Contact presse : PARTENAIRES.............................................................................. 3 ETAT DES LIEUX SUR LES BATIMENTS DE GRANDE HAUTEUR EN BOIS – PAR FRANK MATHIS ........................................................................... 5 REGARD DE BUREAUX D’ETUDES : BAINIER ETUDES, GUILLAUME BAINIER... 8 REGARD DE BUREAUX D’ETUDES : GAUJARD TECHNOLOGIE, THOMAS CHARLIER ................................................................................ 11 REGARD D’ARCHITECTE : PHILIPPE MADEC ....................................... 14 REGARD D’ARCHITECTE : ANTOINE PAGNOUX ................................... 17 REGARD D’ARCHITECTE : RAPHAËLLE-LAURE PERRAUDIN ..................... 19 REGARD D’ARCHITECTE : FRANÇOIS PELEGRIN ................................... 22 REGARD DE SOCIOLOGUE : STEPHANE CHEVRIER ................................ 26 [ANNEXE] LE CLUB [OUI AU BOIS] : WWW.CLUB-OUI-AU-BOIS.COM .... 28 Page 2 PARTENAIRES L’événement du Club [OUI AU BOIS] du 24 juin 2014 s’inscrit dans le cadre de la campagne bois.com destiné à informer les particuliers et les professionnels sur le bois et ses usages, plus particulièrement dans la construction, la rénovation et l'aménagement de l'habitat. Il est animé conjointement par le Comité national pour le développement du bois (CNDB), le Comité professionnel de développement des industries françaises de l'ameublement et du bois (CODIFAB) et Swedish Wood. LE CNDB, ORGANISME NATIONAL FRANÇAIS POUR LE DEVELOPPEMENT ET LA PROMOTION DE LA FILIERE BOIS Depuis 1989, le Comité National pour le Développement du Bois défend les intérêts de l’ensemble de la filière forêt-bois et accompagne ses membres et partenaires pour promouvoir une ressource bois de qualité. L’objectif du CNDB est de faire connaître le rôle de la filière dans le développement de l’économie française et des emplois sur le territoire national. Sa mission consiste également à mettre en lumière la capacité du bois à contribuer à l’atténuation du changement climatique. LE COMITE PROFESSIONNEL DE DEVELOPPEMENT DES INDUSTRIES FRANÇAISES DE L'AMEUBLEMENT ET DU BOIS (CODIFAB) REPRESENTE PAR YVES DUCERF Créé par le décret 2009-371 du 1er Avril 2009, le Codifab est un Comité Professionnel de Développement Economique, institué par les Pouvoirs Publics à la demande des Professions de la fabrication de l’Ameublement et des industriels et artisans du Bois. Le Codifab a pour mission de collecter la taxe fiscale affectée créée par l’article 71 de la loi de finances rectificative pour 2003 du 30 Décembre 2003 (modifiée) et de financer des actions collectives au profit de ces secteurs dans le cadre des missions mentionnées à l’article 2 de la loi du 22 Juin 1978. Yves Ducerf est chef d’entreprise implanté en Bourgogne, fabrication de lamellé-collés feuillus pour l’agencement la décoration et la menuiserie, produits d’aménagement extérieur (bardage, terrasse). Il est également VicePrésident UIB, Membre CODIFAB et Co-Président de la campagne Bois.com. Page 3 SWEDISH WOOD REPRESENTE PAR CHARLOTTE APELGREN Swedish Wood oeuvre pour informer et inspirer, mais aussi pour promouvoir le bois, les produits bois et la construction en bois. Le but est de développer l’utilisation du bois en Suède et sur des marchés choisis à l’international. Swedish Wood est un département de la Fédération suédoise des industries forestières, organisation professionnelle et patronale. Swedish Wood est le fruit d’une initiative des scieries suédoises. La Suède est le premier exportateur d’Europe de bois résineux sciés et a une longue tradition d’export vers la France. Charlotte Apelgren est Directrice Communication De Swedish Wood et Co-Présidente de la campagne Bois.com. Page 4 ETAT DES LIEUX SUR LES BATIMENTS DE GRANDE HAUTEUR EN BOIS – PAR FRANK MATHIS ETAT DES LIEUX Aujourd'hui, plus de 50 % de la population mondiale vit dans les villes ; en Europe et en France ce taux est de 60 %. Près de 65 millions de nouveaux habitants s'installent en ville chaque année dans le monde ; l'enjeu, à l'horizon 2050, est de préserver l'espace agricole et naturel de l'urbanisation galopante, en repensant la ville en hauteur. En France, la part du bois dans la construction est en retrait par rapport à d’autres pays développés, déjà plus avancés. Les plus récents bâtiments en bois atteignent 8 niveaux en France, 14 en Norvège, 18 en Australie. Des bâtiments de plus de 30 niveaux sont en projet aux États-Unis et au Canada. La construction bois en France augmente de façon dynamique dans le logement individuel et collectif, mais aussi dans les constructions publiques, notamment parce qu'une demande sociétale croissante de bois local s'exprime. Elle bénéficie d’un marché de croissance forte au niveau mondial, d’une ressource abondante, d’un écosystème technologique et industriel et de nouvelles technologies, offrant des procédés constructifs innovants, compétitifs, qui doivent lui permettre d’occuper une place plus prépondérante et de construire de plus en plus haut à partir de bois. LES ENJEUX DE LA CONSTRUCTION BOIS EN HAUTEUR Cinq enjeux majeurs se distinguent : l’enjeu climatique : passer d’une économie des ressources fossiles à la bio-économie (stocker le CO2 et émettre moins de CO2) ; l’enjeu environnemental : réduire les consommations d’espaces naturels et développer les usages du bois pour une ville plus durable ; l’enjeu énergétique : réduire les consommations d’énergie et développer les énergies renouvelables ; l’enjeu économique : développer une offre française issue du bois français, notamment en feuillus, et générer des coproduits pour les panneaux, le papier et l’énergie ; l’enjeu technologique : 8 niveaux en France, 14 niveaux en Europe et 30 niveaux en projet aux Etats-Unis. LES BATIMENTS DE GRANDE HAUTEUR EN BOIS : QUELLES ECHEANCES ? QUELLES PERSPECTIVES ? 15 étages demain, 30 étages après-demain. Les savoir-faire de l’industrie française et sa capacité d’innovation permettent d’envisager deux échéances : d’ici 2017, dix bâtiments en bois de 10 à 15 étages ; d’ici 2030 : des immeubles de plus de 15 étages. Et de couvrir de nombreux types d’espaces de vie : immeubles d’habitation, résidentes étudiantes et 3e âge, bureaux, hôtellerie, ERP... Pour y parvenir, le Plan « Industries du Bois » s’attèle à lever les freins réglementaires et normatifs, pour concrétiser, dans les années à venir, une offre industrielle nationale sur les constructions en bois de grande hauteur. Une gouvernance participative et une feuille de route collective sur 3 Page 5 ans est mise en place, avec des acteurs sélectionnés pour leur compétence (décideurs, professions, régions, organismes financiers, etc.) et une feuille de route préparée collectivement qui a identifié les besoins, la maîtrise d’ouvrage et le financement. Des études seront lancées dès septembre 2014 pour construire des bâtiments de grande hauteur et obtenir des délivrables pour pouvoir réaliser avant 3 ans des bâtiments d’une quinzaine de niveaux. Ces études vont permettre de réaliser dès 2017 des bâtiments en bois de moyenne hauteur. développer une conception innovante des espaces de vie en termes de confort (visuel, acoustique, ergonomique, qualité de l’air intérieur, esthétique...) ; de modularité (flexibilité des espaces et évolutivité des aménagements) ; valoriser l’innovation et le design « Made in France » ; Pour ce faire, le plan « Industries du bois » propose de : conforter une démarche environnementale, avec des labellisations (HQE, BREEAM, LEED...), des bilans carbone, le BBC voire le « passif ». développer trois systèmes constructifs en bois, conformes à la réglementation et/ou dotés d’avis techniques : CLT, poteaux poutres et colombages de grandes dimensions ; QUELS BENEFICES POUR LA POPULATION, POUR LA SOCIETE ET POUR L’ECONOMIE ? Face à l’urbanisation galopante, la ville de demain doit s’adapter, tout en répondant efficacement aux nouveaux enjeux écologiques. « Les immeubles à vivre en bois », confortables, peu consommateurs d’énergie et puits de carbone répondent en tout point aux attentes de la population française, sur tous les plans sociaux, sociétaux et environnementaux, pour un mieux vivre partagé et « transgénérationnel ». Le plan « Industries du bois » va permettre de réimplanter sur le territoire national les activités de transformation du bois et de rendre globalement la filière plus compétitive en améliorant l’accès à la ressource forestière, en développant la construction bois, avec à la clef la création de 60 000 emplois. croissance de 30 % des effectifs et de 10 % de CA. 10 nouvelles unités de 1ère et 2e transformations pourraient voir le jour, hors modernisation des unités existantes (investissement par unité de 20 à 100 M€). Pilier de la croissance verte, la forêt française représente un marché d’avenir mais aussi une symbolique environnementale forte pour les Français. Cette ressource nationale, matière première noble, bio-sourcée et locale sera plus fortement mobilisée, avec un potentiel de + 7 % de bois ronds, soit + 1,5 millions de m3. L’accroissement net annuel du stock de CO2 pourrait progresser de 7 % à l’horizon 2020, sur la base actuelle de 2,6 Mtéq. CO2 (flux annuel stocké en construction bois). De facto, le projet est porteur de développement économique et social avec un potentiel de L’AMBITION DU PLAN « INDUSTRIES DU BOIS » Son concept global et innovant, qui inclut espace de vie, innovation et performance environnementale, répond en tout point aux attentes du marché et de tous ses professionnels (concepteurs, maîtres d’ouvrages, entrepreneurs...), mais aussi aux besoins des utilisateurs finaux. Il sera conforme aux enjeux et aux critères les plus exigeants de stabilité, de sécurité, de qualité environnementale, et affirmera son identité par une ambiance bois moderne mettant en avant le design à la française. Un grand concours sera d’ailleurs lancé en 2015 pour créer des démonstrateurs sur le territoire national. Page 6 La démarche engagée, associant l’ensemble des acteurs du bâtiment, induira des effets macro-économiques importants et permettra aux acteurs industriels, soutenus par l'État et les régions, d'investir pour mettre au point ce concept d’immeubles en matériaux bois attractifs, reproductibles et exportables. Ce plan d’innovation industrielle se fonde sur un investissement total de 8,9 millions d’euros, pour accompagner la réalisation de ce projet d’envergure. Le financement émane à 68 % de l’aide publique conditionnée par un financement privé. La filière doit ainsi apporter la preuve de sa capacité à se mobiliser pour l’avenir. C’est pourquoi a été créée l’Association pour le Développement des Immeubles à Vivre Bois (ADIVBOIS) avec pour ambition de regrouper les forces vives qui permettront au Plan « Industries Bois » d’aboutir d’ici trois ans. Industriels, maîtres d’ouvrage, pôles de compétitivité, fédérations professionnelles et interprofessions ainsi que le mécénat et les fondations sont sollicités pour apporter leur soutien à cette association. Page 7 REGARD DE BUREAUX D’ETUDES : BAINIER ETUDES, GUILLAUME BAINIER BOIS ET SISMICITE Etat des lieux La nouvelle carte européenne élargit le nombre de communes concernées par un risque sismique en France applicable depuis le 1er mai 2011. Page 8 Incidences des tremblements de terre sur les constructions Un séisme produit principalement des efforts horizontaux très pénalisants pour une construction : Des efforts importants apparaissent dans les murs ou poteaux (points les plus faibles), du soulèvement dans les fondations, et éventuellement de la torsion (selon la géométrie du bâtiment). Deux alternatives sont alors possibles : Une structure très rigide, qui encaisse tous ces efforts Une structure très souple, qui absorbe l’énergie On peut comparer ces absorptions d’énergies aux crashs tests des voitures… L’impact est toujours le même, mais la déformation de certains éléments (moteur généralement) permet de préserver l’habitacle. Le comportement du bois en zone sismique Le bois est naturellement élastique (matériau fibreux). Le comportement du bâtiment dans son ensemble dépend alors principalement des assemblages et de leur capacité à dissiper l’énergie. Les limites du bois en zone sismique Il n’existe pas de limite figée. Comme pour tous les autres matériaux, les limites dépendent de la conception et du budget. Techniquement, il existe un grand nombre de solutions éprouvées, comme : des amortisseurs (utilisés dans les ponts), des contre poids (utilisés dans certains gratte-ciel)… Il est même possible d’améliorer le comportement d’un bâtiment vis-à-vis du séisme en le surélevant. En effet, en dissociant la surélévation du reste de la structure, ce surpoids agit comme un contre poids, et diminue les déplacements globaux du bâtiment. Page 9 ZOOM PROJETS Le Parc de l’ensoleillée Pour le parc de l’Ensoleillé, à Aix en Provence, toutes les fixations ont été calculées sous les cas de charges sismiques règlementaires. Maitre d’ouvrage : Nexity – Ywood Architecte : Tangram Architectes BET Bois : Bainier Etudes et Altibois Le Bâtiment B, Nantes Pour le Bâtiment B à Nantes, il été retenu une solution de poteaux toute hauteur afin de ne pas avoir de rupture à gérer entre les différents niveaux. Maitre d’ouvrage : Atlanbois Architecte : Agence Barré Lambot BET Bois : MO : Synergie Bois et Bainier Etudes EXE : ECSB et ICM Page 10 REGARD DE BUREAUX D’ETUDES : GAUJARD TECHNOLOGIE, THOMAS CHARLIER OUI A L’AVANCEE DU BOIS DANS LA CONSTRUCTION EN FRANCE Comme le signalait Dominique Gauzin-Müller à Beaune il y a deux ans, pendant de nombreuses années, les architectes français partaient par bus entiers visiter les chantiers bois d’Autriche, de Suisse et d’Allemagne. Depuis très peu de temps, la tendance a commencé à s’inverser. Les architectes français se sont appropriés le matériau et ont apporté une patte plus latine à son utilisation. Par ailleurs, la France est dotée d’une des plus belles forêts d’Europe. Sa filière bois se structure chaque jour davantage. Le bois est en marche intensive en France depuis plusieurs années. Il n’y a qu’à voir l’accélération du nombre de projets présentés chaque année au Forum du bois pour s’en persuader. OUI AU DEFI DE LA CONSTRUCTION DE GRANDE HAUTEUR EN BOIS répondre à un programme mixte de commerces, bureaux, logements tester plusieurs systèmes constructifs bois sur l’îlot ; il était suggéré pour notre lot de tester le système poteaux-poutres / ossature bois En découvrant le concours de l’Îlot Bois Strasbourg, nous nous sommes tout de suite dits « nous ne pouvons pas ne pas y répondre ». donner la part belle aux matériaux biosourcés, et soutenir notamment la filière chanvre locale Le programme du concours, réparti en 3 lots, était copieux : tout en garantissant l’impératif économique puisque les équipes candidates devaient inclure un promoteur qui s’engage à porter le projet. Petit préambule : Hermann Kaufmann et Mickael Green ont conçu des bâtiments de 20 à 30 niveaux qui ne restent qu’à construire. Et Dominique Calvi a conçu, dans les années 90, une tour de 200m de haut en bois. Elle n’a jamais été réalisée, mais le calcul a prouvé que c’était envisageable. construire des bâtiments en bois allant jusqu’à R+9 / R+10 en zone sismique 3 Page 11 Nous avons répondu présents sur l’ensemble des demandes de la Communauté Urbaine de Strasbourg (CUS) pour le lot 3 : 10 niveaux tout en bois y compris premiers niveaux et cages d’ascenseur / d’escalier (les cages et les premiers étages sont souvent en béton) les commerces, bureaux et logements n’ont pas été séparés dans des bâtiments différents, mais mis les uns au-dessus des autres, pour d’urbanisme coller aux contraintes les architectes ont fait le choix du béton de chanvre comme matériau d’isolation, pour ses qualités de paroi perspirante, de confort hygrométrique et d’inertie thermique ces choix nous ont conduit à choisir une structure poteaux-poutres et ossature bois, qui répond ainsi favorablement à la demande de la CUS de tester ce système C’est un défi pour nous pour plusieurs raisons : construire 10 niveaux tout bois, avec mixité de programmes et en zone sismique. Nous avons déjà conçu entre autres un bâtiment bois en R+5 en zone sismique (CROUS de Strasbourg) et un bâtiment bois en R+7 mais pas en zone sismique (la Maison de l’Inde à Paris). Dans les deux cas, le programme était unique (logements ou chambres étudiantes). Le programme mixte conduit à des contraintes fortes : « ouvrir » la structure des étages bas vis-àvis des commerces et des bureaux, pour libérer de grands espaces, alors que pour tenir les 9 étages du dessus il serait préférable de disposer d’une structure dense au rez-de-chaussée résister à des contraintes incendies fortes dans les étages du bas (ERP) apporter une grande raideur à la structure, malgré sa hauteur et les étages « creux du bas » noyer une structure bois dans du béton de chanvre, matériau issu d’une filière humide, c’est a priori contraire à toutes nos règles et habitudes et en apparence contradictoire avec les impératifs de rapidité d’exécution et d’économie du projet utiliser les matériaux bio-sourcés en isolation de façade n’est pas décrit dans les solutions préconisées par les règlements incendie (vis-à-vis du risque de propagation d’un feu d’un étage à l’autre); il faudra donc vraisemblablement obtenir, après étude ou essai, une appréciation favorable du CECMI (Comité d'Etude et de Classification des Matériaux et éléments par rapport au risque d'Incendie - Min. de l'Intérieur). Nous l’avons fait, avec essai sur maquette à taille réelle, pour le Groupe Scolaire d’Issy-les-Moulineaux isolé en paille. C’était un bâtiment en R+2 avec une tenue au feu de 30 minutes. Pour l’îlot bois, c’est une heure qui sera exigée. Essai Lepir 2 - projet du Groupe Scolaire d’Issy-les-Moulineaux © Gaujardtechnologie scop Une fois que les projets en cours de bâtiments d’environ 10 à 15 niveaux seront construits, la prochaine barrière réglementaire concernera les IGH (immeubles de grande hauteur). Page 12 OUI A LA SOLIDITE DU BOIS Jusqu’où peut-on aller quand on parle de bois en hauteur ? L’équilibre technico-économique de la hauteur est difficile à deviner a priori. Nous pensons que les limites sont surtout psychologiques. La nature sait produire des arbres de 40m de haut sans ajout de technologie. Le bois a une résistance à la compression similaire au béton, et il est 5 fois plus léger. Des solutions notamment au niveau des assemblages seront à inventer, mais nous ne voyons pas à l’heure actuelle de contrainte majeure pour monter les niveaux. Mais une question demeure : la très grande hauteur est-elle l’objectif ultime à viser ? Pour l’effet psychologique, peut-être. Cependant, les gratteciels sont anecdotiques. Il y a déjà tant à faire pour limiter l’impact environnemental de constructions usuelles après et avant construction. ZOOM PROJETS La Maison de l’Inde Résidence étudiante Architectes : Lipsky et Rollet 72 chambres, Universitaire Structure et enveloppe bois des chambres; cœur béton (escaliers/ascenseur/cuisines) Livré en 2013 Photos : Gaujard technologie scop R+7 à Paris, Cité Crous de Strasbourg Résidence étudiante Architectes : Patriarche 200 chambres étudiantes, R+5 à Illkirch Structure modulaire bois toute hauteur ; cage béton (escaliers/ascenseur) Etudes de faisabilité niveau EXE Page 13 REGARD D’ARCHITECTE : PHILIPPE MADEC Photographe : Bruno Levy BATIMENTS DE GRANDE HAUTEUR EN BOIS : OUI A L’INNOVATION ET A LA CREATIVITE Les réponses aux nouveaux enjeux sont en train d’être inventées, celles d’aujourd’hui ne sont peutêtre pas définitives. Mais il y a la nécessité d’innovation et de recherche. Le premier enjeu pour le bâtiment de grande hauteur en bois réside dans la simplicité de la volumétrie. Par exemple, dans le cadre de notre projet à Strasbourg, en zone sismique, cela demande d’associer différents volumes élémentaires. Plus on monte, plus la tête de l’immeuble bouge en cas d’événement sismique, et plus on a besoin de joints de dilatation larges. Donc pour éviter ce cas de figure, notre projet juxtapose des immeubles haut et bas pour que les plus élancés se retrouvent libres de leur mouvement en cas de séisme. L’autre enjeu est lié à l’esthétique. Nous cherchons quelle peut être l’apparence d’un immeuble de grande hauteur en bois. Pourquoi devrait-il ressembler à un immeuble bardé construit en béton ? Comment jouer avec le bois ? Y a-t-il une autre esthétique qui permette de faire apparaître le bois ? Un autre enjeu lié à la hauteur est la maintenance des vêtures, ce qui mène à rechercher des matériaux sans entretien. © atelierphilippemadec Page 14 Dernier enjeu, une nouvelle façon de travailler ensemble avec l’ensemble des acteurs dont voici la liste pour un projet comme celui de l’îlot démonstrateur : la communauté urbaine de Strasbourg, maître d’ouvrage urbain, pour la mise au point du projet urbain de l’îlot ; toutes les équipes engagées sur les autres lots dans le cadre du projet partagé ; enfin la maîtrise d’ouvrage et d’œuvre architecturale. L’équipe est large pour répondre aux diverses problématiques soulevées par le projet. Pour notre lot, on compte le maître d’ouvrage, Nacarat, 2 autres équipes d’architectes, Atelier D et Méandre, ainsi que le paysagiste Panorama, un bureau d’environnement TRIBU, un bureau d’études bois Gaujard Technologie Scop, un bureau des fluides AMOES, un économiste Tohier, et un BET pour le chanvre car il s’agit d’une démarche inédite (3C). Il y a également un acousticien (atelier ROUCH) et enfin des constructeurs : les Charpentiers de France avec Rabot Dutilleul. Les réponses acoustiques sont très précises dans la conception de ces bâtiments d’habitation en hauteur entre les parties privées et publiques. Sur la partie conception, ce sont environ 25 personnes qui sont à l’œuvre, sans compter les dessinateurs. BATIMENTS DE GRANDE HAUTEUR EN BOIS : OUI A LA PERFORMANCE ECONOMIQUE Pour le projet de Strasbourg, le maître d’ouvrage a donné des objectifs de coûts de construction. Tout le travail fait par l’équipe vise à montrer que l’on peut répondre avec le bois aux enjeux économiques. C’est aussi pour cela qu’on travaille sur des formes simples, et avec une ventilation naturelle (les salles de bain sont en façade). Le projet est donc conçu pour être vendable, ce qui fait partie de ses qualités éco-responsables. OUI A UNE VILLE DENSE ET NATURELLEMENT HUMAINE GRACE AU BOIS Une ville dense ET ouverte Plus on densifie, plus la qualité des espaces ouverts prend de l’importance. La densité permet d’éviter l’étalement urbain, mais demande une programmation des lieux urbains aussi intense que la densité elle-même. A Strasbourg, il y a justement dans le projet urbain de Reinchen & Robert, l’ouverture du centre de l’îlot avec le paysage partagé. Il y a aussi l’enjeu de gestion des eaux qui aide à concevoir ses espaces partagés. Et les toitures des immeubles bas deviennent des terrasses jardins. On accueille des modes de vie différents avec une terrasse résidentielle, accessible à tous. Une autre proximité Avec Hans Thoolen, responsable de la qualité urbaine de la ville de BREDA aux Pays Bas, je développe une approche de « la ville de la pantoufle ». Une meilleure proximité entre logement / travail / activités / commerces permet à chacun d’avoir la liberté de se déplacer, de moins subir le déplacement quotidien imposé. Une meilleure porosité de la ville donne plus de « mieuxvivre la ville » à ses habitants. Imaginez-vous dans un embouteillage, en banlieue, un matin de février, sous la pluie et sous un pont autoroutier : y a-t-il plus grande perte de liberté et contexte plus indécent ? Page 15 Une ville sereine et réenchantée grâce au bois Le titre de l’actuelle exposition à la Cité de l’Architecture et du Patrimoine est « réenchanter le monde » ; le bois y est très présent. Le réenchantement, c’est l’apaisement. L’architecture est de l’ordre de la consolation, elle apaise. Le bois dans la ville apporte la douceur aux pas, au toucher de la main, le parfum de ses essences et son absorption des bruits. Léger, il la surélève aisément ou en élargit des immeubles. Retrouver le bois, c’est protéger notre terre commune et réenchanter la ville. ZOOM PROJET : L’ILOT DEMONSTRATEUR DE STRASBOURG La communauté urbaine de Strasbourg a décidé de réaliser dans la zone d'aménagement concertée (ZAC) du Port-du-Rhin un quartier où tous les immeubles seront en bois et s'érigeront sur 5 à 11 étages. Il comprendra 400 logements, 1 400 m2 de commerces et 800 m2 de bureaux. Dans le cadre de l’îlot, 3 promoteurs privés ont été retenus ; un bailleur social rejoindra le projet ensuite. © atelierphilippemadec Dans cet îlot certains éléments sont partagés : un parking silo (la nappe phréatique étant haute, il ne peut donc pas y avoir de parking souterrain) des discussions sont en cours sur un réseau de chaleur collectif ; actuellement, il est prévu un réseau de chaleur bois pour l’eau chaude, dans la mesure où les architectures sont passives, il y a peu de chauffage un espace paysagé de centre d’îlot accessible à tous une production d’énergie électrique pour atteindre le niveau BEPOS sur l’îlot nécessitera sans doute que la toiture du parking se retrouve aussi partagée © atelierphilippemadec © atelierphilippemadec Page 16 REGARD D’ARCHITECTE : ANTOINE PAGNOUX BATIMENTS DE GRANDE HAUTEUR EN BOIS : OUI AUX EVOLUTIONS TECHNOLOGIQUES ET METIER Une nouvelle technologie innovante Il existe aujourd’hui une réponse générique avec l’arrivée des panneaux de bois lamellés-croisés (Crossed Laminated Timber, CLT), communément appelés « panneaux bois massifs ». Ce sont des panneaux en bois qui sont constitués de plusieurs lits de planches collées et croisées. Cette technologie ouvre la voie pour réaliser de grandes constructions bois, car elle apporte une réponse fiable aux enjeux de la stabilité. Elle est reconnue à l’échelle mondiale : aux Etats-Unis et au Canada, Mickael Green est en train d’imaginer des bâtiments de 30 / 40 étages avec les panneaux de bois lamellés-croisés. Un nouveau métier : l’assemblage Le point principal d’enseignement de notre chantier Jules Ferry de Saint-Dié-des-Vosges de 8 étages en 2013 est le travail sur les assemblages. A partir de cette « matière première » que sont les panneaux bois massifs, il s’agit de trouver les meilleures techniques pour faire les nœuds d’assemblage là où tous les efforts de structure sont concentrés. Lors de la construction du bâtiment, nous avons pu prendre toute la mesure de la complexité des assemblages et de la nouvelle importance de cette activité sur le chantier. L’assemblage devient une activité à part entière. La France n’est pas en retard ! Nous avons commencé à nous servir des panneaux bois massifs en 2007. Lors des visites du bâtiment Jules Ferry, nous avons eu autant de visiteurs étrangers que français. La France n’a pas à rougir. A l’échelle mondiale, tous les pays sont au même niveau. Une des voies explorées notamment par les canadiens est le chaînage béton. Ce sont des voies également explorées en France avec la mixité des matériaux. Mais je ne suis pas complètement convaincu par les exemples que j’ai eu l’occasion de voir. Je travaille avec nos ingénieurs pour mettre le maximum de bois. En effet, la mixité des technologies et des matériaux amène des complexités supplémentaires et crée des risques sur le chantier ou sur la mise en œuvre, et c’est d’autant plus vrai sur un bâtiment de grande hauteur. Les deux grands atouts du bois pour un chantier sont d’une part la préfabrication, d’autre part la spécificité de la filière sèche. A contrario, un matériau comme le béton amène de l’eau sur le chantier, ce qui nécessite des temps de séchage et de retrait. Page 17 BATIMENTS DE GRANDE HAUTEUR EN BOIS : OUI A L’EVOLUTION DE LA REGLEMENTATION Si nous n’avions pas bénéficié de l’appui de notre maître d’ouvrage pour soutenir ce projet qui cumulait les défis (8 niveaux en bois, le plus haut bâtiment bois passivhaus en France aujourd’hui, 100% paille), jamais le projet n’aurait vu le jour. Technologiquement, la France est tout à fait capable de réaliser ce type de projet. Mais les freins sont réglementaires. En termes de bâtiment de grande hauteur en bois, nous sommes confrontés à l’absence de réglementation spécifique qui contraint à faire de l’interprétation et crée des blocages. En effet, les règles de construction d’aujourd’hui sont conçues pour des bâtiments béton, elles sont assez peu adaptées à la construction bois, et elles datent de plus de 20 ans. Aujourd’hui, la réglementation incendie n’est pas adaptée. Il y a un vide normatif qui est en train d’être comblé. Le CSTB a commencé à mettre des outils en œuvre, les choses évoluent, mais lentement. Et plus il y aura de projets, plus les freins se lèveront. Le travail du Club [Oui au bois] est à ce titre très important aussi pour faire bouger les lignes. ZOOM SUR LE PROJET DE LA RESIDENCE JULES FERRY, A SAINT-DIE-DES-VOSGES Le plus haut bâtiment bois passivhaus livré en France aujourd’hui. Type de construction : logement collectif de 3 à 8 niveaux, 26 logements sociaux type T3 et T4 Bâtiment labellisé « Passivhaus » Date de livraison : 2013 Localisation : Saint-Dié-des-Vosges, Vosges Technologies : structure bois massif (type CLT) avec isolation paille Un retour d’expérience : pendant un mois, nous avons embaumé le quartier, le chantier était calme, sain et propre. Il a avancé très rapidement. C’est un des projets les plus agréables que j’ai vécu. © ASP ARCHITECTURE © ASP ARCHITECTURE Page 18 REGARD D’ARCHITECTE : RAPHAËLLE-LAURE PERRAUDIN OUI A LA JUSTE DENSITE GRACE AU BOIS La question d’associer la densité et le bois est évidemment pertinente, et c’est nécessaire. Le bois combine les qualités nécessaires à une juste densité. La question est : « quel est le bon curseur », entre « sur- et sousdensité » ? Trouver la juste densité, c’est compliqué. Le bois permet d’augmenter la densité dans de bonnes conditions. Juste densité, hauteur admissible Travailler les interstices et les délaissés Promouvoir la densité, certes, mais à condition de conserver la qualité de vie des habitants et des usagers et la qualité environnementale de la construction. Qu’est-ce que la grande hauteur en France ? Pour un immeuble de logements c’est 50m, ça fait 15 étages. On ne sait pas construire aujourd’hui des immeubles en bois si haut. On voit quelques projets naître à R + 9/10, et ça, on sait faire. Ces hauteurs-là correspondent d’ailleurs à des densités qui sont admissibles dans certains centres urbains – malgré tout, c’est au-delà d’une juste mesure qui serait plutôt autour du R +6/7. Quand on construit plus haut, on crée des densités déraisonnables et une économie globale qui ne tient pas du tout en termes d’entretien et de maintenance – sans parler de l’impact des constructions les unes sur les autres. Densifier avec le bois est une bonne réponse car c’est un matériau flexible en termes de mise en œuvre, qui a de grands potentiels constructifs et qui permet la réduction des nuisances durant le chantier. Le bois permet une intervention sur une matière existante, celle de la ville existante : on va chercher en densifiant à renforcer, solidifier, compléter. Parce qu’il est léger, parce qu’il se travaille dans un cadre de préfabrication, le bois peut venir se glisser dans tous les interstices ou délaissés. Et de façon modulable, flexible. Il peut répondre à des besoins pour 50 ans, 10 ans, ou 5 ans ou 2 mois. On en revient au débat pour ou contre les tours… En tant qu’architecte urbaniste, dans le cadre de la réflexion que je dois mener sur la ville de demain, je suis amenée à proposer des projets de densification qui doivent être tolérable autant en termes de résultat qu’en tant que procédé constructif. Page 19 Le bois permet de travailler dans la souplesse pour densifier en hauteur, s’inscrire dans les interstices ou zones de niche, exploiter des bâtiments existants et concevant surélévations, c’est-à-dire une densification horizontale ou verticale. Ça commence à se faire en France en particulier dans les centres-villes dans lesquels le prix du foncier incite à exploiter tous les possibles. En Autriche, c’est quelque chose de courant. La ville de Vienne a travaillé sur ces processus de densification. On rajoute un ou deux étages très facilement dans différentes configurations architecturales. L’utilisation du bois en structure, en ossature est alors très avantageux : le chantier est léger, rapide et permet de maintenir les habitants en place. Les toitures deviennent alors de nouveaux lieux à conquérir : les structures existantes peuvent généralement accueillir le poids d’un étage supplémentaire en bois, ce qui ne serait pas le cas en métal ou en béton. OUI AU BOIS POUR DES SOLUTIONS CONTEXTUALISEES ET EVOLUTIVES Je crois beaucoup aux solutions de contexte. Le bois est un matériau adaptable qui permet des réponses sur-mesure, des solutions d’urbanisme qui sont contextualisées et évolutives dans le temps. Aujourd’hui, on veut faire de la ville partout, et de la même façon. Mais il ne faut pas construire en bois pour produire des solutions uniques, c’est un contre-sens ne serait-ce qu’en termes de climat. Dans un contexte de réhabilitation, le projet de la Halle Pajol est une bonne illustration de la capacité du bois à s’adapter à l’existant. L’emploi du bois s’est révélé aussi un choix technique constructif optimisé en termes de méthodologie de chantier dans un contexte de réhabilitation : par rapport au patrimoine, nous avons pu garder la charpente métallique, nous nous sommes glissés dessous, et avons ainsi répondu aux contraintes de sécurité incendie. C’est un projet tout en indépendance, autonomie, légèreté, et qu’on pourra faire évoluer dans 30 ans. Oui à l’évolutivité des constructions La construction en bois massif ou en ossature bois, c’est aussi pérenne qu’un autre système constructif. Mais la construction en bois permet aussi de développer des procédés constructifs qui intègrent l’évolutivité du bâti dans le temps, sa flexibilité, son adaptation. On peut ainsi par exemple imaginer modifier les façades sans modifier le reste. Le béton ne permet pas de déconnecter façade et plancher alors qu’on peut déposer une façade bois très facilement : un jour un commerce, puis un logement et dans 20 ans une micro-crèche. On peut faire évoluer l’enveloppe grâce à des travaux légers. On peut rajouter, prolonger, se raccrocher, épaissir de façon aisée. Il faut laisser la possibilité aux générations futures de remodeler nos réalisations d’aujourd’hui. Un des enjeux du développement durable est de répondre aux besoins du présent sans dégrader les conditions futures. On ne connait pas les besoins futurs. Il faut résister à la prétention de l’architecte, de l’urbaniste et de l’élu qui veulent laisser leurs empreintes. C’est une attitude à la fois immobiliste et conservatrice. En tant qu’architecte, je ne dois pas laisser derrière moi des bâtiments qui produisent du déchet et qui sont irréversibles. Quand on voit le patrimoine autant formidable que catastrophique dont on hérite des 50 dernières années, on peut se demander à juste titre pourquoi on serait meilleur que nos prédécesseurs. Le bois répond à la fois à cette nécessaire humilité que l’on doit entretenir face au bâti et au respect des ressources de la planète. Page 20 Oui à la diversité La ville n’a pas vocation à être homogène : il faut conserver cette idée de la diversité, ce qui fait que la ville est conviviale et mixte dans les usages, dans les cultures. L’avantage du bois d’ossature, c’est qu’on peut revêtir le bois de toute vêture. La diversité architecturale, c’est ce qui fait qu’on reste dans les villes ; tous les bâtiments sont à la fois dans l’harmonie et la diversité : diversité de hauteur, de forme, de distribution… Il doit y avoir beaucoup de configurations différentes ; le charme français, ce sont les alternances, les retraits, les cours et arrièrecours, les jardins ouverts ou cachés… Oui aux façades bois et au grisaillement Une façade entièrement en briques n’est pas intéressante, c’est l’architecture qui la rend intéressante, l’alternance des pleins et des vides – ceci est valable pour tous les matériaux. L’utilisation du bois en vêture est une évidence pour notre agence. Nous la revendiquons : je trouve ça beau quand ça grisaille, parce qu’accepter ce grisaillement, c’est admettre que TOUT évolue. On peut faire varier les traitements, les vêtures. Une façade béton est tout aussi sinistre. Les tours de la Défense totalement vitrées, c’est sinistre. Il faut travailler la façade, mixer les revêtements, les matériaux. Il y a beaucoup de maîtres d’ouvrage qui pensent que le bois en façade va mal vieillir. Mais le vieillissement du matériau de façade n’est pas propre uniquement au bois. Aucun matériau ne reste le même. Toutes les façades sont ravalées ; les façades en pierre, ça noircit, ça se sable, le béton grise, la brique s’encrasse, les enduits jaunissent et se couvrent de coulures. On stigmatise le bois mais il n’existe aucune façade qui ne nécessite pas de ravalement - sauf peut-être les façades vitrées mais qui nécessitent un nettoyage régulier – avec toutes les consommations d’eau induites. OUI A LA MIXITE DES USAGES DANS LA VILLE DE DEMAIN Il y a une chose à laquelle je crois : travailler sur la mixité des usages au sein même du bâti, c’est-à-dire promouvoir des espaces polyvalents - même si les pouvoirs publics se montrent réticents. Ecole, externat, lycée etc… on voit aujourd’hui une quantité incroyable de bâtiments en bois. Mais il faudrait que cette évolution s’accompagne d’une réflexion plus forte : ce sont des bâtiments qui ne fonctionnent pas en permanence. On décarbone le bâti mais par déficit de programmation, on recarbone. Les gymnases et les lycées ne sont utilisés qu’en tant que tels : ils sont sous-utilisés. Il faut réexeploiter, exploiter plus, mieux. C’est une question de gestion, d’entretien, il faut créer de nouveaux outils plus flexibles pour l’utilisation et la maintenance des bâtiments. Cette mixité qu’on met en place dans les villes se situe à l’échelle du quartier ou de l’îlot : logements, services, bureaux, commerces. Mais la mixité d’usages à l’échelle du bâti est plus compliquée. Il n’y a pas de difficulté technique, ce progrès dépend de la seule volonté du politique et de son gestionnaire. Malgré tout, la notion de partage fait son chemin. Page 21 REGARD D’ARCHITECTE : FRANÇOIS PELEGRIN Etre urbaniste dans un contexte de densité urbaine, c’est un métier d’anticipateur de besoins futurs, mais aussi de remodeleur : on ne crée pas ex nihilo, on s’appuie sur un existant. La politique urbaine d’aujourd’hui, c’est bien de refaire la ville sur la ville et non pas de s’étendre sur des terrains vierges qu’il convient de préserver. L’enjeu, c’est de retrouver de la densité dans des tissus conçus il y a très longtemps en réponse à des besoins et usages très différents de ceux d’aujourd’hui. On voit apparaître des solutions, des concepts nouveaux, pour augmenter la densité ; ils interpellent tous les acteurs et les différentes filières constructives, et notamment celui de la filière bois. OUI AU BOIS FACE A L’ENJEU DE LA DENSITE URBAINE Que ce soit pour la surélévation, l’extension latérale, l’épaississement des façades, on va chercher la légèreté, la rapidité, la précision, la réduction des nuisances et des déchets de chantier, la qualité environnementale et les performances plurielles ; on va donc s’intéresser à la préfabrication légère. On va alors naturellement se tourner vers les filières qui apportent des solutions et notamment la filière bois. OUI à l’avènement de la préfabrication SUR MESURE : les solutions bois R + 3 / 4 / 5 En construction neuve, on voit fleurir des solutions tout bois en 2D ou en 3D. Partenaires de BH (groupe BENETEAU) depuis la création de leur division habitat, nous avons développé le concept des maisons MUSE sur le principe d’assemblage de modules entièrement préfabriqués en usine puis livrés et assemblés sur le chantier : une maison de 4P sur 2 niveaux est montée en une journée. Ainsi un chantier de construction de 20 maisons (hors terrassement, VRD fondations et finitions) ne dure plus qu’un mois !! Puis on a développé l’habitat intermédiaire, c’est à dire des maisons individuelles superposées ; on Page 22 peut ainsi proposer des « modes d’habiter façon maisons individuelles » avec une forte densité (90 logements/ha). Aujourd’hui, nous développons une nouvelle offre originale d’immeubles collectifs modulaires jusqu’à R+5. Nous avons mené d’autres recherches notamment une étude conduite sur Bordeaux rive droite : on arrive à de belles densités quand on fait de la maison superposée en R+3 ou +4. Je crois fermement à l’aventure du modulaire avec la maquette numérique, c’est une solution véritablement innovante au niveau du process. Cela suppose une forte collaboration : on réfléchit autrement, à plusieurs - industriel, architecte, thermicien, ingénieur structure,…. Cette forme d’habitat intermédiaire concilie le charme de l’habitat individuel avec la densité du collectif. Les habitants bénéficient de petits jardins ou terrasses: c’est important dans la vie de la famille, ce n’est pas une exigence accessoire. Lauréats du CQFD du PUCA et d’un accord-cadre avec SNI, le procédé MUSE s’est traduit en 3 ans par la réalisation de plus de 500 maisons avec des architectures variées car il s’agit bien d’un concept ouvert et non d’un modèle. La filière modulaire recèle encore de belles marges de progrès. Je crois surtout beaucoup à la combinaison du 3D et du 2D sur une même opération, histoire d’éliminer des doublons inutiles et de gagner non seulement en qualité, en délai mais surtout en COÛT. Par ailleurs, toujours en modulaire 3D, BH a réalisé plusieurs résidences étudiantes (Angers, Laval, Bondy…). LA REHABILITATION ? OUI A LA REQUALIFICATION ! Je préfère parler de requalification architecturale plutôt que de réhabilitation thermique. D’abord, parce que la réhabilitation thermique n’est que l’un des 15 sujets à traiter dans le cadre d’un projet. Le projet : rue Clavel à Paris 18, témoin des difficultés de mise en œuvre sur un projet porteur La requalification vise à repenser les bâtiments pour les modes de vie actuels, à améliorer les conforts et les usages et à valoriser l’image architecturale pour recréer l’envie et la fierté d’y habiter tout en augmentant la valeur patrimoniale. (Lauréat de l’appel REHA du PUCA et du prix du grand Paris du logement, il y a plus de 5 ans). Par ailleurs, le projet pour 2020 n’est pas de faire une nouvelle réglementation thermique mais de conduire les acteurs à une réglementation globale visant à qualifier le logement selon les performances plurielles des espaces engendrés. Personnellement, je me réjouis de ces saines orientations pour lesquelles je milite depuis 1979. On est enfin sorti du monocritère purement thermique pour s’intéresser au vrai sujet : la qualité de vie de l’homme dans une perspective de développement durable. La caractéristique de cette réhabilitation de 37 logements, c’est de la faire à coût zéro. Page 23 Nous avons en effet démontré qu’au prix de vente du m2 parisien, le bénéfice de la vente des m2 créés couvrait les investissements nécessaires pour passer d’une classe G à une classe B sur le bâtiment existant. On a démontré que la densité crée de la richesse et que cette réhabilitation requalifie l’image du bâtiment. Ce bénéfice esthétique et les nouvelles performances contribuent à augmenter durablement la valeur patrimoniale du bien. Au-delà des avantages immobiliers, on offre de nouvelles valeurs d’usage grâce aux balcons, aux loggias, jardins d’hiver et aux extensions. On essaie de corriger les erreurs du passé. Et les nuisances de l’extension sur l’environnement immédiat sont nulles car le bâtiment est entouré d’un jardin et d’un garage. Nous avons simulé sous ARCHIWIZARD l’impact des ombres portées : on ne porte préjudice à personne. Hélas, ce projet n’est toujours pas réalisé ; car il faudrait que l’on fasse sauter le verrou du plafonnement de hauteur de l’actuel PLU. Il faudrait davantage de courage collectif et autoriser les élus à être porteurs de ce courage collectif. Il faut absolument ouvrir des espaces de liberté pour innover. Il faut que les nouveaux élus se posent la question d’ouvrir le champ des possibles. La surélévation à Paris… du projet à la réalité : un combat politique - Un manifeste pour ouvrir le champ des possibles… C’est indispensable. Si on ne fait pas cette densité à Paris, si on ne permet pas aux nouveaux outils, aux nouvelles techniques de revivifier la ville, on multiplie les lotissements en bordure d’agglomération, on aura de plus en plus de bureaux au cœur des villes, et donc des villes en perte de vie… Ce n’est pas la demande. Nous architectes urbanistes, nous atteignons nos limites. Nous donnons nos idées, nous innovons ; mais s’il n’y a pas la volonté politique pour transformer l’essai, nos efforts resteront vains et nos projets des concepts. Il faut permettre l’innovation. On ne peut pas annoncer la rénovation de 500 000 logements par an en conservant toutes les règles qui paralysent et qui conduisent à faire de cet objectif ambitieux un slogan politique de plus. OUI A LA QUALITE DE VIE GRACE AUX CONSTRUCTIONS BOIS Suite aux différents projets MUSE réalisés, on enregistre des retours assez positifs même si la réalisation des premières opérations n’a pas toujours été simple ; on livre maintenant couramment avec « zéro réserve » : les habitants apprécient l’agrément de vie, en qualité de vie. Une maison en ossature bois crée une ambiance plus chaleureuse, même si le bois n’est pas apparent, le confort hygrométrique est apprécié. Nous avons développé des jeux de cloisons mobiles séjour / cuisine / entrée : ce dispositif n’était pas une simple idée d’architecte, mais répondait bien à des usages. Les habitants l’apprécient, ils procèdent tous à des agencements intérieurs différents. Découvrir un habitat en bois, c’est aussi vivre avec un escalier qui grince un peu et des petits craquements à apprivoiser. OUI A LA MIXITE SOCIALE ET FONCTIONNELLE Il existe un certain nombre de recherches sur cette question de la mixité sociale et fonctionnelle, que nous avons développé dans le cadre d’une recherche CQHE pour le PUCA notamment avec la méthode CQHE depuis 7/8 ans. Concrètement, on envisage la mixité fonctionnelle notamment avec le troc de calories entre les bureaux et les logements qui leur sont contigus. Pour expérimenter ces écosystèmes, et il faut prendre les projets très en amont avec les aménageurs et promoteurs, trouver des opérateurs ouverts à la mutualisation. L’urbanisme de demain, c’est de raisonner en écosystèmes. Il y a des réponses programmatiques, il y a de nouveaux modèles économiques à mettre en place. Il ne faut plus Page 24 raisonner au bâtiment, il faut raisonner à l’échelle de l’îlot, du quartier… Juridiquement, c’est encore très compliqué à mettre en œuvre. Cela induit la remise en question de nos modèles, c’est bien grâce à l’évolution et à la modification des comportements que les lignes bougeront. Ce n’est pas une crise que nous traversons mais une MUTATION qui va prendre encore quelques années. ZOOM SUR LE PROJET DE RESIDENCE LE DOUGLAS A CERGY Type de construction : logement collectif du studio au T5 Date de livraison : 2014 49 logements en R+5 avec bardage bois sur l’attique au R+5 Structure mixte : plancher béton de 20 cm et façade de bois préfabriquée Système constructif innovant : façades et balcons bois rapportés SHON : 5 122m2 Surface de plancher : 4 666m2 Surface habitable : 4 280m2 Surface parcelle : 1 745m2 Surface jardin : 637m2 Bois d’ossature : 86 m3 épicéa (provenance Allemagne) Charpente R+5 : (provenance France) Structure balcons : LC douglas 8m3 (provenance France) Casquette R+5 : 17 m3 en KLH (provenance Autriche) Balcons : 87 m3 en KLH (provenance Autriche) LC douglas 5m3 Page 25 REGARD DE SOCIOLOGUE : STEPHANE CHEVRIER Atlanbois a mandaté en 2013 le sociologue Stéphane Chevrier pour la conduite d’une étude sur la perception du bois par le grand public. Il nous livre ici une partie de ses enseignements. OUI AU BOIS COMME VECTEUR DU RENOUVELLEMENT URBAIN Le renouvellement Le fait d’avoir du bois dans la ville peut être un marqueur de renouvellement urbain. On voit bien que pour exprimer ce renouvellement urbain, il faut l’exprimer en termes architecturaux, donc employer de « nouveaux matériaux ». Dépaysement, poésie et nature Il y a un élément sur lequel le bois peut être pertinent : le sentiment balnéaire, vacancier, notamment dans le cadre de la reconquête des bords de rivières (à Nantes, à Bordeaux). Avec la reconquête de ces espaces, on cherche à être dépaysé dans sa propre ville. On cherche l’exotisme chez soi. Dans le domaine de l’habitat, les propriétaires recherchent ça, on cherche des codes de l’hôtellerie pour réinjecter dans l’habitat le voyage au sein de l’espace urbain. Le bois peut redonner de la poésie à la ville. Le bois a cette possibilité de créer une forme de désir de la ville d’autant plus qu’il n’a pas le poids du stigmate de la ville industrielle. Il aménage une ville désirable, post-carbone. Il ramène de la nature dans le cadre urbain. Le besoin de nature dans la ville est réel surtout si on est dans un contexte de densité. Mais ce besoin de nature est subjectif. Il passe par la qualité des espaces publics, aujourd’hui, ou la qualité des balcons, des perspectives, des vues sur paysages, ça ne se traduira plus seulement par des m2. Habitat social / Maisons individuelles / Sèvre Loire Habitat : Le Bostangis / Cholet (49) / Architectes : Triade et Jean-Luc Guineberteau La sérénité Ce que j’ai trouvé très intéressant : les gens ont le sentiment que le bois procure de la sérénité. C’est un sentiment subjectif de sécurité au sens psychologique, le « j'y suis bien ». Le bois est une Page 26 seconde peau. Le bois est un matériau presque maternel, protecteur. Les gens touchent le bois. C’est un réflexe. A contrario, le béton renvoie à un environnement et un imaginaire industriel et carcéral, avec des formes très géométriques, de longs couloirs. Le bois, lui, joue la carte du naturel, à plus petite échelle, il est plus humain. La visite des établissements psychiatriques est tout à fait révélatrice de ce point de vue. Pour faire simple, un établissement conçu comme un bâtiment massif en béton renvoie une sensation de couleur triste et bas de plafond, avec beaucoup de résonnance, c’est un bâtiment très sonore, où les patients sont plusieurs par chambre. A contrario, le bâtiment en bois est au milieu des bois, fait de maisonnettes, avec des chambres individuelles, peu de couloirs, de plein pied. J’ai retrouvé de manière très accentuée les expressions de sentiment de sérénité, d’apaisement. Le bois fait partie de cet environnement. Ce type de bâtiment doit répondre à un besoin de protection contre toute agression, et le bois semble avoir ses propriétés pour calmer les fureurs intérieures, être faiblement émetteur d’agression extérieure. La réalité de ce type d’établissement, c’est que les patients sont parfois équipés de casque pour éviter de se blesser eux-mêmes en cas de gestes violents. En termes d’environnement, dans ce contexte de violence physique, il n’est plus du tout anodin d’envisager la différence entre le fait de se cogner contre du bois et le fait de se cogner contre du béton. Le bois peut jouer ce rôle d’enveloppe protectrice, apaisante ; ce sont là des propriétés objectives ET culturelles. Groupe scolaire / Jacques Brel / Saint-Père-en-Retz (44) / Architecte : Agence Drodelot EPMS / L’Ehrétia / Le Gâvre (44) / Architecte : Adhoc Architecture EPSMS / EPSMS du Pays de Challans / Challans (85) / Architecte : Adhoc Architecture A contrario, un bâtiment tout en bois ou à l’ancienne avec des couleurs sombres va créer un sentiment d’insécurité, d’étouffement. Il faut un cocon protecteur ET respirant. Aujourd’hui, on veut de la respiration… il faut le resituer dans l’air du temps. Page 27 [ANNEXE] LE CLUB [OUI AU BOIS] : WWW.CLUB-OUI-AU-BOIS.COM POURQUOI LE CLUB [OUI AU BOIS] ? Bois.com souhaite permettre aux décideurs qui font le choix du bois de se rassembler au sein d'une communauté, afin de partager des valeurs communes et d'échanger avec d'autres décideurs. Pour leur permettre également d'affirmer haut et fort, ensemble, que le bois dans la construction, l'aménagement et la rénovation possède toutes les performances requises en termes de rapidité, d'efficacité énergétique et acoustique, et que ce matériau renouvelable offre des solutions modernes, souples et design. Pour leur permettre enfin de renforcer leurs convictions, d'enrichir leurs connaissances, et de faire tous ensemble avancer les solutions bois dans la construction et la rénovation. L’IMPORTANT, C’EST DE VOULOIR Pour tout projet de construction ou de rénovation, ce sont la force de conviction et l'engagement des acteurs du projet en faveur du choix du bois qui sont déterminants. Le Club [OUI AU BOIS] a véritablement pour but de valoriser et favoriser le passage à l'acte en faveur de la décision bois. UN CLUB PENSE POUR ET AVEC LES PRESCRIPTEURS DE LA CONSTRUCTION BOIS Ce Club a pour but de permettre à tous les maîtres d’ouvrage de : découvrir des projets emblématiques partager les retours d'expérience de ceux qui ont déjà choisi le bois pouvoir entrer en relation avec les acteurs engagés être informés de façon privilégiée de l'actualité du réseau et des informations de Bois.com découvrir les raisons qui ont motivé les choix du bois dans des contextes très différents Page 28 UN RESEAU OUVERT AUX MAITRES D’OUVRAGE Ce réseau s'adresse à tous les porteurs de projets : élus bailleurs sociaux, promoteurs, chefs d'entreprises, dirigeants d'institutions publiques, architectes, bureaux d'études. Pour être membre, une seule règle : être prêt à témoigner en faveur du choix du bois et de son utilisation significative à travers la réalisation d'un ou plusieurs projets. Page 29
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