OONFLITS - Shodhganga

INTRODUCTION
OONFLITS
..
Quand on aborde les Oeuvres d' And."t'e
oe qui nous frappe
o. •
I~iA.LRAUX:,
ernb1ee c' est sa fascin2.tion
pour les civilisations etrangeres surtout son gout
de
1~
Orient.
1-lais c 1 est 1 1 obsession d' aut res civilisa,
.
;. peut -e~...... re a.. ma VJ_e,
.
quJ.• a.onne
a... 1 a m~enne,
e·.;·
n
.J...
~~ons
leur accent pa:rticuJ.ier.
A mes yeux du moins "1,
affirme .~ IliALRAUX,
~ui"ttgnt
son pays de na1.szance pourquoi HALRAUX
est-il alle si loin, en Orient :po;.J.r si tuer ses Oeuvres?
t~ Voila un gar9on qui, des 1' adoleiiceDce, s
fi
est a.van-
ce vers elle ( il s' agi t de 1a societe occicle:;:y~ale
fran9aise) 1' oeil mavvais, un poignard 2. J.a main, qui
a cherche en Asie 1' endroit plus vulnera-ble n2, dit
Franc; ois Mauria.c.
Est - ce le gout de 1' exotique et de 1 t aventure
qui 1 t a pousse
Asie- en Orient?
a faire
clerouler ses pr·emiers
rom&TlS
€n
Q:ct\l,lle est dor..c la, force qui l 'a. mis
-~-------
1.
Ga.etan PICON - NAI;;RAUX pa.r lui~raeme
Toujom·sn, Ed. Seuil, 1970,
2~
p~
n
1.8.
Les Crit:.quos de r.otre temps et !tlAL..RAUX..
p ..
63.
Ecrivai:ns de
16.
en contact avec ces contrees loin.tc:dnes?
ques-tions qui se posent dans 1
1
Voila des
esprit de to:At lecteur
qui veut peneit:r.er dar.s le monde romanesque cle RAL..lt.AUX.
Mais pourquoi suis-je alle en Asie?
r.
Savez·· vous que
c' est la. question que m'a poseeValery lorsquc je 1' ai
rencontrG pour la premiere fois?ul.
On
Chacun de nous se pose e.u.ssi cette question6
sait que le decor de LA VOIE
ROY~
est le
Indo-Chine, celui de LES CQ¥.Q.ill1~Al,fT§.
et
c~~bodge
de LfL_Q.9NQ1_'f..IOK
1IDf.!:AINE , la Chine et une grande pa.rtie de ses
dialogues
n
en
n
hauts
des ANTIMEHOIREf?_ se fait en Chine et en Inde.
Une lecture attentive de ses deux premiers Essai:J
LA TENTATION DE L' OCCIDEnT et Dt UNE ,TETJNESSE EUROPEl%fNE
peuvent nous fournir la clef de tcute 1 1 architecture de
son oeuvre romanesque dont le decor est 1' Orien-t. Des
ces premiers Essa.is nous constatons qu' i l y a une prise
de conscience chez M.li.LRAUX: les progres. des sciences
n
t
ont donne
al
f
homme que des armes de destr"l1.ci..ion
et le monde, surtout le monde: occidental-est prive
ae
tout appui moral.
" Notre civilisation depuis qu 1 eJ.le a perdu
-------·---1.
Ga!Han PICON,
'OPo
cit. Po 12.
------·----
17. '
J.' espoir d.e trouver dans les sciences le sens O.u monde
est privee de tout but spirituel"l.
11 faut se r2.ppeler qu' And.r·e MALRAlJX ecrit ces
deux essais dont nous avons mentionne les
-ti·~res
ci-
dessus, apres avoir fait un voyage en Asie.- Age de vingt
cinq ems il vient de passer de longs mois en Indo-Chine.
A son retour, c' est un regard neuf qu' il jette sur
1' Europe craquant de tout es parts et sur la lt1 rance.
Lorsqu' il scrute 1 1 Europe en ces annees 1926-27,- c' est
en jetarit 1e regard du voyageur revenant de 1' Asie.
Co~~e
bon nombre d' inte1lectuels lasses de leurs pays,
avides de decouvrir dt autres terres, A. M.ALRAUX est
parti
pot~
1' Orient, esperant y trouver les reponses
Mais quelle reponse a-t-il
refusees par le v-ieux: monde.
tronve en Asie?
" L' Asie peut-elle nous apporter quelque enseignement ? - Je ne le crois pas.
Plutot une decouverte
particuliere de ce que nous SOinmes "2.
Cette declaration de II'1ALl1AUX lui-meme nous di t
qu' il n' y a pas trouve definitivement ce qu' il a cherche.
1-lais ce qui est certain c' est que ce contact avec
une civilisation
etr~~gere,
les multiples experiences
-----------------------------1 • . Aiio5:€
~1Alu't.AUX
- D' TJrTE ._TEln.JESSE EUROPK.B.1'ffiE , " Cahie:r.s
Verts '' , cote L.F. N 193, :Bibliotheque de 1' Ecole
Normale Superieure, :Po
2.
145.
KALRAUX, declaration - Les Nouvelles Litteraires,
31 J·uillet 1926, article
p.24 colonne 3.
filmq
n
Andre I•lALRAUX et 1' Orient .. ,
:Bibliotheque Na.tionale,cote :035 micro-
Si nous consderons de pres ce premier essai,
LA r.rENTATION
DE L' OCCIDENT, ecrit so us forme de plu-·
sieurs lettres echangees_, entre deux amis, ce qui nous
frappe d' abord c' Emt le titre meme.
Comme il 1' in-
dique, il s' agit de 1' Occident entier et non uniquement de la France.
C' est
~~
titre
a~bigu.
Il peut si-
gnifier la tentation subie par 1' occidental en question
pour que(Lquechose d. t etranger ou cellc d 1 un etrangcr
pour 1' Occident.
D' apres cet essai, les deux prota-
gonist es, le fran<; ais A.. D. et le chino is Ling M. Y. ont
chacun une certaine
a~~iration
pour la civilisation de
1' autre et 1' analysent avec un esprit critique.
A
travers ces lett res echa.ngees entre un europe en se jo·:_u·nant en Extreme-Orient et un chinois voyageant en Europe, A. I-1ALRAUX compare la dynarnique europeenne
a
la .pen-
see chinoise.
If
arms,
Que la grandeur soit votre, celle de 1' homme
celle de la douleur, ou notre, celle de la perfec-
tion, elle vient de 1 t intensite de 1' emotion qu t un
sentiment eveille en ri.ous.
sacrifice.
Chez vous, c 1 est celui du
L' admiration vient d'
~~e
nous c' est seulement la conscience d
1
action.
Pour
etre selon le
mode le plus beau "1.
Blanc ou jaune 1' homme reve; mais quand le bla!JC
reve c·1· est de gloire et d' action alors que le jaune
recherche le calme - le. serenite.
1.
L' un aspire
a se
------------
--------------
A. MALRAUX,
OCC'~
LAT:f!."N"l'.ATION ]JE 'L 1
, p. 27.
20.
dapasser, 1 s autre
corder
a son
a se
ryt~~eo
tre la paix.
fondre dans 1'" Univers,
a sc.'
L' un veut empoigner le reel,
ac1~
au-
C' est cette contradiction qui est mise en
evidence avant tout dans cet essaio
" C' est d' une confrontation de 1' Orient et de
1 • Occident qu' . i1 espere faire jaillir
tion de 1' ho!T'ur.e.
Cette
confront~tion
n,YJ.e
nouvelle no-
est le sujet de
LA TENTATION :OE L' OCCIDENT_ et se tradui t
jusque dans sa
forme puis qu' il s' agit des lettres qu' echangent
A.D., fran9ais
MM.
age de 25 ans, ayant que1que conna.issance
des ouv:rages de la Chine et
T~ing.
~~Yo
, chinois, 23 ans,
attei.nt d' une curieuse culture occidentale dent sou:ffre
un grand nombre de ses compatriotes ••• Or, 1' oeuvre entier de
li'J.AL..~AUX
semble se deve1opper se1on cette meme
opposition: aux trois premiers :romans consacres
a 1'
Ori-
ent ( LES COHQli'ERANTS, LA VOIE- ROYALE, LA COi'JDTTION B"U'·MAINE) :repondent 1es trois derniers consacres
a 1'
Occi-
dent ( LE rrEr{.PS DU MEPRIS, L' ~SPOIR, LES NOYERS DE 1,' A_l!,!]lN130UR.Q. ) •
LES VQ!.!..]JU SILE't-~ semb1ent venir 8. 1 1 heurc
ou, ayant epuise cette confrontation, MALRAUX est pret
a
definir sa notion d' un humanisme mondia1, sy:nthese de
1' Orient et de 1' Occident n1, remarque JeF...."1 Carc1ungr
dCl-lls son etude des oeuvres roma.nesques de MALRAUX.
MALP~U~
du mot.
seeo
n' ecrit pas un essai au sens traditionne1
Il ne developpe pas d' une fa;;; on. ·1ogique sa pen-
Au contraire il prefere ecrirc u_~e sorte de roman
-~--·-----
1..
-----------
Jean Cardungr - La Creatton romanesque c!}ez. It!ALRAUX
21.
de rom:.mr~·p<>..r lettres.
exotique surgit
Des 1a. predere page un decor
a notre. regard.
et dans cette exaltation,
" Que ne vous a.i-jc rencontres sauvages impre-..rus
qui prasentiez aux navigateurs des fruits en forme de
ccrne sur des plateaux barbares tandisqu.e des coupo-les
apparaissent entre les pa1mes "1, on entend la volold;e
clairement affirme du jeune A.D. de rompre avec sa civilisation.
Il decouvre de nouveaux paysa.ges, un decor
precis pour presenter les idees ab;:::;traites mais
puissan+·-~
tes:
.n
Chaque printemps couvre les steppes· de l;'iongolie
de roses tartares, blancs au coeur pourpre.
Des caravanes
les traversent"1.
En evoquant cette region particuliere de la HauteAsie constituee par la Mongolia, le TurKestan chinois ou
Sinkiam ( qui s' appelait aussi Tartarie ) et le Tibet,
1' Auteur semble nous mener au seuil d.' un monde qui etait
deja
en conflits dans les a:nnees vingt.
Il nous fc:mt ra-
ppeler que la Mongolie exterieure etait en revolte contre
la souverainete chinoise et qu' elle s
1
est wonstituee
en Republique Populaire sur le modele de la Republiq_\lB
So-vietique en 1924 avec 1' aide des armees russes.
lonte humaine s
1
La vo-·
organisc.it deja pour rejeter un systeme
etabli depuis des siecles.
Corrm1e des regimes crees pa.r
1' homme ont un caract ere peu. stable q_uand. il s' agi t de
-----~---~-----~------------------------~---------
0,\1..~) ""b.1~o\ ·. 6'
\'t.'2..l.~~ \
22.
ce!·ta.ir..€'s regions de la terre, les Steppes de Mongolia,
selcm la nature de toutes- les steppes de 1' Asie centrale
qui prosente u.n relief contraste de plateaux, de chainons de :nontagnes enca.d.rant les bassins interieurs et
offrant a.ux voyageurs tm pays age monotone jusqu •
a des
milliers de kilometres sur la rou-te de 1' Occident
Chine,
ch~~gent;de
couleur au cours de 1' annee.
a la
Les
Steppes d.e Sinkia.m couvrent d' une floraison ·eblouissante
epoq~e
D' ailleurs le printemps est 1'
au printemps.
breve d.' ur1e veritable explosion de la Vegetation.
Mai, selon le temoignage de
tres
En
M.A. Raymond, un explorateur
de la ' Mission Citroen Centre-Asie •,
11
huit jours d 1
e-
panouissement fugace entre deux saisons de mort, floraison
du plateau Kongole et des Gobis brU.les de 1' interieur,
passage souverain du printemps sur ces terres de glace
et de feu "1 ..
On sa.i t
que les relations avec les pays voisiris
s' effectuaient par des pistes itineraires tradi tionnels
des caravanes, vieilles routes de la. Chine
avant 1'
o~verture
de la voie maritimeo
ja.dis de grands noma.des partant
a 1'
a 1'
Occident
Les Mongols furent
aventure avec tous
leurs biens mobiles, troupeaux et chariots contenant les
tentes et le materiel domestique.
Ava.nt meme d' a.rriver au seuil de la Mongoli.e on
s' arrete pour ecouter les mouvements des :troupes de.ns le
lointain:
" Plus loin tourbillom!ent les armees de 1 t As:ie
Centrale "2.
----------------------
1.
Piel.'re GEORGES 1
!J.• nis.s.
Hautc,-Asie - Ira]!, Biblio-
theque de la Sorbonne, cote L-821 (1)
·2.
A~ J.iALRAUX ,
4
-8 , p. 495
rrEN'PA'IIO!~ D!S 1' OCCIDENT ,
p. 12.
23.
Ce"tte evocation nous rappelle les paroles de
Pandi t ,TAHAHARLAL NEHRU dans son oeuvre ce l"cbre
1
Discovery of India ' ( 'I,a :Decou.verte de 1 1 Inde 1 ) :
Central Asia
€~en
The
•1-
to-day, four legendary figures of great
conqueror~s are remembered
Sikander ( Alexander ) , Sul-
tan Mahmud, Chengiskhan and Timur.
To the::::e four must·
be e>,dded no1t1 a fifth, another type of person, not a
~rior,
In
but a conqueror in a. different
realm~
Ha~,­
rcur"d. l!hose
name legend has already gathered - Lenin "1.
Nous
a...~ons
que vers la. fin du dix-r1euvieme siecle
la Russie a:tteignit la frontie:re de l ' Afghanistan et d.c
1' Inde et 1 f imparialisme tsariste penetra en I>'landchourie.
J.iais cette Gonqu(He de 1' Asie Centrale n 1 a pas traca
un chemin rose pour la Russie Sovietique d<ms sc-. g:ca.nde
tache de 1' unification et de pacification de Turkestan
qui s' acheva vers 1926.
On sai t
que las
g:-r.~andes
ci·tees
de Tashkent, de Samarkand, de Bokhara etco.$' etaient
pendant la conquete russe riches en monuments, trad.itions
et cultures musulmanes.
Presque taus les tribus de lt Asie
Centrale etaient d' origine turque.
Le Turkestan avant
1917 representai t selon les Marxistes.., le type de region
peu favorable
a des
revohltions sociales.
----------------------
c
f
est le meme
--------·-·--··---
1 • (" En Asie central~memc aujou:r-d' hu.i, on se sou-v··ient
de ccs q_,_va.tre figures legendaires de grc:mds conqu.e-rants: Sikamder ( Alexandre ) , Sui tan Mal1mud, Ch,2ngiska.n et Timom·. ...1 faut mai:ntenant ajouter
ces c:_ua;tre
noms 1.m cinquicme, un autre type de personne, non un :,·,_.e~
guerrier, mais un conq_utlrant dans un autre domaine autour de q_ui une legende s' est deja const±tuee - Lonin. n)
a
24 ..
Turkestan qui fut le. centre des forces gue:rilles antiscvir:Hiq'.l&S depuis la premiere guerre mo:ndiale, dont 1e
·-out etait de 1iberer tous 1es peuples de l ' Afghanistan,
de Perse et cle 1' Incle surtout ceux du Turkestan occidental du joug de 1a Russie.
" Ba.smachi "1, le mouvement de la Resistance CcntreAsiatique, 1918-1924, ast le plus celebre dans 1' Histoire
m.od.erne de 1' Asie Centrale.
Cc mouvement cessa vers 1926
avec 1a victoir·e de 1' armee rouge sur celle d' Envar Pasha,
le Ministre de la guerre de Tu.rkestan qui s' etai t c.llie
aux revolutionnaires musulme.ns, nourri d.e 1' ambition de
creer un grand Etat musulman Centre
donne un ultimatum
Bo¥~ara
Khive,
...uUS.
I l fut
a 1a
asiatique~
I l avait
Russie de retirer ses .forces de
et Turkestand dans un delai de
q~inze
jouxn.
dans la batai1le, et c' est ensuite que le Tur-
kestan fut pacifie et incorpore dans lt U.R.S.S.
conf1it renait une nouvelle societe.
De tout
Ce sent des luttes
liv1·aes par la volonte humaine pour changer sa condition.
c•
est dans ce sens qu' elles interessent
~~LRAUX
pour qui
toute reali te sensible 011 intellec:tuelle n' existe que
dans
UI1
contexte precis et limite.
Le decor est achev·3
pour incarner scs idees.
De la page 11
a
la page 16 de LA TEl~ATION DE L 1 OC-
CIDEWI' deferle successivement
1.m
entaux des etres et de leur vie.
panorama, de paysages oriNous
retrouve:~ons
etres et leur decor tout 1(\ long de LA VOTE ROYALE, de
--------1.,
Pour plus de details ,
G. P.ARK ,
a
Asie CentraJ.e
con?ulter :
Sovieti~~-
Alexander
- 1917-_19.27,
Bibliotheque Netionale , cote: Ech. int~ 586-59
VIII d 28
( 8 02 ro--450 )
a1
de beaute et destinee
devoirs.
1
certai~s
accomplissement de
Qu' elle soit feconde et fid~le si elle doit
etre epouse; belle si elle doi t etre concubine'
e.xp·~r-t e
si elle doi t et:re courtisane '7 1.
Le chinois Ling considere que 1' idee que se fait
un occidental de la femme est ridicule:
u
Porter interet
a
des femmes et les desirer, seu-
lemen-t parce qu • elles sont belles, quelle marque de '· · ·
grossieretel"2, s• exclame - t - il.
Dans ces deux essais du jeune Ecrivain la politique
n • B,pparatt pas.
And.r~
MALRAUX saisi t cette Europe on
pleine tourmente sur un plan
metaphysi~ue.
Les· ter·res de 1 1 Europe ont subi la. double influence
du genie grec et du ahristianisme ; le premier leur a appris
a me surer
toute chose
a
la durae et
a1
t
intensi te
d' une vie humaineo
n
Les Grecs ont congu l' homme comme un homme 9 un
etre qui na.tt et qui meurt "3, ecnit And.re MALRAUX et il
ajoute en laissant la parole au chinois Ling:
" Une seule vie.
Pour moi, aEfiatique, tout le genie
grec est dans cette idee et dans la sensibilite qui en
de.pcncl.
Il y a H. 1m acte de. foi.
I.e grec croi t 1' homme
--·----- ----------·
1. A. MALHAUX, LATENT AT I Oli DE L'
2.
ibid
3.
ibid
.'
.'
OCCIDE.~\fT
'
:p.
58.
p • 60.
p • 50.
2?.
distinct du monde comme le chretien croit 1' homme
lie aDieu, cornme nous crayons 1 1 homme lie au mondenl.
Par ces propos de ces deux personnages A. MALRAUX
prouve QUe 1& pensee occidentale et la pensee orientale envisagent de
f~ons
differentes le rapport entre
1' hornme et le mond.e et le rapport entre 1' homm.e et
Dieu.
" Dicus pour vous, est etat; pour nou£ rythme
"2,
ajoute le chinois.
L' attitude de 1' homme devant.les lois de la
nature n' est pas la meme chez un occidental et un oriental.
Un a.siatique ne craint pas la vieillesse autant
qu' un europe en.
Il eet toujours co:;,}scient que quelque
puissant que soi t
l
per
a la
1
esprit le corps ne peut pas
force destructrice du temps.
contradiction il ne s' inquiete pas.
e chap-
Et devant cette
Il se prepare sa-
gement pour. subir cet ordre de la nature.
Pour lui
chaque etape de la vie a son charme et sa valeur:
n
Vieillir, c' est aussi subir un ordxe in·~erieur
auquel peu d' hoxnmes echappent.
Centre cet ordre
~Her-­
nel, quellen revoltes sont possibles ? 1t3-.
En opposant ainsi les idees occidentales et.
~orien·tales
dans leurs aspects moraux, a:ociaux e·t mr:Haphysiques,
l.
A. lftli.L.>til..UX, LA TEHTATION DE L' OCCIJJSNT
-.
2:'
3.
ibid
ibid.
.'
Dt
ill~E
.'
-· JE~JNESSE EUROFEii.:NNE
'
'
p .. 49p.
52~
p•
149.
A. r1ALRAUX analyse la crise de la conscience europe-
anne dans 1es annees vingt.
Comme on dresse 1' in-
ventaire d' une succession avant d' en accepter l'heri tage, il dresse dans LA 'I'Ellf!!!OH DE L' OCCIDENT et
D' UNE JEUHESSE EUROPEENNE l ' inventaire de la. culture
europeenne.
Le bilan en<:.e:at
n~ga.tif.
Ei; il conclut
que 1 • esprit europeen, apres avoir "d.etruit Dieu", a
a.:nean·ti tout ce qui pouvai t s' opposer
a1
homme.
t
" Parvenu au terme de ses efforts, cormne Rance devanJ~>
le corps de sa maitre sse, il ne trouve que la mort
n
1.
I L prend conscience du fait q:o.e le '""monde se reduit en tm immense jeu de rapports que nulle intelli·gence ne s' :applique plus
a fixer
puis qu' il est dans
leur nature meme de changer, c1e se rl.Ulouveler sans cesse"2.
A son avis seules certaines idees peuvent defendra·
1' homme contre la lente et 1' irreductible transformation que lui font subir les annees.
•
Devant cette prise de conscJ.ence
de 1
I
ecrou 1 eA
ment de toutes les va1eurs de 1' Europeen et de sa
civilisation ou de sa' realite, il pousse un cri de desespoir et d' indignation:
n
J,' Europe, grand cimetiere ou ne clorment que
dee conquerants morts: et dont la tristesse devient
1.
2.
A. IflALRAUXs I.A TEt~TATI()N .DE L' OCCIDENT., p.
ibid. ,
D' UNE JEU'11ESSE EUROPEENNE
158.
p. 152.
plus profonde en se parant de leurs noms illustres
tune laisses autour de moi qu' un horizon nu et le
miroir qu' apporte le desespoir,. vieux maitre de la
soli tude n1.
Toute 1 • angoisse d' un homme qui fu.t J.e temoin
de 1' ecrou1ement de toutes les valeurs pendant les
amlees de la guerre, qui se met
a la
recherche de la
paix ail1eurs, se trouve impregnee dans ces lignee·
emouvantes :
"
Image mouvante de moi-meme, jc suis pour toi
sans amour.
Comme une large blessure mal ferrnee, tu
es ma gloire morte et rna souffrance vivante.
Je·t' ai
tout donne, et, pourtant, je sais que je.-ne t' aimerai jamais.
Sans m' incliner jet' apporteTai chaque
jour 1a paix en offrande.
Lucidite avide, je brule
encore devant toi, fla.mme solitaire et droi te, dans
cette lourde nuii ou le vent jaune du large
r~petait
autour de moi 1' orguei1leuse clameur de la n1er sterile"2.
c'
est une sorte d' adieu a' sa pro pre civilisa-
tion que no us
sus.
ecou~.;ons
C' est 1
I
dans ces lignes citees ci- des-
enfan·t dont par le F-ra.n9 ois lile.uria.c dans
son journal que nous avons mentionne au debut •
n
Que· j' ai besoin de vous, delices du corps
vaincu dans la nuit accablante, pensee inhumaine au
1.
2e
.A.o
I>~ALRAUX,
ibid. '
LA
'I'El~TATION
DE 1' OCCIDENT , p.
159.
P• 160.
30.
dessus d.<:: 1' immense flamboiemen·i; du moncle, A.sie ••• "1.
Cette soif de 1' Asie- cette forme concrete de
1' Orientalisme - sera 1' o"t>jet de notre etude
vers les oeuvres de 1 1 Ecrivain.
+++++o+++++o+++++
--------------------·---·---
a tra-