamination. A human tragedy. John Wiley fe Sons, New York, 1977. ENVIRONNEMENT La pollution par le mercure et ses dérivés La Documentation Française, Paris, 1974. FRIBERG, L. et VOSTAL, J. Mercury in the Environment. C R C Press, 1972 . GOLDWATER, L.J. Mercury. A history of quicksilver. York Press, 1972. HAMILTON, A. et HARDY, H.L. Industrial Toxicology. Publishing Science Group Inc., Acton , Mass. , 1974 . HANDBOOK O7^ RESPIRATORY PHYSIOLOGY. U S A F School of Aviation Medicine. Randolf Field, Texas, 1954. HARTUNG, R. et DINMAN, B.D. 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