Juin 2014 Sommaire Une 39e assemblée générale...............................3 Le vrai bonheur d’Adela ......................................4 Gabrielle Fortin / Le centre, un milieu de vie .....5 Côte-des-Neiges dans le temps ..........................6 Le dérangement ....................................................7 Une fin heureuse ...................................................8 Le Répit, paroles de mamans, d’enfants ............9 Aider les personnes qui ont des besoins ...........10 Moi j’embarque! ..................................................11 Le centre et la formation d’un citoyen .............12 Surmonter sa timidité ..........................................13 Nos préjugés .........................................................14 Adieu Camille ...................................................... 15 Noize : La comédie musicale ............................. 16 Noize : L’entrevue ................................................17 Noize : Les témoignages .....................................18 Noize : Les crédits ............................................... 19 Ça se passe au parc Jean-Brillant cet été...... 20 Notre ste web : www.cclcdn.com Équipe du journal Coordonnateur Serge Meyer Rédacteurs Denise Beaulieu Pierre Drolet Serge Meyer Correctrice Marie-Françoise Tricard Infographiste Équipe du centre communautaire de loisir de la Côte-des-Neiges Directrice générale Denise Beaulieu Coordonnatrice Famille Lucie Bérubé Coordonnatrice Adultes Jennate Berrahma Coordonnatrice Adolescents et 19-25 ans Monique Göhler Coordonnateur du programme Enfants Schneider Augustin Coordonnateur du Bénévolat Patrick Beaudoin Coordonnateur du projet Répit Ousmane N ‘ Diaye Rapprochement Interculturel Marie-Claude Barey Responsable de la logistique Danielle Mireault Comptable Louise Pelletier Accueil Ibis Espino & Islande Sylvain Adjointe-administrative Christiane Dubreuil Coordonnatrice du projet QEF Gabrielle Fortin Adjointe à la comptabilité Ilka Paz Coordonatrice du projet Moi J ‘ embarque Maria Munera Responsable de l ‘ informatique Bernard Slama Sarah Bordeleau Note de la direction : Le Centre Communautaire de Loisir CDN favorise l ‘ expression des idées, néanmoins, les auteurs des articles publiés dans ce journal, conservent l ‘ entière responsabilité de leurs opinions. 2 Une 39e assemblée générale ! Christiane Dubreuil Adjointe administrative L ‘Assemblée générale du 4 juin, un beau moment de démocratie ! ! Une assistance forte de 150 personnes, dont 139 membres du Centre, était présente au Centre ce mercredi pour l ‘Assemblée générale annuelle. Mmes Denise Lacelle, coordonnatrice de la Corporation de développement communautaire de CDN avait accepté d ‘en assurer la présidence. Au programme, les rapports de la Présidente du Conseil d ‘administration, Mme Catherine Soleil, de la Directrice générale Mme Denise Beaulieu et de la Trésorière Mme Martine Ouellet et l ‘élection du nouveau Conseil d ‘administration. Mais aussi l ‘occasion d ‘échanger, de prendre du temps pour découvrir, apprécier l ‘action du Centre et se retrouver entre nous autour d ‘un plantureux et délicieux buffet de l ‘amitié. Encore merci à tous les membres et représentants des bailleurs de fonds et organismes partenaires qui nous ont apporté leur soutien à cette occasion ! ! Les membres du Conseil d'administration, dans l'ordre à partir de la gauche vers la droite Nicolas Trinh, Catherine Soleil, Josée Bélanger et derrière elle, Ingie Joseph Maire-Josée Demers et dernière elle, Joelle Namer, Michel Marcouiller et dernière lui, Martine Ouellet. Véronique Mazerat, à droite 3 Le vrai bonheur d ‘Adela Serge Meyer, bénévole De toute évidence, je la sentais très à l ‘aise au milieu des enfants qui l ‘entouraient à Croquignoles, mais lorsque je lui ai demandé si elle accepterait de me parler d ‘elle pour un article dans notre petit journal, j ‘ai perçu que je l ‘indisposais un peu, ce qui ne l ‘empêcha pas d ‘accepter malgré tout, et ce, je le devinais, par pure gentillesse. Adela Rollo est le genre de personnes qui ne tiennent pas à parler d ‘elles : son travail avec les enfants la comble, elle aime l ‘accomplir dans la discrétion et n ‘a nul besoin de publicité. communautaires et aide à la cuisine pour les événements que le Centre organise. En 1998-1999, Denise Beaulieu propose à Adela de travailler de 13 à 16 h 30 à la halte-garderie de « Un, deux, trois, go » située rue Bouchette, en quelque sorte une mini-filiale des Ateliers Croquignoles, lesquels relevaient alors de Georgetta Batog. En 2000, Adela travaille avec Lucie Bérubé au Salon familial où elle s ‘occupe des enfants. Enfin en 2004, commence sa carrière d ‘animatrice aux Ateliers Croquignoles. Pour conclure, laissons la parole à Adela : « Travailler ici est un privilège, une vraie joie, et pour moi, ça l ‘est depuis le premier jour ». Sortie sous le soleil Jennate Berrahma Des membres du club de marche et du programme “Parlons français”, bénévoles et participants, ont effectué la visite aux tulipes à Ottawa. Les 29 participants à cette sortie ont Arrivée du Mexique où elle avait étudié en administration pu faire le plein de soleil qui était enfin au rendez vous. Au puis travaillé pour une petite entreprise spécialisée en programme également l’incontournable Musée canadien études de marché, elle décide de venir voir ce qu ‘est la vie au des civilisations! Canada et choisit d ‘y rester malgré la dureté des hivers. À ce propos, elle précise que si elle avait fait la même démarche à l ‘âge qu ‘elle a actuellement, elle ne serait probablement pas restée, surtout après un hiver aussi rigoureux et interminable que celui que nous venons de connaître. Pour son premier été en sa nouvelle terre, elle a, comme beaucoup d ‘immigrants indique-t-elle, travaillé dans ce qui était encore la campagne, à Sainte-Dorothée… dans les tomates. Plus tard, elle occupera un poste de vendeuse dans un magasin de souvenirs du Vieux-Port, ce qui lui vaudra une belle (sic) expérience avec une clientèle cosmopolite. Nous sommes en 1994, il y a vingt de cela, Adela demeure rue Gatineau, juste en face du Centre. Sa fille a trois ans et elle l ‘inscrit aux Ateliers Croquignoles où la petite vivra sa première expérience de socialisation. Le temps passe, la fillette atteint l ‘âge scolaire, elle a maintenant un petit frère qui, par faveur spéciale, sera admis à Croquignoles un tout petit peu avant sa deuxième année. C ‘est alors qu ‘Adela participe à l ‘activité Maman et les bébés dirigée par Monique Göhler. Comme elle dispose de temps maintenant, Adela s ‘engage dans le bénévolat… au Centre, bien entendu. Ainsi, passe-t-elle par l ‘Accueil. Là, si elle aimait bien les filles qui y travaillaient à l ‘époque, elle trouvait cependant la tâche difficile, parce que c ‘était la période du camp d ‘été et elle ne se sentait pas en mesure de répondre de manière satisfaisante aux nombreuses questions qui lui étaient posées. Elle participe ensuite à la préparation des repas 4 Gabrielle Fortin, pleine de vie et de projets Le Centre un milieu de vie… Patrick Beaudoin, coordonnateur au bénévolat Denise Beaulieu, directrice générale Les bénévoles nous disent comment ils aiment s ‘impliquer au Centre. C ‘est agréable, réjouissant, enrichissant. Elle est avec nous depuis 4 ans ! Elle a été adjointe à la L ‘ambiance est chaleureuse, ajoutent-ils. coordination du programme enfants, sous la gouverne de Schneider Augustin. Elle a été animatrice de psychomotricité dans les écoles primaires du quartier. Et l’année dernière, Ils nous disent aussi apprécier l ‘autonomie qu ‘on leur elle a été chargée de la formation en psychomotricité des accorde et qui leur permet de partager leur expérience éducatrices en CPE et en services de garde en milieu familial du quartier CDN. Ce projet était financé par Québec en Forme. Gabrielle a convaincu 9 CPE et 11 services de garde en Pour reprendre les mots de Ghislaine Larocca, bénévole : milieu familial de former leurs éducatrices dans le domaine « Le Centre est un lieu où l ‘on rencontre l ‘autre qui est de la psychomotricité afin de favoriser un développement souvent notre miroir ». optimal des enfants. C’est ainsi que Gabrielle et Alejandra Médina Lopez ont habilité 116 éducatrices à introduire les jeux de psychomotricité dans leur quotidien en garderie C ‘est bien de cela qu ‘on parle… et elles ont suivi 37 éducatrices en CPE dans l’application des éléments appris lors de la formation. En avril, Gabrielle À l ‘aide aux devoirs, au « Parlons français », dans les organisait aussi un grand événement de psychomotricité au Ateliers de conversation française, au Café des parents, au Centre, étalé sur 3 jours, auquel 400 enfants ont participé. lundi Québécois, dans les activités de loisirs jeunesse, et j ‘en Mais l’aventure se termine ici. Québec en forme a décidé de passe, les bénévoles sont présents. ne plus subventionner ce projet et Gabrielle, plein de fougue, de jeunesse, de créativité et de curiosité, a décidé de relever d’autres défis ailleurs. Ils animent, ils favorisent la création de liens, entre eux et Merci Gabrielle pour ton engagement au Centre. Nul doute entre les participants. Ils accueillent « l ‘Autre » qu ‘il soit que tu sauras relever les nouveaux défis qui se présenteront participant ou bénévole. Ils se soutiennent. à toi ! Photo de Gabrielle Fortin Les bénévoles apportent l ‘ouverture sur notre société, montréalaise et québécoise. Les bénévoles sont l ‘esprit et le contenu. Ils sont l ‘âme du Centre, ce lieu agréable, réjouissant, enrichissant, où l ‘ambiance est chaleureuse. Ils nous disent que c ‘est un privilège d ‘être bénévole au Centre. Merci d ‘être là. C ‘est un privilège de pouvoir travailler avec vous. 5 CÔTE-DESNEIGES DANS LE TEMPS : Le 30 avril dernier, le Centre organisait en collaboration avec la Société d ‘Histoire de Côte-des-Neiges une soirée racontant l ‘évolution de Côte-des-Neiges depuis une centaine d ‘années. M. Pierre Ramet, coordonnateur de la Société d ‘Histoire a entretenu les participants du passage du Côte-desNeiges rural au quartier urbain que nous connaissons aujourd ‘hui. Des lectures d ‘extraits de romans et de poèmes ayant pour cadre Côte-des-Neiges faites par Denise Beaulieu, Bernard Slama et Marie-Françoise Tricard, sont venues étayer les causeries de M. Ramet et de M. Gilbert Dupuis. Originaire de Côte-des-Neiges, M. Dupuis y réside depuis sa naissance. Il nous a raconté son enfance et son adolescence rue Jean-Brillant qui ne s ‘appelait pas encore ainsi à l ‘époque. Une animation, des quiz et des prix de présence ont complété la soirée. Source photo : www.imtl.org 6 Le dérangement Gilbert Dupuis, résident du quartier Le temps passe et nous passons avec… C’est pour passer un peu moins vite, qu’on fait l’exercice de la mémoire. Celle d’un quartier, en outre. Celle de Côtedes-Neiges. Je suis né rue Tremblay en 1953. J’habite à trois portes de ma maison natale. Mes enfants sont nés aussi dans cette rue et y habitent toujours aujourd’hui. Mes petits enfants jouent au ballon dans la même entrée de garage que moi, à l’époque. C’est dire. Cependant, entre le moment où je suis né et aujourd’hui, le quartier s’est profondément transformé. Il y a eu bien sûr, le dérangement. Pour moi, dont la Famille est d’origine acadienne, le grand dérangement, cette effroyable déportation de nos ancêtres par les troupes de l’Empire britannique, d’évidence, signifie beaucoup. Conséquemment, il ne saurait y avoir qu’un seul grand dérangement. Par contre, un dérangement comme celui propre à Côte-des-Neiges est une autre calamité. On le doit à l’Université de Montréal, à l’époque où la moitié de ma rue a été détruite : un quadrilatère complet et quantité d’espaces verts ont fait place à une horreur architecturale, inspirée des murailles de la ville de Carcassonne – l’architecte venait d’y passer ses vacances ! Ce souvenir de vacances architecturales en gâche toujours la vue, en face de chez nous, faisant insulte à l’œuvre d’Ernest Cormier, le grand architecte de la modernité québécoise et créateur de l’Université, version originale. Ce faisant, le dérangement a aussi emporté le nom de ma rue. De Tremblay, elle est devenue Jean-Brillant. Je n’ai rien contre ce capitaine, héros de la Première Guerre, la Grande, comme ils disent, mais enfin. Bref, aujourd’hui, je veux vous parler de la rue Tremblay, donc du quartier avant le dérangement. J’ai une photo de moi, en 1956 devant la maison que j’habitais. La maison n’a pas changé. Moi, si. Qui était ce jeune enfant ? Cet autre moi, qui n’est plus moi, mais qui en même temps, me constitue ? Il jouait dans une rue ou il n’y avait pas beaucoup de voitures. En face de chez lui demeuraient des gens célèbres, la famille Nadeau, dont le fils Pierre, grand copain de mon frère, allait devenir un grand journaliste à l’époque ou RadioCanada était autre chose que son ombre. Derrière les Nadeau, où se trouvent aujourd’hui le bunker – autre horreur architecturale, due, cette fois aux HEC-, angle des rues Jean-Brillant et Decelles, il y avait des vergers et des jardins appartenant à une communauté religieuse - qui allait être expulsée par ledit dérangement. Ces lieux étaient gardés par de gros lions de pierre qui impressionnaient les badauds qui passaient devant, rue Decelles. Notre plaisir était de les chevaucher, bien que ce genre d’acrobaties fût interdit… Cavalcades célestes qui nous amenaient aux confins du monde ! La rumeur – ma mère, en fait !- disait que si on pénétrait dans le jardin des religieux, les lions devenaient vivants et nous bouffaient, sur le coup, comme les saints martyrs canadiens. Personne parmi mes copains n’avait envie de connaître le sort d’un saint martyr canadien. Conséquemment, on ne mettait jamais les pieds dans le jardin. Sauf une fois. Tentation, tentation… C’était le temps des patates. Il y en avait partout dans le champ. On en a volé… Mal nous en prit ! Il a fallu nous sauver à toutes jambes. Cette fuite éperdue m’a valu une première visite dans une autre institution du quartier : l’hôpital Sainte-Justine. Les lions ne m’avaient pas mangé, mais je m’étais brisé un poignet à cause d’une mauvaise chute, en sautant une clôture beaucoup trop haute pour moi. Depuis, les patates ont un goût légèrement amer… que je ne pouvais chasser qu’en fréquentant la boutique de Mme Pépin, grande vendeuse de bonbons, à quelques portes de chez moi. En fait, la boutique de la dame se trouvait là où une maison à appartements donne, aujourd’hui, sur le parc Jean-Brillant, à quelques pas de la nouvelle garderie. Mme Pépin avait au moins l’âge du quartier. C’est dire… elle devait avoir dans les 300 ans, Mme Pépin, mais ça faisait notre affaire qu’elle soit encore là ! Ses bonbons avaient à peu près le même âge, d’ailleurs. Ce qui me valut ma première visite chez ce monstre, bien réel, lui, qu’on nomme le dentiste ! Enfin, la boutique de Mme Pépin était en bois tout comme sa maison. Une des dernières bicoques de l’autre siècle, comme disait mon père. Y pénétrer était, à chaque fois, une aventure magique. Deux vitrines nous attiraient avec toutes sortes de trésors : modèles réduits, jouets surannés, d’autant plus intéressants qu’ils étaient surannés, et bien sûr, les fameux bonbons. La porte grinçait. L’odeur, en y mettant les pieds, ça sentait la pipe ! Eh oui, Mme Pépin fumait la pipe. Elle avait bien le droit, à 300 ans ! De plus, elle fumait un tabac qui, et ce n’est pas une blague, portait le nom de la rue : Tremblay. Le tabac venait, en grosses feuilles, qu’elle hachait avec une terrible machine tranchante. Le tout provenait, disait-elle fièrement, de la région de Joliette. Une fois dans la boutique, on pouvait prendre tout notre temps pour choisir. C’étaient des bonbons à une cenne. Avec cinq sous, on était riches ! Mme Pépin nous posait des questions, nous parlait de l’école. Une fois qu’on avait fait le tour de la boutique, dépensé nos cinq sous, on sortait, la bouche pleine, pour aller parler avec le père de mon ami Felli, le tailleur, qui tenait commerce à deux pas de Mme Pépin. On aimait bien monsieur Felli. Il fumait, en fin de journée, une cigarette – une seule !- et se moquait pas mal qu’on avale des bonbons, contrairement à sa femme de qui on devait se cacher, si jamais elle apparaissait. M. Felli se prénommait Tobia. Il demeurait en haut de sa boutique, avec toute sa famille. Sa boutique était pleine de tissus anglais et italiens… des trésors doux, au toucher ! Mais rien ne nous fascinait plus que ses grands ciseaux. On les aurait dit sortis tout droit de La Boîte à surprises, une émission produite par Radio Canada, à l’époque où... Donc, des ciseaux magiques qui servaient, nous racontait-il, non seulement à couper les tissus, mais aussi à séparer le jour de la nuit… Eh oui. C’est monsieur Felli qui coupait la lisière entre le jour et la nuit. C’était là le travail secret du tailleur, mais c’était aussi un secret, qu’il ne fallait pas répéter, sous peine de mettre Côte-des-Neiges sens dessus dessous. Imaginez s’il fallait que quelqu’un s’empare des ciseaux ! Par exemple un architecte qui vient de passer ses vacances à Carcassonne et à qui l’Université de Montréal confie un autre projet ! J’ose à peine imaginer ce qu’il pourrait faire avec de tels ciseaux ! Secret, donc… Secret… Et je vous demanderais de ne pas le divulguer, tout adulte que vous soyez. À personne. Même aujourd’hui. Surtout aujourd’hui. Car ils servent encore, les ciseaux. Hé oui. Ils vont même servir à l’instant ! Figurez-vous que c’est avec eux, que je vais couper le fil du texte que vous lisez. Car j’ai déjà dépassé allègrement les 25 lignes qu’on m’avait octroyées. Mais un fil, ça se renoue. Particulièrement lorsqu’on vit dans un quartier qui est habité par des Grâces. À l’origine, elles étaient cinq, et puis trois, et puis… Elles sont restées dans le quartier, mais elles habitent maintenant le cimetière. Ce qui ne les empêche pas d’être encore actives ! Si vous saviez ce qu’elles font avec le fil des histoires ! Mais ça, c’est un autre texte… Source photo: Volume des villes” / Marcel Paquette “Montréal, une île, 7 UNE FIN HEUREUSE... Ousmane Ndiaye, coordonnateur du projet Répit. Ah oui! Toutes les bonnes choses ont une fin... une affirmation que la grande famille du répit a eu du mal à digérer le 15 juin dernier,marquant la sortie de fin d’année annuelle au magnifique paysage du CAP ST JACQUES. Malgré la petite fatigue qui se lisait sur les visages de certains jeunes, du fait entre autres du soleil tapant, l’effervescence était toujours là quant au fait de pouvoir enfin arriver à la plage. Les discussions vont bon train en ce sens et les questions fusent de partout mais toujours la même à savoir « c’est quand qu’on y va à la plage?» Le temps de ré-embarquer dans le bus depuis la ferme, nous arrivons vers 12h30 à la plage et là on découvre pour la plupart d’entre nous quelque chose qui dépasse notre entendement, un endroit que le terme magnifique ne saurait à lui seul qualifié. Le temps de réaliser que c’était vrai, les activités débutent : baignade, jeux sur le sable, bronzage, détente... Nous avons vite compris à travers les réactions spontanées des parents et de leurs petits que nous venions de marquer un bon coup en créant une ambiance favorable au dialogue, au rapprochement entre les familles, au renouement et au renforcement des liens, ce qui participent grandement à dissiper les tensions liées à un quotidien stressant. Une telle ambiance s’est poursuivie et s’est accentuée lors du copieux repas partagé ensemble. Pour tout vous dire, nous n’avons pas vu le temps passé et il fallait respecter les horaires du bus. Ceci étant, l’annonce du départ à été un peu dur; mais ce que tout le monde venait de En effet, tout a débuté avec une magnifique journée vivre était tellement grandiose que le regret et l’amertume ne ensoleillée, des parents et des enfants au rendez vous et très pouvaient en aucun cas assiéger les cœurs où étaientt déjà enthousiasmés par le programme soigneusement concocté gravés les mots joie et bonheur. par l’équipe engagée du Répit. Il était 9h30 lorsque nous Ainsi il est 17h lorsque les premiers passagers descendent avons commencé à accueillir les premiers parents avec leurs du bus pour renter à la maison et la mine du soir était très enfants sourires aux lèvres et un peu d’appréhension de la différente de celle du matin. Tout le monde était visiblement part des parents. L’heure du rendez vous étant respectée et heureux et l’unique mot qui sortait de leurs bouches était pas d’annulation de dernière minute, voilà un premier défi «MERCI!» relevé car ce n’était pas gagné d’avance. Il est 10h du matin, comme prévu, lorsque les premiers passagers font leur entrée dans le bus. Le temps que tout le monde s’installe confortablement et que les consignes et le déroulement de la journée soient annoncés, nous voilà direction le CAP SAINT JACQUES. Il est environ 11h lorsque nous arrivons comme prévu au programme à la ferme écologique. Sur place, le temps d’une collation nappée d’un accueil chaleureux, nous avons vite oublié l’ambiance morose de la ville au profit d’une ambiance vivante et attrayante tant au niveau du décor environnemental que des hommes qui y habitent et/ou qui y travaillent. La visite libre de la ferme qui a duré environ une heure a permis à beaucoup d’entre nous, des profanes pour la plupart, d’apprendre des choses sur la faune et la flore et par là d’enrichir notre vocabulaire en la matière. 8 Note de la direction : « MERCI. » Depuis 1996, le Centre offre une activité de Répit aux familles en difficulté de notre quartier. Pendant 24 heures, du vendredi 18 h au samedi 18 h, nous accueillons des enfants de 5 à 11 ans, dans les locaux occupés en semaine par la halte-garderie Croquignoles. Une équipe d ‘animateurs dévoués et engagés s ‘évertuent à recréer, dans ces locaux, une atmosphère familiale, mais encadrante, permettant aux enfants d ‘évoluer et de grandir, tout en leur faisant vivre des moments de plaisir, de découvertes et d ‘échanges. Depuis 2 ans, le Répit, menacé de fermeture, a pu survivre grâce au support financier de Centraide. Le Répit, nous y croyons. Nous sommes certains qu ‘il a un impact positif sur la vie des enfants et des parents. Nous nous évertuons chaque année à recueillir les commentaires reçus des parents qui nous indiquent que nous atteignons nos buts. Cette année, s ‘y rajoutent aussi les commentaires des intervenants qui nous les référent. C ‘est avec plaisir que nous vous en transmettons quelques-uns. Merci pour tous ces témoignages qui nous renforcent dans l ‘idée, que le Répit fait une différence dans la vie des familles rejointes. Longue vie au Répit ! Bonne lecture, En définitive, le constat effectué par nos partenaires en l ‘occurrence les intervenants jeunes en difficulté du CSSS est unanime et se résume en ces propos : « les familles qui bénéficient du service répit, se disent très satisfaites des services qu ‘elles reçoivent et tous sans exception souhaitent qu ‘ils continuent. » Le Répit : paroles de mamans, d ‘enfants, d ‘intervenants Propos recueillis, par Ousmane Ndiaye, coordonnateur du Répit Une maman monoparentale qui a beaucoup de difficulté à élever ses trois enfants et pour qui le répit est un véritable soulagement nous a confié ce que le Répit lui a apporté : « J ‘ai le temps de relaxer, j ‘économise de l ‘argent lorsqu ‘on emmène les enfants à des sorties et on leur apprend à prendre soin d ‘eux-mêmes et à être autonomes. J ‘ai du temps pour moi et cela m ‘aide beaucoup. Je suis contente qu ‘ils aient l ‘opportunité de participer à ce projet. » Une autre maman qui a de sérieux problèmes de santé et qui a beaucoup de mal à s ‘occuper de son enfant surtout la fin de semaine, faisant que ce dernier souffrait d ‘un réel manque de stimulation avant son arrivée au répit. Au point que lors de notre première rencontre elle lançait ce cri de détresse en ces termes : « aidez-moi, mon fils ne fait rien, ne parle pas, je suis fatiguée. » Aujourd ‘hui, elle se réjouit non seulement de l ‘évolution comportementale de son enfant qui rit, parle, chante et danse, mais aussi du fait de la diminution du stress, elle voit ses problèmes de santé vraiment atténués et quand elle vient chercher son enfant cette mère isolée n ‘a qu ‘un seul mot sur les lèvres qu ‘elle répète sans arrêt, c ‘est Ainsi, la travailleuse sociale scolaire, Mme Vignola du CSSS de la Montagne qui suit un enfant ayant des difficultés particulières, a pu elle-même noter un changement positif comportemental depuis sa fréquentation du répit. D ‘ailleurs, elle a tenu à témoigner pour cet enfant et pour les autres dont elle assure le suivi et voilà les propos tirés de son témoignage : « J ‘ai eu le bonheur d ‘être témoin de progrès considérables chez des enfants qui s ‘exprimaient très peu et qui étaient incapables d ‘établir des liens constructifs avec d ‘autres enfants, ceci en partie grâce au Répit. » Suivant un tel ordre d ‘idées Mme M. C. Manga Travailleuse sociale scolaire à l ‘école des Nations a recueilli les témoignages des enfants dont elle assure la référence et le suivi avec nous, et voilà ce qui ressort de son enquête : « Je m ‘amuse très bien, j ‘ai appris à prendre soin de moi et de mes deux petits frères ; et j ‘ai aussi pu passer du temps avec d ‘autres enfants. J ‘ai appris à cuisiner, à faire des pâtisseries, à servir les autres et à partager mon talent. J ‘ai appris à prendre des responsabilités comme donner des médicaments à mes frères lorsqu ‘ils sont malades. Je suis très heureuse de participer à ce projet. J ‘ai beaucoup appris. » N. E 11 ans. « Nous nous amusons tellement bien là-bas, nous apprenons à partager, à nous occuper des autres et à apprécier les autres. Nous sommes très reconnaissants pour toutes les sorties que nous avons les samedis, nous allons au cinéma, au théâtre, à la piscine, à la bibliothèque, à des spectacles et nous avons hâte de connaître les prochaines activités. Nous remercions tous les animateurs et nous apprécions beaucoup ce qu ‘ils font pour nous. » E et M 6 et 9 ans. Tout compte fait, nous pouvons dire sans risque de nous tromper que le Répit participe au bien-être des familles concernées. Ceci est l ‘avis de Mme Lamarche, travailleuse sociale scolaire pour le CSSS qui réfère des enfants au répit depuis plusieurs années ; elle soutient que : « le Répit participe sans nul doute à l ‘équilibre de la famille en permettant aux parents d ‘être plus disponibles et plus positifs pour ses enfants après ce moment de répit ». Ainsi ajoute-t-elle : « Le répit participe dans une certaine mesure à atténuer les tensions au sein de la famille ». 9 Aider les personnes qui ont des besoins devenant membre du conseil d ‘administration du Centre et de son comité Finance. Dans ce rôle, il compte, non seulement être utile, mais encore enrichir son expérience. Si pour Nicolas, le bénévolat c ‘est, entre autres choses, rompre avec la routine du quotidien, c ‘est surtout aider à Serge Meyer, bénévole créer un environnement convivial en comblant les besoins Né dans la banlieue parisienne de parents d ‘origine qui s ‘y font sentir dans toute la mesure de ses possibilités. vietnamienne, Nicolas Trinh est arrivé au Canada en 2002 pour y poursuivre ses études à l ‘École Polytechnique dont il détient une maîtrise en génie mécanique. On a sonné les cloches pour un Québec sans pauvreté Si la ville de banlieue où il a été élevé a la réputation d ‘être plutôt bourgeoise, elle n ‘en possède pas moins une cité, ces endroits très peuplés, pour ne pas dire surpeuplés, où se dressent des HLM tristes et sans caractère qui, à l ‘écart du cœur des villes, regroupent des familles à revenu modeste, immigrées ou frappées par le chômage. C ‘est sans doute un tel contexte qui, outre sa nature, a amené Nicolas à Marie-Claude Barey, développer une évidente conscience sociale Cette conscience sociale l ‘a conduit durant ses études à devenir président d ‘ingénieurs sans frontières (ISF) Canada, section de l ‘École Polytechnique de Montréal. Fondée en 2002, cette section a permis à plusieurs dizaines d ‘étudiants de mettre en pratique leurs valeurs humaines au sein d ‘ISF, tant dans les programmes au Canada que dans les programmes à l ‘international. Comme toutes les autres sections universitaires, cette section tient au cours de l ‘année différentes activités à l ‘intérieur des aires de travail nationales. Au cours des dernières années, elle a décidé de concentrer son travail autour de l ‘ingénierie globale, c ‘està-dire la bonne pratique de l ‘ingénierie dans le contexte actuel de la mondialisation*. À sa façon, Nicolas définit la raison d ‘être de l ‘Association comme visant à abolir l ‘extrême pauvreté dans les pays africains qui en souffrent, par exemple dans le domaine de l ‘eau et de l ‘alimentation. Pour le milieu universitaire, il s ‘agit à long terme de former des ingénieurs qui tiennent compte de la réalité du terrain des pays concernés. Pour ce faire, deux étudiants vont passer chaque année quatre mois en Afrique. Au Canada, ISF fait de la sensibilisation dans les écoles afin d ‘éveiller les jeunes aux réalités de pays moins favorisés. Mais ISF Poly appartient au passé pour Nicolas. Il lui faut concrétiser son engagement dans le milieu, dans son milieu, en aidant les personnes qui ont des besoins par une action positive. Alors, voilà qu ‘il reçoit le programme du Centre, lit son annonce de demande de bénévoles, songe d ‘abord au badminton, mais opte pour l ‘aide aux devoirs. Nous étions en 2012. Actuellement, il apporte son soutien, spécialement en math, à raison de trois heures par semaine le vendredi, à des élèves dont le niveau varie de la fin du primaire au CÉGEP. Ceux-ci fréquentent divers établissements, dont le collège Notre Dame, le collège international Marie-deFrance, les écoles Lavoie, Mont-Royal et Côte-Saint-Luc. Depuis octobre dernier, Nicolas a élargi son engagement en 10 Coordonnatrice, Programme de rapprochement interculturel Le 29 mai dernier, à l ‘heure du midi une douzaine de membres du Centre s ‘est installée près du trottoir devant le Centre et a sonné les cloches pour demander au gouvernement du Québec, à la veille du dépôt du prochain budget, d ‘agir contre la pauvreté. Solidairement, nous avions répondu à l ‘appel du Collectif pour un Québec sans pauvreté qui nous invitait à interpeller le gouvernement du Québec et lui signifier que nous voulons un plan d ‘action : • Qui assure à toutes et à tous un revenu suffisant pour couvrir l ‘ensemble de leurs besoins de base ; • Qui augmente le salaire minimum afin de permettre aux gens travaillant à temps plein de sortir de la pauvreté ; • Qui réduit les inégalités socio-économiques entre les plus pauvres et les plus riches ; • Qui vise à changer les mentalités et à contrer les préjugés envers les personnes en situation de pauvreté ; • Qui améliore l ‘accès, sans discrimination, à des services publics universels et de qualité. C ‘est dans la bonne humeur et sous un soleil radieuxque nous avons sonné les cloches et alerté les passants dont beaucoup nous approuvaient d ‘un signe de tête ou s ‘arrêtaient devant nos pancartes présentant nos demandes. La lutte contre la pauvreté est une des priorités de la concertation dans le quartier, le Centre y contribue à sa manière. Et sensibiliser la population aux solutions qui existent aide à lutter contre cette fausse fatalité qu ‘est la pauvreté ! Moi j’embarque ! comme celle-ci travailler ensemble, coopérer et partager cette incroyable énergie réjouissante ! Merci pour cette merveilleuse expérience =) » — Chris, 18 ans — Maria Munera, coordonnatrice du projet MJ En mars 2013 le Projet Moi J’embarque a été pris en main par une nouvelle gérance. Le but du changement a été de replacer le projet sur le cheminement espéré ainsi que de le réaligner avec les objectifs établis lors de la création du projet. Des efforts ont été enclenchés pour aller chercher la clientèle cible : des jeunes de 16 à 25 ans ayant besoin d’une expérience d’appui pour leur insertion sociale et économique. Grâce à l’utilisation de différentes méthodes de recrutement, le projet a suscité un grand intérêt auprès des jeunes et le nombre de candidats voulant s’inscrire au programme a été supérieur au nombre de places disponibles par session. Il a donc été nécessaire de différer certaines demandes pour la session suivante. D’autre part, une refonte du curriculum a permis d’offrir une formation théorique et pratique complète contribuant au développement de différentes compétences en organisation et gestion de projets chez les participants. L’acquisition de diverses notions tant théoriques que pratiques a donné aux jeunes les outils nécessaires pour organiser des projets de moyenne et de grande envergure. Au cours de l’année, le Projet Moi J’embarque a su se démarquer par la qualité du travail accompli par ses membres. Les jeunes ont développé un lien d’appartenance envers le programme et même après avoir terminé leur stage ils/elles offrent aide et soutien aux nouvelles équipes de MJ. « J’ai appris à organiser mon travail, que ce soit dans un contexte événementiel ou scolaire. En effet, à chaque événement, il fallait réfléchir sur notre main d’œuvre, notre budget et notre temps permis. J’ai réalisé à quel point il est important de s’y prendre à l’avance et que la publicité est très importante afin d’attirer les gens. Finalement, j’ai appris à répartir les tâches avec mes coéquipiers et surtout, coopérer avec eux dans le plaisir et l’harmonie ! L’entraide dans une équipe est extrêmement importante. » — Casta, 19 ans — « Mon expérience a été vraiment géniale, c’était super fun ! Et en même temps, on a appris de nouvelles choses qui vont nous servir pour plus tard. Cette expérience m’a appris à ne pas être timide et à être ouverte d’esprit. Aussi, à partager de bons moments avec de nouveaux amis » — Daniela, 18 ans — « C’était vraiment plaisant d’être membre de ce groupe. Je me suis surprise moi-même en voyant que je pouvais organiser des événements avec les autres. Les événements ont été intenses et à la fin de chacun d’eux, je me suis sentie fière de moi et de MJ ! » — Soheui, 16 ans » D’ici le mois de décembre, nous espérons rejoindre 3 autres groupes de jeunes pour un total de 24 jeunes au moins. Si vous êtes intéressés, renseignez-vous auprès de Maria Munera à l’adresse suivante : [email protected] Moi j’embarque !...Et vous, qu’attendez-vous ? Du mois d’avril 2013 au mois de mars 2014, le projet a rejoint 23 jeunes de 16 à 24 ans, soit 9 hommes et 14 femmes, répartis en 3 groupes. 61 % étaient étudiants au niveau secondaire et 39 % au niveau Cégep. Cette belle équipe de jeunes a Le 1er groupe de M.J. — avril à juillet 2013 — contribué à l’organisation de 7 événements au Centre et a collaboré à l’organisation de 7 autres. Ce projet a pu être réalisé grâce à une subvention de l’arrondissement au titre du programme Lutte à la pauvreté et à l’exclusion sociale. Il se poursuivra jusqu’en décembre 2014 et peut être encore plus longtemps, si d’ici là nous trouvons le financement nécessaire. Nous croyons que ce projet mérite qu’on le, car l’impact sur la vie des jeunes qui y participent est vraiment important, comme le démontrent les témoignages qui suivent : « En gros, cette remarquable expérience m’a vraiment aidé dans ma communication auprès des gens qui m’entourent. J’ai appris à mieux communiquer et à lancer mes idées quand il le fallait et partager mes expériences tout au long du projet. J’apprends de jour en jour, mais je vois rarement une équipe 11 Le Centre et la formation d’un citoyen intégral dans une communauté multiculturelle Luis Francisco Solano Vargas – Stagiaire au rapprochement interculturel Le présent article s’inscrit dans la continuité de la formation théorique que j’ai reçue dans les différents cours de la maîtrise en Études internationales de l’Université de Montréal et de la formation pratique que j’ai acquise comme stagiaire durant 16 semaines au CCLCDN, organisme multiculturel qui exerce des activités essentiellement éducatives auprès des gens de la ville de Montréal. Je traite ici de l’importance de la transparence, du respect, de la solidarité et de la prévenance, comme valeurs de la formation d’un citoyen intégral dans une société multiculturelle1. En ce sens, je considère la nécessité de lier l’éducation au développement de ces valeurs, comprises comme des axes qui donnent un espace à la diversité culturelle2. À cet égard, il est nécessaire d’aborder des pratiques éducatives qui façonnent de vrais citoyens qui mettent en avant dans toute situation économique, sociale, politique ou religieuse, le respect des droits et de la dignité de l’homme, dans son originalité et sa diversité. Cela signifie des valeurs où l’autre est considéré comme un interlocuteur valable. Il importe donc que cette éducation forme des citoyens capables de réfléchir sur leurs pratiques morales et éthiques, les mettant en mesure de comprendre celles des autres. L’éducation, au sens large, joue un rôle important dans l’évolution des modes de vie et des comportements qui caractérisent la société contemporaine, en devenant un outil essentiel dans la lutte contre la complexité croissante de notre monde. L’exercice de la citoyenneté consiste à contribuer à la construction démocratique d’une société plus juste. La citoyenneté, selon ce point de vue, prend de nouvelles dimensions, exige de nouveaux rôles des citoyens pour que ces derniers puissent relever les défis de la société globalisée. Tous ces éléments sont impossibles à réaliser si l’on ne prend pas l’éducation comme point de départ, c’est-à-dire en commençant par éduquer d’authentiques citoyens, véritables sujets moraux, disposés à bien travailler, à bien penser et à partager avec les autres des actions et pensées. Il est nécessaire d’apprendre aux citoyens à fournir et construire de nouvelles alternatives au processus actuel de mondialisation comme l’idéologie néolibérale. Pour faire face à ces défis, il faut nécessairement des professionnels et des experts qui orientent la mondialisation de manière différente en proposant des solutions de rechange moralement souhaitables, en tenant compte du fait que les nouvelles dimensions de la citoyenneté universelle reposent sur des citoyens qualifiés, prévenants, et qui savent chercher une vie de qualité. Selon Cortina Orts (2001)3, l’éducation devrait reposer sur les connaissances, la prévenance et la sagesse morale. Ce n’est pas dans l’ignorance que l’on peut rendre le monde plus humain. Il ne suffit pas 12 d’avoir des connaissances, l’éducation universelle exige la formation d’un Homme issu de la prévenance, vertu qui permet de discerner ce qui est bon pour lui et pour la société. La personne prévenante essaie de garder les rênes de son existence sans se laisser impressionner par le côté matériel, mais en choisissant plutôt des activités productrices de liberté. En plus des connaissances et de la prévenance, il est nécessaire de répondre aux exigences de la justice. Toutes ces approches font ressortir l’urgente nécessité de repenser, non seulement les perspectives auxquelles nous aspirons en matière de citoyenneté et de modèle de société, mais aussi les nouveaux rôles que l’éducation permet de définir pour que personne ne soit exclu du système et qui peuvent conduire à l’intégration culturelle fondée sur la reconnaissance des différences. Enfin, l’éducation à la citoyenneté universelle est toujours une construction collective, une construction qui ne peut se concrétiser que si toutes les personnes concernées sont en mesure d’y contribuer. Une construction collective signifie que le résultat est un produit de la relation entre les acteurs impliqués dans le processus d’enseignement, c’est quelque chose qui réside dans le tissu des relations humaines. C’est le produit d’un véritable dialogue d’une éthique dialogique, et lorsque le dialogue existe, la vérité n’est pas dans un ou l’autre de ceux qui participent au dialogue, mais est parmi eux. Éduquer à la citoyenneté universelle, consiste à faciliter ce processus de construction dialogique, à créer les conditions propices, à encourager l’action, la participation, la création et à promouvoir l’expérience de valeurs telles que la solidarité et le développement humain équitable. 1 “Au CCLCDN les valeurs inspirantes sont le respect, la solidarité et la transparence. Ces trois mots supposent une vision, des attitudes, des comportements. Le respect, c’est-à-dire respect de soi-même, des autres et du CCLCDN lui-même comme organisme communautaire autonome à la longue tradition démocratique, et comme lieu de rassemblement et de travail. La solidarité qui sousentend l’empathie, l’entraide entre membres du CCLCDN –incluant les employés- et le soutien envers des actions collectives à l’échelle du quartier. La transparence elle suppose la confiance. Au CCLCDN on fait confiance au potentiel des personnes, en leur capacité de comprendre, de s’ajuster, de se développer et de collaborer”. (BAREY, Marie-Claude. Les P’tites nouvelles. Février 2014, pp 6). 2 La diversité culturelle, signifie que les différentes cultures coexistent dans le même espace public, implique des interrelations à la fois contradictoires et non contradictoires de service et d’échange entre les cultures. Basé sur ce contexte, l’interculturalisme déclenche la reconnaissance de cette diversité, en admettant les similitudes malgré les différences. De plus, en mettant l’accent sur la réciprocité entre les cultures, l’interculturalisme accepte le relativisme dans la culture. Il s’agit d’un multiculturalisme intégré, pas d’exclusion.(BILBENY, Norbert. Pour une cause commune. Éthique de la diversité. Editorial Gedisa. Barcelone. Espagne. 2002). 3 CORTINA ORTS, Adela. La force des valeurs morales de la coexistence. Éditeur : Secrétaire Général Technique. I.S.B.N. 94-3693441-5. 20 p. 2001. Présentation lors du séminaire «La coexistence dans les écoles comme un facteur de qualité», Le Conseil Scolaire d’État, Ministère de l’Éducation, Culture et Sport, Madrid, Espagne. Surmonter sa timidité Rachael Cowan, stagiaire au programme de rapprochement interculturel Depuis le mois d ‘avril, je me retrouve chaque mardi soir au même endroit : la salle d ‘attente des Ateliers de conversation française, au sous-sol du Centre. Pour ceux qui ne le savent pas, les Ateliers font partie du programme de francisation du Centre et sont assurés presque entièrement par des bénévoles. Avec une inscription gratuite, tout adulte non francophone est le bienvenu, peu importe son niveau de français. Leur but est de permettre aux participants de devenir plus à l ‘aise à s ‘exprimer en français en offrant une ambiance conviviale où on peut discuter ensemble, échanger avec d ‘autres sur plein de sujets différents et simplement parler. Essentiellement, par la pratique ! En tant qu ‘une non-francophone arrivée au Québec il y a quelques années pour mes études, je peux comprendre la difficulté à trouver des endroits où pratiquer son français. C ‘est un commentaire que j ‘ai entendu plusieurs fois en parlant avec les participants qui attendaient le début de leurs ateliers. Pour moi, c ‘était aussi une question de confiance. Je sentais que mes capacités en français étaient pires que les gens autour de moi et donc j ‘étais timide de me laisser entendre, peut-être par peur de me faire juger. Mais je me suis rendu compte que je ne pourrais jamais acquérir plus de confiance en moi pour faire une chose, si je ne pratiquais pas souvent cette chose. Et c ‘était un peu effrayant, sortir de ma propre zone de confort pour pratiquer une langue qui était difficile pour moi. Mais c ‘est normal et tout à fait compréhensible ! Donc les Ateliers offrent un endroit pour pratiquer son français, mais, et c ‘est un autre commentaire que j ‘ai entendu de plusieurs participants, ils offrent quelque chose de plus : la réalisation que nous ne sommes pas seul. On rencontre d ‘autres gens qui sont en train d ‘apprendre le français et donc on se crée un réseau de personnes qui vivent des sentiments similaires. Ensemble, on s ‘encourage, on sympathise lorsqu ‘on a des difficultés et l ‘on peut célébrer nos succès ensemble. Pour moi, ces Ateliers ont été aussi un aperçu de la diversité de notre arrondissement à Côte-des-Neiges. Les participants que j ‘ai rencontrés viennent vraiment des quatre coins du monde : Italie, Russie, Argentine, Vietnam, Chine, Iran… pour n ‘en nommer que quelquesuns ! De plus, chaque semaine il y avait un mélange de personnes nouvellement inscrites et des visages familiers des semaines précédentes. C ‘est un groupe impressionnant qui se réunissait chaque semaine autour du désir de mieux connaître la langue de la belle province. Au moment où j ‘écris cet article, le dernier Atelier aura lieu en moins d ‘une semaine. Je vous félicite tous pour vos efforts et j ‘espère que vous avez aussi apprécié l ‘expérience ! 13 Nos Préjugés : Reconnaître, comprendre, avancer Eva-Queen Ngayap Atelier dans le cadre de la Semaine d ‘action contre le racisme le 22 mars 2014 Durant mon stage mon dossier principal était de mener l ‘organisation d ‘un évènement durant la Semaine d ‘action contre le racisme au Centre. En tant que personne passionnée par le progrès social et qui s ‘investit énormément dans le domaine des relations raciales, ce dossier me tenait à cœur. L ‘atelier intitulé « Nos Préjugés : reconnaître, comprendre, avancer » a été un succès pour une première fois. II y a sans doute des façons d ‘en tirer encore plus d ‘ateliers comme celui-ci, mais dans l ‘ensemble je pense que j ‘ai réussi à sensibiliser les participants aux préjugés acquis de chacun d ‘entre nous. J ‘avais hâte de me lancer dans ce projet, mais en même temps j ‘étais inquiète, car je n ‘avais jamais été responsable de l ‘organisation d ‘un tel évènement. Lorsque vint le temps de réfléchir à ce que j ‘allais faire, cette peur s ‘est traduite par plusieurs heures consacrées à rechercher sur Internet d ‘autres évènements qui abordaient le racisme. Il a fallu que je me ressaisisse et que je me rappelle que c ‘est un domaine que j ‘aborde quotidiennement dans mon entourage et dans mes études, et que cet évènement me permettait de transmettre, à partir de mes propres connaissances du monde, un message qui me tenait à cœur. C ‘est comme cela que les premières idées pour l ‘atelier « Nos Préjugés : Reconnaître, comprendre, avancer » me sont venues a l ‘esprit. J ‘ai très souvent remarqué que lorsqu ‘on aborde des sujets concernant le racisme les discussions semblent être freinées par notre difficulté à reconnaître tout d ‘abord que nous avons forcément des préjugés. Nous ne sommes jamais capables de réellement aborder cet important sujet à cause de notre ego. Et avec raison d ‘ailleurs, car être accusé d ‘être raciste peut détruire l ‘image et la crédibilité d ‘un individu. Bien que ce soit une bonne chose de reconnaître que le racisme est un mal de société, voire le pire des maux, il devient quasiment impossible d ‘aborder le sujet, qui est bel et bien présent, souvent d ‘ailleurs de manière subtile, dans la vie de tous les jours. J ‘ai posé la question durant ma campagne de publicité : vrai ou faux ? C ‘est possible de ne plus avoir de préjugés un jour. La grande majorité des personnes ont répondu VRAI en utilisant un discours conforme à une réflexion idéaliste sur les progrès de la lutte contre le racisme où la bonne foi et le mélange de différentes cultures produisaient des individus sans préjugés. Mais en réalité, il est impossible de ne plus avoir de préjugés quelconques*. Je répondais dans la publicité que c ‘était en fait FAUX en expliquant que : Toute connaissance du monde doit forcément prendre appui sur un a priori. Même avec les meilleures intentions aucun d ‘entre 14 nous ne sait tout sur tout. L ‘important est d ‘être ouvert d ‘esprit et de pouvoir se remettre en question. J ‘ai donc voulu mener un atelier qui permettrait aux participants de repartir en étant capable d ‘avoir à l ‘avenir des réflexions et des conversations plus fructueuses sur la question. Il a été important de rappeler les valeurs du Centre en abordant un sujet aussi délicat, mais où je voulais quand même encourager un dialogue ouvert et sans crainte. Il faut croire qu ‘il est tout à fait possible d ‘agir avec respect, transparence et solidarité lorsque nous faisons face à nos préjugés si nous tenons à mener ces conversations. L ‘atelier comportait 3 parties qui, elles, consistaient en des présentations, des activités de groupes et des discussions. Le but de la première partie était bien sûr de nous mettre d ‘accord sur le fait que nous avons tous des préjugés et de créer un espace de confiance entre les participants. Quant à la deuxième partie, elle avait pour but de montrer que même lorsque nous faisons l ‘effort de ne pas avoir de préjugés, cet effort même indique que nous sommes conscients des préjugés qui existent. J ‘ai présenté la théorie de l ‘orientalisme de l ‘intellectuel Edward Said et la théorie de l ‘africanisme de l ‘intellectuel Valentin-Yves Mudimbe pour donner des exemples de la façon dont nous arrivons dans ce monde pleins d ‘idées déjà établies sur certaines choses et que nous venons forcément à connaître. Ceci, malgré nous, influence notre manière de penser. Pour finir, j ‘ai voulu qu ‘on trouve des moyens pour mieux nous y prendre dorénavant lorsque nous retrouvons dans des situations où nous sommes victimes de préjugés et lorsque, à l ‘inverse, nous sommes accusés d ‘avoir eu des préjugés. J ‘espérais qu ‘au fur et à mesure de l ‘atelier les participants seraient plus aptes à identifier ce dernier cas, car il semble toujours plus facile de se dire victime d ‘un préjugé que de reconnaître que l ‘on puisse en être l ‘auteur. Même si je ne peux pas donner des réponses à tous nos problèmes je pense que l ‘aptitude à nous remettre en question et avant tout à être ouverts d ‘esprit nous permettra d ‘aborder ces sujets de manière plus constructive dans la vie de tous les jours. Je remercie tous ceux qui ont assisté à cet atelier. J ‘ai vu qu ‘il y avait une forte envie de discuter, non seulement de ce sujet en particulier, mais aussi du racisme en général sous différentes formes... ce qui me rassure. À cet atelier ainsi qu ‘à d ‘autres que j ‘ai suivis durant la Semaine d ‘action contre le racisme les participants avaient énormément de choses à partager et il est clair que nous n ‘avons pas souvent assez d ‘occasions de nous exprimer alors qu ‘il est évident qu ‘un certain épanouissement est ressenti dans ce partage. Je remercie le Centre, particulièrement la coordonnatrice du programme de rapprochement interculturel, Marie-Claude Barey, de m ‘avoir offert cette opportunité et le soutien indispensable à la réalisation d ‘un tel projet. *Les préjugés ne sont pas exclusivement à caractère racial. Ils portent aussi sur la culture, le sexe, la religion, l ‘orientation sexuelle et même sur sujets comme le choix alimentaire d ‘une personne, son poids, ses passe-temps, etc. Adieu Camille ! Jennate Berrahma située à 600 km (à l’est de Moscou) appelée MARI ou MARI El qui a sa propre langue et sa religion. Quand je l’ai invitée à m’en dire davantage, elle m’expliqua en fait que les Maris étaient animistes. Imaginez ma stupéfaction, et ma curiosité. J’avais entendu parler des déplacements de population de Staline, et je me demandais si tout ce que j’entendais était réel. Comment les « Maris » y avaient échappé ? C’est avec une profonde tristesse que j’ai appris le décès soudain de Camille Simony, bénévole à « Parlons français », que j’ai eu le plaisir de côtoyer pendant près de 7 ans. Elle a été emportée par une crise cardiaque, alors qu’elle était en voyage en France. Camille était une bénévole dévouée et une amie admirable. Ses courriels intelligents et souvent drôles, Je me suis renseignée aussitôt et je vous fais son franc-parler connu de tous et sa sollicitude pour ses partager le fruit de mes recherches. amis me manqueront ! Puisses-tu reposer en paix Camille. Les « Maris », également connus sous le nom de Voici un article qu’elle a rédigé pour les Ptites nouvelles Tchérémisses, sont un peuple de langue et de tradition il y a 2 mois sur une de ses participantes et qui illustre, si essentiellement finno-ougrienne qui se partage en deux besoin est, tout l’intérêt qu’elle portait aux personnes qu’elle groupes distincts : une minorité, les Maris des montagnes, côtoyait au Centre. convertis depuis longtemps au christianisme et une majorité, les Maris des plaines, qui sont animistes. Ils ont su résister à la christianisation, à l’islamisme, aux répressions tsaristes et communistes, ainsi qu’aux autorités actuelles de l’Église orthodoxe. (**). Rencontre avec une « Marie » Camille Simony, bénévole Le programme « Parlons français », je suis tombée dedans par hasard. Et si je compte cette année, cela fera 5 ans, et ce avec un plaisir toujours renouvelé et une attente jamais déçue. Je voudrais vous parler des nombreux Chinois (femmes et hommes)- dont la discipline, la ponctualité, la soif d’apprendre et le sourire en sus, nous poussaient toujours plus (nous les bénévoles) . Quel plaisir de les suivre ! Je vous parlerai aussi de ce jeune Marocain: il parlait assez bien le français, et s’était trouvé un travail au service d’entretien du Groupe hôtelier St-Germain. Un matin, il arrive avec le journal Métro en mains, et me demande de lui expliquer un paragraphe en particulier. Il avait souligné les mots qu’il ne connaissait pas (c’était un exercice que nous avions l’habitude de faire, et par lequel, à la fois, on revoyait la prononciation, le vocabulaire, et la grammaire au passage). Ce matin-là, il déclare tout de go qu’il « veut me dire avec ses mots ce qu’il comprenait ». Un peu surprises, mais intéressées par sa démarche, nous avons repris le paragraphe en question pour le décortiquer et l’expliquer. Puis, il fait la synthèse du texte avec ses propres mots: il avait bien compris, et s’en est bien sorti. Hélas, nous étions déjà presque à la fin de la session, et je ne l’ai plus revu depuis. Mais ma dernière histoire - et c’est celle qui me pousse à écrire cet article - et de loin la plus étrange et la plus intéressante, à mon avis. Il s’agit de l’histoire de Tatiana Mueller. Elle m’a rapidement dit qu’elle n’était pas exactement Russe. À partir de ce moment-là, j’ai senti et j’ai su que j’allais apprendre bien des choses. Tatiana me raconte au fil de la conversation qu’elle est Russe, mais qu’elle vient d’une petite république, La République des Maris est une république souveraine. Elle a son drapeau, ses armoiries, son hymne. On estime aujourd’hui, sa population à 699 000 habitants. Les langues d’état sont la langue « marie », la langue russe, et le bachkir. Yoshkar-Ola (qui signifie la ville rouge) est la capitale de cette république. Elle compte 3 musées : le Musée National, le Musée d’histoire, et le Musée des Beaux-arts., ainsi que 5 théâtres et deux universités. Le peuple « mari », perpétue ses traditions locales : il pratique le culte dans les « rocha », des petits bois isolés, parfois minuscules, parfois grands comme des petites forêts. Le Dieu créateur suprême des Maris, chef des autres dieux, se nomme « Blank ». On compte des dizaines d’autres dieux : le dieu de la vie organique, la Terre mère, La Mère soleil, et les esprits de la nature qui habitent les bois et les arbres sacrés. Linguistiquement proches des Estoniens et des Finlandais, les « Maris » forment un peu moins de 50 % de la population de la république. Selon les organisations culturelles « maries », environ la moitié des « Maris » pratiquent aujourd’hui le culte traditionnel, parfois en parallèle avec la religion orthodoxe. J’espère que cette histoire vous intéressera. Camille Simony, bénévole au programme « Parlons français ** Référence: « Chez les derniers animistes d’Europe », journal Le Monde du 30 novembre 2009, par Alexandre Billette - envoyé spécial. Anatoli Mikhaîlovitch Ivanov (correspondant de « Synergies Européennes ») en Russie. Photo : La regrettée Camille Simony 15 NOIZE : LA COMÉDIE MUSICALE ahanant, tout ce beau monde entre en scène portant sur son dos tout son attirail scolaire : pupitres, bureau, livres et cahiers, etc. S ‘agglutinant littéralement les uns sur les autres, les élèves forment deux groupes distincts de chaque côté de la scène, laissant le centre complètement libre pour les performances dansantes. Audrey Dubé-Loubert nous rappelle ainsi de manière symbolique que toute acquisition de connaissances ainsi que la production de toute forme de Pierre Drolet, bénévole spectacle, soit dit en passant, nécessite inévitablement une D ‘entrée de jeu, un panorama représentant le centre- part d ‘efforts, de sueur et de discipline. ville de Montréal est projeté en arrière-scène en guise de décor. Rapidement, les danseurs-comédiens, incarnant La pièce, écrite sous la supervision de Robine Kaseka, est divers personnages, imposent le beat de la ville. Un rythme structurée en tableaux qui servent d ‘ossature sur laquelle se à la fois oppressant, inquiétant et hypnotisant pour les greffent de nombreux numéros de danse urbaine. Étant un deux protagonistes de la pièce qui « débarquent » dans total néophyte dans l ‘art de la danse urbaine, ses divisions et la métropole, l ‘une en provenance du Congo, l ‘autre de subdivisions, je me contenterai de lever mon chapeau devant les performances d ‘excellent niveau offertes par tous les l ‘Abitibi. artistes présents sur scène et habilement chorégraphiées par Le ton est donné. Au tempo endiablé et frénétique des David « DKC » Dundas, « 7Starr », Alexandra « Spicey » danses urbaines, succèdent des scènes plus intimistes Landé, Maria Mùnera et Nedge« Black Kat » Valmé. nous montrant Aminata (Wahida Sylvie Abou) et Béatrice (Catherine Cléroux) aux prises avec les problèmes qu ‘elles éprouvent toutes les deux à s ‘intégrer à leur nouvelle ville, à leur nouvelle vie. L ‘aspect théâtral, parfois négligé dans ce genre de spectacle, est ici au contraire soigné dans une mise en scène alerte, rigoureuse et dynamique. Le niveau de jeu des jeunes s ‘en trouve de la sorte rehaussé et tout à fait crédible. Le texte de Kaseka et consorts est souvent drôle, toujours efficace et rend avec humour et de façon colorée les particularités langagières des personnages. La musique d ‘Antoine Létourneau-Berger est à la fois envoûtante et percutante. Les éclairages de Sophie Boucher, en l ‘absence de décors élaborés, dessinent bien les contours des différents lieux dans lesquels se déroule la pièce et recréent avec fluidité les diverses atmosphères recherchées : jaune et chaud dans les chambres des filles, blanc et froid dans la classe et carrément sombre, avec des luminosités wilds dans le club Noize où se retrouvent les jeunes le soir. La comédie musicale Noize, parrainée par le Centre, sous la direction de Monique Göhler, comporte son lot de belles trouvailles scéniques : l ‘entrée en classe du professeur de sociologie totalement déjanté (Clauter Alexandre, Dr Step) Tout le long de la représentation à laquelle j ‘ai assisté, un grand bonheur de performer et d ‘être ensemble était évident et de ses élèves est particulièrement réussie. et palpable chez tous les artistes. Audrey Dubé-Loubert, la metteure en scène, règle de façon brillante ce qui aurait pu être un problème de changement de En somme, comme le diraient les deux protagonistes décor et un autre d ‘occupation scénique. Tirant, poussant, Aminata et Béatrice : « Y est vraiment trop bon ton show » ! 16 NOIZE : L’entrevue m ‘imprégner de la mise en scène et des chorégraphies. Ensuite, eh bien, je me suis occupée des échéanciers, des contrats, etc. Je trouve que la différence avec « Passages », c ‘est que nos rôles étaient cette fois mieux définis. On a commencé « Noize » dans l ‘euphorie de la fin de « Passages ». Évidemment, de nouvelles personnes se sont ajoutées, d ‘autres ont quitté, ce qui a créé une toute nouvelle dynamique. Au début du projet, je me souviens avoir demandé à Monique, ce dont elle avait besoin. Moi j ‘aime l ‘administration, la planification, l ‘organisation, mettre en branle des choses avec des systèmes. En ce sens, je complète bien Monique. Jeudi 22 mai. Elles sont là devant moi, à peine quelques jours après la fin de cet immense projet collectif que fut la comédie musicale « Noize ». Comment se sententelles aujourd ‘hui ? Sont-elles portées par l ‘extraordinaire décharge d ‘adrénaline dont elles ont bénéficié ces derniers temps ? Ou bien ont-elles commencé à ressentir cette déprime postproduction que beaucoup subissent à la fin d ‘un projet de si longue haleine ? Ce que je retiens de mon expérience, c ‘est que les liens que nous avions commencés à établir entre Robine, Audrey et moi se sont renforcés. Ce projet m ‘a permis de les connaître sur d ‘autres aspects. Enfin, je veux insister sur la totale liberté artistique que nous avons eue lors de cette création : grâce à Monique et au Centre. » C ‘est maintenant au tour d ‘Audrey. D ‘emblée, elle se voit J ‘avoue que je ne leur ai pas demandé. Ce qu ‘elles ont à vivre comme une femme intense, une sorte de maman sur la comédie musicale. Elle avait en charge d ‘orchestrer la mise maintenant ne concerne qu ‘elles. en scène, mais aussi d ‘orienter les chorégraphies en fonction Quant à moi, c ‘est leur parcours depuis un an et un peu plus des caractères des personnages. Elle dit ne pas avoir de qui m ‘intéresse. problèmes à travailler avec les danseurs parce qu ‘elle est très J ‘ai donc Sophie et Audrey devant moi. Monique physique et très démonstrative dans ses mises en scène. Ça viendra s ‘adjoindre à elles un peu plus tard. Robine est passe beaucoup dans le corps et dans la respiration et pas seulement dans les mots. malheureusement absente, retenue par son travail. Je commence par Sophie, elle, dont le rôle peut sembler Enfin, elle insiste pour dire que Monique sait créer un moins spectaculaire, mais tout aussi essentiel que celui de esprit de famille : « Elle crée un climat d ‘amour vraiment magnifique. » ses comparses. « Avec « Noize », j ‘en suis à ma deuxième expérience après Un mot sur Robine, qui avait pour difficile travail de « Passage ». Mon rôle dans la production était en somme celui synthétiser les textes, de mettre en mots les idées, de donner d ‘assistante. Je constituais le filet de sécurité du spectacle. aux personnages une vie réelle par leur langage différent les J ‘étais une sorte de sonnette d ‘alarme. Alors qu ‘Audrey et uns des autres. Robine étaient absorbées par l ‘urgence dès « maintenant », Sophie remarque qu ‘elle a relu ses notes des toutes premières je devais prévoir ce qui s ‘en venait, les problèmes que nous réunions et qu ‘après de nombreuses versions, le texte de la allions avoir à affronter. pièce reflète toujours l ‘histoire et le message initiaux. J ‘avoue qu ‘il m ‘est arrivé de paniquer, car je devais parfois Monique qui jusque là avait écouté sans rien dire, aura le répéter souvent les choses avant que les gens en prennent dernier mot : « Mon travail, ça a été de trouver les bonnes conscience. personnes. Après, ça a été des vacances. » Durant les représentations, je faisais la régie du spectacle. Les deux autres protestent mollement en rigolant. J ‘ai été aussi responsable de la création des éclairages. Pour y parvenir, j ‘ai tout au long du processus, tenté de bien Après tout, si elle n ‘avait pas tout à fait tort ? 17 NOIZE : LES TÉMOIGNAGES C ‘est vendredi, la première de la comédie musicale Noize a eu lieu le soir précédent. Quant à moi, j ‘arrive vers 18 h. Toute l ‘équipe est déjà là. Audrey donne les notes de la première représentation. Elle resserre certaines choses qui ont moins bien été, mais elle souligne aussi les bons coups qui ont été faits, en somme elle réajuste le tir et le rythme. L ‘équipe écoute, elle s ‘emballe puis retombe dans un silence plutôt relatif avant de s ‘emballer à nouveau. Bref, Audrey exécute pour la Xième fois son minutieux travail de directrice de jeu. D ‘ailleurs, tous les gens présents sont manifestement parfaitement heureux d ‘être là. Une fois les notes données, on répète quelques éléments de chorégraphie en compagnie de « Spicey », Alexandra Landé dans la vie courante. Jordan (Homme d ‘affaires et David Murphy) : « Il y a deux ans j ‘ai joué “Passage” avec le Centre. Un ami m ‘a dit que l ‘on cherchait un danseur cette année. Ce que j ‘aime dans “Noize”, c ‘est le mélange de danse et de théâtre parce que j ‘aime les deux. Je travaille au YMCA du Parc comme professeur de danse et au service à la clientèle. Hier à la première, c ‘était parfait, je me suis vraiment amusé. J ‘aimerais bien faire d ‘autres projets de ce genre : c ‘est le fun, amusant, instructif. On rencontre plein de gens différents et intéressants qui viennent de milieux variés. » Jonathan (Squeegee et Guillaume Parent) : « Je suis des cours de danse et Snaxx m ‘a parlé de l ‘audition. J ‘étais vraiment content d ‘être accepté. La première s ‘est bien déroulée. J ‘aime le mélange de danse et d ‘acting. C ‘est rare qu ‘on voit ça. » Snaxx : « Je donne des cours de popping entre autres au Centre depuis cinq ans et j ‘ai participé à l ‘organisation de plusieurs événements. J ‘ai été chorégraphe pour la comédie musicale de l ‘année dernière. Cette année, j ‘ai été aussi chorégraphe et je remplace un danseur qui nous a quittés. Dans cette comédie, les danseurs sont de bon niveau. Et surtout, ils ont vraiment le goût d ‘être là. Il y a une énergie et une passion très présente dans le projet. » Puis j ‘obtiens la permission de faire quelques entrevues. Je commence d ‘abord avec les deux protagonistes du spectacle qui jouent respectivement les rôles d ‘Animata et de Béatrice. Kalpana (Fashionista et Dorantina Selane) : « Je joue deux Voilà, je vous livre leurs témoignages à chaud. Il est près de rôles, un dans le prologue et un dans le reste de la pièce. 19 h. Je suis dans la salle d ‘attente. Peu de gens sont encore Pendant ce projet, j ‘ai pu approfondir mes liens avec les arrivés, mais la représentation sera comble ce soir, m ‘a-t-on gens que je connaissais déjà. Je me sens mieux connectée avec eux. Ça fait des années que je suis impliquée au Centre. dit. Cette expérience m ‘a fait évoluer en tant que danseuse, car Sylvie : « Dans la pièce, je fais Animata. Ce soir, je suis maintenant je peux exécuter des styles plus variés. En tant excitée, car hier, ça a très bien été. Bien sûr, j ‘étais nerveuse, que personne, j ‘ai évolué aussi. Je me sens davantage moimais c ‘était du bon stress. Je me suis vraiment amusée, même. J ‘ai du plaisir. » mais aujourd ‘hui je vais donner encore plus. J ‘ai connu le projet parce que je suivais des cours au Centre. Je ne voulais Kenny (Squeegeee et Hoan Hao) : « Avec mes amis, je fais pas nécessairement faire les auditions, car ça me mettait des chorégraphies. Ici, j ‘adore ça, car c ‘est plein de gens qui vraiment en dehors de ma zone de confort. Quand j ‘ai été veulent être là. C ‘est une belle énergie. Hier, j ‘ai été nerveux choisie, j ‘étais à la fois contente et stressée. Je suis timide de quelques minutes avant la représentation et ce soir j ‘aimerais nature et je me demandais comment j ‘allais faire. C ‘était un que ce soit bien mieux. » gros défi pour moi. Au fil des répétitions, j ‘étais de plus en Alexandra « Spicey » : « je suis chorégraphe et j ‘en suis à plus à l ‘aise et j ‘ai appris à avoir confiance en moi. » ma deuxième année. Donc je connaissais déjà le processus. Catherine quant à elle interprète le rôle de Béatrice : « Je La connexion était déjà là. Je suis au Centre depuis cinq connais bien Robine, l ‘auteure de la pièce, c ‘est une bonne ans. Au début du projet, on a perdu plusieurs membres. amie, nous avons fait de l ‘improvisation ensemble. Je fais Mais tout le monde s ‘est serré les coudes avec beaucoup de beaucoup de choses dans la vie. Entre autres, je suis au persévérance. Il y a une belle symbiose dans l ‘équipe et ça Bac en enseignement dramatique à l ‘UQAM, je suis coach paraît sur scène. d ‘improvisation, je fais moi-même de l ‘impro et j ‘organise la coupe universitaire d ‘improvisation. Lorsque Robine m ‘a demandé de faire partie de ce projet, elle a dû insister. On m ‘a proposé un des rôles principaux. Je me reconnais dans le rôle de Béatrice, je ne suis pas de Montréal, je viens de l ‘Outaouais. Hier, j ‘ai trouvé la soirée amusante, vivante et pleine d ‘énergie. J ‘éprouve une grande fierté à faire partie de ce beau projet. » 18 Distribution par ordre alphabétique : Wahida Sylvie Abou, Clauter Alexandre (Dr. Step), Élischa Alla, Nadia Ben Mérièm, Ahmed Benkhalifa, Jordan BenoîtAncion, Catherine Cléroux, Destiny Dorval-Dundas, « 7Starr », Kalpana Loganathan, Jonathan Mukoma-K Nshinga, Maria Mùrena, Felipe Soto, Arielle Veyitondolo et Kenny Vu. Équipe de production dans le désordre (Ce qui n ‘est en aucun cas un commentaire sur cette production très disciplinée) : NOIZE : LES CRÉDITS David « DKC » Dundas, « 7Starr, Alexandra « Spicey »Landé, Maria Murèna, Nedge « Black Kat » Valmé, Robine Kaseka, Sophie Boucher, Audrey Dubé-Loubert, Monique Göhler, Maurice Casaubon. Antoine Létourneau-Berger, Maxime Godin-Monat, Jessica Côté-Guimond et Nikolaz Turmel. 19 Ça se passe au parc Jean-Brillant, cet été Denise Beaulieu Directrice générale Cette année encore, l’arrondissement CDN/NDG nous a invités à animer la scène du parc Jean-Brillant. Donc, avis aux intéressés, du 8 juillet au 29 août, si vous avez le goût de dépenser le surplus d’énergie qui vous reste après votre journée de travail, la Zumba vous attend encore les mardis à 18 h ; si au contraire, vous avez besoin de relaxer, de développer votre côté zen, l’atelier de Gi Gong est fait pour vous. Et les jeudis découvertes, s’ouvrent sur différents styles de danses (baladi, colombiennes, africaines, urbaines), pour vous permettre d’apprécier d’autres cultures et de vous y essayer. Si vous avez des enfants de 4 à 7 ans, ne manquez pas les 2 soirées de rondes et comptines, à goûter en famille, les jeudis 10 juillet et 14 août de 16 h 30 à 17 h 30. Apportez votre lunch et venez passer ces quelques heures avec nous. Parlez-en à vos amis, amenez-les... et n’oubliez pas votre bonne humeur ! Souriez c’est l’été, enfin ! Bon été ! Photos : Animation au parc Jean-Brillant, été 2012 et été 2013 20
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