Bois et Forêts en Pays de la Loire Sommaire Même si la forêt peut donner l’impression de pousser toute seule, le sylviculteur doit investir du temps et de l’argent pour les générations futures, afin qu’elles disposent de bois d’œuvre de qualité, et donc de grande valeur du fait de leurs utilisations spécifiques. Imaginons ou observons un agriculteur qui sèmerait une céréale sur un sol mal préparé et qui ne se préoccuperait de sa parcelle que le jour de la moisson ! À coup sûr, il ne sera pas agriculteur très longtemps ou, s’il le reste, c’est qu’il a d’autres revenus. Si l’on veut produire, il faut savoir investir ! Notre problème de sylviculteur, c’est de vivre Antoine de Ponton d'Amécourt, président du CRPF. des investissements des générations précédentes, mais d’investir pour les générations futures. En 1946, la création du fonds forestier national (FFN) a donné une réponse adaptée à cette exigence. Cela a permis, de façon massive jusqu’en 1999, d’encourager les investissements (plantations, dépressages, élagages, voiries…) réalisés, la plupart du temps, sur des parcelles peu productives. Nous en récoltons le fruit aujourd'hui. Notre président national de la forêt privée, Henri Plauche-Gillon, faisait remarquer, dans son discours lors de l’assemblée générale à Euroforest, qu’en 1970, un propriétaire devait réinvestir 20 % du produit de sa coupe dans le renouvellement et le suivi d’un reboisement. Aujourd’hui, on estime qu’il faut réinvestir 70 à 80 % ! n On n'a rien sans rien p. 1 n Des PSG suivis à la trace... en Pays de la Loire p. 2-3 n Interview : rénovation des parcs boisés p. 4 n Chêne : croissance rapide et qualité sont compatibles p. 5 B. Longa - CRPF PDL n Les lisières forestières, refuges de biodiversitép. 6-7 n On n'a rien sans rien (suite) Réélection M. d'Amécourt La Feuille, bimestriel d'information forestière Se former pour sa forêt p. 8 N° 113 - Septembre 2014 Il faut donc, si nous voulons que les générations futures aient à vendre de beaux bois d’œuvre à grande valeur ajoutée, que nous trouvions les moyens de réinvestir… Et pour ce faire, je vous livre quelques-uns de mes souhaits : • que les propriétaires forestiers aient un tempérament de producteurs ! Utilisons nos documents de gestion comme un vrai tableau de bord indispensable à une bonne gestion planifiée de nos interventions sylvicoles. Ne faisons pas d’économies sur l’implantation d’un nouveau peuplement et son suivi les cinq à dix premières années. Mais ne faisons pas non plus de travaux qui ne se justifient pas. Sachons vendre nos bois lorsqu’ils atteignent l’âge d’exploitabilité et vendons les à leur juste valeur, qu’il s’agisse des volumes ou des prix, • que les scieurs sachent et aient les moyens d’investir dans des unités de production dignes de ce nom qui, grâce à de meilleures productivités, leur donneront la possibilité de mieux valoriser nos bois et donc de mieux rémunérer les sylviculteurs dans des contrats « gagnant-gagnant », • que les pouvoirs publics prennent enfin conscience de l’importance des conséquences de la disparition du fonds forestier national et qu’ils œuvrent à la création d’un nouveau fonds d’aide à l’investissement forestier, suite de l'éditorial en dernière page CRPF PDL On n'a rien sans rien Des PSG suivis à la trace... en Pays de la Loire ______ Un Plan Simple de Gestion prévoit un certain nombre de coupes et travaux pour une période définie. Lorsqu’un retard de gestion est constaté, le CRPF déclenche une nouvelle dynamique pour comprendre et accompagner les propriétaires. Exemple en Pays de la Loire En Pays de la Loire, le CRPF dispose de cinq techniciens, responsable chacun d’un « secteur PSG ». Chaque secteur comprend entre 200 et 250 plans simples de gestion et il est prévu, à court terme, une augmentation de 50 % de ce nombre. Ce sera le résultat cumulé de l’apparition des nouveaux PSG, devenus obligatoires du fait de la disparition du critère de seul tenant, et d’une politique volontariste du CRPF, soutenue en cela par la Région, en faveur des PSG volontaires, pour la tranche des 10-25 hectares. Les surfaces couvertes par tous ces PSG concernent environ la moitié des surfaces boisées régionales. Elles sont, de ce fait, connues du CRPF, d’autant mieux que certains techniciens sont présents de longue date sur les mêmes secteurs, où ils ont développé un réseau d’interlocuteurs parmi les propriétaires forestiers et les gestionnaires professionnels (experts forestiers, gestionnaires forestiers professionnels indépendants ou des coopératives). En 2010, dans l’effervescence qui a suivi le discours d’Urmatt (1), nous nous sommes donc posé la question du taux de réalisation des coupes et travaux programmés de nos PSG, en lançant une enquête exhaustive auprès des propriétaires forestiers. Les résultats ont été difficiles à interpréter et furent donc dou- C. Weben - CRPF PDL Différentes enquêtes, régionales ou nationales, concluent toutes dans le sens de la reconnaissance de l’efficacité du Plan Simple de Gestion, notamment pour l’augmentation de la récolte de bois en forêt privée. Les CRPF, forts de ce constat, s’engagent davantage dans le suivi des PSG, afin d’améliorer leur taux de réalisation des coupes et travaux prévus, couramment estimé autour de 70 %. Cet objectif recouvre en fait toute la question du développement forestier : rédiger et mettre en œuvre son plan simple de gestion s’inscrit en effet dans un processus très large d’information et de formation des propriétaires forestiers. De l'intention... blés d’une analyse plus précise à partir de 40 PSG par secteur (soit 200 en tout). Un taux de réalisation de 70 % fut ainsi annoncé, suite à ces différentes approches : il exprime la fréquence des coupes réalisées dans les cinq ans suivant leur programmation, sans prise en compte ni des surfaces concernées, ni des types de produits exploités, ni de leur volume. Il faut donc considérer ce résultat comme un simple ordre de grandeur, confirmé par la suite dans le cadre d’études particulières. Nous pouvons évoquer deux d’entre elles, respectivement consacrées à la question du renouvellement des pins maritimes (Sarthe) et des chênes (Loire-Atlantique), ainsi qu’un bilan réalisé dans le cadre d’un Plan de développement de massif (Maine-et-Loire). Dans ces trois cas, la saisie des prévisions de coupes des PSG dans notre base de données « Merlin » a grandement facilité ces enquêtes, dont les résultats n’ont pas contredit ce fameux 70% pour les deux premières, mais ont frisé les 100 % dans le périmètre du PDM. Ce satisfecit arrivait à point nommé pour contrebalancer certains constats faits (1) Lors de la visite d'une scierie à Urmatt, en Alsace en mai 2009, le président de la République N. Sarkozy a dévoilé des mesures de relance de la filière bois. 2 Septembre 2014 par ailleurs de forêts où, malgré un PSG, « rien ne s’est fait depuis 20 ans ! ». Conclusion : 70 % c’est bien, mais cela reste améliorable. Voyons comment. "La chasse aux retards de coupe de plus de cinq ans est ouverte" C'est quasiment en ces termes que notre équipe technique fut mobilisée, dans l'objectif d'améliorer ce taux de réalisation des PSG. Une "arme" toute neuve fut établie pour l'occasion : la fiche "Actions". De quoi s'agit-il ? Tout simplement d'un fil conducteur à suivre pour passer du constat d'une coupe non réalisée à la mise en place d'une solution et à un résultat tangible. Diverses sources d'informations permettent le repérage des retards de gestion sylvicole, notamment les visites à mi parcours (une vingtaine par technicien prévues en 2014), les demandes de conseils directs, les retours des experts ou les constats des DDT. 1ère étape : constater et comprendre la cause de non-réalisation, 2ème étape : imaginer une solution, la proposer et agir. è5 ha d'éclaircie de pin maritime non réalisée (prévue en 2007) Cause : méconnaissance du marché Solution proposée : intervention d'un gestionnaire pour vente groupée Résultat : coupe vendue en décembre 2013. è4 ha d'éclaircie de pin maritime non réalisée (prévue en 2006) Cause : absence de desserte Solution proposée : dépôt d'une demande de subvention et intervention d'un expert Résultat : route aménagée en 2013, coupe prévue en décembre 2013. è10 ha de coupe rase de pin maritime et taillis (prévue en 2007) Cause : choix sylvicoles modifiés Solution proposée : modification du PSG Résultat : modification agréée en 2012 et coupes correspondantes réalisées. Il est très intéressant de regarder de plus près les causes de ces coupes non réalisées. Certaines sont souvent liées à des événements familiaux, le CRPF n'y changera rien, quoique, au moment d'une succession, il puisse parfois être de bon conseil. Les autres causes ne sont pas, la plupart du temps, des cas isolés, mais peuvent être regroupés en grandes catégories : manque de disponibilité, méconnaissance des marchés, des acteurs, des pratiques ou des techniques, remise en cause des choix sylvicoles antérieurs…. Chacune de ces familles de causes appellera une solution spécifique qui orientera soit vers un professionnel, soit sur une formule collective d'animation-formation proposée par le CRPF. C'est ainsi que naquirent les "Groupes de sylviculture appliquée" en Pays de la Loire. C. Weben - CRPF PDL Voici quelques exemples concrets, issus d'une fiche "actions" établie en 2013. ... à l'action. À l'issue des trois premières années de fonctionnement, les fiches "actions" se sont également révélées utiles dans d'autres domaines. Pour l'attribution des plans de chasse, par exemple, elles permettent au technicien de CRPF de recenser objectivement les difficultés de mise en œuvre de certains PSG du fait d'une trop forte pression du grand gibier. Le résultat s'apprécie en termes d'attribution de bracelets, puis surtout au vue de la réussite de la régénération engagée sur la parcelle, ce qui incite à ne pas refermer trop tôt ces dossiers sensibles. Le premier point est atteint, le second inéluctablement en marche, reste le troisième qui consacrera à lui seul la réussite des deux premiers. Reste à espérer que l'action des CRPF, complémentaire à celle des gestionnaires professionnels, puisse continuer à se développer, en dépit des perspectives d'évolution de leurs moyens qui ne vont pas dans le même sens, bien au contraire. François-Xavier DUBOIS Directeur du CRPF Conclusion Ces différentes initiatives s'inscrivent totalement dans le mot d'ordre que le CRPF s'est fixé à lui-même : des PSG plus simples, plus nombreux, mieux suivis. Le groupe de sylviculture appliquée Le technicien du CRPF repère dans sa fiche "actions" quelques propriétaires de son secteur éprouvant les mêmes difficultés à réaliser la même intervention sylvicole, figurant dans leur PSG. Il leur propose donc de constituer un "groupe de sylviculture appliquée" pour accompagner la mise en œuvre de cette intervention par des visites chez chacun d'eux permettant des débats techniques, économiques et un échange d'expériences. Une fois les interventions réalisées, le groupe se dissout et ses membres sont encouragés à rejoindre d'autres structures de développement, comme les Cetef. Début 2014, plusieurs groupes ont été constitués sur ces principes, notamment autour de questions posées par le renouvellement des peuplements (douglas, pin maritime, chêne). * Retrouvez cet article, et d'autres, sur "la Force du PSG", dans Forêt-Entreprise n° 216 - juin 2014. Septembre 2014 3 La rénovation des parcs boisés est maintenant une réalité dans les Pays de la Loire dans le cadre du CETEF de Loire-Atlantique. La rénovation d’un parc est particulière et difficile, puisque liée à la vie d’une propriété attenante et donc remplie d’une histoire familiale. L’affectivité inévitable rend la tâche d’autant plus compliquée. Sensibilisé par la problématique qui est aussi celle de la sauvegarde d’un patrimoine et d’un paysage, le CETEF 44, en partenariat étroit avec le CRPF, a lancé il y a deux ans maintenant, un programme de formation pour les propriétaires demandeurs. L’une d’entre eux, Véronique du Parc, a accepté de nous donner son avis sur l’intérêt de cette formation. CETEF : êtes-vous décidé à engager cette rénovation dans votre parc ? VP : oui, par nécessité. D’ailleurs, des plantations et des élagages ont déjà été faits. CETEF : pouvez-vous exposer la situation de votre parc en Mayenne, vos difficultés ? VP : notre parc est encore beau grâce à ses arbres anciens, mais il est fragilisé par l’âge de ces derniers et les tempêtes. Nos principales difficultés sont de l’ordre des choix et des priorités à se donner. CETEF : quel fût le thème ayant eu le plus d’intérêt pour vous ? VP : pour moi, les thèmes les plus intéressants ont été ceux liés aux "vues" et aux évaluations de l’état sanitaire des arbres. CETEF : de quoi aviez-vous besoin ? Et étiez-vous suffisamment armée pour engager une rénovation ? VP : nous avions besoin surtout d’un œil extérieur plus objectif qui puisse juger sans affectivité et aider dans le diagnostic. CETEF : comment avez-vous connu l’existence de ce projet ? L’accès en a-il été facile ? VP : par le bouche à oreille et les démarches administratives pour l’inscription ont été simples. CETEF : trois jours (théorie et travaux pratiques sur le terrain) alternant avec une période de deux mois vous permettant d’appliquer aussitôt dans votre parc ce que vous avez appris, vous convient-il ? VP : la méthode est bonne, mais un peu tôt en saison Mme de Vautibault et sa fille, Mme du Parc, à La Feuillée. pour faire le diagnostic. CETEF : pensez-vous que cette formation est efficace ? Répond-elle à votre attente ? VP : oui car elle démystifie et peut déclencher ce challenge de rénovation. CETEF : votre regard sur votre parc a t-il changé ? VP : oui, car nous avons maintenant un regard plus critique sur les aspects vues, arbres et sur l’intérêt de la biodiversité. CETEF : et vous permettra-elle d’engager un plan d’action et une gestion dans le temps ? VP : oui, pour s’engager dans un plan d’action, car on a vu les priorités à don- ner et sommes convaincus par une gestion dans la durée. CETEF : qu’avez-vous retenu en premier lieu pouvant vous aider dans ce challenge ? VP : j’ai pu découvrir l’existence d’une structure technique accessible et des outils à notre portée. CETEF : enfin conseilleriez-vous à des propriétaires de parcs en mauvais état de suivre cette formation ? VP : oui, car cette formation est un premier pas et on y croise d’autres personnes ayant les mêmes problèmes et divers organismes qui peuvent nous aider. Christophe de Sagazan Inscriptions Les inscriptions pour la formation "Rénovation des parcs boisés" 2015 sont ouvertes, 3 journées, les 16 janvier, 27 mars et 7 mai, alternant théorie le matin, pratique l'après-midi avec une application immédiate sur son propre parc. Inscrivez-vous dès maintenant, les places sont limitées. Contact : Isabelle d’Arras [email protected] 4 2 Septembre 2014 CETEF 44 Interview : rénovation des parcs boisés _____________ Chêne : croissance rapide et qualité sont compatibles___ Le chêne si courant dans nos forêts ligériennes, est surtout très méconnu. Ainsi, ses capacités de croissance sont, trop souvent, très largement sous-estimées. Les gestions habituelles conduisent à pratiquer dans les peuplements jeunes des éclaircies trop tardives et trop timides pour que le réel potentiel de croissance du chêne puisse s’exprimer complètement. Les tests de gestion plus dynamique menés par le CRPF depuis une quinzaine d’années donnent des résultats démonstratifs sur la question. L’observation des marchés contredit l’éventuelle conséquence sur le prix. En gestion dynamique, il est indispensable d'assurer la qualité des bois produits pour bien valoriser la parcelle. Pour cela, il faut respecter trois conditions essentielles : • choisir soigneusement et assez tôt les arbres d’avenir (60 par hectare quand le peuplement atteint 12 m de hauteur dominante*). Les arbres choisis doivent être vigoureux, donc plus gros que la moyenne et bien conformés, • mener des éclaircies adaptées mais vigoureuses. En première éclaircie, parmi les techniques possibles, celle dite du détourage favorise la mise en place d’une gestion dynamique. Elle se pratique en éclaircissant vigoureusement les arbres d’avenir, sans intervenir, ou seulement à la marge, dans le reste du peuplement. Le taux de prélèvement, fonction du nombre d’arbres d’avenirs retenu, est en général voisin de 25% du peuplement. En plantation, ce détourage ne peut être pratiqué qu’une seule fois et toujours au moment d’une première intervention précoce, c'est-à-dire avant que la hauteur des arbres ne dépasse 12 m. Au-delà, la vitesse lente commence à être enclenchée. L’accélération reste encore possible, mais en douceur pour éviter l’accident. Les deux éclaircies suivantes seront des éclaircies, dites en plein. Espacées de 5 ans en général, elles éclaircissent l’ensemble du peuplement, même si les 60 arbres d'avenir sont toujours favorisés en priorité. Le taux de prélèvement sera un peu plus fort (35% du peuplement) •élaguer obligatoirement les arbres d’avenir à 6-8 m de haut lors de la première éclaircie pour assurer la qualité. Une croissance vigoureuse bonne pour l’économie et la biodiversité Pour le chêne, la tradition veut que les meilleures qualités ne s’obtiennent qu’avec une croissance lente (entre 1 et 2 mm par an). Ce mythe a la vie dure. Pourtant, la simple observation de la réalité des prix suffit à le réduire à rien. Aujourd'hui, la valeur du chêne est plus faite par la grosseur du diamètre que par la largeur du cerne. Ce point se vérifie régulièrement sur les coupes finales de futaies régulières. Sur une même parcelle en coupe définitive et donc avec des arbres d’âges équivalents, à qualité égale, les bois de gros diamètre sont toujours achetés plus chers au m3 que les plus petits diamètres. Pourtant, leurs cernes d’accroissement sont, forcément, plus larges. D’autre part, l’éventuelle baisse de qualité technologique du bois due à la vigueur et à la précocité des premières éclaircies est largement compensée par la régularité de la croissance et par l’élagage artificiel de la bille de pied, garantie de bois sans nœud. A cela s’ajoutent les bénéfices indirects liés à la meilleure stabilité et à la meilleure vitalité du peuplement. Ceux-ci, plus clairs, permettent le développement d’une végétation d’accompagnement variée et les houppiers (la tête de l’arbre), plus larges, favorisent les branches charpentières qui sont autant de sources de micro-habitats. * Hauteur dominante : moyenne des hauteurs des plus gros arbres de la parcelle. C. Weben - CRPF PDL Une croissance en liberté surveillée Avec une gestion adaptée, un sol et un climat favorables, le sylviculteur peut permettre au chêne une croissance bien supérieure à celle habituellement admise, sans que cela remette en cause sa qualité. Evidemment, cette croissance restera toujours loin de celle d’un châtaignier ou d’un douglas. Ce n’est cependant pas une raison pour le brider plus que nécessaire en le soumettant à des contraintes de concurrence inutiles. Cela ne doit pas non plus faire oublier que le chêne est un arbre au caractère bien trempé. Lui lâcher la bride ne veut pas dire le laisser-aller. Dans ce cas, le résultat risque fort de ne pas correspondre aux attentes. Les fourches, grosses branches et autres gourmands (petites branches qui se développent le long du tronc) profiteront de l’occasion pour se développer aussi à grande vitesse. Un chêne d'avenir élagué et détouré assure croissance, qualité et biodiversité. Faire le bon choix Le chêne, surtout le sessile, s’adapte assez facilement à différents types de sylviculture. Chacune a ses avantages et ses inconvénients. La gestion dynamique impose une première éclaircie précoce et l’élagage des arbres d’avenir mais réduit significativement l’âge d’exploitabilité et assure la qualité. La gestion traditionnelle demande moins d’investissement mais comporte, plus de risques, notamment du fait de l’allongement de l’âge d’exploitabilité et de la concurrence plus forte entre les arbres. Néanmoins, un des avantages de la gestion dynamique est son adaptabilité. Ralentir la croissance du chêne après la 3ème ou 4ème éclaircie pour se rapprocher d’une gestion classique est facile. Redynamiser la croissance d’un peuplement adulte géré de façon traditionnelle est autrement plus délicat. Christian Weben Ingénieur CRPF Bibliographie : "Le chêne autrement" Jean Lemaire IDF : [email protected] Septembre 2014 5 3 Les lisières forestières, refuges de biodiversité _______ Les petits massifs forestiers, très courants en Pays de la Loire, présentent l’avantage de produire de grandes longueurs de lisières. Ces lisières, comme les haies avec lesquelles elles sont souvent connectées, sont en général accompagnées d’un talus et d’un fossé ce qui en font des milieux extrêmement riches et diversifiés. Comme les haies, elles servent de refuge pour de nombreuses espèces animales et végétales, notamment pendant les périodes de l’année où les cultures des parcelles agricoles sont récoltées. Une lisière forestière comme une haie doit être entretenue pour qu’elle puisse remplir pleinement ses rôles. De l’avantage de la dispersion des forêts régionales La région des Pays de la Loire avec son taux de boisement voisin de 10 %, très inférieur à la moyenne nationale (30 %), tire un avantage particulier de cette faiblesse. Sur le territoire régional, à quelques exceptions près (le massif de la Breille les Pins à l’est du Maine et Loire par exemple) les forêts ne forment souvent que de petits massifs dispersés de quelques centaines d’hectares, comme le montre la carte ci-contre. Partant du principe que plus une surface est divisée et irrégulière, plus les longueurs de périmètres sont élevées, le rapport entre la longueur des lisières et la surface des forêts est donc élevé en Pays de la Loire. Cette forte proportion de lisières est un atout pour la biodiversité régionale, à condition de leur apporter l’attention qu’elles méritent. Il suffit dans la plupart des cas d’appliquer quelques simples règles de bon sens pour que les lisières puissent remplir au mieux leur rôle d’abri pour la flore et la faune et leur fonction non moins importante de protection de la forêt qu’elles bordent. Photo. Une faune et de la flore à la banalité précieuse Il n’existe pas de plante ou d’animal emblématique de la lisière forestière. Toutes les espèces de plantes qui s’y trouvent se rencontrent dans d’autres milieux, notamment en forêt, dans les prairies C. Weben - CRPF PDL Le morcellement des massifs forestiers ligériens conduit à des longueurs de lisières élevées, propices à la biodiversité. Un grand nombre d'espèces se côtoient dans ces zones de transition. 6 2 Septembre 2014 permanentes, les friches, les landes... En fonction de leur type, de leur localisation, de leur orientation, les situations de lisières varient rapidement sur de courtes distances, par exemple entre le côté soleil et le côté ombre, ou entre le sommet du talus et le fond du fossé. De nombreuses espèces peuvent ainsi se côtoyer malgré, parfois, des besoins assez différents vis-à-vis de la lumière, de l’humidité et de la concurrence. La situation est identique pour la faune. A l’exception de quelques rares insectes spécifiquement inféodés aux haies (Rosalie des Alpes, Pique-Prune), un grand nombre d'espèces sylvicoles et d'espèces de milieux ouverts peuvent se côtoyer dans les lisières forestières. Des linéaires variés à soigner Compte tenu de leur importance, le forestier a de nombreuses bonnes raisons de soigner ses lisières de forêt ainsi que tout ce qui s’apparente à des alignements forestiers comme les arbres de bord d’allée. L’importance de la diversité qu’elles abritent limite fortement le risque « d’explosions démographiques » des ravageurs. En effet, proies et prédateurs sont régulièrement présents en nombre suffisant pour que l’équilibre naturel entre ces populations puisse s’établir et se maintenir. Les oiseaux et chauve-souris insectivores, les rapaces, les reptiles, les araignées, les insectes régulent par qu’elle borde et abrite. Par son effet filtre, une lisière à la perméabilité bien dosée, freine le vent, ce qui réduit les risques de chablis (renversement des arbres). Trop claire, l’effet filtre est insuffisant. Trop dense, le vent butte sur la lisière, ce qui provoque des tourbillons violents dans les peuplements situés derrière et accentue le risque de bris de cimes ou de chablis. prédation ou parasitisme, les populations de ravageurs, pucerons, chenilles, campagnols. Ils ne les éradiquent pas mais maintiennent leurs populations à un niveau qui entraîne peu de baisse de vitalité sur les arbres ou les plantations et donc peu de pertes économiques directes. C’est la grande différence avec l’utilisation des insecticides. En effet, l’action du produit ne se limite pas en général à la destruction des populations d'insectes indésirables. Il a aussi comme conséquence de faire disparaître les auxiliaires, soit par le manque de nourriture du fait de la disparition des indésirables dont ils se nourrissent, soit atteints par un produit mal dosé ou insuffisamment sélectif. Le « vide » ainsi créé est rapidement comblé par les populations les plus opportunistes, en général les ravageurs, qui sont d’autant plus à l’aise pour se multiplier que leurs prédateurs ont disparu. La structure de la lisière est très importante pour sa capacité d’accueil et son efficacité en tant que brise vent. Le rôle de ces deux fonctions augmente avec la hauteur et le nombre de strates (d’étages) de végétation. Une lisière intéressante est pourvue d’une strate herbacée (herbes et végétaux bas), d’une strate arbustive (les arbustes et autres taillis) et d’une strate arborescente (les grands arbres). Comme la structure, la perméabilité de la lisière est un élément essentiel. Elle joue un rôle protecteur pour le boisement C. Weben - CRPF PDL Créer un couvert permanent permet d’abriter la faune sauvage toute l’année. Il est intéressant d’avoir des arbres au feuillage persistant comme le troène et le houx, ou marcescent (les feuilles sèchent mais restent sur l’arbre durant l’hiver) comme le charme et certains chênes qui servent de refuge durant la période hivernale. Les lisières doivent être perméables pour freiner le vent sans le bloquer. Conserver quelques arbres morts permet à certaines espèces de se loger. Les arbres âgés doivent être renouvelés pour la pérennité de la lisière mais en maintenir quelques uns est indispensable à certains animaux. La lisière forestière offre alors la possibilité d’habitat pour des insectes comme le Pique-prune qui ne peuvent survivre que s’ils disposent d’arbres à grandes cavités, où ils trouveront un terreau indispensable à leur développement larvaire. Par exemple, conserver un arbre mort (ne présentant pas un danger potentiel), tous les 100 m est favorable aux écureuils, chauve-souris et à de nombreux oiseaux, notamment les pics et rapaces nocturnes, comme la chouette chevêche, qui sont des grands prédateurs de rongeurs. Ainsi lors de plantation de terres délaissées par l’agriculture, les haies doivent être conservées autant que possible car elles apportent un abri aux jeunes arbres, favorable à leur démarrage, mais aussi à une flore et une faune variée. Il faut éventuellement tailler la haie avant la plantation et garder un passage périphérique pour l'entretenir. F. Averty - CRPF PDL • Fournir le gîte et le couvert Favoriser les arbres et arbustes à baies pour rendre les lisières plus accueillantes à la faune qui y trouve une source alimentaire précieuse. Le merisier, l'aubépine, le noisetier, le fusain d’Europe, les sureaux, la ronce, le lierre… offrent une nourriture recherchée par les animaux. Une très grande diversité de milieux sur l'espace restreint de ce large fossé et son talus. On favorisera aussi les essences mellifères pour attirer les insectes pollinisateurs : saules, aubépines, tilleuls, prunelliers… • Soigner et améliorer ses lisières, les intégrer au réseau bocager Les très nombreuses lisières de nos forêts, zones de transition entre l’espace forestier fermé et l’espace agricole ouvert, sont une source de diversité floristique et faunistique importante qu’il ne faut pas négliger. Le forestier, à l’occasion d’une intervention dans une parcelle comportant une lisière, doit lui porter un regard attentif afin de soigner sa structure et entretenir sa perméabilité. Le rôle environnemental des lisières est d’autant plus important qu’elles se trouvent connectées avec les haies bocagères. L’ensemble forme alors un véritable réseau favorable au déplacement des espèces animales et végétales. La Trame verte et bleue régionale, actuellement en cours de préparation, a ainsi pour objectif d’identifier les principales voies de circulation des espèces ; le maintien d’un réseau d’espaces boisés et de haies connectés entre eux sera primordial pour la biodiversité de notre territoire régional. Cécile LE FERREC Technicienne CRPF Septembre 2014 3 7 Ancien président du CRPF des Pays de la Loire et d'un grand nombre de structures nationale (Institut pour le Développement Forestier), régionale (Union Régionale Professionnelle de la forêt privée) et sarthoise (Syndicat des forestiers privés de la Sarthe), Alain de Montgascon nous a brutalement quittés le 28 juillet, au terme d'une vie consacrée à la Forêt. A ses enfants, petits-enfants et à toute sa famille, nous exprimons notre sympathie mêlée de respect et de reconnaissance pour ce grand forestier. Journal d’information forestière publié par le Centre Régional de la Propriété Forestière des Pays de la Loire, délégation régionale du Centre National de la Propriété Forestière - 36 avenue de la Bouvardière - 44800 Saint-Herblain Tél.02 40 76 84 35 • Fax 02 40 40 34 84 Mèl : [email protected] Sites : www.cnpf.fr Directeur de la publication : F.-X. DUBOIS Rédaction : C. WEBEN Réalisation : F. AVERTY Antoine de Ponton d’Amécourt Président du CRPF des Pays de la Loire Lors du Conseil de Centre du 8 juillet dernier, Antoine de Ponton d'Amécourt (à gauche sur la photo) a été réélu pour trois ans président du CRPF des Pays de la Loire. Nous le voyons ici, entouré des conseillers, de deux ingénieurs et du directeur du CRPF lors de la visite sur le terrain qui a suivi cette première réunion de son second mandat. On reconnaît sur la photo Alain de Montgascon (5ème à partir de la gauche), participant ce jour là à sa dernière journée forestière. La Feuille, bimestriel d'information forestière_______________ "La Feuille", envoyée gratuitement par messagerie électronique, est le complément du bulletin « Bois et Forêts en Pays de la Loire ». Elle vous informe sur l'actualité des réunions, des formations, de l’évolution de la réglementation et des évènements à ne pas manquer. Vous y trouverez des renseignements sur les démarches, travaux, techniques par le biais d’une sélection d’informations sur la forêt privée régionale. Pour la recevoir, il suffit d’aller sur le site du CRPF des Pays de la Loire : www.crpf-paysdelaloire.fr / se former, s'informer / lettre d'information. Indiquer alors vos coordonnées et vous recevrez le prochain numéro de "La Feuille" sans autre formalité. Se former pour sa forêt________________________________ Trimestriel : abonnement gratuit Imprimerie GRAPHY PRIM’ • Nantes 3ème Trimestre 2014 • Le stage Fogefor de base, avec une journée par mois sur 10 mois fournit les clés indispensables, concrètes et pratiques pour mieux connaître sa forêt et mieux maîtriser sa gestion. • Le stage Fogefor « rédiger son plan simple de gestion », avec 3 journées (12 septembre, 10 octobre et 21 novembre 2014) donne les clés nécessaires pour décrire sa forêt, définir ses objectifs et fixer le cadre de sa gestion. • Le stage Fogefor « rénovation des parcs boisés », les 16 janvier, 27 mars et 7 mai apporte les éléments nécessaires pour restaurer votre parc. Document réalisé avec le concours financier de la Région des Pays de la Loire et du Ministère de l’Agriculture, de l’AgroAlimentaire et de la Forêt Pour tous renseignements sur les réunions et les stages des CRPF, et pour s'inscrire, consulter le site www.cnpf.fr et abonnez-vous à "La Feuille" n° ISSN 1253-2185 2 8 Septembre 2014 B. de Grandmaison. Alain de MONTGASCON nous a quittés • que les utilisateurs de la forêt soient conscients : que l’on ne peut indéfiniment laisser la population de grands ongulés proliférer et qu’il est urgent de retrouver le bon équilibre forêt-gibier, que la production de bois d’œuvre ne nuit pas forcément à la biodiversité, que couper des arbres au bon moment cela fait du bien à la forêt ! Pour créer ou recréer une réelle dynamique de production forestière, il nous faut avoir un vrai esprit de filière… C’est le rôle de notre interprofession Atlanbois qui rassemble tous les intervenants et partenaires de la gestion forestière, de la récolte, de la transformation et de l’utilisation du bois. Ensemble, mobilisons nous pour l’avenir. 10-31-1280/certifié PEFC/pefc-france.org En bref… On n'a rien sans rien (suite) ___________________
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